Fiche n 21. «La joie des retrouvailles» 3 Pour vivre la Parole au quotidien. 4 Points de catéchèse



Documents pareils
NOTRE PERE JESUS ME PARLE DE SON PERE. idees-cate

«Si quelqu un veut venir après moi qu il renonce à lui-même, qu il se charge chaque jour de sa croix et qu il me suive» Luc 9 : 23.

CHANT AVEC TOI NOUS IRONS AU DÉSERT (G 229)

Alice s'est fait cambrioler

Le Baptême de notre enfant

Je viens vous préparer à cet évènement : L illumination des consciences

«Ce Qui Sort de la Bouche de l Éternel»

Ne vas pas en enfer!

Dieu était sur moi Une phrase qui revient comme un refrain et qui peut résumer en

C ÉTAIT IL Y A TRÈS LONGTEMPS QUAND LE COCHON D INDE N AVAIT PAS ENCORE SES POILS.

COMMENT DÉCOUVRIR SA VOCATION

Emmanuel, Dieu avec nous

Mais revenons à ces deux textes du sermon sur la montagne dans l évangile de Matthieu.

La Neuvaine de l'assomption

22 Nous Reconnaissons la force du pardon

Vive le jour de Pâques

Du 6 au 14 août Neuvaine de préparation à la fête de l Assomption

Que fait l Église pour le monde?

programme connect Mars 2015 ICF-Léman

Conseil Diocésain de Solidarité et de la Diaconie. 27 juin «Partager l essentiel» Le partage est un élément vital.

6Des lunettes pour ceux qui en ont besoin

Paroisses réformées de la Prévôté - Tramelan. Album de baptême

ISBN

1. Le Psaume 23 est un psaume bien connu, souvent mémorisé, c'est le psaume du Berger: dire

SOYETTE, LE PETIT VER A SOIE

Mademoiselle J affabule et les chasseurs de rêves Ou l aventure intergalactique d un train de banlieue à l heure de pointe

Christina Quelqu'un m'attendait quelque part...

Partager? En parler avec les enfants de 6-11 ans

Quelques exemples de croyants célibataires

Les rapports du chrétien avec les autres

Enseignement des habiletés sociales au secondaire

Donner, léguer... pour la vie et les projets de l Église Réformée à Lyon. Parlons-en!

AVERTISSEMENT. Ce texte a été téléchargé depuis le site. Ce texte est protégé par les droits d auteur.

On faitle rnarche. avec Papa

LE CEP ET LES SARMENTS 15:1-27 LEÇON

Tétanisés par la spirale de la violence? Non!

LA LETTRE D UN COACH

AUJOURD HUI SI VOUS ENTENDEZ SA VOIX. «7 Aujourd hui, si vous entendez ma voix, n endurcissez pas vos cœurs.» (Hébreux 4, 7)

La petite poule qui voulait voir la mer

Poèmes. Même si tu perds, persévère. Par Maude-Lanui Baillargeon 2 e secondaire. Même si tu perds Tu n es pas un perdant pour autant Persévère

Quelqu un qui t attend

de ta famille et de la maison de ton père un peuple le nom une bénédiction! ceux qui te béniront ; mais qui te réprouvera,

Visita ad limina Apostolorum dei Presuli della Conferenza Episcopale del Benin

Auxiliaire avoir au présent + participe passé

MARC SELON. La prédication de Jean-Baptiste (Voir aussi Matt ; Luc ; Jean )

Cela lui fut imputé à justice. Lecture de l épître de Saint-Paul aux Romains, chapitre 3, versets 27 à 31 et chapitre 4 versets 1 à 25 :

La petite poule qui voulait voir la mer

Le conditionnel présent

French 2 Quiz lecons 17, 18, 19 Mme. Perrichon

Celui qui me guérit Copyright 1995, Geneviève Lauzon-Falleur (My Healer) Ps. 30. Car Tu es Celui qui me guérit

RITUEL POUR ATTIRER L ATTENTION DE QUELQU UN

Assises de l Enseignement Catholique Intervention de Paul MALARTRE Paris Cité des Sciences de La Villette 8 juin 2007

L enfant sensible. Un enfant trop sensible vit des sentiments d impuissance et. d échec. La pire attitude que son parent peut adopter avec lui est

EOI ARUCAS DEPARTAMENTO DE FRANCÉS DOSSIER PASSÉ RÉCENT FUTUR PROCHE PRÉSENT PROGRESSIF

1. La famille d accueil de Nadja est composée de combien de personnes? 2. Un membre de la famille de Mme Millet n est pas Français. Qui est-ce?

TOUS MALADES! (Texte de M.-A. Ard) - Le Médecin :

Comment avoir une banque sans banque. Tome 2

Célébrons le baptême de votre enfant. 30, rue François Perrin

Le carnaval des oiseaux

Learning by Ear Le savoir au quotidien Les SMS, comment ça marche?

Louise, elle est folle

C86. Comment être réellement libre, libéré de la chair, du monde et des démons

UR présente : Episode 3: Je ne sais pas si je t ai écrit 35 ou 55 lettres

O I L V I E V R AIME SA FM

Pourquoi Jésus vint-il sur la terre?

Voici donc quelques arguments qui incitent à penser que Jésus était marié :

«Toi et moi, on est différent!» Estime de soi au préscolaire

Séance 1 - Classe de 1 ère. Cours - Application Introduction à la typologie et à l analyse des figures de style

Nouvelle écrit par Colette lefebvre- Bernalleau 1

Églantine et les Ouinedoziens

Comment faire plus d'argent cet été!

C63. Tout ce que Jésus a accompli sur la Croix pour nous

LA MAISON DE LA FOI au moment voulu, envers tous, et surtout habitants de la foi la moitié toute lassons surtout envers les frères en la foi.

LE CHEMIN DE CROIX DE NOTRE DAME DE ROCHEFORT

scaricato da

CAP TERTIAIRE/INDUSTRIEL

Rebecca Léo Thomas Gaspard

Stromae Alors on danse

Paroisse St-Pierre de Plaisir. 4 rue Calmette, PLAISIR tél. : BAPTÊME DE ... LE...

Que chaque instant de cette journée contribue à faire régner la joie dans ton coeur

Discours direct indirect au présent

Jésus est au centre de l Église (Matt )

13 Quelle est l église du Nouveau Testament?

Trois personnes mangent dans un restaurant. Le serveur

PRÉSCOLAIRE. ANDRÉE POULIN (devant la classe) : Je me présente, mais je pense que vous connaissez déjà mon nom, hein? Je m'appelle Andrée.

L OISEAU. Quand il eut pris l oiseau, Il lui coupa les ailes, L oiseau vola encore plus haut.

La rue. > La feuille de l élève disponible à la fin de ce document

L Eglise dans ses dimensions religieuse, économique, sociale et intellectuelle

Récit des Pèlerins d Emmaüs Luc 24, 13 35

Lisez ATTENTIVEMENT ce qui suit, votre avenir financier en dépend grandement...

Je veux apprendre! Chansons pour les Droits de l enfant. Texte de la comédie musicale. Fabien Bouvier & les petits Serruriers Magiques

Parent avant tout Parent malgré tout. Comment aider votre enfant si vous avez un problème d alcool dans votre famille.

En la fête de l Assomption de la Vierge Marie, Homélie pour une profession perpétuelle 1

«J aime la musique de la pluie qui goutte sur mon parapluie rouge.

CONSIGNE : Lis attentivement les textes suivants. Réponds aux questions en relisant chaque fois les textes.

Les 144,000 Les prémices de Jésus-Christ

23. Le discours rapporté au passé

Indications pédagogiques C3-15

LEARNING BY EAR. «Les personnes handicapées en Afrique» EPISODE 4 : «Handicapé mais pas incapable»

Transcription:

