Logistique de chantier et coordination de sécurité

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1 Logistique de chantier et coordination de sécurité

2 L INSTITUT NATIONAL DE RECHERCHE ET DE SÉCURITÉ L Institut national de recherche et de sécurité (INRS) est une association déclarée sans but lucratif (loi du 1er juillet 1901), constituée sous l égide de la Caisse nationale de l assurance maladie. Il est placé sous la tutelle des pouvoirs publics et le contrôle financier de l État. Son conseil d administration est composé en nombre égal de représentants du Mouvement des entreprises de France et des organisations syndicales de salariés. L INRS apporte son concours aux services ministériels, à la Caisse nationale de l assurance maladie, aux Caisses régionales d assurance maladie, aux comités d hygiène, de sécurité et des conditions de travail, aux entreprises, enfin à toute personne, employeur ou salarié, qui s intéresse à la prévention. L INRS recueille, élabore et diffuse toute documentation intéressant l hygiène et la sécurité du travail : brochures, dépliants, affiches, films, renseignements bibliographiques... Il forme des techniciens de la prévention et procède en son centre de recherche de Nancy aux études permettant d améliorer les conditions de sécurité et l hygiène de travail. Les publications de l'inrs sont distribuées par les Caisses régionales d'assurance maladie. Pour les obtenir, adressez-vous au service prévention de la Caisse régionale de votre circonscription, dont vous trouverez l adresse en fin de brochure. LES CAISSES RÉGIONALES D ASSURANCE MALADIE Les Caisses régionales d assurance maladie disposent, pour diminuer les risques professionnels dans leur région, d un service prévention composé d ingénieurs-conseils et de contrôleurs de sécurité. Par les contacts fréquents que ces derniers ont avec les entreprises, ils sont à même non seulement de déceler les risques professionnels particuliers à chacune d elles, mais également de préconiser les mesures préventives les mieux adaptées aux différents postes dangereux et d apporter, par leurs conseils, par la diffusion de la documentation éditée par l Institut national de recherche et de sécurité, une aide particulièrement efficace à l action des comités d hygiène, de sécurité et des conditions de travail. Paris, INRS Illustrations JC Bauer/ Maquette ici design

3 Logistique de chantier et coordination de sécurité JP MOINEAU et JC VOISIN, ingénieurs à l INRS avec la collaboration d ingénieurs des Caisses régionales d assurance maladie G. MAGNIEZ (Bordeaux) M. TOURTIER (Rennes) JC. DUBOIS (Rouen) M. ARMANET (Strasbourg) ED 884

4 3 Sommaire Introduction 5 1 La logistique dans le secteur industriel 7 2 La logistique dans le domaine du BTP Des freins à la mise en place Des enjeux pour les chantiers 11 >>> Les enjeux économiques 11 >>> Les enjeux sociaux La logistique, des obligations d origine réglementaire ou contractuelle 13 >>> Les obligations relevant du code du travail 13 La coordination sécurité et protection de la santé 13 Les principes généraux de prévention 14 La manutention manuelle des charges 14 >>> D autres obligations 15 La loi sur la maîtrise d ouvrage publique, dite loi MOP 15 La norme NF P La réglementation des déchets 15 Le management de la qualité 16 3 Comment adapter la démarche logistique au BTP? Des principes d action 17 >>> Identifier et quantifier les produits 17 >>> Planifier les besoins en produits 17 >>> Connaître les conditions de réalisation des travaux 18 >>> Définir des conditionnements et des modes de livraison adaptés 19 >>> Passer la commande des produits 19 >>> Gérer les déchets Des séquences à respecter 21 >>> Avant les travaux 21 La conception de l'opération 21 La conception du projet 21 La passation des contrats de travaux 22 La préparation de chantier 23 >>> Pendant les travaux 24 La phase «structure, enveloppe» 25 La phase «cloisonnements, fluides» 25 La phase «équipements, finitions» Les outils de la logistique de chantier 29 >>> Les réunions 29 Les réunions d'études 29 Les réunions de préparation de chantier 29 Les réunions de chantier 30 Les réunions du CISSCT 31 >>> Les plannings et les plans 32 Les plannings 32 Le plan des installations de chantier 33 Le plan général de coordination SPS 34 >>> Les moyens matériels 34 La distribution verticale 34 La distribution horizontale 36 >>> Des moyens logistiques extérieurs au chantier 37 Les modes d approvisionnement 37 Le conditionnement 37 Conclusion 39 Bibliographie 40 Logistique de chantier et coordination de sécurité 3

