Sœur Nicole Joseph du Corps du Christ (Nicole Ballé)

Dimension: px
Commencer à balayer dès la page:

Download "Sœur Nicole Joseph du Corps du Christ (Nicole Ballé)"

Transcription

1 Sœur Nicole Joseph du Corps du Christ (Nicole Ballé) Née le 14/05/1961 à Porto Novo Entrée le 09/02/1988 à Sokodé Prise d'habit le 17/04/1989 à Bobo Dioulasso Premiers vœux le 14/05/1991 à Bobo Dioulasso Vœux perpétuels le 29/12/1996 à Abomey Décédée le 10/12/2004 à Abomey Parole : «Père, que tous soient Un» La Province d Afrique de l Ouest a rédigé un numéro spécial de Fratcom» n 39 à la mémoire de Sœur Nicole Joseph du Corps du Christ. Nous en reprenons quelques extraits pour ce fascicule. Mot d ouverture de Sœur Martine Tapsoba, provinciale, au début de la célébration des obsèques le 16 décembre 2004 : «Votre présence si nombreuse ce matin dans l église Bon Pasteur qui nous accueille et votre soutien dans la prière depuis la nouvelle de la maladie de notre sœur Nicole Joseph, constitue déjà un motif d action de grâce. Pour les personnes qui ne connaissent pas notre sœur, elle est née le 14 mai 1961 à Porto- Novo. Elle a commencé sa formation religieuse par le Postulat à Sokodé (Togo) en Elle entre au noviciat le 17 avril 1989 à Bobo-Dioulasso (Burkina-Faso). Elle fait sa profession temporaire le 14 mai Elle a passé sa vie missionnaire au Togo, au Bénin, et au Burkina-Faso depuis Le 29 décembre 1996, elle fait sa profession perpétuelle dans cette église qui l accueille aujourd hui pour la dernière fois. Sœur Nicole-Joseph fait partie de la troisième vague de sœurs de notre jeune Province qui commençaient à prendre des responsabilités. Et la voilà déjà arrêtée dans son envol, afin de continuer la mission avec nous par son intercession. Le dimanche 21 novembre, à la messe que nous avons eue en famille, avant son départ pour Abomey, sœur Nicole-Joseph disait, en voyant les trois prêtres qui étaient autour de l autel : «quel bonheur d avoir trois prêtres pour notre petite assemblée!» Imaginez donc ce qu elle dirait ce matin, en voyant tant de prêtres venus non seulement du Bénin, mais aussi du Togo et du Burkina pour continuer l action de grâce en son nom. Oui, nous sommes là pour rendre grâce au Seigneur, et malgré la douleur de la séparation physique d avec notre sœur, nous pouvons dire avec foi : ce jour que fit le Seigneur est un jour de joie! Nous sommes là pour célébrer la fraternité universelle dont notre sœur a témoigné par sa vie. Depuis son départ vendredi matin, les messages ont afflué des quatre coins du monde pour manifester aux sœurs et à la famille de Nicole-Joseph, compassion et amitié, dans l action de grâce, pour sa vie toute donnée dans la simplicité et la sérénité. Elle est devenue une sœur universelle parce qu elle a vécu en sœur universelle. Quand j ai fait la connaissance de Nicole en 1982 lors d une Mariapolis à Bobo-Dioulasso et que nous ayons sympathisé et échangé nos adresses, nous étions loin de penser que nous nous reverrions un jour. Quand je l ai revue à Paris en 1987, elle comme étudiante et moi comme jeune sœur, nous étions loin de penser que Dieu nous unirait dans une même famille religieuse, «en communion de destin», à jamais unies. Depuis son intégration dans la Congrégation, nous étions bien loin d'imaginer ce qui nous arrive aujourd hui. Les pensées du Seigneur ne sont décidément pas les nôtres. Mais une chose demeure, la fraternité, ce pur don de la grâce de Dieu, qui nous lie et qui la

