Risques de dommages potentiels



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Recherche et Technologie Dégradation Risques de dommages potentiels Les performances des modules solaires soumis à des tensions élevées peuvent baisser sensiblement [photomontage : Svenja Schnickmann / photon-pictures.com] 28

» La «dégradation induite par le potentiel» est un problème nouveau et sérieux pour le secteur du solaire, en raison des effets secondaires générés par les tensions habituellement élevées présentes dans les installations photovoltaïques modernes. L apparition de courants de fuite au sein d un module pourrait affecter plus de vingt pour cent de son rendement. Premier fabricant sur ce marché, la société Solon a annoncé que des mesures correctives seraient, dès cette année, appliquées à sa production de série. Certes, tout n était pas idéal auparavant, mais il est vrai que certains problèmes n étaient pas encore apparus : «Il y a 20 ans, personne n en parlait», commente Lars Podlowski, directeur technique de Solon SE, fabricant de modules solaires implanté à Berlin. Parlait de quoi? D un phénomène désigné aujourd hui par les publications scientifiques sous le terme de «High Voltage Stress» (HVS) ou encore «Potential Induced Degradation» (PID). Entendez : «perte de puissance due à une tension élevée». Au début du photovoltaïque, cette «menace» n en était pas une, les systèmes étant généralement limités à une «très basse tension de sécurité», c est-à-dire à 120 volts. Aujourd hui, la situation a changé. Une chance, aimerait-on pouvoir dire, car grâce aux tensions comprises entre 600 et 1.000 volts la norme aujourd hui, il est désormais possible de simplifier la conception des circuits et de diminuer les pertes de puissance, tout en ayant un grand nombre de modules couplés entre eux. En vertu de la loi d Ohm, il n y a donc rien d étonnant Il existe un certain nombre de fléaux qui nuisent aux performances des modules solaires. La lumière, la corrosion ou des impacts mécaniques sont susceptibles de provoquer des dégradations. L effet «PID» désigne un phénomène parasite relativement nouveau et très pénalisant. à ce que l on cherche à augmenter la tension au maximum. Cependant, depuis quelque temps, il est devenu évident que ce résultat n est pas sans effets secondaires sur les modules. Pour les chercheurs, ce problème n est pas une découverte : «Différents instituts de recherche travaillent sur le sujet depuis un certain nombre d années», affirme Juliane Berghold, responsable de la recherche et du développement des modules chez Solon. Déjà, en 2005, des scientifiques du NREL (National Renewable Energy Laboratory Laboratoire national des énergies renouvelables), dans l Etat du Colorado (Etats-Unis), avaient réalisé une étude complète dédiée aux effets du stress à haute tension sur la stabilité des modules solaires dans le temps. «Malgré cela, poursuit Juliane Berghold, l effet PID reste aujourd hui encore totalement inconnu du monde de l industrie.» Ce phénomène n est pas non plus pris en compte dans les procédures de certification des modules cristallins, prévues par la norme internationale CEI 61215. Des pertes insidieuses Il n y a rien de fondamentalement nouveau dans le fait que les modules solaires perdent de leur puissance lorsqu ils sont en service. Ce qui est connu, c est surtout le phénomène de dégradation sous lumière. A titre d exemple, on sait que les modules solaires à couches minces en silicium amorphe perdent jusqu à vingt pour cent de leurs performances initiales au bout des 1.000 premières heures de fonctionnement. Ce n est qu ensuite que leur rendement se «stabilise» de manière durable. Au fil des années, tous les types de modules subissent des pertes supplémentaires liées, par exemple, à l augmentation des résistances de contact ou encore à la diminution de transparence de la face supérieure en verre et du matériau d encapsulation. Bien sûr, il serait exagéré de conclure que la recherche, dans ce domaine, a fait le tour de la question. Néanmoins, on peut dire que dans les grandes lignes le secteur du solaire en connaît les tenants et les aboutissants. Ce n est, par contre, qu en 2006 que l effet PID a fait sa première apparition publique. Pourtant, à ce moment-là personne n utilisait