5 3 Introduction Avec un chiffre d affaires sensiblement égal à 10% du produit intérieur brut et des effectifs représentant à peu près 8% de la population active, le secteur de la construction constitue une part importante de l activité économique française. Ce secteur, aux spécificités très marquées, se caractérise à la fois par un niveau de rentabilité faible, sans rapport avec la complexité de l activité, et par une forte proportion d accidents du travail. En effet, avec le quart des accidents du travail survenus en France, le bâtiment et les travaux publics (BTP) demeure une activité à haut risque bien qu il ait divisé par plus de trois le nombre de ses accidents mortels au cours des 30 dernières années. Pour lutter contre ce double constat, les entrepreneurs du BTP ont tout d abord concentré leurs efforts de recherche sur les procédés de construction et les matériels associés dans le but d améliorer les tâches de production directe. Ils se sont penchés ensuite sur les conditions de réalisation des ouvrages et plus particulièrement sur les modes opératoires en se préoccupant de la place des ouvriers pendant l utilisation des outils et lors de la mise en œuvre des produits. Actuellement de nouveaux axes de recherche portent sur des tâches telles que la gestion des informations, la maintenance des ouvrages ou la logistique de chantier qui ne concernent plus la production directe mais qui représentent cependant des sources importantes de progrès économique et humain. Parmi ces travaux de recherche, la logistique, qui a pour objet d optimiser l ensemble des approvisionnements d une opération, est assurément une voie de progrès pour le secteur du BTP. Cette brochure vise à sensibiliser tous les acteurs de la construction à ce thème essentiel dans le monde industriel. Elle présente tout d abord l importance des enjeux économiques et sociaux. Puis, après avoir souligné les principaux freins à l optimisation des approvisionnements, elle précise les principes d action qui relèvent essentiellement de l organisation ; la mise en place de moyens matériels, souvent présentée comme la solution, n est en fait qu une conséquence de cette organisation. Les principaux bénéficiaires d une meilleure logistique sont les artisans et les petites entreprises qui ne peuvent intervenir individuellement sur l organisation générale d un chantier. Les coordonnateurs santé sécurité, dont l un des rôles consiste à favoriser la mise en place de moyens communs, ne peuvent, quant à eux, qu être partie prenante d une telle démarche. Les maîtres d ouvrage et les maîtres d œuvre sont cependant les premiers concernés, car la maîtrise de toute opération de construction demande qu ils prennent, dès la conception, un ensemble de décisions relatives à son organisation générale. On peut noter également que la mise en œuvre d une telle organisation ne peut que contribuer à une amélioration sensible de la qualité de la construction. Logistique de chantier et coordination de sécurité 5

6 1 La logistique dans le secteur industriel Utilisée initialement dans le domaine militaire, la logistique est présentée dans ce cadre comme une combinaison d actions et de moyens mis en œuvre pour ravitailler une armée. Transposée au secteur civil, elle est définie par l ASLOG, association française pour la logistique, comme «l'ensemble des activités qui assurent la mise en place à moindre coût, d une quantité déterminée de produit, à l endroit et au moment où une demande existe». La logistique fait donc appel à des techniques qui permettent de répondre aux besoins des clients dans les meilleures conditions. La mise en œuvre de ce nouveau concept se traduit souvent par la création d une nouvelle fonction transversale, la fonction logistique, qui se développe de plus en plus dans les grandes entreprises. La logistique : une fonction transversale Dans la plupart des entreprises industrielles coexistent des services spécifiques plus ou moins développés : achats, production, commercial, marketing, relations humaines, communication, comptabilité, etc., qui tous participent à la vie de l ensemble et pour lesquels chaque responsable recherche l efficacité maximale. Or, dans ce mode de gestion «au plus juste» d entités séparées, très peu de personnes disposent à la fois du temps et du recul nécessaires pour harmoniser les interfaces entre services. En étudiant tous les mouvements de produits de l entreprise, le logisticien facilite bien évidemment ces transferts, mais il fournit également de nombreuses informations qui pourront s avérer très utiles pour accroître la compétitivité de l entreprise ou pour lui permettre de se donner des orientations à plus ou moins long terme. La gestion des flux physiques et des flux d informations La première tâche du logisticien consiste à identifier, puis à analyser tous les transferts de produits réalisés dans le cadre de l activité de l'entreprise. Cela concerne les achats faits en amont de la production auprès des fournisseurs, mais également les échanges entre services et les livraisons à la clientèle. Cette étude des flux physiques porte sur les produits - nature, quantité, dimensions, etc. - mais également sur les moyens - camions, grues, aires de stockage, hangars, etc. - qui doivent être mis en œuvre pour effectuer les transferts. Logistique de chantier et coordination de sécurité 7

7 Le travail du logisticien 1. Recenser 2. Analyser 3. Optimiser Les flux de produits et d'informations Simultanément, le logisticien effectue le même travail d identification et d analyse sur toutes les actions qui déclenchent ou qui accompagnent les mouvements de produits. Cet ensemble est appelé le flux d informations. Il comporte, par exemple, le suivi des commandes, la gestion des stocks, l élaboration du plan de production ou la facturation. Un travail de synthèse sur les flux permet de mettre en lumière et de supprimer rapidement les dysfonctionnements les plus évidents qui sont généralement dûs à un manque de coordination ou à des divergences d intérêts entre services. Les actions correctives portent le plus souvent sur la suppression d opérations inutiles, sur une meilleure répartition des stocks ou des surfaces de stockage, sur une utilisation plus efficace des moyens de transport ainsi que sur une circulation plus rapide et plus utile des informations et des produits. La logistique : un outil de gestion Dans la plupart des cas, l action du logisticien ne va pas au-delà de la gestion des flux. Toutes ces données constituent néanmoins une importante source d informations, qui peut aider l'entreprise à réfléchir aux orientations qu'elle doit se donner pour assurer sa pérennité. Ces informations peuvent lui permettre, en effet, d adapter en permanence son outil industriel aux conditions du marché et d anticiper l évolution des besoins de ses clients. Adapter l outil industriel aux conditions du marché En s interrogeant sur le coût et l intérêt des flux physiques et des flux d informations identifiés par le logisticien, il est possible d'optimiser progressivement l'outil industriel et de l adapter à son environnement. C est ainsi que beaucoup d entreprises accélèrent la circulation des produits, en limitant leurs stocks de matières premières ou de produits finis, pour diminuer leurs frais financiers et immobiliers et que d autres sous-traitent des tâches telles que le stockage ou la distribution à des acteurs plus compétents ou demandent à leurs fournisseurs des services nouveaux, comme le fractionnement des livraisons ou la fourniture de composants plus faciles à manipuler. Anticiper l évolution des besoins des clients En suivant le produit jusqu'au client final, le service logistique dispose d informations utiles pour anticiper tout changement dans les besoins des clients et permettre ainsi de faire évoluer l outil industriel. Dans la grande distribution, par exemple, la diminution progressive des surfaces de réserve au profit des surfaces de vente oblige de plus en plus les fournisseurs à modifier leur organisation et souvent leur système de production, pour pouvoir livrer les produits en continu et par quantités adaptées. L analyse des flux physiques et d'informations permet d optimiser le fonctionnement global de grandes entreprises industrielles ou commerciales de secteurs aussi variés que l automobile, la grande distribution ou l aéronautique. Les chapitres suivants montrent comment appliquer cette démarche au secteur du BTP. 8 Logistique de chantier et coordination de sécurité

