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LCHR Lawyers Committee for Human Rights HRW Human Rights Watch SENEGAL MISE EN OEUVRE DU STATUT DE LA COUR PENALE INTERNATIONALE COMMENTAIRES RELATIFS AU PROJET DE LOI MODIFIANT LE CODE DE PROCEDURE PENALE PROJET MODIFIANT LE CODE DE PROCEDURE PENALE Remarques préliminaires afférant à la forme et à la structure du Titre XIV : Ce projet de loi a vocation à mettre en place les procédures de coopération exigées dans le Statut de Rome en vertu des articles 86 et 88 du Statut. La numérotation et la structure des différents chapitres et sections de ce titre appellent cependant un certain nombre de commentaires. L intitulé du Titre XIV du code de procédure pénale tel qu il est proposé à l art 1 er tendrait à suggérer que la coopération avec la CPI se fait uniquement à travers les juridictions nationales. Mais cette coopération se fait également à travers des autorités autres que judiciaires, notamment le Ministre de la Justice. L intitulé devrait donc être modifié afin de mieux refléter cette réalité. Nous recommandons, soit «Des relations avec la Cour pénale internationale», soit «Des relations entre le Sénégal et la Cour pénale internationale». Le Titre XIV comporte un chapitre A De la coopération entre la Cour et le Sénégal et un chapitre A De l arrestation et la remise. Cette structure ne reflète que partiellement la distinction entre les différentes procédures de coopération prévues par le Statut et donne une place prédominante à la procédure d arrestation et remise qui a pour conséquence de minimiser, voire d omettre, les autres types de procédures. La coopération en matière d atteintes à l administration de la justice n est, par exemple pas prévue. Par conséquent, le titre XIV serait plus lisible et plus complet s il était restructuré sur le modèle du projet de loi congolais (qui suit lui-même le modèle d autres projets de loi). Le Titre XIV serait alors structuré comme suit : Chapitre 1 : Des dispositions générales en matière d entraide judiciaire 1

Ce Chapitre comprendra les dispositions générale du Statut de Rome en matière de coopération à savoir la réaffirmation du principe de coopération, le respect des privilèges et immunités du personnel de la Cour lorsque celui-ci est présent sur le territoire sénégalais dans le cadre des enquêtes et poursuites de la Cour, l organe compétent pour recevoir et exécuter les demandes d assistance de la CPI, la procédure de contestation de la compétence de la Cour etc A l intérieur du premier chapitre actuel sur la Coopération entre le Sénégal et la CPI, les deux sections traitent séparément de «l entraide judiciaire» et de «la coopération avec la CPI». Pourtant, l entraide judiciaire n est qu une forme de coopération, ou mieux, l intitulé générique d un ensemble de formes de coopération. Il apparaît que la section 2 sur «la coopération avec la Cour pénale internationale» traite d un certain nombre de procédures qui sont généralement traitées au sein des dispositions générales en matière de coopération. On pourrait donc supprimer les intitulés et n en faire qu une section unique. Enfin, la numérotation adoptée ne paraît pas des plus heureuses ni des plus habituelles. Il serait plus avisé d adopter la numérotation du code de procédure pénale qu il s agit de modifier, c est-à-dire, de remplacer «chapitre A» et «chapitre A» par «Chapitre I» et «Chapitre II», comme dans le code de procédure pénale. Chapitre 2 : De l arrestation et de la remise Chapitre 3 : Autres formes d entraide judiciaire Ce chapitre traitera des procédures de coopération prévues par l article 93 du Statut. Ces procédures doivent être prévues dans un titre à part dans la mesure où elles se distinguent de l arrestation et la remise et constitue le deuxième volet du chapitre IX du Statut. Leur inclusion dans le chapitre 1 au titre de l entraide judiciaire ne parait pas satisfaisante dans la mesure où elle ne rend pas compte de la spécificité de ces formes de coopération alors qu elles figurent au sein même du chapitre IX du Statut de Rome. Chapitre 4 : De l exécution des peines et des autres mesures d exécution Il apparaît encore une fois souhaitable de traiter de l exécution des peines dans un chapitre distinct dans la mesure où il s agit d une procédure différente de celles prévues par le chapitre IX du Statut. Son inclusion au sein des dispositions générales d entraide judiciaire ne rend pas suffisamment compte de sa spécificité. Chapitre 5 : Des atteintes à l administration de la justice La coopération en matière de répression de telles atteintes a été omise du projet actuel et doit y être insérée. Cette forme de coopération fait également partie des procédures de coopération qui figurent en dehors du chapitre IX du Statut de Rome et se distingue nettement des autres procédures de coopération. Il semblerait par conséquent souhaitable de lui consacrer un chapitre. La modification de la structure du projet de loi sur ce modèle en faciliterait sans aucun doute la lecture tout en intégrant les différentes procédures de coopération requises par le Statut et en prenant en compte les spécificités de chaque type de procédure. Les commentaires passant en revue le fond du projet de loi suivront cependant la structure 2