cette notion. Rétrospectivement, force est cependant de constater que ce terme correspond tout à fait à l expérience qu en avait déjà faite, bien malgré elle, la société américaine Sunpower Corp., entreprise spécialisée du secteur solaire. Cette dernière avait soudain été confrontée à des difficultés en raison du nombre élevé de ses modules de série réputés pourtant avoir le rendement le plus élevé du marché qui ne fournissaient plus la puissance spécifiée. Des pertes de rendement de vingt pour cent et plus avaient alors été constatées. Dans un premier temps, le problème avait été considéré comme étant spécifique à la technologie de pointe de Sunpower : les contacts électriques des cellules fabriquées en silicium «dopé n» se situent seulement sur la face arrière. La face avant comporte une couche de passivation en silice. Or, c est précisément sur cette couche que peut se produire une polarisation de surface temporaire. Si le générateur solaire présente un potentiel positif par rapport à la terre, des charges électrostatiques négatives s accumulent sur la surface de la cellule. A leur tour, ces charges attirent, au sein du matériau semi-conducteur, des trous générés par les photons et chargés positivement. Ces trous devraient normalement migrer vers le contact arrière de la cellule pour participer à la production de courant. Au lieu de quoi, un grand nombre d entre eux se recombinent avec les charges négatives présentes à la surface de la cellule. D où une perte considérable de rendement. Pas seulement chez Sunpower! Si ce processus peut s amorcer et se maintenir, c est parce que les cellules, au sein du module, ne sont pas isolées électriquement d une façon aussi stricte qu on le pensait. Le matériau d encapsulation dans lequel elles sont intégrées, de même que le cadre du module ou encore sa face supérieure en verre autorisent en effet la formation de courants de fuite. En définitive, la cellule passe, dans une certaine mesure, d un rôle de diode à celui de transistor. Pour les modules de Sunpower, le résultat est semblable à ce qui se passe sur les modules de cellules solaires à couches minces (voir encadré) : il faut les relier à la terre pour éviter une polarisation de surface. Mais cela signifie aussi, en règle générale, que seuls peuvent être utilisés des onduleurs avec transformateur. Sur les appareils sans transformateur, ne disposant pas de séparation galvanique entre courant continu et courant alternatif, il se produit, à l un des pôles, un court-circuit avec la terre. 29

Recherche et Technologie Reste que les onduleurs avec transformateur sont plus lourds, sensiblement plus chers et moins efficaces que leurs homologues sans transformateur. Il est donc très peu motivant de consacrer des investissements importants à la mise au point et à la production de modules solaires particulièrement performants, sans avoir la possibilité de les associer à des onduleurs de technologie moderne. Les spécialistes, aussi bien ceux de la recherche que de l industrie, sont donc en permanence en quête de solutions à ce problème. Mais il faut reconnaître que les résultats obtenus jusqu alors ne sont que des succès partiels : les cellules à contact électrique arrière de Sunpower (comme ceux d autres fabricants d équipements de technologie de pointe) ne peuvent être associées à des onduleurs sans transformateur qu à la condition expresse que leur type ait été validé, ce qui exige normalement un «kit de mise à la terre». Les fabricants de modules cristallins conventionnels se croyaient à l abri de telles restrictions d utilisation. Pourtant, les études du laboratoire NREL ont montré que leur assurance était bel et bien illusoire. Ce que sont venues confirmer, à l automne 2007, les difficultés Juliane Berghold, chercheure chez Solon : «C est un phénomène totalement inconnu du monde de l industrie.» rencontrées par les modules de la société Evergreen Solar Inc. Là encore, des effets de polarisation avaient été constatés. Ils résultaient, selon le constructeur, de la méthode de réalisation des contacts sur les cellules. Ce problème, qui était apparu uniquement sur des modules provenant de certaines lignes de fabrication, avait été entre temps résolu. Mais pas avant d avoir provoqué des pertes de rendement