La figure du fils aîné, évocation du mystère d Israël Les Pères de l Eglise ont rapporté le thème des deux frères aux relations entre Juifs et païens. Dans le frère resté à la maison, ils ont vu le peuple d Israël, qui disait à juste titre : «Il y a tant d années que je suis à ton service sans jamais avoir transgressé un seul de tes commandements.» C est dans la fidélité à la Torah que se révèle la fidélité d Israël, ainsi que son image de Dieu. L interprétation qui renvoie aux Juifs n est pas infondée tant qu on la prend telle qu elle est apparue dans le texte : une délicate tentative de Dieu de persuader Israël, tentative qui se trouve totalement dans les mains de Dieu. Remarquons bien que, dans la parabole, le père ne remet pas en question la fidélité du fils aîné, et aussi qu il le confirme de manière expresse dans son statut de fils. Mais cette même interprétation devient erronée dès que l on en fait une condamnation des Juifs, dont il n est nullement question dans le texte. Benoît XVI, Jésus de Nazareth, tome 1, Flammarion, p 235 3 Pour vivre la Parole au quotidien 1. Quelle est en nous la part du fils aîné, du fils cadet? 2. Quand nous sentons-nous cherchés, rejoints par Dieu? 4 Points de catéchèse Péché Le péché est un refus de l amour de Dieu, un refus de la relation à Dieu. C est l échec de la liberté puisque la pleine réalisation de la liberté humaine est de choisir Dieu, qui seul peut la combler. La puissance de la résurrection du Christ donne à chacun une possibilité effective de sortir du péché pour qu il recouvre la liberté de dire non au mal ainsi que la logique du partage et de l amour. Péché originel Le récit de la chute (Gn 3) utilise un langage imagé, mais affirme un événement primordial qui a eu lieu au commencement de l histoire de l homme. La Révélation nous donne la certitude de foi que toute l histoire humaine est marquée par la faute originelle librement commise par nos premiers parents. L homme, tenté par le diable, a laissé mourir dans son cœur la confiance envers son Créateur et, en abusant de sa liberté, a désobéi au commandement de Dieu. Dans ce péché, l homme s est préféré lui-même à Dieu. Le baptême, en donnant la vie de la grâce du Christ, efface le péché originel et retourne l homme vers Dieu, mais les conséquences pour la nature, affaiblie et inclinée au mal, persistent en l homme et l appellent au combat spirituel. Catéchisme de l Eglise Catholique (390, 397, 405) Fiche n 21 «La joie des retrouvailles» Lc 15, 1-31 [1]Les publicains et les pécheurs venaient tous [2] à Jésus pour l'écouter. Les pharisiens et les scribes récriminaient contre lui : «Cet [3] homme fait bon accueil aux pécheurs, et il mange avec eux!» Alors Jésus leur dit cette parabole : [4] «Si l'un de vous a cent brebis et en perd une, ne laisse-t-il pas les quatre-vingt-dixneuf autres dans le désert pour aller chercher celle qui est perdue, jusqu'à ce qu'il la [5] [6] retrouve? Quand il l'a retrouvée, tout joyeux, il la prend sur ses épaules, et, de retour chez lui, il réunit ses amis et ses voisins ; il leur dit : 'Réjouissez-vous avec moi, [7] car j'ai retrouvé ma brebis, celle qui était perdue!' Je vous le dis : C'est ainsi qu'il y aura de la joie dans le ciel pour un seul pécheur qui se convertit, plus que pour quatrevingt-dix-neuf justes qui n'ont pas besoin de conversion. [8] Ou encore, si une femme a dix pièces d'argent et en perd une, ne va-t-elle pas allumer une lampe, balayer la maison, et chercher avec soin jusqu'à ce qu'elle la retrouve? [9] Quand elle l'a retrouvée, elle réunit ses amies et ses voisines et leur dit : 'Réjouissez[10] vous avec moi, car j'ai retrouvé la pièce d'argent que j'avais perdue!' De même, je vous le dis : Il y a de la joie chez les anges de Dieu pour un seul pécheur qui se convertit.» [11] [12] Jésus dit encore : «Un homme avait deux fils. Le plus jeune dit à son père : 'Père, donne-moi la part d'héritage qui me revient.' Et le père fit le partage de ses biens. [13] Peu de jours après, le plus jeune rassembla tout ce qu'il avait, et partit pour un pays [14] lointain où il gaspilla sa fortune en menant une vie de désordre. Quand il eut tout dépensé, une grande famine survint dans cette région, et il commença à se trouver [15] dans la misère. Il alla s'embaucher chez un homme du pays qui l'envoya dans ses [16] champs garder les porcs. Il aurait bien voulu se remplir le ventre avec les gousses que [17] mangeaient les porcs, mais personne ne lui donnait rien. Alors il réfléchit : 'Tant [18] d'ouvriers chez mon père ont du pain en abondance, et moi, ici, je meurs de faim! Je vais retourner chez mon père, et je lui dirai : Père, j'ai péché contre le ciel et contre toi. [19] [20] Je ne mérite plus d'être appelé ton fils. Prends-moi comme l'un de tes ouvriers.' Il partit donc pour aller chez son père. Comme il était encore loin, son père l'aperçut et [21] fut saisi de pitié ; il courut se jeter à son cou et le couvrit de baisers. Le fils lui dit : 'Père, j'ai péché contre le ciel et contre toi. Je ne mérite plus d'être appelé ton fils...' [22] Mais le père dit à ses domestiques : 'Vite, apportez le plus beau vêtement pour [23] l'habiller. Mettez-lui une bague au doigt et des sandales aux pieds. Allez chercher le [24] veau gras, tuez-le ; mangeons et festoyons. Car mon fils que voilà était mort, et il est revenu à la vie ; il était perdu, et il est retrouvé.' Et ils commencèrent la fête.

[25] Le fils aîné était aux champs. A son retour, quand il fut près de la maison, il entendit la musique et les danses. [26] Appelant un des domestiques, il demanda ce qui se passait. [27] Celui-ci répondit : 'C'est ton frère qui est de retour. Et ton père a tué le veau gras, parce qu'il a vu revenir son fils en bonne santé.' [28] Alors le fils aîné se mit en colère, et il refusait d'entrer. Son père, qui était sorti, le suppliait. [29] Mais il répliqua : 'Il y a tant d'années que je suis à ton service sans avoir jamais désobéi à tes ordres, et jamais tu ne m'as donné un chevreau pour festoyer avec mes amis. [30] Mais, quand ton fils que voilà est arrivé après avoir dépensé ton bien avec des filles, tu as fait tuer pour lui le veau gras!' [31] Le père répondit : 'Toi, mon enfant, tu es toujours avec moi, et tout ce qui est à moi est à toi. [32] Il fallait bien festoyer et se réjouir ; car ton frère que voilà était mort, et il est revenu à la vie ; il était perdu, et il est retrouvé!» 1 Pour goûter la Parole Au point de départ du chapitre 15 (v. 1-3), un nouveau repas offre aux pharisiens et aux scribes l occasion de crier au scandale devant l attitude de Jésus à l égard des pécheurs, attitude qui brise les barrières traditionnelles conformes à leur pratique de la Loi. Pour justifier sa propre conduite, révélation du cœur de Dieu lui-même, Jésus commence par deux paraboles construites de façon parallèle (v. 4-10) et qui interpellent la foule, évoquant quelque chose de perdu (le mot revient 5 fois) que l on a retrouvé (6 fois). Ni la brebis ni la pièce d argent n ont mérité quoi que ce soit. C est le maître qui souhaite que rien ne demeure perdu et soit retrouvé Ces paraboles jumelles identifient ce qui est perdu au pécheur et célèbrent l initiative de Dieu qui part à la recherche des pécheurs. Et les paraboles culminent dans la joie des retrouvailles, joie partagée qui veut déborder sur tous. La parabole de l homme qui avait deux fils se présente comme un diptyque mettant d abord en scène le cadet (v. 11-24) qui réclame sa part d héritage du vivant de son père, une façon symbolique de le faire mourir. Il pense que c est loin du père, tout en jouissant de ses biens, qu il pourra s accomplir. La générosité du père est visible d emblée, il donne la liberté et s il ne part pas à la recherche du prodigue, c est pour respecter cette liberté. Mais il veille, au point d attendre sur le pas de la porte l ingrat parti au loin et de l accueillir par une fête, sans s interroger sur les véritables sentiments ayant motivé le retour de son fils. Le père rétablit le fils dans sa dignité (robe et sandales), dans ses droits (anneau) et organise un festin. Jésus met ainsi face à face les deux libertés qui se jouent dans le pardon : l amour du père qui attend inlassablement le pécheur et la recherche imparfaite du pécheur qui va à la rencontre du père. L aîné (v. 25-32) quotidiennement au service de son père, n a pas fait l expérience de tout perdre. Il vit avec le père, mais il ne vit pas en fils. Sa relation au père est une relation sans joie, basée sur le donnant-donnant. Il n a pas compris quelle liberté était la sienne. Le bonheur du frère retrouvé a pour lui un goût amer et il ne prend pas part à la fête. Sa colère, en fin de récit, fait écho aux récriminations des pharisiens au début du chapitre. Cependant, la dernière parole du père quand il vient à la rencontre de son aîné est comme un appel à entrer dans la maison paternelle, à se retourner, à se convertir. 2 Pour aller plus loin La joie de Dieu Joyau le plus précieux de l enseignement de Jésus, ces paroles bouleversantes révèlent comme nulle autre ce qui est au cœur du dessein de Dieu : accueillir dans son royaume des hommes touchés par sa main tendue, accueillir dans son royaume des créatures libres de leur choix. A des hommes fiers de leur pratique religieuse et qui " murmurent ", le Seigneur explique la grâce de Dieu et montre la joie du ciel lorsqu un homme se repend et s engage ainsi dans le chemin de la foi. Jésus justifie son attitude par la joie de Dieu et il laisse entendre que Dieu lui-même cherche les pécheurs à travers la mission qu il lui a confiée. La joie du ciel, la joie de Dieu c est de «nous adopter pour lui par Jésus Christ» (Eph 1, 5). C est de nous savoir en sa présence, de «lui appartenir» (Rom 14, 8). La figure du fils cadet, une évocation du péché originel Jésus explique très bien l erreur du péché originel dans la parabole des deux frères. Le fils cadet, c est-à-dire tout homme à la suite d Adam, dit à son père : «Père, donne-moi la part d héritage qui me revient». Le drame du péché réside dans un mot : " la part " ; car Dieu voulait donner tout. «Donne-moi la part d héritage qui me revient» autrement dit, «donne-moi le monde, ta création, puisque c est pour moi que tu l as faite ; laisse-moi en paix y trouver mon bien puisqu elle est pour moi». Le Père voulait tout donner, mais tout donner dans la communion, dans l héritage partagé, non pas au sens où l on découpe, mais au sens où l on goûte ensemble, comme le montre la suite, au moment du retour du fils, quand on partage tout ensemble. L héritage est indivisible car il est donné dans l amour du Père et il est le Père lui-même : «Mon enfant, toi, tu es toujours avec moi, et tout ce qui est à moi est à toi». C est la phrase même de Jésus à son Père : «Tout ce qui est à moi est à toi et ce qui est à toi est à moi» (Jn 17, 10). Père Jean-Miguel Garrigues Dieu sans idée du mal, Desclée, 1996, p 56