8 2 La logistique dans le domaine du BTP Dans le secteur du bâtiment et des travaux publics, les exemples de mise en place de la démarche logistique sont peu nombreux. - Des logisticiens existent chez les fabricants et les négociants de produits de construction ; ces entreprises étant toutefois plus proches du monde industriel que du secteur BTP. - Des services approvisionnements sont créés sur les grandes opérations ne disposant pas d aires de stockage suffisantes ainsi qu à l étranger, sur les chantiers devant importer la plupart des matériaux et des matériels utilisés. - Quelques expérimentations sont menées à l initiative du Plan construction et architecture (PCA) sur de petits chantiers témoins de bâtiment. Mis à part ces cas particuliers, les approvisionnements sur chantier font rarement l objet d une réflexion concertée entre les intervenants d une même opération et les produits sont le plus souvent achetés au fur et à mesure des besoins ; prix, proximité et disponibilité étant les principaux critères de choix. 2.1 Des freins à la mise en place Les professionnels de la construction partagent des spécificités qui les différencient très fortement des autres secteurs industriels et qui expliquent, en partie, les difficultés rencontrées pour mettre en place sur les chantiers une organisation plus performante en matière d approvisionnement à pied d œuvre. Des entreprises de petite taille Dans le secteur de la construction, une part importante des travaux est réalisée par de petites entreprises (70% du chiffre d affaires [1] du BTP est réalisé par des entreprises de moins de 50 salariés) et ces entreprises travaillent généralement avec leurs propres moyens (peu d organisation collective) car les marchés sont souvent passés en corps d état séparés. De plus, la sous-traitance est importante sur les chantiers. Ces deux caractéristiques font que l on rencontre rarement dans le secteur du BTP, notamment sur les petits chantiers, des moyens logistiques adaptés qui permettraient d approvisionner les matériaux à pied d œuvre dans les meilleures conditions. Les moyens individuels étant généralement moins performants qu une organisation collective conçue dès la phase de conception. Un coût des manutentions non chiffré Peu de recherches ont été menées pour évaluer les quantités de produits utilisés sur chantier et pour connaître le temps passé à les déplacer (déchargement, mise en stock, reprise et distribution au poste de travail). Dans les études de prix, les coûts d approvisionnement sont le plus souvent «noyés» dans les frais de chantier et très rarement individualisés. Il est donc difficile, dans ces conditions, de chiffrer les économies que l on pourrait attendre d une organisation logistique plus performante. Cela explique les hésitations des maîtres d ouvrage et celles des entreprises à demander ou mettre en place des moyens logistiques plus efficaces alors que les gains de productivité espérés ne sont pas chiffrés. Ce manque de connaissance explique aussi le peu d empressement des industriels à développer des produits, conditionnements ou matériels de manutention qui répondraient mieux aux besoins des utilisateurs. Un environnement de travail particulier et difficile Les conditions de réalisation d un ouvrage sont très éloignées de l environnement de travail que l on rencontre habituellement dans une usine. Logistique de chantier et coordination de sécurité 9

9 Chaque ouvrage est en effet un produit unique, plus proche du prototype que du produit de série. Les entreprises du BTP doivent être capables d adapter rapidement leur système de production aux résultats des appels d offres et savoir gérer les nombreux aléas liés à la programmation des maîtres d ouvrage, à des choix architecturaux toujours différents ainsi qu à des conditions climatiques, géologiques et environnementales très variables. Un chantier mobilise par ailleurs un nombre important d intervenants : maître d ouvrage, maître d œuvre, coordonnateur SPS, bureaux d études et de contrôle, administrations, entreprises, pour réaliser un travail commun. Ces différents intervenants se connaissent souvent mal et n ont des relations contractuelles directes (ou indirectes dans le cas de sous-traitance) qu avec le maître d ouvrage. La coordination de l ensemble des intervenants est d autant plus nécessaire que les interfaces sont nombreuses et que les projets ne sont bien souvent définis dans le détail que très peu de temps avant le début effectif des travaux. Une autre particularité du BTP concerne la main-d œuvre d exécution dont le coût peut atteindre le tiers du montant des travaux. Cette maind œuvre possède en général un faible niveau de qualification et, dans bien des cas, fait partie intégrante du système de production car le matériel, qui doit pouvoir être réemployé facilement sur d autres opérations, est généralement peu mécanisé et peu spécialisé. Malgré cet environnement de travail particulier et difficile, le taux d encadrement sur chantier reste plus faible que celui que l on rencontre habituellement dans l industrie. On comprend donc pourquoi les responsables de chantiers, qui doivent gérer dans l urgence une somme importante de problèmes et d informations pour faire avancer leurs travaux, ne consacrent pas beaucoup de temps à l organisation des approvisionnements. Cela est d autant plus vrai qu ils savent par expérience qu un retard de livraison est toujours possible et que l avancement des travaux dépend aussi de leur capacité d adaptation aux aléas. 10 Logistique de chantier et coordination de sécurité