actuelle afin de faire apparaître les difficultés qui se posent au fond compte tenu de la forme retenue. Les recommandations qui figurent à la fin de ce document seront par contre rédigées sur la base de la structure recommandée ci-dessus. A. De l entraide judiciaire («Section 1») Il apparaît logique de traiter des dispositions générales applicables en matière de coopération entre le Sénégal et la Cour au titre d une section ou d un chapitre premier. La distinction entre la section 1 «de l entraide judiciaire» et la section 2 «De la coopération avec la Cour pénale internationale» n apparaît pas évidente : il semble que les deux sections aient vocation à reprendre les dispositions générales applicables en la matière. Il n apparaît donc pas particulièrement nécessaire de diviser le chapitre en deux sections. Le Chapitre A pourrait donc ne contenir aucune sous-section et être intitulé «Dispositions générales en matière de coopération entre la Cour pénale internationale et le Sénégal» ou «Dispositions générales en matière d entraide judiciaire entre la Cour pénale internationale et le Sénégal». 1. Limiter le contenu de cette section/chapitre aux dispositions générales applicables à toutes les procédures de coopération Les dispositions incluses dans cette section première du Statut ne relèvent pas toutes des dispositions générales. En effet, l article A2 traite des différentes formes d entraide judiciaire au titre de l article 93 du Statut alors qu il constitue le deuxième article de cette section. Ceci est problématique dans la mesure où les procédures de l article 93 constituent un ensemble de procédures de coopération à part entière qui font suite, dans le Statut, à la procédure d arrestation et remise. Il semblerait judicieux à cet égard de marquer la spécificité de ces procédures dans une section ou un chapitre différent et de se borner au titre des dispositions générales aux dispositions applicables à toutes les procédures de coopération. L article A2 devrait donc être repris dans une section différente relative aux autres formes de coopération en matière d enquêtes et poursuites. Les dispositions A 12 et A 13 touchent, quant à elles, à l exécution des peines et devraient également être traitées dans un chapitre à part consacré à cette question. 2. Insérer les dispositions générales qui ne figurent pas dans le projet Il apparaît indispensable de signaler que quelques dispositions à caractère général ne figurent pas dans le projet de loi et devraient donc y être insérées. Il s agit notamment de: L obligation du Sénégal de coopérer pleinement avec la Cour conformément aux articles 86 et 88 du Statut. L obligation de coopération devrait figurer à l article 2 du chapitre. La formulation suivante pourrait être retenue : «Art. 2 : La République du Sénégal coopère pleinement avec la Cour dans les enquêtes et poursuites qu elle mène pour les crimes de sa compétence, 3

conformément aux procédures prévues par les dispositions du présent code et aux dispositions du Statut de la Cour pénale internationale.» La reconnaissance des privilèges et immunités du personnel de la Cour conformément à l article 48 du Statut. Le Sénégal devrait faire le nécessaire afin que l Accord sur les Privilèges et Immunités de la Cour soit ratifié dans les moindres délais et mis en œuvre dans le cadre de ce projet. A défaut d insertion de dispositions plus détaillées reprenant le contenu de cet Accord, un renvoi à l Accord et sa mise en œuvre par un décret d application sont envisageables. Les termes de l article 48 pourraient alors être repris dans leur plus grande partie : «1. La Cour jouit sur le territoire de la République du Sénégal des privilèges et immunités nécessaires à l'accomplissement de sa mission. 2. Les juges, le Procureur, les Procureurs adjoints et le Greffier jouissent, dans l'exercice de leurs fonctions ou relativement à ces fonctions, des privilèges et immunités accordés aux chefs de missions diplomatiques. Après l'expiration de leur mandat, ils continuent à jouir de l'immunité contre toute procédure légale pour les paroles, les écrits et les actes qui relèvent de l'exercice de leurs fonctions officielles. 3. Le Greffier adjoint, le personnel du Bureau du Procureur et le personnel du Greffe jouissent des privilèges, immunités et facilités nécessaires à l'exercice de leurs fonctions, conformément à l'accord sur les privilèges et immunités de la Cour. 4. Les avocats, experts, témoins ou autres personnes dont la présence est requise au siège de la Cour bénéficient du traitement nécessaire au bon fonctionnement de la Cour, conformément à l'accord sur les privilèges et immunités de la Cour.» Frais liés à l exécution des demandes Il pourrait s avérer utile en cas de contestation future de disposer d un article réglant la question de la répartition des frais d exécution des demandes d entraide entre le Sénégal et la Cour pénale internationale. Cet article reprendrait le contenu de l article 100 du Statut et serait alors rédigé comme suit : «1. Les dépenses ordinaires afférentes à l exécution des demandes sur le territoire du Sénégal sont à la charge du Sénégal, à l exception des frais suivants, qui sont à la charge de la Cour pénale internationale : a) Frais liés aux voyages et à la protection des témoins et des experts ou au transfèrement des détenus en vertu de l article 93 du Statut ; b) Frais de traduction, d interprétation et de transcription ; 4

c) Frais de déplacement et de séjour des juges, du Procureur, des procureurs adjoints, du Greffier, du Greffier adjoint et des membres du personnel de tous les organes de la Cour ; d) Coût des expertises ou rapports demandés par la Cour ; e) Frais liés au transport des personnes remises par l Etat de détention ; f) Après consultation, tous frais extraordinaire que peut entraîner l exécution d une demande. 2. Les dispositions de l alinéa 1 ci-dessus s appliquent aux demandes adressées à la Cour par les Etats Parties. Dans ce cas, la Cour prend à sa charge les frais ordinaires de l exécution.» 3. Modifier certaines dispositions du projet AUTORITE CHARGEE DE RECEVOIR ET EXECUTER LES DEMANDES D ASSISTANCE DE LA COUR Les articles A3 à A7 traitent de la réception et de l exécution des demandes. Ils prévoient que le Ministre de la Justice est compétent pour envoyer ou recevoir les demandes d entraide judiciaire et que le Procureur Général près la Cour d Appel de Dakar est l autorité chargée de l exécution des demandes. Le mécanisme de transmission des demandes de la Cour au Procureur Général n est pas entièrement satisfaisant dans la mesure où toutes les demandes de la Cour sont uniquement envoyées au Ministre de la Justice qui les transmet ensuite au Procureur Général (sauf procédure d urgence). Cette procédure est problématique car : - Elle laisse présager des délais et difficultés dans la transmission des demandes ; - Elle ne met pas en place de mécanisme en place permettant de traiter les demandes et de les transmettre dans les moindres délais au Procureur Général ; - Elle ne prévoit pas de délai à respecter pour transmettre les demandes de la Cour au Procureur Général ; - Elle laisse par conséquent un certain pouvoir discrétionnaire au Ministère en ce qui concerne la décision d exécuter la demande de la Cour (alors que les motifs de refus sont extrêmement limités et définis strictement par le Statut comme l indique l article A5 du projet). Il serait par conséquent souhaitable d envisager que le Procureur Général soit saisi directement des demandes de la Cour dans tous les cas de figure et cela, en même temps que le Ministre de la Justice afin de pouvoir donner suite immédiatement à ces demandes. Le bureau compétent au sein du Ministère de la Justice reste pour autant l autorité centrale compétente pour recevoir les demandes de la Cour. Une autre option serait de maintenir le mécanisme prévu en prévoyant que le Ministère de la Justice transmet les demandes au Procureur Général près la Cour d Appel de Dakar dans les 48 heures (ou 5

