Risques liés à l utilisation des principaux désinfectants utilisés en milieu de soins R Garnier 1NosoPicard 2015 24/03/2015
Désinfectants utilisés en milieu de soins Chimiquement très divers Alcools Essentiellement, éthanol et isopropanol Hypochlorites Eau de Javel, solution de Dakin, polychloroisocyanurates Oxydants (autres que les hypochlorites) Eau oxygénée, acide peracétique Produits iodés Alcool iodé, teinture d iode, solution de Lugol, solution de Tarnier Polyvidone iodée Phénols et chlorophénols 2NosoPicard2015 24/03/2015
Désinfectants utilisés en milieu de soins Chimiquement très divers Ammoniums quaternaires Chlorure de benzalkonium, bromure de cétrimonium Chlorhexidine et biguanides chlorés Carbanilides Triclocarban Diamidines Hexamidine Aldéhydes Formadéhyde, glutaraldéhyde, glyoxal Colorants Éosine, fluorescéine, etc. 3NosoPicard 2015 24/03/2015
Désinfectants utilisés en milieu de soins Matières actives souvent en association Adjuvants : Tensioactifs anioniques, non ioniques, cationiques et amphotères Solvants Éthers de glycol, glycols (propylène glycol) Sels alcalins de sodium ou de potassium Enzymes Colorants Parfums 4NosoPicard 2015 24/03/2015
Dangers des matières actives Risques associés à l exposition DÉSINFECTANTS EN MILIEU DE SOINS 5NosoPicard 2015 24/03/2015
Alcools Ethanol Toxicité aiguë Irritation De la peau en cas de contact prolongé Des muqueuses, en cas de contact, même bref Vapeurs faiblement irritantes à partir de 5 000 ppm, modérément irritantes à 20 000 ppm. Dépression du système nerveux central Syndrome ébrieux, puis coma Acidose métabolique Intoxication systémique fait généralement suite à ingestion Inhalation : discret syndrome ébrieux pour 9 000 ppm x 30 min VLCT : 5000 ppm (9500 mg/m 3 ) Pas de risque de passage systémique important par contact cutané, en l absence d occlusion Du fait de la volatilité de l éthanol 6NosoPicard 2015 24/03/2015
Alcools Ethanol Toxicité chronique Irritation De la peau en cas de contact prolongé et répété Complications systémiques Encéphalopathie, neuropathie périphérique, hépatite, anémie, etc. Seulement en cas d intoxication chronique par ingestion Effets cancérogènes (tractus digestif supérieur, foie, sein, colon-rectum) Seulement en cas d intoxication chronique par ingestion Effets sur la reproduction Diminution de la fertilité masculine Diminution de la libido, atrophie testiculaire Seulement en cas d intoxication chronique par ingestion Effets sur le développement Retard de croissance, troubles mentaux organiques, syndrome malformatif Seulement en cas d intoxication chronique par ingestion VME : 1000 ppm (1900 mg/m 3 ) 7NosoPicard 2015 24/03/2015
Alcools Isopropanol Toxicité aiguë Irritation Cutanée : en cas de contact prolongé Muqueuses : en cas de contact direct même bref Vapeurs : faiblement irritantes à 200 ppm x plusieurs heures ; modérément irritantes à 800 ppm Toxicité systémique Syndrome ébrieux, puis coma Acidose métabolique Pas de cas d intoxication aiguë rapporté après exposition à des vapeurs ou des aérosols Discrets troubles de l équilibre à 400 ppm x 4 heures VLCT : 400 ppm (980 mg/m 3 ) Pas de risque de passage systémique important par contact cutané, en l absence d occlusion Du fait de la volatilité de l isopropanol 8NosoPicard 2015 24/03/2015
Alcools Isopropanol Toxicité chronique Irritation De la peau : en cas de contact répété Complications systémiques Troubles mentaux organiques Jamais rapportés chez travailleurs exposés Effets sur la reproduction Expérimentalement, pas d effet sur la fertilité en l absence d autres effets systémiques Expérimentalement, pas d effet sur le développement, en l absence d effets toxiques chez les mères Pas d effet sur la fertilité ou le développement rapporté chez l homme Cancérogénicité Pas d effet cancérogène chez le rat et la souris, après inhalation répétée Excès de risque de cancer des VAS chez salariés effectuant synthèse de l isopropanol par le procédé à l acide fort Pas imputable à l isopropanol Surveillance biométrologique En principe, possible : acétonurie (IBE : 40 mg/l fin de poste, fin de semaine) Généralement inutile 9NosoPicard 2015 24/03/2015