10 2.2 Des enjeux pour les chantiers Depuis toujours, des actions ont été menées pour accroître les performances du secteur de la construction. Des progrès importants ont ainsi été réalisés dans le domaine du calcul, de la conception des ouvrages et dans celui de la qualité des produits. L ensemble du secteur peine cependant en matière de productivité, de qualité d ouvrage et les jeunes ne sont toujours pas attirés par les métiers du BTP. La phase de réalisation des ouvrages ou phase chantier, souvent suspectée d être à l origine de ces difficultés, ne fait bien souvent que révéler les dysfonctionnements de la phase conception. De plus, cette phase chantier ne dépend pas que des seules entreprises chargées des travaux et tous les autres acteurs de la construction - maître d ouvrage, concepteurs, fournisseurs de matériels et de matériaux - devraient lui prêter une plus grande attention, pour faire progresser (collectivement) l ensemble du secteur. Pourquoi, par exemple, ne pas proposer des produits plus faciles à manutentionner et à mettre en place et, d une manière générale, ne conviendrait-il pas de réfléchir à des méthodes de construction mieux adaptées aux conditions réelles des chantiers? En effet, bien des procédés de construction, insuffisamment maîtrisés par l ensemble des acteurs, sont à l origine de sinistres. Certains d entre eux sont actuellement mis en observation par l'agence qualité construction dans le cadre de la garantie décennale [2]. >>> Les enjeux économiques Les entreprises ont peu de données chiffrées sur le coût des approvisionnements. Les principales informations dont on dispose sur le sujet proviennent d études [3] menées sur des chantiers expérimentaux, à l initiative de la Direction de l habitat et de la construction ou du Plan construction et architecture. Les coûts de mains d œuvre Il apparaît dans ces études [3] que la part de main d œuvre consacrée aux manutentions, dans les métiers du bâtiment, est très importante. Elle est de l ordre de 30% pour le gros œuvre et de 40% pour les autres corps d état. Avec un coût de main d œuvre estimé à 25% du montant des travaux, les dépenses de main d œuvre engendrées par les manutentions représentent donc, pour un chantier de bâtiment, pratiquement 10% de ce montant des travaux (~ 40% X 25%). Sachant que dans bien des cas, les approvisionnements ne font pas l objet d études approfondies, il est tout à fait possible d espérer une économie significative sur ce poste et par conséquent sur le coût total des travaux, en intervenant uniquement sur l organisation des approvisionnements. Une diminution du tiers du coût des manutentions est tout à fait envisageable. Cela correspondrait à une économie de 3% du coût global des travaux (1/3 de 10%). Ce chiffre est à rapprocher de la marge des entreprises du BTP qui dépasse rarement 1% du chiffre d affaires. Il permet de prendre conscience de l importance des économies directes qui peuvent être envisagées. Logistique de chantier et coordination de sécurité 11

11 La qualité Les professionnels de la qualité s accordent pour estimer les coûts de non-qualité à 10% du montant des travaux et pour considérer que l origine de ces dépenses réside le plus souvent dans un manque d organisation. La démarche logistique, qui consiste à mieux organiser les flux de produits et les flux d informations, ne peut donc que générer des économies indirectes sur ces coûts de non-qualité, grâce notamment à la mise en cohérence des informations. Nota : Une diminution de 30% des coûts de non-qualité, qui est l objectif de l Agence qualité construction pour les années à venir, entraînerait une économie de 3% du montant des travaux. Les déchets de chantier Les déchets générés par le secteur du bâtiment sont actuellement estimés à 25 millions de tonnes par an et leur élimination représente environ 2% du chiffre d affaires global de ce secteur [4]. C est un poste de dépenses important qui sera amené à augmenter rapidement dans les années à venir avec la mise en place progressive des dispositions contraignantes issues des directives européennes sur l environnement. Dans le cas de travaux neufs de bâtiment, par exemple, un chantier génère, en moyenne et par logement, 5 m 3 de déchets divers (0,07 m 3 par m 2 de plancher [3]) dont 1,5 m 3 (1T) pendant la seule phase de finitions et d équipements). Tous ces déchets doivent être manipulés et entraînent des dépenses qui ne produisent pas de valeur et qui sont fréquemment sous estimées par les entreprises. Des principes de gestion des déchets sont donnés dans le paragraphe >>> Les enjeux sociaux Les accidents du travail Les manutentions sont à l origine du tiers des accidents du secteur de la construction. Ces accidents peuvent survenir pendant l utilisation de moyens mécaniques : décrochement de charges, renversement d engins, rupture d apparaux de levage, etc., mais dans la grande majorité des cas, ils trouvent leur origine dans les manutentions manuelles. Les manipulations d objets lourds et les manutentions effectuées dans de mauvaises conditions ou de façon répétitive sont à l origine de nombreuses lésions invalidantes. Le coût total des accidents dûs aux manutentions manuelles pour le secteur du BTP s élève à plus de 200 millions d euros et représente environ 1,7 millions de journées perdues par an. Improvisation et manque de préparation sont souvent à l origine de ces accidents. Une meilleure organisation des approvisionnements devrait permettre d en faire baisser le nombre et le coût de façon significative. L image de la profession et l intérêt des jeunes pour le métier Nous avons vu dans le paragraphe précédent que les ouvriers du bâtiment passaient une grande partie de leur temps de travail en manutentions diverses de matériaux et de matériel. Ces tâches qui se déroulent souvent dans des conditions difficiles, et qui dans certains cas pourraient être mécanisées, sont peu valorisantes et donnent une très mauvaise image du métier. Elles correspondent à un gaspillage de qualification puisque l on demande à des ouvriers spécialisés, plombiers, électriciens ou carreleurs de consacrer beaucoup de temps en manutentions. Elles peuvent aussi engendrer des tensions. Par ailleurs, les périodes de récupération, qui devraient suivre toute manutention importante, notamment pour les ouvriers les plus âgés, sont souvent prises pendant le travail de spécialité, ce qui rend ce dernier moins intéressant. Pour attirer les jeunes dans ce métier, il est indispensable d en améliorer les conditions de travail et notamment de faciliter les manutentions. 12 Logistique de chantier et coordination de sécurité