pouvant atteindre trente pour cent sur les installations concernées! Sunpower et Evergreen ont, tous les deux, résolu la question pour les équipements déjà en place et ne devant pas faire l objet d une mise à la terre : Sunpower a recommandé de soumettre l installation à une tension négative de Rolf Schulten / photon-pictures.com Les modules à couches minces aussi concernés Les modules solaires à couches minces sont, eux aussi, confrontés à des phénomènes semblables à l effet PID. Dans les fines couches de matériau quelques microns d épaisseur, les hautes tensions peuvent, dans le cas le plus défavorable, conduire à la formation d une corrosion électrochimique : un processus susceptible de se produire lorsque des métaux différents se trouvent en présence d un électrolyte conducteur et d un flux de courant électrique. Ce phénomène, dont les modules solaires sont le siège, n a pas encore été totalement élucidé. On l explique toutefois par la diffusion d ions positifs d azote et par la pénétration de vapeur d eau à la frontière entre la couche transparente et conductrice de la face supérieure de la cellule à couches minces d une part (TCO oxyde transparent conducteur) et la face supérieure en verre d autre part : la conséquence en est la corrosion du TCO par réaction électrochimique. Il est toutefois possible de réduire ce risque. Le choix de l onduleur revêt une importance primordiale. En règle générale, il n est possible de combiner des modules solaires à couches minces qu avec des transformateurs, les onduleurs sans transformateur ne pouvant être utilisés qu avec l accord exprès du constructeur. On peut également lutter contre cette corrosion électrochimique en ayant recours à une tension de système inférieure; ou encore en empêchant la formation de courants de fuite par l emploi d un matériau d encapsulation très isolant et imperméable autant qu il est possible de l être à la vapeur d eau. Le Photovoltaik-Institut Berlin AG (PI) a fait un exposé sur des tests modifiés de vieillissement à la chaleur humide, à l occasion de la conférence européenne du photovoltaïque qui s est tenue en 2010 à Valence (Espagne). En plus de la procédure standard mettant en jeu une température de 85 degrés Celsius et une humidité de l air de 85 pour cent comme le préconisent les normes de tests des modules CEI 61215 (CEI 61646 pour les modules solaires à couches minces), une haute tension négative de 1.000 volts a été appliquée. Ce test a porté sur des modules à couches minces à base de silicium amorphe (a-si), de cellules «tandem» en silicium amorphe et en silicium microcristallin (a-si/µc-si) et de modules au tellurure de cadmium (CdTe). Tous ont présenté des signes de corrosion et de perte de performances au bout de 1.000 heures. Les hautes tensions combinées à une humidité et à une température élevées ont conduit à l apparition de courants de fuite. Elles ont également provoqué une augmentation des résistances de contact, alors que les résistances de shunt (résistances de court-circuit) diminuaient. La manifestation concourante de ces deux phénomènes indique bien l enclenchement d un processus de vieillissement! L équipe du PI de Berlin considère l étanchéité de l encapsulation à la vapeur comme l une des principales solutions pour empêcher la pénétration d eau, et par conséquent l apparition de courants de fuite. Un grand nombre de constructeurs de modules ont également relevé ce défaut et l ont pallié en renforçant le laminé, par exemple dans les angles du module, qui constituent souvent le point de départ de cette corrosion. Ils ont aussi pu apporter des modifications à la fixation ou à la conception du cadre. Dans le but de rendre ces recherches et leurs résultats plus facilement compréhensibles, il conviendrait de mettre en place des critères de tests homogènes permettant de mesurer la dégradation induite par le potentiel. L Institut PI propose, également, de contrôler tout particulièrement la perméabilité à la vapeur du matériau d encapsulation. Il suffirait d un test effectué en chambre climatique sous haute tension pour mesurer le flux de charge à travers le matériau d encapsulation. cha 30