Solutés hydro-alcooliques Risques associés à l emploi de solutés alcooliques en milieu de soins Solutions concentrées d éthanol et/ou d isopropanol Souvent, avec d autres matières actives et divers adjuvants cosmétiques (extraits végétaux, parfums, colorants, etc.) Risque d incendie Alcools facilement inflammables Quelques accidents (bénins) rapportés : souvent à l occasion de l allumage d une cigarette Pas de risque d intoxication systémique Dans des conditions d utilisation raisonnablement prévisibles Plusieurs études avec des volontaires n ont montré que des élévations faibles des concentrations sanguines d éthanol ou d isopropanol après l emploi répété (20-50 fois en 4 heures) de solutés hydro-alcooliques pour la désinfection des mains : Éthanolémie< 0, 1 g/l Isopropanolémie < 0,01 g/l En revanche, assez nombreux cas rapportés d intoxication alcoolique volontaire par ingestion NosoPicard 2015 24/03/2015 10
Solutés hydro-alcooliques Risques associés à l emploi de solutés alcooliques en milieu de soins Dermatose de contact Chez volontaires, pas de dermite aiguë observée, même en cas d emploi très fréquent (50 fois en 4 heures) Probablement, en raison de l évaporation rapide En milieu de travail, application répétée de solutés hydroalcooliques, généralement mieux tolérée que lavage des mains répété Quelques cas de dermite d irritation rapportés Mains sèches et érythémateuses Facteurs favorisants Utilisation de gants avant séchage Terrain (atopie, xérose ) Rôle des adjuvants NosoPicard 2015 24/03/2015 11
Hypochlorites Agissent en générant oxygène et chlore actif Eaux et extraits de Javel Solutions aqueuses d hypochorites(généralement de sodium) Prêtes à l emploi : 2,6 % de chlore actif Concentrées : 9, 6 % de chlore actif ph > 11,5 Stabilisation par soude Réglementairement : NaOH < 1,5 % Toxicité Irritants Mélanges dangereux : Avec acides : libération de chlore Avec ammoniaque : libération de chloramines Eczéma de contact Rôle du chrome 24/03/2015 NosoPicard 2015 12
Hypochlorites Polychloroisocyanurates Dans l eau, hydrolysés en acide isocyanurique et hypochlorite En cas de contamination galet ou comprimé par l eau Réaction exothermique possiblement explosive Production de chlore et de trichlorure d azote Toxicité Irritants Solution de Dakin Mélange d hypochlorite de sodium (0,5 % chlore actif) et de permanganate de potassium (10 mg/l) Toxicité Celle de l hypochlorite dilué Toxicité du manganèse? Pas pour le personnel soignant 24/03/2015 NosoPicard 2015 13
Acide peracétique Utilisé comme biocide, en association avec le peroxyde d hydrogène Les solutions désinfectantes prêtes à l emploi sont un mélange en équilibre de : Acide peracétique (0,3 % à 40 % ; plutôt 2,5 % à 15 % en milieu de soins) Acide acétique Peroxyde d hydrogène Eau Avec des stabilisants Acide peracétique : acide faible, puissant oxydant Réactions violentes avec anhydrides, éthers, oléfines, chlorure de sodium et en cas de chauffage (110 C) Attaque de la plupart des métaux NosoPicard 2015 24/03/2015 14
Acide peracétique et peroxyde d hydrogène Irritation Acide peracétique Irritant pour la peau dès 0,1 %, pour les yeux dès 0,04 % Corrosif pour la peau dès 4 %, pour les yeux dès 0,4 % Discrète irritation respiratoire pour des concentrations atmosphériques comprises entre 0,005 et 1,84 mg/m 3 Acide acétique Irritant pour la peau à partir de 10 % Corrosif à partir de 90 % (mais risque de brûlure chimique dès 10 %, en cas de contact prolongé) Faible irritation respiratoire dès 10 ppm, intolérable plus de 3 minutes à 1000 ppm VLCT: 10 ppm (25 mg/m 3 ) ; aux USA et en Allemagne VLEP 8h : 10 ppm Seuil olfactif : 0,5 ppm Peroxyde d hydrogène (3% = 10 volumes O 2 ) Irritant dès 5 %, fortement à partir de 15 % ; Corrosif à 70 % Pas d irritation respiratoire chez des volontaires exposés à 5 mg/m 3 VME indicative : 1 ppm (1,5 mg/m 3 ) NosoPicard 2015 24/03/2015 15