12 2.3 La logistique, des obligations d origine réglementaire ou contractuelle De nombreux textes d origine réglementaire ou contractuelle s appliquent dans le cadre des approvisionnements de chantiers. Parmi tous ces textes, certaines obligations relèvent du code du travail, d autres sont issues des règles de l environnement, de la construction, de l urbanisme ou du management de la qualité. >>> Les obligations relevant du code du travail La coordination sécurité et protection de la santé Dans son article L , le code du travail [8 et 9] précise qu une «coordination en matière de sécurité et de santé des travailleurs doit être organisée pour tout chantier de bâtiment ou de génie civil où sont amenés à intervenir plusieurs travailleurs indépendants ou entreprises, entreprises sous-traitantes incluses, aux fins de prévenir les risques résultant de leurs interventions simultanées ou successives et de prévoir, lorsqu elle s impose, l utilisation de moyens communs tels que les infrastructures, les moyens logistiques et les protections collectives». Cette coordination est assurée par un coordonnateur de sécurité désigné par le maître d ouvrage, tant au cours de la conception, de l étude et de l élaboration du projet, que de la réalisation de l ouvrage. C est ainsi que pourra être décidée la mise en commun de moyens d approvisionnement qui permettront à tous les salariés ou travailleurs indépendants présents sur un même chantier de bénéficier d équipements sûrs, appropriés aux opérations à effectuer. Les mesures d organisation collective proposées par le coordonnateur doivent être arrêtées impérativement dès la phase de conception du projet et faire partie du dossier d appel d offres. L expérience montre que lorsque les travaux sont commencés, il est toujours très difficile de modifier l organisation prévue (et chiffrée) par les entreprises. Pour faciliter les approvisionnements à pied d œuvre, le coordonnateur proposera donc, dès la phase de conception, une organisation prévisionnelle qui portera sur : - l ordonnancement des travaux (plannings, phasages, etc.), - les infrastructures provisoires (accès, voies de circulation, zones de stockage, etc.), - les moyens matériels (appareils de manutention, recettes, etc.). Cette organisation prévisionnelle sera aménagée pendant la période de préparation de chantier avec les entreprises adjudicataires. C est pourquoi il est souhaitable que les entreprises soient retenues au plus tôt. Logistique de chantier et coordination de sécurité 13

13 Les principes généraux de prévention a) Eviter les risques. b) Evaluer les risques qui ne peuvent pas être évités. c) Combattre les risques à la source. d) Adapter le travail à l homme, en particulier en ce qui concerne la conception des postes de travail ainsi que le choix des équipements de travail et des méthodes de travail et de production, en vue notamment de limiter le travail monotone et le travail cadencé et de réduire les effets de ceux-ci sur la santé. e) Tenir compte de l état d évolution de la technique. f) Remplacer ce qui est dangereux par ce qui n est pas dangereux ou par ce qui est moins dangereux. g) Planifier la prévention en y intégrant, dans un ensemble cohérent, la technique, l organisation du travail, les relations sociales et l influence des facteurs ambiants. h) Prendre des mesures de protection collective en leur donnant la priorité sur les mesures de protection individuelle. i) Donner les instructions appropriées aux travailleurs. Pendant la phase de réalisation des travaux, le rôle du coordonnateur consiste, d une part, à vérifier que les mesures d organisation prévues sont bien mises en œuvre et, d autre part, à gérer les aléas et proposer les améliorations qui s imposeraient. Nota : Lorsque les travaux sont effectués dans un établissement en activité et soumis au décret du 20 février 1992, la coordination est assurée par le chef d établissement [10]. Les principes généraux de prévention Aux termes de l article L du code du travail [6], il appartient à chaque employeur de prendre les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé de ses salariés ainsi que celle des travailleurs intérimaires qu il emploie. En même temps qu il définit une obligation générale de sécurité, cet article énumère les principes généraux qui servent de base aux actions que l employeur doit mettre en œuvre pour prévenir les risques professionnels dans son entreprise. L article L du code du travail demande que les maîtres d ouvrage, maîtres d œuvre et coordonnateurs de sécurité mettent en œuvre, chacun pour ce qui le concerne, les principes généraux de prévention a, b, c, e, f, g et h «afin d assurer la sécurité et de protéger la santé de toutes les personnes qui interviennent sur un chantier de bâtiment ou de génie civil». Appliqués au cas particulier des approvisionnements, ces deux articles imposent donc qu une organisation soit définie et mise en place avant travaux pour prévenir les risques liés à la manutention mécanique des produits et ceux qui sont associés au port manuel des charges. La manutention manuelle des charges Dans son article R , le code du travail [7] demande que «l employeur prenne les mesures d organisation appropriées ou utilise les moyens adéquats, et notamment les équipements mécaniques, afin d éviter le recours à la manutention manuelle de charge par les travailleurs». 14 Logistique de chantier et coordination de sécurité