» 1.000 volts par rapport à la terre, pendant une heure. L effet de polarisation des modules de Sunpower est, en effet, réversible. Evergreen, pour sa part, a mis en œuvre un boîtier «PV Offset Box» développé en collaboration avec le fabricant d onduleurs SMA Solar Technology AG. Ce boîtier crée une tension positive, la nuit, entre le générateur et la terre. Cependant, ne serait-ce que pour des raisons de coûts, ces deux solutions ne sont pas envisageables pour des installations standard. Il serait, pour autant, faux de conclure à la nécessité de mettre à la terre toutes les installations solaires : «Ça ne peut être qu une solution de repli à laquelle un fabricant aura recours lorsqu il n est pas en mesure de résoudre le problème au niveau de la cellule ou du module», commente Lars Podlowski. Tensions problématiques Il va donc falloir faire preuve d imagination! En effet, les études effectuées par Solon, en coopération avec différents fabricants de cellules études dont les résultats ont été publiés l été dernier, ont confirmé les premiers soupçons : compte tenu de la généralisation progressive des hautes tensions dans les systèmes, l effet PID ne gardera pas le statut d épiphénomène. Des batteries de tests, réalisés avec des cellules solaires conventionnelles, ont abouti à des conclusions assez probantes : à 1.000 volts tension qui a fini par s imposer comme une valeur relativement standard sur les grandes installations photovoltaïques, la situation peut devenir critique pour toutes les technologies de cellules cristallines. Des coupons, formés de cellules solaires individuelles laminées, ainsi que des modules complets ont été exposés en laboratoire à un stress de tension important. La partie supérieure des pièces testées a été recouverte avec de l eau ou un linge humide. Cette face a ensuite été reliée au pôle positif, tandis que les contacts du module ou de la cellule étaient reliés au pôle négatif d une source de courant, puis soumis à une tension de 1.000 volts. Ce montage a permis de simuler un potentiel négatif des cellules par rapport à la terre, de façon analogue à ce qui se produit dans la réalité (dans le cas de la polarisation des modules Sunpower, ce sont des potentiels positifs qui apparaissent puisque les cellules sont constituées de silicium «dopé n» alors que c est normalement du silicium «dopé p» qui est utilisé). Les échantillons ont été soumis Formation de potentiel et courants de fuite dans les modules solaires Charge positive Charge négative Courants de fuite S il est utilisé avec un onduleur sans transformateur, un générateur solaire présente un potentiel électrique par rapport à la terre. Il peut alors se produire (sur les cellules solaires standards cristallines en silicium «de type p») une accumulation de charges positives sur la face supérieure des cellules. Il en résulte alors un flux de charges négatives formant des courants de fuite entre le matériau d encapsulation, le cadre et même la face supérieure en verre (avec du silicium «de type n», les charges négatives s accumulent sur la surface et il se forme un flux de charges positives). Un fort degré d humidité, une température élevée ou, surtout, des tensions importantes accentuent ce phénomène. à cette sollicitation pendant 100 heures. Un ampèremètre, associé à un enregistreur de données, a été mis en place afin de déterminer combien de porteurs de charges avaient disparu sous la forme de courants de fuite, à un instant donné. L ensemble du dispositif d essai a été placé à l intérieur d une chambre climatique, afin de contrôler l influence de la température et de l humidité de l air. Dès lors, les chercheurs n avaient plus qu à observer les variations des différents paramètres ayant une influence positive ou négative sur les performances des modules. Il en a résulté un certain nombre de recommandations destinées à lutter contre le phénomène de PID, recommandations qui ont ensuite été publiées. Sebastian Pingel, collaborateur de Solon qui a largement participé à cette étude, a consacré un exposé à «l effet PID sur les cellules et Cadre du module Verre Contact en face avant Couche antireflet Emetteur (dopé n) Cellule solaire Base (dopée p) Contact arrière Film en face arrière Encapsulation (EVA) les modules», lors de la 35e conférence des spécialistes du photovoltaïque qui s est tenue à Hawaii, en juillet dernier. Un événement qui faut-il