dans un autre délai jugé approprié) sauf en cas d urgence. En ce qui concerne le respect de la confidentialité des demandes d entraide, il semble que le mot «sauf» ait été omis, il a donc été rajouté. La formulation de cet article pourrait alors être la suivante : «Art. 3 1. Les demandes d entraide émanant de la Cour pénale internationale sont envoyées et reçues par le ministère chargé de la Justice. 2. Les demandes d entraide sont également directement transmises au Procureur Général près la Cour d Appel de Dakar qui est l autorité judiciaire chargée de l exécution de la demande. 3. En cas d urgence, il peut être saisi par des copies certifiés conformes des demandes ou par tout moyen laissant des traces écrites. Les originaux sont transmis dans les formes prévues à l article [A6]. 4. Toutes les mesures doivent être prises afin de respecter le caractère confidentiel des demandes d entraide judiciaire et des pièces justificatives y afférentes sauf dans la mesure où leur divulgation est nécessaire pour donner suite à la demande.» L article A7 devrait intervenir immédiatement après cet article puisqu il touche également directement à la question de l exécution des demandes d entraide. Il serait utile de préciser dans un premier alinéa que le Procureur Général est chargé de l exécution des demandes sur l ensemble du territoire sénégalais. A des fins de clarté, il pourrait également être utile de préciser que la juridiction requérante est la Cour pénale internationale. L article A7 deviendrait ainsi un article 3 et serait composé de deux alinéas : «Art. 4: 1. Les demandes d entraide sont exécutées par le Procureur Général près la Cour d Appel de Dakar sur l ensemble du territoire national. 2. Les autorités judiciaires requises sont tenues de respecter les conditions dont la Cour pénale internationale assortit l exécution des demandes.» Il pourrait être utile d insérer après l article A7 tel que modifié un nouvel article sur le modèle de l article 37 du projet de loi congolais : «Les procès-verbaux établis en exécution de ces demandes sont adressés à la Cour pénale internationale. En cas d urgence, les copies certifiées conformes des procèsverbaux peuvent être adressées directement et par tout moyen à la Cour. Les originaux sont ensuite transmis dans la forme prévue à l alinéa précédent.» DIFFICULTES ET REFUS D EXECUTION DES DEMANDES D ENTRAIDE JUDICIAIRE L article A4 prévoit la tenue de consultations en cas de difficultés dans l exécution des demandes. A des fins de clarté, il serait souhaitable ici aussi de remplacer «autorité judiciaire requérante» par «Cour pénale internationale». 6

«Lorsque l exécution des demandes soulève des difficultés qui l empêchent ou le gênent, le Procureur Général près la Cour d Appel de Dakar consulte la cour pénale internationale sans tarder en vue de régler la question» L article A5 prévoit que «l entraide ne peut être refusée que pour des motifs découlant des dispositions du Statut». Il semblerait utile de préciser quelque peu ces motifs dans les chapitres suivants. En ce qui concerne l arrestation et la remise, il pourrait être précisé qu aucun motif de refus n est opposable à l exécution des demandes de la Cour. En ce qui concerne le chapitre relatif aux procédures de l article 93, l exception relative à la sécurité nationale devrait être strictement retranscrite dans le projet de loi pour éviter tout abus. Dans tous les cas, le terme «découlant» du Statut devrait être ici remplacé par «prévu» par les dispositions du Statut afin de s en tenir rigoureusement au Statut. B. De la coopération avec la Cour pénale internationale (Section 2) POUVOIRS DU PROCUREUR DE LA CPI L article A8 est inédit en matière de mise en œuvre. Les dispositions du Statut prévoient un certain nombre de cas de figure où le Procureur peut exécuter une demande directement sur le territoire de l Etat. Cependant, la disposition de l article A8 diffère sensiblement du Statut sur ce point. L article A8 prévoit en effet que «le Procureur Général de la République peut s opposer à l exécution desdits actes par le Procureur de la CPI si ceux-ci peuvent être exécutés dans les mêmes délais et selon les mêmes modalités». Le Statut, par ailleurs, envisage une telle intervention du Procureur comme tout à fait exceptionnelle et uniquement dans l hypothèse où «cela est nécessaire pour exécuter efficacement une demande à laquelle il peut être donné suite sans recourir à des mesures de contrainte 1». Une telle hypothèse couvre notamment le fait «d entendre ou de faire déposer une personne agissant de son plein gré, y compris hors de la présence des autorités de l Etat requis quand cela est déterminant pour la bonne exécution de la demande, ou lorsqu il s agit d inspecter un site public ou un autre lieu public sans le modifier 2». Les modalités du Statut prévoient des consultations «aussi étendues que possible 3» s il s agit de l Etat où le crime a été commis sur le territoire de cet Etat et que la Cour a déclaré l affaire recevable. Dans les autres cas, des consultations sont également requises ainsi que la prise en compte des «conditions ou préoccupations raisonnables 4» que cet Etat fait valoir. Par conséquent, il apparaît que le Procureur de la CPI ne sera amené à intervenir en vertu de l article 99 que dans des hypothèses où, pour une raison ou pour une autre, l intervention des autorités nationales pour l exécution de la demande se ferait au détriment de cette même demande. Le fait que le Procureur Général puissent procéder à l exécution dans les mêmes délais et modalités ne parait pas pouvoir éliminer d office l intervention du Procureur de la CPI puisqu il pourrait se présenter des hypothèses où le 1 Art. 99(4) chapeau du Statut. 2 Art. 99(4) chapeau du Statut. 3 Art. 99(4)(a) du Statut. 4 Art. 99(4)(b) du Statut. 7

