26 février Marie,

Transcription

1 Commémoration du Centenaire de la Grande Guerre Lettres écrites par Julie, élève de 1L 26 février 1918 Je suis tellement heureux, ce temps maussade ne se finira jamais il me semble, maintenant. Mais je suis heureux, heureux de mes souvenirs des feuilles des arbres s envolant avec les oisillons, heureux de me rappeler ton sourire. Mon amour, mon amour ici rien ne distingue un arbre du bois calciné, rien n est comparable, rien n est reconnaissable. La seule beauté est le sourire des compagnons, ce n est là qu un faible réconfort. Tout est laid, tout est mort, tout sauf les sourires et les rires des souvenirs lointain. Tout tremble, tout respire difficilement, tout devient sourd et aveugle. Les balles brillent, vivaces, elles nous toucheront bien un jour, avec un peu de chance elles ne nous emporteront pas avant que ce ne soit notre heure. Je suis certains d une chose, je ne pourrais oublier de t écrire constamment malgré cette boue, ces blessures et cette fatigue accablante. Ne t inquiète pour rien au monde, nos futures noces auront bientôt lieu mon amour, j espère de tout cœur que tu soi en bonne santé. J aimerais te lire bientôt

2 14 mars 1918, Les fleurs sont grises et sentent les cendres mais les rires fusent souvent à l usine, la bonne humeur reste encore et encore imperturbable. Je ne peux t écrire plus longuement, nous confectionnons après le travail de beaux lainages pour le froid qui accable vos quartiers. Marina se demande s il faut ajouter quelques larmes dans nos ouvrages, mais lorsque toutes sont réunis, nous apprécions ces moments emplit de générosité et de chaleur dans cette période sombre, cher amour, oh si nous pouvions nous retrouver dans un contexte plus heureux, moins tendu. J ai une merveilleuse nouvelle a t annoncer, une chose si belle... Je dois encore fabriquer quelques petites choses pour vous réchauffer lors de confections avant de voir le médecin. Tout va bien, ne t en fait pas. Marie

3 03 Avril 1918 Les positions sont bonnes, la santé, les rires aussi. Nous n avons plus de temps pour nous regarder souffrir, l heure est belle et les cendres se dispersent sous nos yeux, chacun aménage sa vie comme il en décide lorsqu il le peut. Nous voyons enfin le bout d un conflit inutile. Nous sommes en vain montés au front, nous réussissons à atteindre et à battre. Enfin l on se sent partir. Très peu nous ont quitté aujourd hui. La lourdeur disparaît sous nos pas, nous sommes fort et nous seront bientôt de retour. La lecture des lettres se fait silencieuse, belle et harmonieuse, lorsque certains décident de partager leur bonheur, tout le monde éclate se disperse et enfin nous sommes généreux. Le malheur se dissipe sur le visage des «oubliés», les personnes qui en reçoivent plus ou en ont jamais reçu. Chacun partage comme il peut. Des liens se créent, parfois heureux mais lorsque disparaissent nos amis nous désespérons de ne jamais plus les voir. Je ne dois plus trop avoir a m inquiéter pour vous. Dès à présent, nous reviendront et nous serons tous réunis.

4 16 juin 1918 Plusieurs semaines ont passé, dis-moi que tu vas bien, dis-moi qu il va bien, réponds au plus vite. 27 août 1918 Cela fait maintenant quelques mois que je ne reçois plus tes lettres, peut être le petit occupe tes journées, peut être es tu simplement préoccupé de ce qu il est arrivé à Jean-Louis... peut-être finalement devrais-je attendre une réponse avant de te reparler...

5 23 décembre 1918 Louis, Elle est décédée, morte, sans vie. Elle nous a quitté, moi et l'enfant. elle n est plus. Cette guerre, faucheuse de vie l'achever, les docteurs n ont pu sauver la personne m étant le plus cher au monde. Quelle tristesse, quel malheur je ne peux prier que pour cette enfant qui est mien, et pourtant que je ne connais que depuis quelques jours. Je ne peux pas imaginer devoir m occuper de Johanna Isara, ma fille, seule tristesse, amertume se mêlent à la joie de l'avoir dans mes bras, elle ressemble tellement à sa mère, si fine, si gracieuse, ses yeux étincelants, comme des paillettes d étoiles. Ses joues roses et son sourire faisant oublier l horreur. Je ne désire qu une chose, qu elle soit aussi charmante et intelligente que Marie l'était, qu'elle soit forte, battante. Les souvenirs du mariage se puisent dans mon esprit, et je revois la lueur de malice dans les yeux de Marie... La maison est pleine d objets me rappelant ma bien aimée... Peut-être un jour l oublierais-je, cette émotion me parcourant lorsque je revois ma vie avec elle. Les jours agréables sont enfin de retour, nous allons pouvoir reconstruire notre vie, nous allons enfin pouvoir oublier, les oiseaux chantent, les fleurs embaument les maisons et le cœur des vivants, fleurissent sur les tombes comme les sourires sur les visages. La chaleur revient et les couleurs font de même, la course de la vie reprend, la guerre n est plus. Comment vont les enfants? Et ta femme a-t-elle encore la main pour faire des bons plats? Louisa a-t-elle eu le certificat d étude? Comment te sens-tu à présent? La vie reprend-elle des couleurs chez vous? Avec tout mon cœur, je vous envoie cette lettre. Je prierais pour toi qui a été si bon durant cette période, je vous embrasse. Lettres écrites par Julie, 1L