le préciser est réputé être le «sommet» annuel des chercheurs américains dans le secteur du solaire! De son côté, Juliane Berghold a présenté ces mêmes résultats lors de la conférence européenne du photovoltaïque de Valence (Espagne), en septembre dernier. Son exposé a rencontré un vif succès auprès d un grand nombre de participants : «Beaucoup de questions ont été posées par des fabricants de cellules, des constructeurs d onduleurs, des installateurs et même des banques.» Il faut s attaquer à la racine du mal D après ces interventions, il est possible de s attaquer à l effet PID au niveau de la cellule, du module et de la configuration du système. Ce dernier point graphique : Udo Rohnke / PHOTON 31

Recherche et Technologie Frederic Neema / photon-pictures.com Evergreen Solar GmbH La surface sans grille de contact est la marque des cellules à contact arrière de Sunpower. Des problèmes de «polarisation de surface» sont un effet indésirable. Les difficultés rencontrées par les cellules «String-Ribbon» d Evergreen Solar ont révélé que les technologies conventionnelles étaient, elles aussi, concernées par l effet PID. concerne les onduleurs-transformateurs, la mise à la terre ou le retour à des tensions de système plus faibles, ce qui correspond à la variante décrite par Lars Podlowski comme étant la «solution de repli». Celle dont, en fait, personne ne veut. C est la raison pour laquelle tous les efforts se concentrent actuellement sur les deux autres. S attaquer aux causes profondes du problème s impose naturellement comme une piste évidente. D après les chercheurs, «des solutions prometteuses permettant de réduire ou d inhiber l effet PID au niveau de la cellule» sont envisageables. Plusieurs voies y conduisent. Solon a étudié les cellules solaires de trois constructeurs différents et observé, entre autres, l influence de la résistance de la couche de l émetteur et celle de sa base. Dans les cellules standard, l émetteur représente la partie conductrice négative mélangée (dopée) avec du phosphore, la base représentant la partie conductrice positive de la cellule. Sur un échantillonnage de plusieurs centaines de tranches de silicium pouvant être analysées statistiquement, il a été possible de démontrer que l effet PID se réduisait lorsque la résistance de l émetteur diminuait. Parallèlement, l augmentation de résistance de la base conduit au même résultat : pour six à huit Ω-cm (Ω cm 2 /cm), l effet PID s est réduit à zéro au cours des essais effectués. La transition entre couches dopées positivement et couches dopées négativement est également un point critique (transition p/n). En bord de cellule en particulier, les petits écarts parfois constatés par rapport à la structure idéale favorisent également l apparition de l effet PID. L incidence la plus importante a cependant été notée lors de modifications apportées au revêtement antireflet, élément destiné à assurer une absorption importante de la lumière, qui est aussi à l origine de la couleur bleu foncé ou noire des cellules solaires. Le scénario est facile à comprendre. Déjà, dans le cas des cellules Sunpower, cette couche de protection avait été identifiée comme un paramètre important. Sur les cellules standard, ce revêtement est constitué de nitrure de silice, c est-à-dire de silicium et d azote, l effet antireflet étant obtenu par le choix judicieux de l index de réfraction et de l épaisseur de la couche. Conclusion d un des essais : les couches ayant une plus faible concentration en azote permettent de réduire l effet PID. Malheureusement, ce constat à lui seul ne donne pas la solution du problème, car une simple diminution de la concentration d azote pénalise les propriétés optiques de la couche. Par ailleurs, l épaisseur et la densité optique de la couche antireflet ne sont pas les seuls facteurs en cause : sa méthode d application jouerait également un rôle. D où le classement des cellules testées en fonction de l équipement utilisé pour la pose de leur couche antireflet. Ce critère a permis de mettre en évidence des différences significatives selon les fabricants des machines concernées, ce qui n a, en principe, rien d étonnant : l homogénéité maximale du revêtement jusqu aux bords de la cellule est un élément-clé. Il est certain que les