14 Lorsque le recours à la manutention manuelle ne peut être évité, il est prévu que l employeur procède à une évaluation préalable des risques générés par les opérations de manutention projetées. Cette évaluation doit tenir compte : - des caractéristiques de la charge : celle-ci peut être lourde, encombrante, volumineuse, difficile à saisir, etc. ; - de l effort physique nécessaire et des exigences de l activité : des efforts de torsion et de flexion trop intenses ou trop fréquents, des périodes de récupération insuffisantes, des distances ou des dénivellations trop importantes constituent des facteurs de risques ; - des caractéristiques du milieu : un sol inégal ou glissant, un espace réduit ou une visibilité restreinte augmentent la pénibilité des tâches et les risques d accident. A l issue de cette évaluation, l employeur organise les postes de travail et met à disposition des travailleurs des aides mécaniques ou des accessoires de préhension destinés à rendre la tâche plus sûre et moins pénible. Enfin, ces travailleurs sont informés des risques encourus et formés pour pouvoir effectuer ces manutentions en sécurité. >>> D autres obligations La loi sur la maîtrise d ouvrage publique, dite loi MOP La loi MOP [11] précise le contenu des contrats qui sont passés entre une maîtrise d ouvrage publique et une maîtrise d œuvre privée. Obligatoire pour les marchés publics, cette loi est également utilisée, dans un cadre contractuel, sur de nombreux marchés privés. Dans son article 7, la loi MOP définit, d une manière générale, huit éléments de mission : les études d esquisse, d avant-projet et de projet, l assistance au maître d ouvrage pour la passation des contrats, les études d exécution, la direction de l exécution des travaux, l ordonnancement pilotage coordination (OPC) et l assistance au maître d ouvrage pour la réception et pendant la période de garantie de parfait achèvement. Ces éléments de mission doivent permettre à la maîtrise d œuvre «d apporter une réponse architecturale, technique et économique» à la demande formulée dans le programme, par le maître d ouvrage. Chaque élément de mission s appuie sur celui qui le précède. Les études d avant-projet, par exemple, sont établies à partir des décisions validées par le maître d ouvrage au stade de l esquisse. Tout retour en arrière est donc très difficile. C est pourquoi il est important que le coordonnateur intervienne en amont de l élaboration du projet. Ses propositions peuvent alors figurer dans les pièces du dossier d appel d offres pour être prises en compte dans l engagement des entreprises. La norme NF P La norme NF P [12] constitue le cahier des clauses administratives générales (CCAG) pour les marchés de travaux privés de bâtiment. Ce document définit les droits et les obligations de chaque partie contractante. Il ne peut prendre effet, comme pièce constitutive d un marché, que s il est signé pour acceptation ou rendu applicable par le cahier des clauses administratives particulières (CCAP). Dans le domaine de la logistique de chantier, ce document : - rappelle les obligations en matière de coordination SPS ; - confie au lot gros œuvre ou au lot voirie et réseaux divers (VRD), la réalisation des voies de circulation et des aires de stockage dans l emprise du chantier ; - prévoit la mise en commun d équipements de travail ou d installations de chantier, en accord avec le plan général de coordination SPS (PGCSPS) ; - précise l obligation, pour chaque entreprise, de procéder au tri et à l évacuation de ses déchets de construction. La réglementation des déchets Quatre lois [14 et 15] fixent les orientations de la politique des déchets pour notre pays et de très nombreux décrets, arrêtés ou circulaires en donnent les conditions d application. Logistique de chantier et coordination de sécurité 15

15 - classe 1 pour les déchets dangereux, - classe 2 pour les déchets ménagers et assimilés, - classe 3 pour les déchets inertes. Lorsque l on mélange des déchets de catégories différentes, l ensemble est classé dans la catégorie la plus défavorable. Une benne à gravats remplie de chutes de béton et de bois est donc considérée comme une benne de déchets industriels banals et ne sera acceptée que dans une décharge de classe 2. Ces textes, qui pour la plupart transposent des directives européennes, se mettent en place progressivement. Cette législation donne la priorité à la valorisation des déchets. C est ainsi qu à compter du 1 er juillet 2002, il ne sera plus possible d éliminer les déchets par simple mise en décharge. A cette date, les installations de stockage n accepteront plus que des déchets ultimes, c est-à-dire des déchets qui ne peuvent plus faire l objet d une valorisation dans les conditions économiques et techniques du moment. Ces textes classent les déchets en trois catégories : - Les déchets dangereux (D) comme l amiante et les déchets industriels spéciaux (DIS) comme les peintures, colles et mastics contenant des solvants, les produits de traitement des bois, etc. - Les déchets ménagers et assimilés (DMA) qui comprennent aussi les déchets industriels banals (DIB) tels que les bois non traités, les matières plastiques, les métaux, le verre, etc. - Les déchets inertes (I) qui se composent de produits ne brûlant pas, stables au stockage et ne produisant pas de réactions susceptibles de nuire à l environnement, tels que les bétons, les briques, les terres non polluées, etc. Les installations d élimination des déchets par stockage sont réparties en trois classes qui dépendent de la nature des déchets acceptés : Les déchets ultimes ne constituent pas une classe supplémentaire, mais un niveau de valorisation. Ainsi, à compter du 1 er juillet 2002, une installation de classe 2 ne recevra plus que des déchets ménagers ou assimilés ne pouvant plus faire l objet de valorisation et appelés déchets ménagers ou assimilés ultimes. Les emballages font, quant à eux, l objet d un décret particulier qui impose aux entreprises, comme seul mode d élimination, la valorisation par réemploi, recyclage ou tout autre action visant à récupérer des matériaux réutilisables ou de l énergie. Maître d ouvrage [5], maître d œuvre et OPC, et coordonnateur SPS doivent organiser l évacuation des déchets de chantiers de manière à éviter les mélanges de produits qui ne peuvent que déboucher sur des interventions de tri pénibles, inutiles et onéreuses. Le management de la qualité L organisation des approvisionnements fait partie des référentiels ISO 9000 [16] qui permettent de juger de l efficacité du système de management de la qualité d une entreprise, à satisfaire les besoins d un client. Les normes de management de la qualité sont quelquefois incluses dans les marchés, à titre contractuel. Elles précisent notamment que les entreprises doivent «préserver la conformité du produit au cours des opérations internes et lors des livraisons à la destination prévue. Cette préservation doit inclure l identification, la manutention, le conditionnement, le stockage et la protection». 16 Logistique de chantier et coordination de sécurité