2 relie à tant et tant d autres frères et sœurs dans le monde, en Assomption, en Eglise et en humanité. Nicole-Joseph avait un don particulier de nouer des relations avec toutes les personnes qu'elle rencontrait, sans distinction aucune. Elle avait le don de les entretenir, et de les rétablir quand elles avaient été blessées. Elle avait une telle douceur et une telle bonté qu elle ouvrait tous les cœurs qu elle approchait. Vous êtes tous, le signe de son don de relation et de rassemblement. En venant à l Assomption, Nicole-Joseph nous a apporté toute la richesse dont elle était porteuse. Elle nous a ouvertes à sa famille, devenant le lien perpétuel de notre communion La fin de la vie de Nicole-Joseph a été comme un déploiement en miniature de ce qu elle a vécu toute sa vie durant, même si son monde extérieur était réduit au personnel soignant, et à ses proches. Elle a gardé jusqu au bout, la même délicatesse, attention, simplicité, le même sens de l organisation et de la prévision, la même perspicacité. Elle nous a aidés à préparer ses obsèques à plusieurs niveaux, sans vouloir tout faire. C est elle qui a choisi par exemple la deuxième lecture (Phi I, 20c 24 ; 27b ; II, 1-5) que nous allons écouter à cette célébration. Avec son départ, nous comprenons beaucoup de choses. Elle a vécu ces quatre dernières années avec une telle intensité et un tel don de soi, que j ai eu l impression qu elle voulait avancer le travail pour nous en laisser le moins possible, et apporter sa note particulière à l ouvrage. Nicole-Joseph a vécu sa vie religieuse à fond, dans la vérité, l obéissance, la charité. Le bouquet de son obéissance au Seigneur a été sa totale dépendance et son abandon entre ses mains. Sa simplicité et son attachement à sa famille d origine et à sa Congrégation, me remplissaient toujours d admiration. Elle reste toujours bien de la Congrégation. Marie-Eugénie notre Mère Fondatrice disait que «les sœurs mortes sont la partie la meilleure et la plus sûre de la Congrégation puisqu elles sont au terme.» Pour Sœur Nicole-Joseph, le voile des choses humaines s est levé et désormais elle voit Dieu. Elle jouit du bonheur d être à lui. Avant de terminer ce long mot d accueil, j aimerais vous partager ce que disait Mère Marie- Eugénie à propos de l esprit de l Assomption : «pour nous, Dieu nous a appelées à imiter Notre Seigneur dans sa vie commune et aussi dans sa vie apostolique. Nous y arrivons par le zèle, la charité, l amour de Jésus-Christ et de l Eglise Pour cela, il faut surtout une grande application, afin que tout ce que nous disons porte à Jésus-Christ, à sa vérité, à son Eglise, à son Evangile.» Voilà qui résume à merveille la vie de Sœur Nicole-Joseph. Sa présence nous manquera, mais nous aimons croire que Dieu ne nous enlève rien sans se donner à la place. De l homélie du Père Adoukonou, Secrétaire Général de la CERAO, durant la célébration des obsèques : «Ceux et celles qui connaissent Nicole, qui meurt à 43 ans, en pleine vigueur de son âge adulte, et dans la sagesse que donne l Esprit, accueillent aujourd hui avec plus de vérité que jamais ces mots du livre de la Sagesse : «la sagesse surpasse les cheveux blancs, une vie sans tache vaut une longue vieillesse. Il a su plaire à Dieu et Dieu l a aimé... Il a été repris. Arrivé au but en peu de temps, il a couvert une longue route. Parce qu il plaisait au Seigneur, celui-ci, sans attendre, l a retiré d un monde mauvais». Bienheureuse Nicole dont la vie peut servir de commentaire de vérité à des pages bibliques pleinement vécues... Depuis le dernier retour à l hôpital à Orléans jusqu au vendredi 10 décembre à Abomey, Nicole habitait encore plus pleinement son corps, avant sa grande et ultime Pâque. Quand je lui ai téléphoné l une des dernières fois, depuis Abidjan, et que je l assurais de ma prière, pour que sa foi ne défaille pas et qu elle continue l offrande, elle me disait : «Oui, je continue mon offrande au jour le jour». Si elle se nomme «du Corps du Christ», ce n était pas pour rire, mais pour s offrir en prolongement de l offrande de son Seigneur et Maître : «Ce qu il reste à souffrir des épreuves du Christ, je l accomplis dans ma propre chair, pour son corps qui est l Eglise» (Col I, 24). Maintenant