simple fait qu une autorité nationale, même judiciaire, intervienne puisse justifier un refus de déposer d une personne se sentant menacée par l Etat requis. Dans tous les cas, le Statut ne prévoit pas que l Etat requis puisse s opposer à l exécution d une telle demande et conformément au Statut et à l article A5, l entraide ne pourrait pas être refusée sur ces motifs. Seule une disposition exigeant que la Cour consulte le Procureur Général avant de procéder à l exécution directe d une demande d entraide serait conforme au Statut. L article pourrait donc être reformulé comme suit : «Lorsque le Procureur de la Cour pénale internationale veut exécuter des actes prévus à l article 99(4) du Statut sur le territoire national, il en avise immédiatement le Procureur Général près la Cour d Appel de Dakar et mène avec lui des consultations aussi étendues que possible. Le Procureur Général près la Cour d Appel de Dakar peut faire valoir ses préoccupations et proposer au Procureur de la Cour pénale internationale d exécuter lui-même ces actes si ils peuvent être exécutés dans les mêmes délais et selon les mêmes modalités, en réponse à une demande d assistance.» MESURES PROVISOIRES Les alinéas 1 et 2 de l article A9 traitent des mesures provisoires et mettent en place une procédure permettant d ordonner de telles mesures dans les plus brefs délais. Il serait souhaitable d y inscrire le délai dans lequel le Procureur Général près la Cour d Appel de Dakar statue en la matière. Un délai de 24h ou tout au plus de 48h semble s imposer en la matière. On pourrait également envisager de préciser ici que les mesures provisoires couvrent, entre autres, la protection des victimes et témoins. Au-delà des mesures provisoires, il serait par ailleurs utile de prévoir une disposition relative aux mesures de protection applicables aux victimes et témoins. Une référence spécifique à la protection des victimes et témoins pourrait donc être insérée à la suite de ces deux alinéas. A défaut d un système de protection des témoins et victimes au Sénégal, il semble difficile d aller au-delà d une disposition minimale à cet égard mais il est crucial qu une réflexion s engage sur cette question et qu un dispositif soit progressivement mis en place. Cette remarque sera réitérée au titre des procédures de coopération de l article 93. La modification pourrait être la suivante : «( ) peut ordonner des mesures provisoires en vue de maintenir la situation existante, de protéger des intérêts juridiques menacés ou de préserver des éléments de preuve, et en particulier en vue d assurer la protection des victimes et témoins.» SAISINE DIRECTE DE LA CPI PAR LE SENEGAL Les deux derniers alinéas de l article A9 sont relatifs à la possibilité pour le Sénégal de déferrer une affaire à la CPI. Compte tenu de la différence d objet entre les alinéas 1-2 et 3-4 de l article A9, il semblerait plus logique d en faire deux articles distincts : le premier traitant des mesures provisoires et le second de la possibilité de saisir la Cour. En ce qui concerne la formulation de l alinéa 3, il semble que le morceau de phrase «en vue de déterminer si une ou plusieurs personnes identifiées doivent être accusées de ces crimes» nécessite une légère modification car «inculpées» devrait remplacer «accusées». 8

CONTESTATION DE LA COMPETENCE DE LA CPI Les articles A10 et A11 prévoient la possibilité pour le Sénégal de contester la compétence de la Cour pénale internationale dans les hypothèses des articles 18 et 19 du Statut. L article A11 doit faire l objet de précisions dans la mesure où la démonstration à apporter à la Cour pénale internationale va au-delà de la démonstration que «l affaire a fait l objet d une enquête ou d une poursuite au Sénégal ou qu elle a fait l objet d un jugement passé à force de chose jugée». La norme applicable en la matière est celle de l article 17 du Statut et va au-delà la simple conduite d une enquête, poursuite ou du passage d un jugement. Les critères d admissibilité d une affaire sont le manque de volonté ou l incapacité de mener à bien l enquête ou les poursuites au niveau national. La Cour peut notamment conclure au manque de volonté d un Etat Partie dans les hypothèses suivantes : g) «La procédure a été ou est engagée ou la décision de l Etat a été prise dans le dessein de soustraire la personne concernée à sa responsabilité pénale pour les crimes relevant de la compétence de la Cour ( ) h) La procédure a subi un retard injustifié qui, dans les circonstances, dément l intention de traduire en justice la personne concernée ; i) La procédure n a pas été ou n est pas menée de manière indépendante ou impartiale mais d une manière qui, dans les circonstances, dément l intention de traduire en justice la personne concernée 5». Il est par conséquent possible d envisager qu une affaire soit recevable même si l Etat Partie a démontré que «l affaire a fait l objet d une enquête ou d une poursuite au Sénégal ou qu elle a fait l objet d un jugement passé à force de chose jugée». Il est donc essentiel de reprendre les critères du Statut en la matière et de prévoir qu il doit être démontré que «le Sénégal a la volonté ou la capacité de mener la procédure à bien conformément aux exigences l article 17 du Statut». Il semble aussi souhaitable d envisager de réunir ces deux procédures de revendication/contestation de compétence en un seul article et de préciser dans ce même article que lorsque la compétence de la Cour pénale internationale est contestée, l exécution d une demande de coopération peut être ajournée jusqu à ce que la Cour statue conformément à l article 95 du Statut 6. Les articles A10 et A11 pourraient donc être réunis et modifiés comme suit : «Lorsque la compétence de la Cour est mise en œuvre conformément à l article 13 du Statut, le Procureur Général près la Cour d Appel de Dakar, peut faire valoir la compétence des juridictions sénégalaises en application de l article 18 du Statut ou, le cas échéant, contester la compétence de la Cour en application de l article 19 du Statut. 5 Art. 17(2) du Statut. 6 Voire notamment l article 41 du projet de loi congolais. 9