16 3 Comment adapter la démarche logistique au BTP? 3.1 Des principes d action Organiser les approvisionnements, c est prendre en compte : 1. la nature et les quantités de produits à manutentionner, 2. l origine des produits, 3. le mode de livraison et le conditionnement envisagés, 4. la sensibilité aux vols et aux dégradations, 5. le planning des travaux et des livraisons, 6. les contraintes éventuelles des fournisseurs, 7. les contraintes en terme d accès, de circulation et de stockage, 8. les moyens de manutention et de distribution dans l ouvrage, 9. la nature et la quantité de déchets produits et les moyens d évacuation. Pour construire un ouvrage, il est nécessaire d approvisionner à pied d œuvre, dans des conditions souvent difficiles, un grand nombre de produits lourds et volumineux. Lorsque rien n a été prévu pour faciliter ces opérations, les approvisionnements sont souvent réalisés avec du matériel mal adapté ou bien à dos d homme, ce qui représente des coûts économiques et humains non négligeables dans un secteur où les marges sont étroites et le déficit d image important. La démarche logistique peut être adaptée au secteur BTP en tenant compte de ses spécificités et sans transformer les conducteurs de travaux en logisticiens. Les principes d'action mentionnés ci-dessous sont à mettre en œuvre depuis la conception du projet jusqu'à la réalisation des travaux par chacun des acteurs de la construction pour ce qui le concerne. >>> Identifier et quantifier les produits Ce recensement doit permettre de définir la nature des moyens à mettre en place pour faciliter les acheminements à pied d œuvre. Il concerne l ensemble des matériaux et des matériels nécessaires à la réalisation de l ouvrage, y compris les équipements de protection collective, et doit être réalisé par corps de métier et par phase de travaux. La quantification sera faite en poids et volume. S il est envisagé d effectuer certains approvisionnements à la main, l analyse tiendra compte du parcours à réaliser (distance et dénivellation), de telle sorte qu il soit possible d évaluer le temps et l effort physique nécessaires. >>> Planifier les besoins en produits La planification des besoins en produits permet de dimensionner les moyens logistiques, infrastructures provisoires et moyens matériels à mettre en place. Elle donne également la possibilité d intervenir sur le programme de mise en commun d équipements de travail ou d installations de chantier et sur le phasage de certaines tâches. C est ainsi que l on peut décider : - d occuper à titre temporaire un domaine public ou privé, - d envisager l utilisation commune d un moyen de manutention, - de faciliter les circulations horizontales de produits dans les étages, - de décaler la réalisation de certains travaux pour laisser en service plus longtemps un moyen logistique. Logistique de chantier et coordination de sécurité 17

17 >>> Connaître les conditions de réalisation des travaux Pour que les produits arrivent dans les meilleures conditions, à l endroit souhaité, au bon moment et dans des quantités appropriées, il est nécessaire que l entreprise dispose, à temps, des informations qui lui permettront de passer une commande adaptée aux conditions de réalisation du chantier. Ces informations arrivent souvent trop tard ; les commandes sont alors approximatives et passées en catastrophe, le délai l emportant sur les conditions de livraison. Parmi les informations nécessaires figurent en bonne place les suivantes. La définition exacte des produits constituant l ouvrage L ensemble des produits à mettre en œuvre devrait être défini dans les marchés de travaux. Cependant, quelques produits font l objet d un choix sur présentation d échantillons ou sur réalisation d un local témoin. Des choix tardifs sur des couleurs ou sur des références exactes de produits peuvent perturber fortement l organisation de chantier prévue initialement. C est pourquoi il est important de réaliser rapidement le local témoin, dans le cas d opération de bâtiment, pour arrêter les derniers choix d architecte. Le calendrier des travaux Ce document doit être détaillé, fiable et recalé régulièrement. Il doit permettre à l entreprise de commander la quantité de produits adaptée à ses besoins et de la faire livrer au bon moment. Dans l industrie, la diminution des stocks s accompagne d une plus grande rigueur de la programmation. La définition des moyens communs disponibles Le plan des installations de chantier et le PGCSPS, lorsqu il existe, précisent notamment les dispositions collectives retenues pour accéder et circuler dans le chantier, pour stocker les produits et pour les distribuer au poste de travail. Munis de ces documents, les entreprises et leurs fournisseurs peuvent alors définir les moyens propres qu ils doivent mettre en place pour faciliter les approvisionnements à pied d œuvre. 18 Logistique de chantier et coordination de sécurité

18 >>> Définir des conditionnements et des modes de livraison adaptés La tradition et la tendance naturelle des acteurs consistent à remplir les camions pour minimiser les coûts de transport et à stocker sur place le maximum de produits pour éviter les retards de livraison ou les ruptures de stock qui sont toujours très préjudiciables dans une activité à forte proportion de main-d œuvre. Cette habitude conduit très souvent à des reprises de produits pour libérer des zones de stockage qui ne sont plus disponibles, à des pertes pour cause de vols ou de dégradations, à des re-conditionnements effectués par des personnes dont ce n est pas le métier. Pour remédier à ces dysfonctionnements, il est nécessaire de définir des conditionnements et des modes de livraison qui soient adaptés, d une part, à la tâche à réaliser et, d autre part, à l organisation collective du chantier. Les aires de stockage sur chantier et notamment celles qui sont situées sous les grues ou à proximité des moyens de levage sont toujours très limitées et en évolution permanente. Il est donc utile de limiter les stocks sur site en favorisant les petits conditionnements, ce qui augmente la fréquence des livraisons. Les négociants en matériaux proposent maintenant ce service. Ils peuvent livrer, par exemple, sous un même conditionnement, l ensemble des produits nécessaires au travail d un compagnon ou d une équipe pour une durée déterminée, libérant ainsi de la place sur chantier tout en limitant les pertes de temps et de produits. >>> Passer la commande des produits Les commandes sont souvent passées avec retard du fait de choix tardifs ou par méconnaissance des délais de fabrication. Elles sont aussi fréquemment passées alors que l organisation du chantier n est pas totalement définie. Le mode d approvisionnement alors retenu par défaut est généralement celui de l industriel fabricant ou du négociant et celui-ci est rarement modifié par la suite car il est toujours difficile de renégocier une commande. Logistique de chantier et coordination de sécurité 19