3 qu elle a achevé sa transformation, nous pouvons l offrir au Seigneur et Il ne dédaignera pas notre don. Notre conception africaine de l Eglise comme Famille de Dieu entraînait une conception de la personne humaine que Nicole a parfaitement comprise et vécue de manière exemplaire. Toute sa personne était relation de promotion de l autre ; elle rayonnait en communauté et éveillait chacune, chacun depuis le plus fondamental de sa vocation à la fraternité. C est à partir de la création de l Homme à l image de Dieu, qu elle avait compris que, devenir ressemblance de Dieu entraînait que la personne humaine était toute entière relation constitutive à tous ses frères et sœurs en humanité. Ainsi Nicole portait haut le flambeau de l inculturation de la vie religieuse en Afrique.» De Sœur Cécile Renouard, Lubeck : «J ai vraiment fait connaissance de Nicole-Joseph en octobre 1997 ; elle arrivait à Auteuil pour la partie plus théorique de ses études de thèse, après une année à Sokodé. J étais moi-même arrivée dans la communauté au moment des JMJ en août et devais y démarrer mes études de théologie au Centre Sèvres. Pendant presque trois ans, nous avons donc partagé la même vie de communauté, et comme nous étions liées par le même statut de «sœurs étudiantes», les points de rencontre et de connivence ont été nombreux Nicole, c est d abord Nicole-Joseph ; au début, comme d autres, j omettais souvent de prononcer le deuxième terme ; elle rajoutait toujours, fermement et gentiment, comme elle savait si bien le faire, «Joseph» ; du coup nous avons pris l habitude de tout dire, et avons de plus en plus mesuré l importance qu avait pour elle Saint Joseph cela allait au-delà de la simple dévotion, il était comme un soutien, un guide dans sa vie de travailleuse Son sens de l organisation restera légendaire ; Nicole me disait souvent que j étais rapide et qu elle était plus lente ; mais elle organisait les grandes vaisselles hebdomadaires ou le ménage de la chapelle à Auteuil comme nulle autre pareille, et son efficacité était redoutable Sa délicatesse et sa sensibilité étaient immenses c était un trait de son tempérament, sans doute lié à sa culture, et nourri par sa prière. Elle existait à partir de sa culture, et si elle savait s adapter à nos modes de vie nordiques, elle conservait avec force ses repères et manières d être. Cela a été aussi une école mutuelle de liberté ; chercher à nous connaître et nous reconnaître différentes, nous en réjouir souvent, nous expliquer de nos incompréhensions parfois Son zèle pour le Royaume et son amour de Marie-Eugénie et de l Assomption ont été source d émerveillement, cela transparaissait tant dans cette ferme volonté d inscrire au cœur des références culturelles africaines le projet éducatif de Marie-Eugénie ; et en retour ce dernier s enrichissait d une lumière supplémentaire. Il m en reste, comme des échos des réunions du Sillon Noir, le désir de chercher en toutes choses comment rendre les institutions, les structures et les croyances de toutes nos cultures, plus évangéliques, ferment de paix, d unité et de justice Ainsi était telle que je l ai connue Nicole-Joseph : une alliance de chaleur et de réserve, de maîtrise et de confiance, de sérieux et de joie ; une vie donnée, jour après jour, au Christ qu elle aimait et servait de tout son cœur et de toutes ses forces.» De Sœur Christine Françoise à Orléans : «Lors d une réunion de communauté, en septembre, où nous partagions sur ce que nous avions vécu pendant l été, plusieurs d entre nous avaient dit être marquées par cette parole de la Règle de Vie n 58 «Les sœurs malades sont une grâce pour leur communauté et pour toute