Lorsque la compétence de la Cour pénale internationale est contestée conformément aux articles 17 et 19 du Statut de la Cour pénale internationale, cette contestation est présentée, autant que possible avant l ouverture ou à l ouverture du procès devant la Cour ou, l autorisation de la Cour requise, à une phase ultérieure du procès. Elle contient la démonstration que le Sénégal a la volonté ou la capacité de mener la procédure à bien conformément aux exigences l article 17 du Statut. Le Procureur Général prés la Cour d Appel de Dakar communique à la Cour pénale internationale tous les renseignements sur le déroulement de la procédure. Il peut demander que ces renseignements soient tenus confidentiels. Le Procureur général de la République peut ajourner l exécution des demandes d entraide de la Cour pénale internationale jusqu à ce que celle-ci ait statué conformément à l article 95 du Statut.» SURSIS A EXECUTION En plus du sursis à exécution prévu par l article 95, il existe une possibilité de surseoir à l exécution des demandes lorsqu une enquête ou des poursuites sont engagées et que l exécution immédiate de la demande aura pour conséquence de nuire au bon déroulement de l enquête ou des poursuites en cours dans une affaires différente de celle à laquelle se rapporte la demande. L article 94 régit ce sursis et il semblerait utile qu une disposition reflète le contenu de cet article dans le projet. Cette disposition pourrait être rédigée comme suit : «Si l exécution immédiate d une demande peut nuire au bon déroulement de l enquête ou des poursuites en cours dans une affaire différente de celle à laquelle se rapporte la demande, le Sénégal peut surseoir à l exécution de celle-ci pendant un temps fixé d un commun accord avec la Cour. Avant de décider de surseoir à l exécution de la demande, le Sénégal examine si l assistance peut être fournie immédiatement sous certaines conditions.» EXECUTIONS DES PEINES ET AUTRES MESURES D EXECUTION Les articles A12 et A13 touchent à la question de l exécution des peines et autres ordonnances de la Cour pénale internationale et devraient être insérés dans un chapitre spécifique à l exécution des peines et autres mesures d exécution. Un chapitre du Statut de Rome est dédié à cette forme de coopération qui ne figure pas au titre du Chapitre IX et il apparaît souhaitable de suivre ici la même logique que le Statut. Un chapitre 4 régissant cette question devrait donc être inséré au projet de loi après les chapitres régissant la coopération en vertu du chapitre IX. En ce qui concerne le contenu de ces deux articles, il faut noter qu ils ne traitent pas de l exécution des peines d emprisonnement et ne régissent que la question de l exécution des peines d amende et des mesures de confiscation et de réparation. Les dispositions relatives à l exécution des peines d emprisonnement doivent donc être insérées au projet de loi. 10

Exécution des peines d emprisonnement : En l absence de toute disposition en la matière, il apparaît nécessaire d insérer des dispositions régissant cette question. En s inspirant fortement du projet de loi congolais, on peut envisager que les dispositions suivantes soient insérées dans le code de procédure pénale : «Article I: Lorsque, en application de l article 103 du Statut de la Cour pénale internationale, la République du Sénégal accepte de recevoir une personne condamnée par la Cour pénale internationale sur son territoire afin que celle-ci y purge sa peine d emprisonnement, la condamnation prononcée est directement exécutoire dès le transfert de cette personne, pour la partie de la peine restant à subir. L exécution de la peine d emprisonnement est soumise au contrôle de la Cour et les conditions de détention doivent être conformes aux règles conventionnelles largement acceptées en matière de traitement des détenus conformément à l article 106 du Statut. Elles ne sont en aucun cas être ni plus ni moins favorables que celles que le Sénégal réserve aux détenus condamnés pour des infractions similaires. Les communications entre le condamné et la Cour sont libres et confidentielles et les dispositions habituellement applicables en la matière ne s appliquent pas aux personnes condamnées par la CPI. Article II : Dès son arrivée sur le territoire de la République, la personne transférée est présentée au Procureur général près la Cour d Appel de Dakar qui procède à la vérification de son identité et en dresse procès-verbal. Au vu des pièces constatant l accord de la République du Sénégal et de la Cour pénale internationale concernant le transfert de l intéressé, le Procureur général près la Cour d Appel de Dakar ordonne l incarcération immédiate de la personne condamnée. Article III : La personne condamnée peut déposer auprès du Procureur général près de la Cour d Appel de Dakar une demande de libération conditionnelle. La demande est communiquée à la Cour pénale internationale dans les meilleurs délais, avec tous les documents pertinents. La Cour pénale internationale décide si la personne condamnée peut ou non bénéficier de la mesure sollicitée». Des dispositions supplémentaires pourraient également être prévues pour régir le transfèrement du condamné une fois sa peine accomplie, ainsi que les limites en matière de poursuites ou condamnation pour d autres infractions de la personne condamnée par la CPI (articles 107 et 108 du Statut de Rome). «1. Conformément à l article 107 du Statut de Rome, une fois sa peine purgée, une personne qui n est pas un ressortissant sénégalais peut être transférée dans un autre 11