19 Pour passer une commande précise, il faut connaître : 1. la définition exacte des produits constituant l ouvrage, 2. le calendrier détaillé des travaux, 3. les moyens logistiques communs disponibles sur chantier. Pour passer la commande des produits, il est nécessaire que l entreprise ait franchi, au préalable, les différentes étapes définies aux paragraphes précédents. Dans ces conditions, la commande peut être rédigée en laissant d une part aux fournisseurs un délai de préparation suffisant et en indiquant, d autre part, le mode d approvisionnement adapté aux moyens du chantier (dimension des accès, capacité du matériel de manutention, présence de personnes à la réception, etc.). >>> Gérer les déchets Les chantiers et notamment ceux de bâtiment génèrent des quantités importantes de déchets qui, dans bien des cas, sont manutentionnés à la main. Pour limiter ces opérations pénibles et non créatrices de valeur, il est possible, particulièrement sur les chantiers de constructions neuves, d agir d une part sur les quantités produites et d autre part sur les modes d évacuation. Limiter la production de déchets Sur les chantiers de constructions neuves, les déchets sont essentiellement composés d emballages et de produits excédentaires ou dégradés. Pour limiter la production de ces déchets, il est possible d agir : - sur les choix techniques en utilisant par exemple des produits industrialisés, réalisés sur mesure ou livrés en kit (moins d emballages et de pertes), - sur les conditions d approvisionnement en limitant les stockages, toujours source de dégradations, en adaptant avec plus de précision les livraisons aux besoins (calepinage), et en prévoyant les moyens logistiques adaptés. Organiser l évacuation des déchets Cette organisation est tributaire des moyens de manutention présents sur le chantier et de la nature des déchets qui sont produits. Nous avons vu précédemment qu il était important de ne pas mélanger les déchets, bien que le tri puisse être réalisé à l extérieur dans des centres spécialisés (les goulottes qui permettent la descente des gravats depuis les étages ne devraient donc être utilisées que pour évacuer des déchets de même nature). La mise en place de la nouvelle réglementation en matière d élimination des déchets va progressivement modifier les habitudes actuelles et faire apparaître sur les chantiers différents conteneurs. Trois conteneurs au moins devraient être prévus : un pour les déchets inertes, un autre pour les déchets industriels banals et un dernier pour les déchets industriels spéciaux. La manutention et l évacuation avec remplacement de ces différents conteneurs devront être précisés (PGCSPS). 20 Logistique de chantier et coordination de sécurité

20 3.2 Des séquences à respecter Une opération de construction peut être divisée en différentes séquences opérationnelles, depuis l étude de sa faisabilité jusqu'à son exploitation après conception et exécution de l'ouvrage. Une démarche visant à optimiser les approvisionnements d un chantier nécessite qu'à chacune des étapes des décisions soient prises de manière à constituer progressivement un ensemble cohérent connu de tous les acteurs y compris des fabricants de produits de construction s'ils sont concernés par les choix effectués. Certaines de ces décisions sont considérées comme critiques. Les principales séquences à respecter sont rappelées ci-après. >>> Avant les travaux La conception de l'opération Le maître de l'ouvrage est le responsable principal de l'ouvrage. Il lui appartient, après s'être assuré de la faisabilité et de l'opportunité de l'opération, de prendre un certain nombre de décisions (programme, enveloppe financière, financement, etc.) et surtout celle de choisir le maître d'œuvre. Nous avons vu que, d'une manière générale, le maître d'œuvre devait apporter une réponse architecturale, technique et économique au programme du maître de l'ouvrage. Parmi les missions de la maîtrise d'œuvre, l'opc (ordonnancement pilotage coordination) est, depuis la loi MOP et ses textes d'application, une mission à part entière. Cette mission peut être assurée soit par la maîtrise d'œuvre lorsqu'elle en a les moyens et les compétences, soit par une entité spécialisée dont c'est la vocation. Elle fait alors l'objet d'un contrat séparé de maîtrise d'œuvre. Cette mission s'articule autour : - de la préparation du chantier, - de l'exécution des travaux proprement dite, - des opérations préalables à la réception des travaux. Elle est à compléter, si nécessaire, d'une mission de coordination en amont des travaux. L'organisation du chantier dépendra en grande partie de la qualité de cette prestation et il est conseillé au maître de l'ouvrage de s'assurer que les moyens nécessaires seront mis en œuvre pour remplir la mission OPC. La conception du projet Le maître d'œuvre réalise les études nécessaires à la définition de l'ouvrage : études préliminaires, études d'avant-projet et études de projet qui permettront la consultation des entreprises. Chaque nouvelle phase d études est engagée sur la base des études précédentes approuvées par le maître de l'ouvrage ainsi que sur les prescriptions de celui-ci, résultant des autorisations administratives. Pour bien gérer les approvisionnements, il faut : 1. définir une organisation «prévisionnelle» dès la phase de conception, 2. arrêter l organisation du chantier à la passation des contrats, 3. finaliser cette organisation pendant la période de préparation de chantier, 4. mettre en place l organisation et gérer les aléas pendant les travaux. Logistique de chantier et coordination de sécurité 21