«Appel au renoncement» Lc 14, 25-35 [25] De grandes foules faisaient route avec Jésus ; il se retourna et leur dit : [26] «Si quelqu'un vient à moi sans me préférer à son père, sa mère, sa femme, ses enfants, ses frères et soeurs, et même à sa propre vie, il ne peut pas être mon disciple. [27] Celui qui ne porte pas sa croix pour marcher derrière moi ne peut pas être mon disciple. [28] Quel est celui d'entre vous qui veut bâtir une tour, et qui ne commence pas par s'asseoir pour calculer la dépense et voir s'il a de quoi aller jusqu'au bout? [29] Car, s'il pose les fondations et ne peut pas achever, tous ceux qui le verront se moqueront de lui : [30] 'Voilà un homme qui commence à bâtir et qui ne peut pas achever!' [31] Et quel est le roi qui part en guerre contre un autre roi, et qui ne commence pas par s'asseoir pour voir s'il peut, avec dix mille hommes, affronter l'autre qui vient l'attaquer avec vingt mille? [32] S'il ne le peut pas, il envoie, pendant que l'autre est encore loin, une délégation pour demander la paix. [33] De même, celui d'entre vous qui ne renonce pas à tout ce qui lui appartient ne peut pas être mon disciple. [34] C'est une bonne chose que le sel ; mais si le sel lui-même se dénature, avec quoi lui rendra-t-on sa force? [35] Il ne peut servir ni pour la terre, ni pour le fumier : on le jette dehors! Celui qui a des oreilles pour entendre, qu'il entende!» Pour lire l Evangile de Luc en continu Péricopes à lire mais non méditées en cellule source «Urgence de la conversion ; parabole du figuier stérile» Lc 13, 1-9 [1] A ce moment, des gens vinrent rapporter à Jésus l'affaire des Galiléens que Pilate avait fait massacrer pendant qu'ils offraient un sacrifice. [2] Jésus leur répondit : «Pensez-vous que ces Galiléens étaient de plus grands pécheurs que tous les autres Galiléens, pour avoir subi un tel sort? [3] Eh bien non, je vous le dis ; et si vous ne vous convertissez pas, vous périrez tous comme eux. [4] Et ces dix-huit personnes tuées par la chute de la tour de Siloé, pensez-vous qu'elles étaient plus coupables que tous les autres habitants de Jérusalem? [5] Eh bien non, je vous le dis ; et si vous ne vous convertissez pas, vous périrez tous de la même manière.» [6] Jésus leur disait encore cette parabole : «Un homme avait un figuier planté dans sa vigne. Il vint chercher du fruit sur ce figuier, et n'en trouva pas. [7] Il dit alors à son vigneron : 'Voilà trois ans que je viens chercher du fruit sur ce figuier, et je n'en trouve pas. Coupe-le. A quoi bon le laisser épuiser le sol?' [8] Mais le vigneron lui répondit : 'Seigneur, laisse-le encore cette année, le temps que je bêche autour pour y mettre du fumier. [9] Peut-être donnera-t-il du fruit à l'avenir. Sinon, tu le couperas.'» «Guérison d une infirme et paraboles du Royaume» Lc 13, 10-21 [10] Jésus était en train d'enseigner dans une synagogue, le jour du sabbat. [11] Il y avait là une femme, possédée par un esprit mauvais qui la rendait infirme depuis dix-huit ans ; elle était toute courbée et absolument incapable de se redresser. [12] Quand Jésus la vit, il l'interpella : «Femme, te voilà délivrée de ton infirmité.» [13] Puis, il lui imposa les mains ; à l'instant même elle se trouva toute droite, et elle rendait gloire à Dieu. [14] Le chef de la synagogue fut indigné de voir Jésus faire une guérison le jour du sabbat. Il prit la parole pour dire à la foule : «Il y a six jours pour travailler ; venez donc vous faire guérir ces jours-là, et non pas le jour du sabbat.» [15] Le Seigneur lui répliqua : «Esprits faux que vous êtes! N'est-il pas vrai que le jour du sabbat chacun de vous détache de la mangeoire son bœuf ou son âne pour le mener boire? [16] Et cette femme, une fille d'abraham, que Satan avait liée il y a dix-huit ans, n'est-il pas vrai que le jour du sabbat il fallait la délivrer de ce lien?» [17] Ces paroles de Jésus couvraient de honte tous ses adversaires, et toute la foule était dans la joie à cause de toutes les actions éclatantes qu'il faisait.

[18] Jésus disait : «A quoi le règne de Dieu est-il comparable, à quoi vais-je le comparer? [19] Il est comparable à une graine de moutarde qu'un homme a jetée dans son jardin. Elle a poussé, elle est devenue un arbre, et les oiseaux du ciel ont fait leur nid dans ses branches.» [20] Il dit encore : «A quoi vais-je comparer le règne de Dieu? [21] Il est comparable à du levain qu'une femme enfouit dans trois grandes mesures de farine, jusqu'à ce que toute la pâte ait levé.» «Rejet des interlocuteurs de Jésus et appel des païens» Lc 13, 22-30 [22] Dans sa marche vers Jérusalem, Jésus passait par les villes et les villages en enseignant. [23] Quelqu'un lui demanda : «Seigneur, n'y aura-t-il que peu de gens à être sauvés?» Jésus leur dit : [24] «Efforcez-vous d'entrer par la porte étroite, car, je vous le déclare, beaucoup chercheront à entrer et ne le pourront pas. [25] Quand le maître de la maison se sera levé et aura fermé la porte, si vous, du dehors, vous vous mettez à frapper à la porte, en disant : 'Seigneur, ouvre-nous', il vous répondra : 'Je ne sais pas d'où vous êtes.' [26] Alors vous vous mettrez à dire : 'Nous avons mangé et bu en ta présence, et tu as enseigné sur nos places.' [27] Il vous répondra : 'Je ne sais pas d'où vous êtes. Éloignez-vous de moi, vous tous qui faites le mal.' [28] Il y aura des pleurs et des grincements de dents quand vous verrez Abraham, Isaac et Jacob et tous les prophètes dans le royaume de Dieu, et que vous serez jetés dehors. [29] Alors on viendra de l'orient et de l'occident, du nord et du midi, prendre place au festin dans le royaume de Dieu. [30] Oui, il y a des derniers qui seront premiers, et des premiers qui seront derniers.» «Jésus devant sa mort prochaine» Lc 13, 31-35 [31] A ce moment-là, quelques pharisiens s'approchèrent de Jésus pour lui dire : «Va-t'en, pars d'ici : Hérode veut te faire mourir.» [32] Il leur répliqua : «Allez dire à ce renard : Aujourd'hui et demain, je chasse les démons et je fais des guérisons ; le troisième jour, je suis au but. [33] Mais il faut que je continue ma route aujourd'hui, demain et le jour suivant, car il n'est pas possible qu'un prophète meure en dehors de Jérusalem. [34] Jérusalem, Jérusalem, toi qui tues les prophètes, toi qui lapides ceux qui te sont envoyés, combien de fois j'ai voulu rassembler tes enfants comme la poule rassemble ses poussins sous ses ailes, et vous n'avez pas voulu! [35] Maintenant, Dieu abandonne votre Temple entre vos mains. Je vous le déclare : vous ne me verrez plus jusqu'au jour où vous direz : Béni soit celui qui vient au nom du Seigneur!» «Repas chez un pharisien» Lc 14, 1-24 [1] Un jour de sabbat, Jésus était entré chez un chef des pharisiens pour y prendre son repas, et on l'observait. [2] Justement, un homme atteint d'hydropisie était là devant lui. [3] Jésus s'adressa aux docteurs de la Loi et aux pharisiens pour leur demander : «Est-il permis, oui ou non, de faire une guérison le jour du sabbat?» [4] Ils gardèrent le silence. Jésus saisit alors le malade, le guérit et le renvoya. [5] Puis il leur dit : «Si l'un de vous a son fils ou son bœuf qui tombe dans un puits, ne va-t-il pas l'en retirer aussitôt, le jour même du sabbat?» [6] Et ils furent incapables de trouver une réponse. [7] Remarquant que les invités choisissaient les premières places, il leur dit cette parabole : [8] «Quand tu es invité à des noces, ne va pas te mettre à la première place, car on peut avoir invité quelqu'un de plus important que toi. [9] Alors, celui qui vous a invités, toi et lui, viendrait te dire : 'Cède-lui ta place', [10] et tu irais, plein de honte, prendre la dernière place. Au contraire, quand tu es invité, va te mettre à la dernière place. Alors, quand viendra celui qui t'a invité, il te dira : 'Mon ami, avance plus haut', et ce sera pour toi un honneur aux yeux de tous ceux qui sont à table avec toi. [11] Qui s'élève sera abaissé ; qui s'abaisse sera élevé.» [12] Jésus disait aussi à celui qui l'avait invité : «Quand tu donnes un déjeuner ou un dîner, n'invite pas tes amis, ni tes frères, ni tes parents, ni de riches voisins ; sinon, eux aussi t'inviteraient en retour, et la politesse te serait rendue. [13] Au contraire, quand tu donnes un festin, invite des pauvres, des estropiés, des boiteux, des aveugles ; [14] et tu seras heureux, parce qu'ils n'ont rien à te rendre : cela te sera rendu à la résurrection des justes.» [15] En entendant parler Jésus, un des convives lui dit : «Heureux celui qui participera au repas dans le royaume de Dieu!» [16] Jésus lui dit : «Un homme donnait un grand dîner, et il avait invité beaucoup de monde. [17] A l'heure du dîner, il envoya son serviteur dire aux invités : 'Venez, maintenant le repas est prêt.' [18] Mais tous se mirent à s'excuser de la même façon. Le premier lui dit : 'J'ai acheté un champ, et je suis obligé d'aller le voir ; je t'en prie, excuse-moi.' [19] Un autre dit : 'J'ai acheté cinq paires de bœufs, et je pars les essayer ; je t'en prie, excuse-moi.' [20] Un troisième dit : 'Je viens de me marier, et, pour cette raison, je ne peux pas venir.' 21] A son retour, le serviteur rapporta ces paroles à son maître. Plein de colère, le maître de maison dit à son serviteur : 'Dépêche-toi d'aller sur les places et dans les rues de la ville, et amène ici les pauvres, les estropiés, les aveugles et les boiteux.' [22] Le serviteur revint lui dire : 'Maître, ce que tu as ordonné est fait, et il reste de la place.' [23] Le maître dit alors au serviteur : 'Va sur les routes et dans les sentiers, et insiste pour faire entrer les gens, afin que ma maison soit remplie. [24] Car, je vous le dis, aucun de ces hommes qui avaient été invités ne profitera de mon dîner.'»