Etat qui accepte, ou est tenu d accepter, de l accueillir, à moins que le Sénégal n autorise cette personne à demeurer sur son territoire. 2. Cependant, conformément à l article 108 du Statut, le condamné détenu au Sénégal ne peut être poursuivi, condamné ou extradé vers un Etat tiers pour un comportement antérieur à son transfèrement au Sénégal, à moins que la Cour pénale internationale n ait approuvé ces poursuites, cette condamnation ou cette extradition à la demande du Sénégal. Cet alinéa cesse de s appliquer si le condamné demeure volontairement plus de 30 jours sur le territoire sénégalais après avoir accompli la totalité de la peine prononcée par la Cour, ou s il retourne sur le territoire sénégalais après l avoir quitté.» Les recommandations de la Conférence de Dakar recommandaient, en outre, que soient inclus dans l énumération des articles 112 et 113 du décret portant organisation et régime des établissements pénitentiaires au Sénégal, les membres de la CPI ainsi que des personnes mandatées par elle. Exécution des mesures d amendes, de confiscation et de réparation : Il ne semble pas nécessaire de prévoir deux articles distincts dans la mesure où les articles A12 et A13 traitent de la même procédure. Le maintien de deux articles crée une certaine confusion en laissant à penser que chaque article régit l exécution de mesures différentes. De plus, ces dispositions ne prennent aucunement en compte l existence d un fonds pour les victimes tel que prévu par l article 79 du Statut. Une référence au fonds devrait être insérée à la fin de l article A13. Cependant, cet alinéa devait être élargi au-delà des «biens ou de la vente des biens mobiliers» et couvrir également le produit des amendes (et des biens). De plus, il semblerait utile de prévoir un alinéa régissant toute contestation potentielle en la matière. Un alinéa 3 pourrait être inséré dans l article A13 et l alinéa 2 pourrait être modifié comme suit : «Le produit des amendes et des biens, ou le produit de leur vente est transféré à la Cour pénale internationale ou au fonds pour les victimes prévu par l article 79 du Statut de la Cour pénale internationale par le Procureur général près la Cour d Appel de Dakar. Ils peuvent également être attribués aux victimes, si la Cour en a décidé ainsi et a procédé à leur désignation. 7 Toute contestation relative à l exécution des peines d amende et de confiscation, ou aux réparations, est renvoyée à la Cour qui lui donne les suites utiles.» Enfin, en ce qui concerne l exécution des peines d amende et des mesures de réparation, non pas de la CPI, mais des juridictions nationales, dans le cadre de décisions relatives aux crimes du Statut, il pourrait être envisagé de créer un Fonds national pour les 7 Cette formulation s inspire fortement de l article 57 du projet de loi congolais. 12

victimes afin de garantir que celles-ci puissent être indemnisées à l issue de procédures nationales. La mise en place d un tel mécanisme permettrait également au Fonds pour les Victimes de la CPI de faire des transferts directement au Fonds national si une indemnisation est octroyée de manière collective ou même individuelle à des victimes sénégalaises, que ce soit à l issue d une procédure devant la CPI ou d une procédure d indemnisation devant le Fonds de la CPI sur la base de procédures nationales 8. Une disposition pourrait être formulée à cet effet dans les termes suivants : (1) Est institué le Fonds pour les victimes de génocide, crimes contre l humanité et crimes de guerre où sont versés: a) les sommes recueillies par suite de l exécution des ordonnances de la Cour pénale internationale au Sénégal à des fins de réparation ou de confiscation ou des ordonnances de cette cour qui imposent une amende; b) Les sommes recueillies au titre de l exécution de mesures d amende ou de confiscation prononcées à la suite de poursuites engagées devant les juridictions sénégalaises relativement aux infractions de génocide, crimes contre l humanité ou crimes de guerre, ou d atteintes à l administration de la justice de la Cour pénale internationale. c) Les sommes reçues autrement à titre de dons au Fonds. 2) Le Procureur général près la Cour d Appel de Dakar peut verser ces sommes à la Cour pénale internationale, au fonds institué en vertu de l article 79 du Statut de Rome, aux victimes d infractions visées à la présente loi ou relevant de la compétence e la Cour pénale internationale et à leurs familles, ou en disposer autrement. C. De l arrestation et la remise (Chapitre A ) Le Chapitre A relatif à l arrestation et la remise devient ici un chapitre 2. Il semble utile que l article premier de ce chapitre pose le principe général de la coopération en matière d arrestation et de remise de personnes à la Cour conformément à l article 89 du Statut de Rome. Il apparaît souhaitable de préciser dans ce même article que les demandes sont transmises au Procureur général près la Cour d Appel de Dakar qui les exécute 8 A ce titre, voire l article 30 de la loi canadienne qui crée un tel fonds dans les termes suivants: (1) Est institué le Fonds pour les crimes contre l humanité où sont verses: a) les sommes recueillies par suite de l exécution des ordonnances de la Cour pénale internationale au Canada à des fins de réparation ou de confiscation ou des ordonnances de cette cour qui imposent une amende; b) Les sommes recueillies au titre de l article 31 [versement du produit net de l aliénation des biens vises par certains alinéas de la loi sur l administration des biens saisis pour les infractions visées par la présente loi et des amendes verses ou perçues à la suite de poursuites engages relativement à une infraction visée à la présente loi] c) Les sommes reçues autrement à titre de dons au Fonds. 2) Le procureur général du Canada peut verser ces sommes ( ) à la Cour pénale internationale, au fonds institué en vertu de l article 79 du Statut de Rome, aux victimes d infractions visées à la présente loi ou relevant de la compétence e la Cour pénale internationale et à leurs familles, ou en disposer autrement. 13