industriels producteurs de cellules et de modules sont particulièrement intéressés de connaître les «scores» obtenus par ces machines en termes de probabilité d effet PID. Bien entendu, aucun nom n a été cité au cours des exposés de Solon. Solution pour la production Le fabricant de modules ne souhaite pas se reposer entièrement sur l ingéniosité des producteurs de cellules. «Nous ne voulons ni nous en remettre à eux, ni attendre plus longtemps», déclare Lars Podlowski. C est pourquoi Solon entend s attaquer au problème sur son propre champ d action, c est-à-dire au niveau du module. L entreprise va changer de matériau d encapsulation et adapter un certain nombre de ses étapes de fabrication, notamment celle du laminage. Ce nouveau type de production doit être mis en place dès cette année. Les interventions faites dans le cadre des conférences précédemment évoquées n ont pas donné plus de détails sur cet aspect de la solution. «Bien entendu, il ne nous est pas possible de dévoiler la totalité du savoir-faire de notre département de recherche», s excuse Juliane Berghold. Il est toutefois hautement probable que la qualité du matériau d encapsulation soit au cœur du dispositif. Il s agit, normalement, d un film en éthylène vinyle acétate (EVA), disposé entre la face supérieure en verre et les cellules solaires. Lors de l opération de laminage, celui-ci est fondu pour donner une masse d enrobage transparente, mais électriquement isolante. Néanmoins, cette matière plastique n est pas un isolant absolu et garde toujours une certaine conductivité. L ensemble formé par le matériau d encapsulation, le film arrière du module, le cadre et la 32

ıı Lars Podlowski, directeur technique de Solon : «En fait, tout cela est très simple.» face supérieure en verre ouvre la voie à la formation de courants de fuite, notamment en environnement humide (voir graphique). Outre les facteurs déjà évoqués, l augmentation des problèmes causés par l effet PID a, rappelons-le, surtout pour origine les tensions élevées qui favorisent les courants de fuite. Les essais de Solon menés avec différents matériaux d encapsulation ont pourtant montré qu il était possible de lutter contre ce phénomène : «Il existe des alternatives à l EVA standard», peut-on lire dans l étude. Il est donc possible de réduire considérablement les effets PID par une encapsulation correcte. En revanche, un mauvais choix du matériau d encapsulation peut multiplier par dix les courants de fuite qui se forment. Solon n est pas le seul à travailler sur «les alternatives à l EVA standard». Le groupe chimique Dow Corning Corp., par exemple, a présenté lors de la conférence européenne du photovoltaïque de Valence (Espagne) l état de ses recherches concernant l encapsulation au silicium. Alors que le plastique était auparavant très répandu comme matériau d encapsulation, il a perdu du terrain face à l EVA, en raison de sa Norbert Michalke / SOLON SE Sales Ronald Frommann / photon-pictures.com résistance plus faible aux UV. Un aspect du problème que Dow Corning affirme désormais maîtriser. Pour l heure, Solon ne dévoile pas ses intentions concernant les modifications à apporter à son matériau d encapsulation et à sa mise en œuvre. Si les solutions envisagées s avèrent efficaces, la concurrence mettra tout en œuvre pour les étudier à la loupe. Et, dès que la production de série des modules modifiés aura commencé, il est bien possible que certains d entre eux finissent dans les laboratoires des concurrents! En pareil cas, les fournisseurs de matériaux et de machines, qui ne travaillent pas en exclusivité pour un seul constructeur, s efforcent habituellement d assurer un certain transfert de savoir-faire. Lars Podlowski en est bien conscient, et il n a pas la naïveté de croire que les améliorations promises par Solon conserveront longtemps le caractère d un argument-clé de vente. Dans une certaine mesure, il encourage même la concurrence : «Lorsqu on a bien compris un phénomène», plaisante-t-il, «la possibilité d empêcher son apparition ne pose pas de gros problèmes de fabrication.» Jochen Siemer, Christian Haase Production de modules chez Solon (Berlin) : dès la fin de l année, des changements doivent être apportés au matériau d encapsulation et à sa mise en œuvre. 33