La figure du fils aîné, évocation du mystère d Israël Les Pères de l Eglise ont rapporté le thème des deux frères aux relations entre Juifs et païens. Dans le frère resté à la maison, ils ont vu le peuple d Israël, qui disait à juste titre : «Il y a tant d années que je suis à ton service sans jamais avoir transgressé un seul de tes commandements.» C est dans la fidélité à la Torah que se révèle la fidélité d Israël, ainsi que son image de Dieu. L interprétation qui renvoie aux Juifs n est pas infondée tant qu on la prend telle qu elle est apparue dans le texte : une délicate tentative de Dieu de persuader Israël, tentative qui se trouve totalement dans les mains de Dieu. Remarquons bien que, dans la parabole, le père ne remet pas en question la fidélité du fils aîné, et aussi qu il le confirme de manière expresse dans son statut de fils. Mais cette même interprétation devient erronée dès que l on en fait une condamnation des Juifs, dont il n est nullement question dans le texte. Benoît XVI, Jésus de Nazareth, tome 1, Flammarion, p 235 3 Pour vivre la Parole au quotidien 1. Quelle est en nous la part du fils aîné, du fils cadet? 2. Quand nous sentons-nous cherchés, rejoints par Dieu? 4 Points de catéchèse Péché Le péché est un refus de l amour de Dieu, un refus de la relation à Dieu. C est l échec de la liberté puisque la pleine réalisation de la liberté humaine est de choisir Dieu, qui seul peut la combler. La puissance de la résurrection du Christ donne à chacun une possibilité effective de sortir du péché pour qu il recouvre la liberté de dire non au mal ainsi que la logique du partage et de l amour. Péché originel Le récit de la chute (Gn 3) utilise un langage imagé, mais affirme un événement primordial qui a eu lieu au commencement de l histoire de l homme. La Révélation nous donne la certitude de foi que toute l histoire humaine est marquée par la faute originelle librement commise par nos premiers parents. L homme, tenté par le diable, a laissé mourir dans son cœur la confiance envers son Créateur et, en abusant de sa liberté, a désobéi au commandement de Dieu. Dans ce péché, l homme s est préféré lui-même à Dieu. Le baptême, en donnant la vie de la grâce du Christ, efface le péché originel et retourne l homme vers Dieu, mais les conséquences pour la nature, affaiblie et inclinée au mal, persistent en l homme et l appellent au combat spirituel. Catéchisme de l Eglise Catholique (390, 397, 405) Fiche n 21 «La joie des retrouvailles» Lc 15, 1-31 [1]Les publicains et les pécheurs venaient tous [2] à Jésus pour l'écouter. Les pharisiens et les scribes récriminaient contre lui : «Cet [3] homme fait bon accueil aux pécheurs, et il mange avec eux!» Alors Jésus leur dit cette parabole : [4] «Si l'un de vous a cent brebis et en perd une, ne laisse-t-il pas les quatre-vingt-dixneuf autres dans le désert pour aller chercher celle qui est perdue, jusqu'à ce qu'il la [5] [6] retrouve? Quand il l'a retrouvée, tout joyeux, il la prend sur ses épaules, et, de retour chez lui, il réunit ses amis et ses voisins ; il leur dit : 'Réjouissez-vous avec moi, [7] car j'ai retrouvé ma brebis, celle qui était perdue!' Je vous le dis : C'est ainsi qu'il y aura de la joie dans le ciel pour un seul pécheur qui se convertit, plus que pour quatrevingt-dix-neuf justes qui n'ont pas besoin de conversion. [8] Ou encore, si une femme a dix pièces d'argent et en perd une, ne va-t-elle pas allumer une lampe, balayer la maison, et chercher avec soin jusqu'à ce qu'elle la retrouve? [9] Quand elle l'a retrouvée, elle réunit ses amies et ses voisines et leur dit : 'Réjouissez[10] vous avec moi, car j'ai retrouvé la pièce d'argent que j'avais perdue!' De même, je vous le dis : Il y a de la joie chez les anges de Dieu pour un seul pécheur qui se convertit.» [11] [12] Jésus dit encore : «Un homme avait deux fils. Le plus jeune dit à son père : 'Père, donne-moi la part d'héritage qui me revient.' Et le père fit le partage de ses biens. [13] Peu de jours après, le plus jeune rassembla tout ce qu'il avait, et partit pour un pays [14] lointain où il gaspilla sa fortune en menant une vie de désordre. Quand il eut tout dépensé, une grande famine survint dans cette région, et il commença à se trouver [15] dans la misère. Il alla s'embaucher chez un homme du pays qui l'envoya dans ses [16] champs garder les porcs. Il aurait bien voulu se remplir le ventre avec les gousses que [17] mangeaient les porcs, mais personne ne lui donnait rien. Alors il réfléchit : 'Tant [18] d'ouvriers chez mon père ont du pain en abondance, et moi, ici, je meurs de faim! Je vais retourner chez mon père, et je lui dirai : Père, j'ai péché contre le ciel et contre toi. [19] [20] Je ne mérite plus d'être appelé ton fils. Prends-moi comme l'un de tes ouvriers.' Il partit donc pour aller chez son père. Comme il était encore loin, son père l'aperçut et [21] fut saisi de pitié ; il courut se jeter à son cou et le couvrit de baisers. Le fils lui dit : 'Père, j'ai péché contre le ciel et contre toi. Je ne mérite plus d'être appelé ton fils...' [22] Mais le père dit à ses domestiques : 'Vite, apportez le plus beau vêtement pour [23] l'habiller. Mettez-lui une bague au doigt et des sandales aux pieds. Allez chercher le [24] veau gras, tuez-le ; mangeons et festoyons. Car mon fils que voilà était mort, et il est revenu à la vie ; il était perdu, et il est retrouvé.' Et ils commencèrent la fête.