conformément à la procédure établie par les dispositions du présent chapitre. L article suivant pourrait donc être inséré : Article I : «1. Le Sénégal exécute les demandes d arrestation et de remise émanant de la Cour pénale internationale conformément à l article 89 du Statut de Rome et aux dispositions du présent code applicables en la matière. 2. Les demandes d arrestation et de remise sont transmises au Procureur Général près la Cour d Appel de Dakar aux fins de leur exécution dans un moindre délai.» L article A 14 est inchangé à défaut des corrections suivantes portant sur la forme : Article II [article A 14] : «Une demande d arrestation et de remise est présentée accompagnée des pièces justificatives ci-après : 1. Si la demande concerne l arrestation et la remise d une personne faisant l objet d un mandat d arrêt délivré par la Chambre préliminaire de la Cour pénale internationale en vertu de l article 8 du Statut de Rome: - le signalement de la personne recherchée - l identification de la personne et des renseignements sur le lieu ou elle se trouve probablement sont suffisants à cet égard. - l original ou une copie certifiée conforme du mandat d arrêt en cas d urgence. 2. Si la demande concerne l arrestation et la remise d une personne déjà reconnue coupable, elle contient, ou est accompagnée, des pièces suivantes : - l original ou une copie certifiée conforme du mandat d arrêt - une copie certifiée conforme de la décision judiciaire - des indications sur le temps de détention déjà accompli et le temps restant à accomplir.» Les dispositions suivantes traitent à la fois de l arrestation et de la remise sans distinction ou ordre chronologique évident. Il semblerait souhaitable, pour faciliter le travail du juge chargé d appliquer ces dispositions de les organiser dans l ordre chronologique de la procédure pour autant que cela est possible. A cet égard, il conviendrait donc de traiter dans un premier temps de l arrestation puis d envisager la remise. PROCEDURE D ARRESTATION La procédure d arrestation est à peine abordée dans le projet. Les articles A16 à A 20 devraient être complétés. En effet, le projet ne règle pas la question de la valeur exécutoire des mandats d arrêts délivrés par la Cour pénale internationale et ne prévoit pas véritablement de procédure d exécution. Les dispositions précitées touchent essentiellement à la procédure de mise 14

en liberté provisoire. De plus, l exécution des citations à comparaître et des demandes d arrestation provisoire de la Cour pénale internationale ne sont pas prévuea. Il semble également utile de renvoyer aux dispositions applicables en ce qui concerne les droits de la personne arrêtée. Le renvoi au nouvel alinéa de l article 55 (introduit par l article 2 du projet) permet de faire le lien entre ces deux dispositions. La mise en place d un délai de 48 heures entre l arrestation et l audience accordée à la personne arrêtée permet de respecter les exigences du Statut en la matière. Il convient donc de compléter cette section par des dispositions qui pourraient être rédigées selon le modèle suivant 9 : Article III : «Lorsque la Cour pénale internationale présente un mandat d arrêt ou une demande d arrestation provisoire au Sénégal, le Procureur Général près la Cour d Appel de Dakar délivre un mandat d arrêt, engage les recherches, ordonne l arrestation et l incarcération de la personne. Le mandat d arrêt est exécuté conformément à la procédure prévue par le code de procédure pénale. Le mandat d arrêt délivré par le Procureur Général près la Cour d Appel de Dakar contient : - le signalement de la personne poursuivie et les faits qui lui sont reprochés ; - la mention que la remise est demandée par la Cour pénale internationale ; - l indication que la personne poursuivie bénéficie du droit de recours et du droit à l assistance d un avocat.» - Article IV : «Lorsque la Cour pénale internationale a de bonnes raisons de croire que le suspect qu elle recherche se présentera de lui-même à la Cour et délivre une citation à comparaître au lieu d un mandat d arrêt conformément à l article 58(7) du Statut de Rome, le Procureur Général près la Cour d Appel de Dakar l exécute et peut l assortir de conditions restrictives de liberté.» Article V : «1. Lorsque, en cas d urgence, la Cour pénale internationale demande l arrestation provisoire d un suspect alors que les pièces justificatives requises pour procéder à l arrestation ne sont pas encore réunies conformément à l article 92 du Statut, le Procureur Général près la Cour d Appel de Dakar l exécute. 2. La demande d arrestation provisoire peut être faite par tout moyen laissant une trace écrite et contient les mêmes pièces qu une demande d arrestation à l exception du mandat d arrêt auquel est substitué : - une déclaration affirmant l existence d un mandat d arrêt ou d un jugement établissant la culpabilité de la personne recherchée ; et - une déclaration indiquant qu une demande de remise. 9 Cette formulation est reprise de l article 44 du projet de loi congolais. 15

[ancien article A20] 3. Si dans les soixante jours qui suivent l arrestation provisoire, la Chambre d Accusation ne reçoit pas les pièces justificatives, elle ordonne d office ou sur requête l élargissement de la personne concernée.» Article VI : La personne arrêtée bénéficie, dès la première heure de son arrestation, des droits prévus par les articles 55 [nouvel] alinéa 6 et 101 à 109 du présent code. Article VII [article A16] : «La Chambre d Accusation de la Cour d Appel de Dakar vérifie dans les 48 heures de l arrestation que le mandat vise la personne arrêtée, que celle-ci a été arrêtée selon la procédure régulière et que ses droits ont été respectés, faute de quoi la personne arrêtée est remise en liberté.» Article VIII [articles A11, 18 et 19] : «1. Le Procureur Général prés la Cour d Appel de Dakar saisi par le Président de la Chambre d Accusation avise le Chambre préliminaire de la Cour pénale internationale dès qu une demande de mise en liberté provisoire a été présentée. La Chambre d Accusation doit statuer dans un délai maximum de 8 jours. 2. Avant de statuer sur la demande de mise en liberté provisoire, la Chambre d Accusation est tenue de prendre pleinement en considération les recommandations de la Chambre préliminaire conformément à l article 59 du Statut de Rome. Lorsqu elle se prononce, la Chambre d Accusation examine si, eu égard à la gravité des crimes allégués, l urgence et des circonstances exceptionnelles justifient la mise en liberté provisoire. Dans ce cas elle fixe les conditions qui permettent de s assurer que la personne pourra être remise à la Cour pénale internationale.» PROCEDURE DE REMISE Les dispositions du projet sont problématiques dans la mesure où elles ne créent pas de procédure de remise mais rendent applicable certaines dispositions de la loi sur l extradition. Bien que seuls certains articles relatifs à la procédure d extradition soit rendues applicables, rien n indique explicitement que le reste de la loi, et en particulier le titre premier sur les conditions de l extradition, ne soient pas applicables en la matière. Certaines dispositions de la loi sur l extradition ne sont pas compatibles avec les exigences du Statut de Rome et rendent la procédure d extradition particulièrement inappropriée pour la remise de suspects à la CPI. La procédure d extradition sénégalaise est incompatible avec les exigences prévues par le Statut de Rome en ce qui concerne les points suivants 10. Interdiction d extrader les nationaux : En vertu des articles 3 et 5 de la loi sur l extradition, l extradition n est pas accordée lorsque la demande vise un ressortissant sénégalais. Or, la remise est applicable ressortissants sénégalais : la Cour pénale internationale pourra être amenée à demander au Sénégal de lui remettre un de ces ressortissants. Le recours à la procédure d extradition est, à cet égard, contraire au Statut de Rome. 10 Pour plus de détails, voire la section de l analyse de la compatibilité du droit sénégalais au Statut de Rome sur ce point, p. 40 & s. 16