4 l Eglise», ceci signifiait combien nous reconnaissions que la présence de Nicole-Joseph parmi nous était une grâce. C est comme cela que nous l avons vécu ensemble pendant sept mois et nous en sommes toutes fort marquées Nicole-Joseph nous a témoigné sa reconnaissance jusqu au bout. Elle n était que MERCI pour les plus petits gestes, les moindres attentions dont elle était l objet, elle en était touchante. Le matin de son départ de l hôpital d Orléans pour «Jeanne Garnier» (la maison de soins palliatifs à Paris), elle a tenu, une dernière fois, à écrire avec peine quelques lignes à l attention de toutes les sœurs Oui, Nicole-Joseph nous reste très présente. Nous ne l avons connue que dans son état de malade. Mais elle a eu le temps de nous dire par tout son être devenu si fragile, par sa foi, son espérance, sa passion du Royaume, qu elle était une vraie fille de Marie-Eugénie» De Sœur Marie-Valérie, au nom de la Communauté d Abomey dans laquelle Sœur Nicole- Joseph a passé ses trois dernières semaines : «Ce fut une grande grâce pour notre communauté d accueillir Nicole-Joseph, de l accompagner durant ces trois dernières semaines, d être auprès d elle jour et nuit pour lui témoigner toute l affection que chaque sœur de la Province et chacun de ses proches aurait voulu lui prodiguer. Chaque sœur de notre communauté a eu la bonne part et cette grâce laissera sa marque dans nos vies. Lors de son avant-dernière nuit sans sommeil, elle me dit à plusieurs reprises «on a terminé» «on a fini» Comment ne pas songer à la parole du Christ en croix «tout est achevé», remise de soi entre les mains du Père. La veille au soir de sa mort, un prêtre ami de la communauté est venu la bénir. Nous récitions trois Ave Maria, alors qu elle commençait à avoir quelques difficultés à parler, elle répéta par trois fois avec une voix claire et assurée «maintenant et à l heure de notre mort». Cette nuit-là vers 4h du matin elle entrait dans le coma. A 6h elle a rendu son dernier souffle alors que nous priions le mystère de l Ascension, entourée de sa sœur Marie-Claire, de la Communauté d Abomey et de Sœur Pilar, de Koudougou. A résonné alors en moi la confession de Thérèse de Lisieux : «Je ne meurs pas j entre dans la vie». Sœur Cristina nous livre le dernier mot lors de l Eucharistie célébrée à Auteuil pour Sœur Nicole-Joseph le 8 janvier 2005 : «Nous voici réunis pour faire mémoire de la Mort et de la Résurrection du Seigneur Jésus : Voici mon Corps, voici mon Sang Faîtes ceci en mémoire de moi jusqu à mon retour. Communier à cette réalité dans la foi nous donne de goûter dès maintenant la Vie éternelle. A cette mémoire du DON de la vie de Jésus, nous unissons la mémoire de la vie donnée de Sœur Nicole-Joseph. Nicole a reçu le don de participer pleinement à la Mort et à la Résurrection du Christ en ayant vécu sa mort en toute lucidité. Le mystère qu elle portait dans son nom, Le Corps du Christ, et la parole gravée dans son anneau : Père que tous soient un ont guidé la vie de Nicole ; et ceux et celles qui ont eu la grâce de vivre tout près d elle dans ces moments de vérité d une vie humaine, nous pouvons témoigner que ces deux réalités ont transformé Nicole progressivement et jusqu au bout. Nicole a pris soin du Corps du Christ, l Eglise, mais elle a laissé aussi que son corps devienne communion à la Pâque de son Seigneur ; Nicole a su nous unir autour d elle et, dans le secret de son cœur, elle a donné sa vie pour l unité du Corps du Christ, l Eglise qu elle a tant aimée, pour l unité de sa Province l Afrique de l Ouest pour l unité des peuples d Afrique. Aujourd hui nous rendons grâce à Dieu le Père pour avoir aimé Nicole-Joseph d un amour

5 éternel. Pour lui avoir donné de partager la mission du Fils : Père que tous soient UN. Pour nous l avoir donnée comme sœur. Nicole a porté avec beaucoup de fierté son nom ; elle voulait qu on l appelle par son nom complet : Nicole-Joseph. Comme Joseph elle a vécu le mystère de la foi «au quotidien», dans la confiance toute simple. Que sa vie donnée soit source de vie et de consolation pour sa famille, pour son père, pour sa Province, pour nous tous ici rassemblés pour faire mémoire, une mémoire pleine de reconnaissance, de Nicole-Joseph du Corps du Christ. Père, que dans ce Corps, le Corps de ton Fils, tous soient UN.»