[25] Le fils aîné était aux champs. A son retour, quand il fut près de la maison, il entendit la musique et les danses. [26] Appelant un des domestiques, il demanda ce qui se passait. [27] Celui-ci répondit : 'C'est ton frère qui est de retour. Et ton père a tué le veau gras, parce qu'il a vu revenir son fils en bonne santé.' [28] Alors le fils aîné se mit en colère, et il refusait d'entrer. Son père, qui était sorti, le suppliait. [29] Mais il répliqua : 'Il y a tant d'années que je suis à ton service sans avoir jamais désobéi à tes ordres, et jamais tu ne m'as donné un chevreau pour festoyer avec mes amis. [30] Mais, quand ton fils que voilà est arrivé après avoir dépensé ton bien avec des filles, tu as fait tuer pour lui le veau gras!' [31] Le père répondit : 'Toi, mon enfant, tu es toujours avec moi, et tout ce qui est à moi est à toi. [32] Il fallait bien festoyer et se réjouir ; car ton frère que voilà était mort, et il est revenu à la vie ; il était perdu, et il est retrouvé!» 1 Pour goûter la Parole Au point de départ du chapitre 15 (v. 1-3), un nouveau repas offre aux pharisiens et aux scribes l occasion de crier au scandale devant l attitude de Jésus à l égard des pécheurs, attitude qui brise les barrières traditionnelles conformes à leur pratique de la Loi. Pour justifier sa propre conduite, révélation du cœur de Dieu lui-même, Jésus commence par deux paraboles construites de façon parallèle (v. 4-10) et qui interpellent la foule, évoquant quelque chose de perdu (le mot revient 5 fois) que l on a retrouvé (6 fois). Ni la brebis ni la pièce d argent n ont mérité quoi que ce soit. C est le maître qui souhaite que rien ne demeure perdu et soit retrouvé Ces paraboles jumelles identifient ce qui est perdu au pécheur et célèbrent l initiative de Dieu qui part à la recherche des pécheurs. Et les paraboles culminent dans la joie des retrouvailles, joie partagée qui veut déborder sur tous. La parabole de l homme qui avait deux fils se présente comme un diptyque mettant d abord en scène le cadet (v. 11-24) qui réclame sa part d héritage du vivant de son père, une façon symbolique de le faire mourir. Il pense que c est loin du père, tout en jouissant de ses biens, qu il pourra s accomplir. La générosité du père est visible d emblée, il donne la liberté et s il ne part pas à la recherche du prodigue, c est pour respecter cette liberté. Mais il veille, au point d attendre sur le pas de la porte l ingrat parti au loin et de l accueillir par une fête, sans s interroger sur les véritables sentiments ayant motivé le retour de son fils. Le père rétablit le fils dans sa dignité (robe et sandales), dans ses droits (anneau) et organise un festin. Jésus met ainsi face à face les deux libertés qui se jouent dans le pardon : l amour du père qui attend inlassablement le pécheur et la recherche imparfaite du pécheur qui va à la rencontre du père. L aîné (v. 25-32) quotidiennement au service de son père, n a pas fait l expérience de tout perdre. Il vit avec le père, mais il ne vit pas en fils. Sa relation au père est une relation sans joie, basée sur le donnant-donnant. Il n a pas compris quelle liberté était la sienne. Le bonheur du frère retrouvé a pour lui un goût amer et il ne prend pas part à la fête. Sa colère, en fin de récit, fait écho aux récriminations des pharisiens au début du chapitre. Cependant, la dernière parole du père quand il vient à la rencontre de son aîné est comme un appel à entrer dans la maison paternelle, à se retourner, à se convertir. 2 Pour aller plus loin La joie de Dieu Joyau le plus précieux de l enseignement de Jésus, ces paroles bouleversantes révèlent comme nulle autre ce qui est au cœur du dessein de Dieu : accueillir dans son royaume des hommes touchés par sa main tendue, accueillir dans son royaume des créatures libres de leur choix. A des hommes fiers de leur pratique religieuse et qui " murmurent ", le Seigneur explique la grâce de Dieu et montre la joie du ciel lorsqu un homme se repend et s engage ainsi dans le chemin de la foi. Jésus justifie son attitude par la joie de Dieu et il laisse entendre que Dieu lui-même cherche les pécheurs à travers la mission qu il lui a confiée. La joie du ciel, la joie de Dieu c est de «nous adopter pour lui par Jésus Christ» (Eph 1, 5). C est de nous savoir en sa présence, de «lui appartenir» (Rom 14, 8). La figure du fils cadet, une évocation du péché originel Jésus explique très bien l erreur du péché originel dans la parabole des deux frères. Le fils cadet, c est-à-dire tout homme à la suite d Adam, dit à son père : «Père, donne-moi la part d héritage qui me revient». Le drame du péché réside dans un mot : " la part " ; car Dieu voulait donner tout. «Donne-moi la part d héritage qui me revient» autrement dit, «donne-moi le monde, ta création, puisque c est pour moi que tu l as faite ; laisse-moi en paix y trouver mon bien puisqu elle est pour moi». Le Père voulait tout donner, mais tout donner dans la communion, dans l héritage partagé, non pas au sens où l on découpe, mais au sens où l on goûte ensemble, comme le montre la suite, au moment du retour du fils, quand on partage tout ensemble. L héritage est indivisible car il est donné dans l amour du Père et il est le Père lui-même : «Mon enfant, toi, tu es toujours avec moi, et tout ce qui est à moi est à toi». C est la phrase même de Jésus à son Père : «Tout ce qui est à moi est à toi et ce qui est à toi est à moi» (Jn 17, 10). Père Jean-Miguel Garrigues Dieu sans idée du mal, Desclée, 1996, p 56

«Appel au renoncement» Lc 14, 25-35 [25] De grandes foules faisaient route avec Jésus ; il se retourna et leur dit : [26] «Si quelqu'un vient à moi sans me préférer à son père, sa mère, sa femme, ses enfants, ses frères et soeurs, et même à sa propre vie, il ne peut pas être mon disciple. [27] Celui qui ne porte pas sa croix pour marcher derrière moi ne peut pas être mon disciple. [28] Quel est celui d'entre vous qui veut bâtir une tour, et qui ne commence pas par s'asseoir pour calculer la dépense et voir s'il a de quoi aller jusqu'au bout? [29] Car, s'il pose les fondations et ne peut pas achever, tous ceux qui le verront se moqueront de lui : [30] 'Voilà un homme qui commence à bâtir et qui ne peut pas achever!' [31] Et quel est le roi qui part en guerre contre un autre roi, et qui ne commence pas par s'asseoir pour voir s'il peut, avec dix mille hommes, affronter l'autre qui vient l'attaquer avec vingt mille? [32] S'il ne le peut pas, il envoie, pendant que l'autre est encore loin, une délégation pour demander la paix. [33] De même, celui d'entre vous qui ne renonce pas à tout ce qui lui appartient ne peut pas être mon disciple. [34] C'est une bonne chose que le sel ; mais si le sel lui-même se dénature, avec quoi lui rendra-t-on sa force? [35] Il ne peut servir ni pour la terre, ni pour le fumier : on le jette dehors! Celui qui a des oreilles pour entendre, qu'il entende!» Pour lire l Evangile de Luc en continu Péricopes à lire mais non méditées en cellule source «Urgence de la conversion ; parabole du figuier stérile» Lc 13, 1-9 [1] A ce moment, des gens vinrent rapporter à Jésus l'affaire des Galiléens que Pilate avait fait massacrer pendant qu'ils offraient un sacrifice. [2] Jésus leur répondit : «Pensez-vous que ces Galiléens étaient de plus grands pécheurs que tous les autres Galiléens, pour avoir subi un tel sort? [3] Eh bien non, je vous le dis ; et si vous ne vous convertissez pas, vous périrez tous comme eux. [4] Et ces dix-huit personnes tuées par la chute de la tour de Siloé, pensez-vous qu'elles étaient plus coupables que tous les autres habitants de Jérusalem? [5] Eh bien non, je vous le dis ; et si vous ne vous convertissez pas, vous périrez tous de la même manière.» [6] Jésus leur disait encore cette parabole : «Un homme avait un figuier planté dans sa vigne. Il vint chercher du fruit sur ce figuier, et n'en trouva pas. [7] Il dit alors à son vigneron : 'Voilà trois ans que je viens chercher du fruit sur ce figuier, et je n'en trouve pas. Coupe-le. A quoi bon le laisser épuiser le sol?' [8] Mais le vigneron lui répondit : 'Seigneur, laisse-le encore cette année, le temps que je bêche autour pour y mettre du fumier. [9] Peut-être donnera-t-il du fruit à l'avenir. Sinon, tu le couperas.'» «Guérison d une infirme et paraboles du Royaume» Lc 13, 10-21 [10] Jésus était en train d'enseigner dans une synagogue, le jour du sabbat. [11] Il y avait là une femme, possédée par un esprit mauvais qui la rendait infirme depuis dix-huit ans ; elle était toute courbée et absolument incapable de se redresser. [12] Quand Jésus la vit, il l'interpella : «Femme, te voilà délivrée de ton infirmité.» [13] Puis, il lui imposa les mains ; à l'instant même elle se trouva toute droite, et elle rendait gloire à Dieu. [14] Le chef de la synagogue fut indigné de voir Jésus faire une guérison le jour du sabbat. Il prit la parole pour dire à la foule : «Il y a six jours pour travailler ; venez donc vous faire guérir ces jours-là, et non pas le jour du sabbat.» [15] Le Seigneur lui répliqua : «Esprits faux que vous êtes! N'est-il pas vrai que le jour du sabbat chacun de vous détache de la mangeoire son bœuf ou son âne pour le mener boire? [16] Et cette femme, une fille d'abraham, que Satan avait liée il y a dix-huit ans, n'est-il pas vrai que le jour du sabbat il fallait la délivrer de ce lien?» [17] Ces paroles de Jésus couvraient de honte tous ses adversaires, et toute la foule était dans la joie à cause de toutes les actions éclatantes qu'il faisait.