Double incrimination : La loi sur l extradition exige que le fait pour lequel l extradition est demandée soit puni d une peine criminelle ou correctionnelle par la loi sénégalaise 11. De plus, le gouvernement sénégalais ne peut livrer un individu, sur demande d un gouvernement étranger, que si cet individu est l objet d une poursuite intentée au nom de l Etat requérant ou d une condamnation exécutoire prononcée par ses tribunaux 12. Le Statut de Rome ne prévoit pas que l exigence d une double incrimination puisse faire obstacle à la remise d une personne recherchée par la Cour. Il semble donc que cette exigence n ait pas, aux termes du Statut, sa place dans une procédure de remise à la Cour. Discrétion en matière de refus d extrader et motifs de refus inadmissibles en vertu du Statut: En vertu de la loi sur l extradition, le Sénégal dispose d un pouvoir largement discrétionnaire lorsqu il décide d extrader, ou non, une personne vers un Etat requérant. De nombreux motifs de refus d extrader sont prévus à l article 5 de la loi et la seule véritable obligation de l Etat requis est de motiver la décision de refus. Intervention du Ministre des Affaires Etrangères et juridiction compétente : L intervention du Ministre des Affaires étrangères (Art. 10 de la loi) apparaît inutile dans la mesure où c est le Ministre de la Justice qui est l autorité centrale en matière de coopération avec la Cour. D autre part, la loi de 1971 attribue compétence à la Cour d appel du ressort matière d extradition alors que le projet de loi confère compétence à la Chambre d accusation de la Cour d appel de Dakar comme juridiction compétente en matière d arrestation et de remise demandées par la CPI. Pour ces raisons, il est nécessaire de laisser tomber la référence à la loi de 1971 sur l extradition et de prévoir une procédure particulière propre à la remise. On pourrait à cet égard s inspirer du projet de loi congolais. De plus, aucune disposition du projet ne semble traiter de la question des demandes concurrentes (demande de remise émanant de la Cour et demande d extradition émanant d un autre Etat) : une disposition allant dans le sens de l article 90 du Statut devrait être insérée. Les dispositions existantes pourraient donc être réorganisées et modifiées comme suit : Article IX [article A21]: «Le Procureur Général prés la Cour d Appel de Dakar procède à la remise de la personne poursuivie ainsi qu à la transmission des objets et valeurs saisis. 11 Art. 4 de la loi sur l extradition: Les faits qui peuvent donner lieu à l extradition, qu il s agisse de la demander ou de l accorder, sont les suivantes: 1) Tous les faits punis des peines criminelles par la loi de l Etat requérant; 2) Les faits punis de peines correctionnelles, quand le maximum de la peine encourue, aux termes de cette loi, est de deux ans ou au dessus, ou s il s agit d un condamné, quand la peine prononcée par la juridiction de l Etat requérant est égale ou supérieure à deux mois d emprisonnement. En aucun cas l extradition n est accordée par le gouvernement sénégalais si le fait n est pas puni par la loi sénégalaise d une peine criminelle ou correctionnelle. 12 Art. 3 de la loi. 17

Si la personne poursuivie conteste la compétence de la Cour pénale internationale, la remise est ajournée jusqu à ce que la juridiction internationale ait rendu sa décision. Le Procureur Général prés la Cour d Appel de Dakar prend les mesures nécessaires en vue de la remise après entente avec la Cour pénale internationale.» Article X: «Si le Sénégal reçoit de la Cour une demande de remise d une personne et reçoit d un autre Etat une demande d extradition de la même personne, l autorité centrale avise la Cour et l Etat requérant et fait application des dispositions de l article 90 du Statut». Article XI: «Le transit sur le territoire national d une personne transférée à la Cour pénale internationale est autorisé par le Ministre chargé de la Justice conformément à l article 89 de statut.» Article XII: «Si lors de son arrestation provisoire, l intéressé consent à être remis à la Cour pénale internationale, il y est procédé avant que la demande de remise et les pièces justificatives soient reçues.» Article XIII : «Toute personne détenue sur le territoire national peut, si elle y convient être transférée temporairement à la Cour pénale internationale aux fins d identification ou d audition ou pour l accomplissement de tout autre acte d instruction.» D. Des autres dispositions relatives à la coopération ne figurant pas dans le projet ou nécessitant des ajustements structurels L absence de dispositions relatives aux privilèges et immunités du personnel de la CPI a d ores et déjà été traité au titre de la section première sur l entraide judiciaire (dispositions générales). Les questions suivantes n ont cependant pas été abordées jusqu ici. 1. Autres formes de coopération (art. 93 du Statut) L article A2 traite des autres formes de coopération au titre de l entraide judiciaire. Il semble cependant plus approprié de reprendre la structure du Statut à ce titre et d insérer les différentes formes d entraide judiciaire de l article 93 après l arrestation et la remise, et dans un chapitre distinct (Chapitre 3 : Autres formes d entraide judiciaire) compte tenu de la spécificité des ces procédures de coopération. En effet, ces procédures sont très largement celles préexistantes en droit interne même si elles sont parfois sujettes à quelques ajustements. De plus, le régime régissant le refus de coopérer est quelque peu différent à leur égard car les dispositions du Statut relatives à la sécurité nationale établissent, de manière restrictive, un motif de refus de coopérer à l égard de ces seules procédures. 18