[18] Jésus disait : «A quoi le règne de Dieu est-il comparable, à quoi vais-je le comparer? [19] Il est comparable à une graine de moutarde qu'un homme a jetée dans son jardin. Elle a poussé, elle est devenue un arbre, et les oiseaux du ciel ont fait leur nid dans ses branches.» [20] Il dit encore : «A quoi vais-je comparer le règne de Dieu? [21] Il est comparable à du levain qu'une femme enfouit dans trois grandes mesures de farine, jusqu'à ce que toute la pâte ait levé.» «Rejet des interlocuteurs de Jésus et appel des païens» Lc 13, 22-30 [22] Dans sa marche vers Jérusalem, Jésus passait par les villes et les villages en enseignant. [23] Quelqu'un lui demanda : «Seigneur, n'y aura-t-il que peu de gens à être sauvés?» Jésus leur dit : [24] «Efforcez-vous d'entrer par la porte étroite, car, je vous le déclare, beaucoup chercheront à entrer et ne le pourront pas. [25] Quand le maître de la maison se sera levé et aura fermé la porte, si vous, du dehors, vous vous mettez à frapper à la porte, en disant : 'Seigneur, ouvre-nous', il vous répondra : 'Je ne sais pas d'où vous êtes.' [26] Alors vous vous mettrez à dire : 'Nous avons mangé et bu en ta présence, et tu as enseigné sur nos places.' [27] Il vous répondra : 'Je ne sais pas d'où vous êtes. Éloignez-vous de moi, vous tous qui faites le mal.' [28] Il y aura des pleurs et des grincements de dents quand vous verrez Abraham, Isaac et Jacob et tous les prophètes dans le royaume de Dieu, et que vous serez jetés dehors. [29] Alors on viendra de l'orient et de l'occident, du nord et du midi, prendre place au festin dans le royaume de Dieu. [30] Oui, il y a des derniers qui seront premiers, et des premiers qui seront derniers.» «Jésus devant sa mort prochaine» Lc 13, 31-35 [31] A ce moment-là, quelques pharisiens s'approchèrent de Jésus pour lui dire : «Va-t'en, pars d'ici : Hérode veut te faire mourir.» [32] Il leur répliqua : «Allez dire à ce renard : Aujourd'hui et demain, je chasse les démons et je fais des guérisons ; le troisième jour, je suis au but. [33] Mais il faut que je continue ma route aujourd'hui, demain et le jour suivant, car il n'est pas possible qu'un prophète meure en dehors de Jérusalem. [34] Jérusalem, Jérusalem, toi qui tues les prophètes, toi qui lapides ceux qui te sont envoyés, combien de fois j'ai voulu rassembler tes enfants comme la poule rassemble ses poussins sous ses ailes, et vous n'avez pas voulu! [35] Maintenant, Dieu abandonne votre Temple entre vos mains. Je vous le déclare : vous ne me verrez plus jusqu'au jour où vous direz : Béni soit celui qui vient au nom du Seigneur!» «Repas chez un pharisien» Lc 14, 1-24 [1] Un jour de sabbat, Jésus était entré chez un chef des pharisiens pour y prendre son repas, et on l'observait. [2] Justement, un homme atteint d'hydropisie était là devant lui. [3] Jésus s'adressa aux docteurs de la Loi et aux pharisiens pour leur demander : «Est-il permis, oui ou non, de faire une guérison le jour du sabbat?» [4] Ils gardèrent le silence. Jésus saisit alors le malade, le guérit et le renvoya. [5] Puis il leur dit : «Si l'un de vous a son fils ou son bœuf qui tombe dans un puits, ne va-t-il pas l'en retirer aussitôt, le jour même du sabbat?» [6] Et ils furent incapables de trouver une réponse. [7] Remarquant que les invités choisissaient les premières places, il leur dit cette parabole : [8] «Quand tu es invité à des noces, ne va pas te mettre à la première place, car on peut avoir invité quelqu'un de plus important que toi. [9] Alors, celui qui vous a invités, toi et lui, viendrait te dire : 'Cède-lui ta place', [10] et tu irais, plein de honte, prendre la dernière place. Au contraire, quand tu es invité, va te mettre à la dernière place. Alors, quand viendra celui qui t'a invité, il te dira : 'Mon ami, avance plus haut', et ce sera pour toi un honneur aux yeux de tous ceux qui sont à table avec toi. [11] Qui s'élève sera abaissé ; qui s'abaisse sera élevé.» [12] Jésus disait aussi à celui qui l'avait invité : «Quand tu donnes un déjeuner ou un dîner, n'invite pas tes amis, ni tes frères, ni tes parents, ni de riches voisins ; sinon, eux aussi t'inviteraient en retour, et la politesse te serait rendue. [13] Au contraire, quand tu donnes un festin, invite des pauvres, des estropiés, des boiteux, des aveugles ; [14] et tu seras heureux, parce qu'ils n'ont rien à te rendre : cela te sera rendu à la résurrection des justes.» [15] En entendant parler Jésus, un des convives lui dit : «Heureux celui qui participera au repas dans le royaume de Dieu!» [16] Jésus lui dit : «Un homme donnait un grand dîner, et il avait invité beaucoup de monde. [17] A l'heure du dîner, il envoya son serviteur dire aux invités : 'Venez, maintenant le repas est prêt.' [18] Mais tous se mirent à s'excuser de la même façon. Le premier lui dit : 'J'ai acheté un champ, et je suis obligé d'aller le voir ; je t'en prie, excuse-moi.' [19] Un autre dit : 'J'ai acheté cinq paires de bœufs, et je pars les essayer ; je t'en prie, excuse-moi.' [20] Un troisième dit : 'Je viens de me marier, et, pour cette raison, je ne peux pas venir.' 21] A son retour, le serviteur rapporta ces paroles à son maître. Plein de colère, le maître de maison dit à son serviteur : 'Dépêche-toi d'aller sur les places et dans les rues de la ville, et amène ici les pauvres, les estropiés, les aveugles et les boiteux.' [22] Le serviteur revint lui dire : 'Maître, ce que tu as ordonné est fait, et il reste de la place.' [23] Le maître dit alors au serviteur : 'Va sur les routes et dans les sentiers, et insiste pour faire entrer les gens, afin que ma maison soit remplie. [24] Car, je vous le dis, aucun de ces hommes qui avaient été invités ne profitera de mon dîner.'»

La figure du fils aîné, évocation du mystère d Israël Les Pères de l Eglise ont rapporté le thème des deux frères aux relations entre Juifs et païens. Dans le frère resté à la maison, ils ont vu le peuple d Israël, qui disait à juste titre : «Il y a tant d années que je suis à ton service sans jamais avoir transgressé un seul de tes commandements.» C est dans la fidélité à la Torah que se révèle la fidélité d Israël, ainsi que son image de Dieu. L interprétation qui renvoie aux Juifs n est pas infondée tant qu on la prend telle qu elle est apparue dans le texte : une délicate tentative de Dieu de persuader Israël, tentative qui se trouve totalement dans les mains de Dieu. Remarquons bien que, dans la parabole, le père ne remet pas en question la fidélité du fils aîné, et aussi qu il le confirme de manière expresse dans son statut de fils. Mais cette même interprétation devient erronée dès que l on en fait une condamnation des Juifs, dont il n est nullement question dans le texte. Benoît XVI, Jésus de Nazareth, tome 1, Flammarion, p 235 3 Pour vivre la Parole au quotidien 1. Quelle est en nous la part du fils aîné, du fils cadet? 2. Quand nous sentons-nous cherchés, rejoints par Dieu? 4 Points de catéchèse Péché Le péché est un refus de l amour de Dieu, un refus de la relation à Dieu. C est l échec de la liberté puisque la pleine réalisation de la liberté humaine est de choisir Dieu, qui seul peut la combler. La puissance de la résurrection du Christ donne à chacun une possibilité effective de sortir du péché pour qu il recouvre la liberté de dire non au mal ainsi que la logique du partage et de l amour. Péché originel Le récit de la chute (Gn 3) utilise un langage imagé, mais affirme un événement primordial qui a eu lieu au commencement de l histoire de l homme. La Révélation nous donne la certitude de foi que toute l histoire humaine est marquée par la faute originelle librement commise par nos premiers parents. L homme, tenté par le diable, a laissé mourir dans son cœur la confiance envers son Créateur et, en abusant de sa liberté, a désobéi au commandement de Dieu. Dans ce péché, l homme s est préféré lui-même à Dieu. Le baptême, en donnant la vie de la grâce du Christ, efface le péché originel et retourne l homme vers Dieu, mais les conséquences pour la nature, affaiblie et inclinée au mal, persistent en l homme et l appellent au combat spirituel. Catéchisme de l Eglise Catholique (390, 397, 405) Fiche n 21 «La joie des retrouvailles» Lc 15, 1-31 [1]Les publicains et les pécheurs venaient tous [2] à Jésus pour l'écouter. Les pharisiens et les scribes récriminaient contre lui : «Cet [3] homme fait bon accueil aux pécheurs, et il mange avec eux!» Alors Jésus leur dit cette parabole : [4] «Si l'un de vous a cent brebis et en perd une, ne laisse-t-il pas les quatre-vingt-dixneuf autres dans le désert pour aller chercher celle qui est perdue, jusqu'à ce qu'il la [5] [6] retrouve? Quand il l'a retrouvée, tout joyeux, il la prend sur ses épaules, et, de retour chez lui, il réunit ses amis et ses voisins ; il leur dit : 'Réjouissez-vous avec moi, [7] car j'ai retrouvé ma brebis, celle qui était perdue!' Je vous le dis : C'est ainsi qu'il y aura de la joie dans le ciel pour un seul pécheur qui se convertit, plus que pour quatrevingt-dix-neuf justes qui n'ont pas besoin de conversion. [8] Ou encore, si une femme a dix pièces d'argent et en perd une, ne va-t-elle pas allumer une lampe, balayer la maison, et chercher avec soin jusqu'à ce qu'elle la retrouve? [9] Quand elle l'a retrouvée, elle réunit ses amies et ses voisines et leur dit : 'Réjouissez[10] vous avec moi, car j'ai retrouvé la pièce d'argent que j'avais perdue!' De même, je vous le dis : Il y a de la joie chez les anges de Dieu pour un seul pécheur qui se convertit.» [11] [12] Jésus dit encore : «Un homme avait deux fils. Le plus jeune dit à son père : 'Père, donne-moi la part d'héritage qui me revient.' Et le père fit le partage de ses biens. [13] Peu de jours après, le plus jeune rassembla tout ce qu'il avait, et partit pour un pays [14] lointain où il gaspilla sa fortune en menant une vie de désordre. Quand il eut tout dépensé, une grande famine survint dans cette région, et il commença à se trouver [15] dans la misère. Il alla s'embaucher chez un homme du pays qui l'envoya dans ses [16] champs garder les porcs. Il aurait bien voulu se remplir le ventre avec les gousses que [17] mangeaient les porcs, mais personne ne lui donnait rien. Alors il réfléchit : 'Tant [18] d'ouvriers chez mon père ont du pain en abondance, et moi, ici, je meurs de faim! Je vais retourner chez mon père, et je lui dirai : Père, j'ai péché contre le ciel et contre toi. [19] [20] Je ne mérite plus d'être appelé ton fils. Prends-moi comme l'un de tes ouvriers.' Il partit donc pour aller chez son père. Comme il était encore loin, son père l'aperçut et [21] fut saisi de pitié ; il courut se jeter à son cou et le couvrit de baisers. Le fils lui dit : 'Père, j'ai péché contre le ciel et contre toi. Je ne mérite plus d'être appelé ton fils...' [22] Mais le père dit à ses domestiques : 'Vite, apportez le plus beau vêtement pour [23] l'habiller. Mettez-lui une bague au doigt et des sandales aux pieds. Allez chercher le [24] veau gras, tuez-le ; mangeons et festoyons. Car mon fils que voilà était mort, et il est revenu à la vie ; il était perdu, et il est retrouvé.' Et ils commencèrent la fête.

[25] Le fils aîné était aux champs. A son retour, quand il fut près de la maison, il entendit la musique et les danses. [26] Appelant un des domestiques, il demanda ce qui se passait. [27] Celui-ci répondit : 'C'est ton frère qui est de retour. Et ton père a tué le veau gras, parce qu'il a vu revenir son fils en bonne santé.' [28] Alors le fils aîné se mit en colère, et il refusait d'entrer. Son père, qui était sorti, le suppliait. [29] Mais il répliqua : 'Il y a tant d'années que je suis à ton service sans avoir jamais désobéi à tes ordres, et jamais tu ne m'as donné un chevreau pour festoyer avec mes amis. [30] Mais, quand ton fils que voilà est arrivé après avoir dépensé ton bien avec des filles, tu as fait tuer pour lui le veau gras!' [31] Le père répondit : 'Toi, mon enfant, tu es toujours avec moi, et tout ce qui est à moi est à toi. [32] Il fallait bien festoyer et se réjouir ; car ton frère que voilà était mort, et il est revenu à la vie ; il était perdu, et il est retrouvé!» 1 Pour goûter la Parole Au point de départ du chapitre 15 (v. 1-3), un nouveau repas offre aux pharisiens et aux scribes l occasion de crier au scandale devant l attitude de Jésus à l égard des pécheurs, attitude qui brise les barrières traditionnelles conformes à leur pratique de la Loi. Pour justifier sa propre conduite, révélation du cœur de Dieu lui-même, Jésus commence par deux paraboles construites de façon parallèle (v. 4-10) et qui interpellent la foule, évoquant quelque chose de perdu (le mot revient 5 fois) que l on a retrouvé (6 fois). Ni la brebis ni la pièce d argent n ont mérité quoi que ce soit. C est le maître qui souhaite que rien ne demeure perdu et soit retrouvé Ces paraboles jumelles identifient ce qui est perdu au pécheur et célèbrent l initiative de Dieu qui part à la recherche des pécheurs. Et les paraboles culminent dans la joie des retrouvailles, joie partagée qui veut déborder sur tous. La parabole de l homme qui avait deux fils se présente comme un diptyque mettant d abord en scène le cadet (v. 11-24) qui réclame sa part d héritage du vivant de son père, une façon symbolique de le faire mourir. Il pense que c est loin du père, tout en jouissant de ses biens, qu il pourra s accomplir. La générosité du père est visible d emblée, il donne la liberté et s il ne part pas à la recherche du prodigue, c est pour respecter cette liberté. Mais il veille, au point d attendre sur le pas de la porte l ingrat parti au loin et de l accueillir par une fête, sans s interroger sur les véritables sentiments ayant motivé le retour de son fils. Le père rétablit le fils dans sa dignité (robe et sandales), dans ses droits (anneau) et organise un festin. Jésus met ainsi face à face les deux libertés qui se jouent dans le pardon : l amour du père qui attend inlassablement le pécheur et la recherche imparfaite du pécheur qui va à la rencontre du père. L aîné (v. 25-32) quotidiennement au service de son père, n a pas fait l expérience de tout perdre. Il vit avec le père, mais il ne vit pas en fils. Sa relation au père est une relation sans joie, basée sur le donnant-donnant. Il n a pas compris quelle liberté était la sienne. Le bonheur du frère retrouvé a pour lui un goût amer et il ne prend pas part à la fête. Sa colère, en fin de récit, fait écho aux récriminations des pharisiens au début du chapitre. Cependant, la dernière parole du père quand il vient à la rencontre de son aîné est comme un appel à entrer dans la maison paternelle, à se retourner, à se convertir. 2 Pour aller plus loin La joie de Dieu Joyau le plus précieux de l enseignement de Jésus, ces paroles bouleversantes révèlent comme nulle autre ce qui est au cœur du dessein de Dieu : accueillir dans son royaume des hommes touchés par sa main tendue, accueillir dans son royaume des créatures libres de leur choix. A des hommes fiers de leur pratique religieuse et qui " murmurent ", le Seigneur explique la grâce de Dieu et montre la joie du ciel lorsqu un homme se repend et s engage ainsi dans le chemin de la foi. Jésus justifie son attitude par la joie de Dieu et il laisse entendre que Dieu lui-même cherche les pécheurs à travers la mission qu il lui a confiée. La joie du ciel, la joie de Dieu c est de «nous adopter pour lui par Jésus Christ» (Eph 1, 5). C est de nous savoir en sa présence, de «lui appartenir» (Rom 14, 8). La figure du fils cadet, une évocation du péché originel Jésus explique très bien l erreur du péché originel dans la parabole des deux frères. Le fils cadet, c est-à-dire tout homme à la suite d Adam, dit à son père : «Père, donne-moi la part d héritage qui me revient». Le drame du péché réside dans un mot : " la part " ; car Dieu voulait donner tout. «Donne-moi la part d héritage qui me revient» autrement dit, «donne-moi le monde, ta création, puisque c est pour moi que tu l as faite ; laisse-moi en paix y trouver mon bien puisqu elle est pour moi». Le Père voulait tout donner, mais tout donner dans la communion, dans l héritage partagé, non pas au sens où l on découpe, mais au sens où l on goûte ensemble, comme le montre la suite, au moment du retour du fils, quand on partage tout ensemble. L héritage est indivisible car il est donné dans l amour du Père et il est le Père lui-même : «Mon enfant, toi, tu es toujours avec moi, et tout ce qui est à moi est à toi». C est la phrase même de Jésus à son Père : «Tout ce qui est à moi est à toi et ce qui est à toi est à moi» (Jn 17, 10). Père Jean-Miguel Garrigues Dieu sans idée du mal, Desclée, 1996, p 56

«Appel au renoncement» Lc 14, 25-35 [25] De grandes foules faisaient route avec Jésus ; il se retourna et leur dit : [26] «Si quelqu'un vient à moi sans me préférer à son père, sa mère, sa femme, ses enfants, ses frères et soeurs, et même à sa propre vie, il ne peut pas être mon disciple. [27] Celui qui ne porte pas sa croix pour marcher derrière moi ne peut pas être mon disciple. [28] Quel est celui d'entre vous qui veut bâtir une tour, et qui ne commence pas par s'asseoir pour calculer la dépense et voir s'il a de quoi aller jusqu'au bout? [29] Car, s'il pose les fondations et ne peut pas achever, tous ceux qui le verront se moqueront de lui : [30] 'Voilà un homme qui commence à bâtir et qui ne peut pas achever!' [31] Et quel est le roi qui part en guerre contre un autre roi, et qui ne commence pas par s'asseoir pour voir s'il peut, avec dix mille hommes, affronter l'autre qui vient l'attaquer avec vingt mille? [32] S'il ne le peut pas, il envoie, pendant que l'autre est encore loin, une délégation pour demander la paix. [33] De même, celui d'entre vous qui ne renonce pas à tout ce qui lui appartient ne peut pas être mon disciple. [34] C'est une bonne chose que le sel ; mais si le sel lui-même se dénature, avec quoi lui rendra-t-on sa force? [35] Il ne peut servir ni pour la terre, ni pour le fumier : on le jette dehors! Celui qui a des oreilles pour entendre, qu'il entende!» Pour lire l Evangile de Luc en continu Péricopes à lire mais non méditées en cellule source «Urgence de la conversion ; parabole du figuier stérile» Lc 13, 1-9 [1] A ce moment, des gens vinrent rapporter à Jésus l'affaire des Galiléens que Pilate avait fait massacrer pendant qu'ils offraient un sacrifice. [2] Jésus leur répondit : «Pensez-vous que ces Galiléens étaient de plus grands pécheurs que tous les autres Galiléens, pour avoir subi un tel sort? [3] Eh bien non, je vous le dis ; et si vous ne vous convertissez pas, vous périrez tous comme eux. [4] Et ces dix-huit personnes tuées par la chute de la tour de Siloé, pensez-vous qu'elles étaient plus coupables que tous les autres habitants de Jérusalem? [5] Eh bien non, je vous le dis ; et si vous ne vous convertissez pas, vous périrez tous de la même manière.» [6] Jésus leur disait encore cette parabole : «Un homme avait un figuier planté dans sa vigne. Il vint chercher du fruit sur ce figuier, et n'en trouva pas. [7] Il dit alors à son vigneron : 'Voilà trois ans que je viens chercher du fruit sur ce figuier, et je n'en trouve pas. Coupe-le. A quoi bon le laisser épuiser le sol?' [8] Mais le vigneron lui répondit : 'Seigneur, laisse-le encore cette année, le temps que je bêche autour pour y mettre du fumier. [9] Peut-être donnera-t-il du fruit à l'avenir. Sinon, tu le couperas.'» «Guérison d une infirme et paraboles du Royaume» Lc 13, 10-21 [10] Jésus était en train d'enseigner dans une synagogue, le jour du sabbat. [11] Il y avait là une femme, possédée par un esprit mauvais qui la rendait infirme depuis dix-huit ans ; elle était toute courbée et absolument incapable de se redresser. [12] Quand Jésus la vit, il l'interpella : «Femme, te voilà délivrée de ton infirmité.» [13] Puis, il lui imposa les mains ; à l'instant même elle se trouva toute droite, et elle rendait gloire à Dieu. [14] Le chef de la synagogue fut indigné de voir Jésus faire une guérison le jour du sabbat. Il prit la parole pour dire à la foule : «Il y a six jours pour travailler ; venez donc vous faire guérir ces jours-là, et non pas le jour du sabbat.» [15] Le Seigneur lui répliqua : «Esprits faux que vous êtes! N'est-il pas vrai que le jour du sabbat chacun de vous détache de la mangeoire son bœuf ou son âne pour le mener boire? [16] Et cette femme, une fille d'abraham, que Satan avait liée il y a dix-huit ans, n'est-il pas vrai que le jour du sabbat il fallait la délivrer de ce lien?» [17] Ces paroles de Jésus couvraient de honte tous ses adversaires, et toute la foule était dans la joie à cause de toutes les actions éclatantes qu'il faisait.

[18] Jésus disait : «A quoi le règne de Dieu est-il comparable, à quoi vais-je le comparer? [19] Il est comparable à une graine de moutarde qu'un homme a jetée dans son jardin. Elle a poussé, elle est devenue un arbre, et les oiseaux du ciel ont fait leur nid dans ses branches.» [20] Il dit encore : «A quoi vais-je comparer le règne de Dieu? [21] Il est comparable à du levain qu'une femme enfouit dans trois grandes mesures de farine, jusqu'à ce que toute la pâte ait levé.» «Rejet des interlocuteurs de Jésus et appel des païens» Lc 13, 22-30 [22] Dans sa marche vers Jérusalem, Jésus passait par les villes et les villages en enseignant. [23] Quelqu'un lui demanda : «Seigneur, n'y aura-t-il que peu de gens à être sauvés?» Jésus leur dit : [24] «Efforcez-vous d'entrer par la porte étroite, car, je vous le déclare, beaucoup chercheront à entrer et ne le pourront pas. [25] Quand le maître de la maison se sera levé et aura fermé la porte, si vous, du dehors, vous vous mettez à frapper à la porte, en disant : 'Seigneur, ouvre-nous', il vous répondra : 'Je ne sais pas d'où vous êtes.' [26] Alors vous vous mettrez à dire : 'Nous avons mangé et bu en ta présence, et tu as enseigné sur nos places.' [27] Il vous répondra : 'Je ne sais pas d'où vous êtes. Éloignez-vous de moi, vous tous qui faites le mal.' [28] Il y aura des pleurs et des grincements de dents quand vous verrez Abraham, Isaac et Jacob et tous les prophètes dans le royaume de Dieu, et que vous serez jetés dehors. [29] Alors on viendra de l'orient et de l'occident, du nord et du midi, prendre place au festin dans le royaume de Dieu. [30] Oui, il y a des derniers qui seront premiers, et des premiers qui seront derniers.» «Jésus devant sa mort prochaine» Lc 13, 31-35 [31] A ce moment-là, quelques pharisiens s'approchèrent de Jésus pour lui dire : «Va-t'en, pars d'ici : Hérode veut te faire mourir.» [32] Il leur répliqua : «Allez dire à ce renard : Aujourd'hui et demain, je chasse les démons et je fais des guérisons ; le troisième jour, je suis au but. [33] Mais il faut que je continue ma route aujourd'hui, demain et le jour suivant, car il n'est pas possible qu'un prophète meure en dehors de Jérusalem. [34] Jérusalem, Jérusalem, toi qui tues les prophètes, toi qui lapides ceux qui te sont envoyés, combien de fois j'ai voulu rassembler tes enfants comme la poule rassemble ses poussins sous ses ailes, et vous n'avez pas voulu! [35] Maintenant, Dieu abandonne votre Temple entre vos mains. Je vous le déclare : vous ne me verrez plus jusqu'au jour où vous direz : Béni soit celui qui vient au nom du Seigneur!» «Repas chez un pharisien» Lc 14, 1-24 [1] Un jour de sabbat, Jésus était entré chez un chef des pharisiens pour y prendre son repas, et on l'observait. [2] Justement, un homme atteint d'hydropisie était là devant lui. [3] Jésus s'adressa aux docteurs de la Loi et aux pharisiens pour leur demander : «Est-il permis, oui ou non, de faire une guérison le jour du sabbat?» [4] Ils gardèrent le silence. Jésus saisit alors le malade, le guérit et le renvoya. [5] Puis il leur dit : «Si l'un de vous a son fils ou son bœuf qui tombe dans un puits, ne va-t-il pas l'en retirer aussitôt, le jour même du sabbat?» [6] Et ils furent incapables de trouver une réponse. [7] Remarquant que les invités choisissaient les premières places, il leur dit cette parabole : [8] «Quand tu es invité à des noces, ne va pas te mettre à la première place, car on peut avoir invité quelqu'un de plus important que toi. [9] Alors, celui qui vous a invités, toi et lui, viendrait te dire : 'Cède-lui ta place', [10] et tu irais, plein de honte, prendre la dernière place. Au contraire, quand tu es invité, va te mettre à la dernière place. Alors, quand viendra celui qui t'a invité, il te dira : 'Mon ami, avance plus haut', et ce sera pour toi un honneur aux yeux de tous ceux qui sont à table avec toi. [11] Qui s'élève sera abaissé ; qui s'abaisse sera élevé.» [12] Jésus disait aussi à celui qui l'avait invité : «Quand tu donnes un déjeuner ou un dîner, n'invite pas tes amis, ni tes frères, ni tes parents, ni de riches voisins ; sinon, eux aussi t'inviteraient en retour, et la politesse te serait rendue. [13] Au contraire, quand tu donnes un festin, invite des pauvres, des estropiés, des boiteux, des aveugles ; [14] et tu seras heureux, parce qu'ils n'ont rien à te rendre : cela te sera rendu à la résurrection des justes.» [15] En entendant parler Jésus, un des convives lui dit : «Heureux celui qui participera au repas dans le royaume de Dieu!» [16] Jésus lui dit : «Un homme donnait un grand dîner, et il avait invité beaucoup de monde. [17] A l'heure du dîner, il envoya son serviteur dire aux invités : 'Venez, maintenant le repas est prêt.' [18] Mais tous se mirent à s'excuser de la même façon. Le premier lui dit : 'J'ai acheté un champ, et je suis obligé d'aller le voir ; je t'en prie, excuse-moi.' [19] Un autre dit : 'J'ai acheté cinq paires de bœufs, et je pars les essayer ; je t'en prie, excuse-moi.' [20] Un troisième dit : 'Je viens de me marier, et, pour cette raison, je ne peux pas venir.' 21] A son retour, le serviteur rapporta ces paroles à son maître. Plein de colère, le maître de maison dit à son serviteur : 'Dépêche-toi d'aller sur les places et dans les rues de la ville, et amène ici les pauvres, les estropiés, les aveugles et les boiteux.' [22] Le serviteur revint lui dire : 'Maître, ce que tu as ordonné est fait, et il reste de la place.' [23] Le maître dit alors au serviteur : 'Va sur les routes et dans les sentiers, et insiste pour faire entrer les gens, afin que ma maison soit remplie. [24] Car, je vous le dis, aucun de ces hommes qui avaient été invités ne profitera de mon dîner.'»