Acide peracétique et peroxyde d hydrogène Sensibilisation Ni l acide peracétique, ni le peroxyde d hydrogène ne sont sensibilisants Mais certains adjuvants peuvent être à l origine d une dermatose allergique de contact Décoloration Des cheveux, poils, cils et sourcils exposés Parfois associés à des placards cutanés jaunâtres ou chamoisés Effets régressifs à l arrêt de l exposition Toxicité systémique Improbable dans les conditions d exposition professionnelle raisonnablement prévisibles Pourrait résulter d une ingestion ou d une brûlure cutanée étendue Le risque est principalement celui d embolies gazeuse (par libération d oxygène dans les brèches cutanées ou muqueuses) Portales, en cas d ingestion, pulmonaires dans les autres cas NosoPicard 2015 24/03/2015 16
Produits iodés Solutions alcooliques d iode Alcool iodé Alcool éthylique 70 + 1 % iode Teinture d iode Alcool éthylique 70 + 5 % iode Solutions aqueuses d iode Lugol 1 % iode métalloïdique + 2 % iodure de potassium Solution de Tarnier 0,15 % iode Iodophores Povidone iodée 24/03/2015 NosoPicard 2015 17
Produits iodés Toxicité Celle de l iode Éventuellement celles du solvant (alcool) et des adjuvants Toxicité de l iode Irritation Intoxication systémique par l iode Iodides Iodisme céphalées, fièvre, éternuements, rhinorrhée, conjonctivite, hypersalivation, parotidite, stomatite, laryngite, bronchite, éruptions cutanées Dysthyroïdie Hypothyroïdie, plus souvent qu hyperthyroïdie Risque de saturation thyroïdienne quand iodurie > 400 µg/24 heures N : 100-250 µg/24 h) Réactions allergiques Urticaire, éruptions bulleuses, érythrodermie, rashes hémorragiques, myalgies, adénopathies, arthralgies, fièvre 24/03/2015 NosoPicard 2015 18
Phénols et chlorophénols Toxicité Irritants Difficulté de la décontamination des revêtements superficiels Eau + savon + rinçage abondant puis Isopropanol si contamination < 5 % surface corporelle Solution aqueuse PEG 4000 si > 5 % surface corporelle Efficacité discutée Toxicité aiguë Ingestion ou contamination cutanée étendue Atteinte polyvisvérale Coma, myoclonies, convulsions Troubles du rythme cardiaque, hypotension, collapsus OAP Rhabdomyolyse Méthémoglobinémie, hémolyse Cytolyse hépatique Atteinte tubulaire rénale Acidose métabolique, coagulopathie de consommation Coloration brun verdâtre des urines 24/03/2015 NosoPicard 2015 19
Phénols et chlorophénols Toxicité chronique Irritation Eczéma de contact Troubles mentaux organiques Néphropathies tubulaire et/ou glomérulaire Cytolyse hépatique Ochronose 24/03/2015 NosoPicard 2015 20
Ammoniums quaternaires Les plus employés dans les désinfectants Chlorures de benzalkonium Chlorures d alkyldiméthylbenzylammonium Alkyl (R) = C 8 à C 18 Bromure de cétrimonium En solution aqueuse ou hydroalcoolique Eventuellement associés à d autres biocides NosoPicard 2015 24/03/2015 21
Ammoniums quaternaires Toxicité systémique Négligeable, en cas d exposition professionnelle En raison d une faible absorption Observée en cas d ingestion ou d administration parentérale Brûlures chimiques au point de contact Dépression du système nerveux central, convulsions Fasciculations, parésies, paralysies périphériques Méthémoglobinémie, hémolyse Avec cétrimonium NosoPicard 2015 24/03/2015 22
Ammoniums quaternaires Irritation Puissants irritants : les solutions aqueuses sont Irritantes pour la peau et les muqueuses, dès 0,1 % (en cas de contact prolongé ou répété) Fortement irritantes à 1 % Corrosives à 10 % Histaminolibération À faible concentration (< 0,1 %) Peut être à l origine d une urticaire, d une rhinoconjonctivite et/ou d un asthme Sensibilisation A faible concentration (dès 0,05 %, expérimentalement) Peut être à l origine d eczéma de contact ou aéroporté, de rhinoconjonctiviteou d asthme allergique Une des principales causes de dermatite de contact, de rhinoconjonctiviteet d asthme en milieu de soins La 3 ème cause d asthme avec période de latence pour ONAP (2008-2010) 13 % des cas Rapide augmentation des cas avec l utilisation des ammoniums quaternaires, en remplacement des aldéhydes et l application en pulvérisation. NosoPicard 2015 24/03/2015 23
Chlorhexidine Biguanide chloré Utilisée sous forme de diacétate ou de digluconate En solution aqueuse ou hydro-alcoolique à des concentrations comprises entre 0,05% et 4 % NosoPicard 2015 24/03/2015 24
Chlorhexidine Irritation Solutions irritantes dès 1 % Dès 0,1 % pour l œil Corrosives au-delà de 10 % Lésions oculaires sévères dès 4 % Sensibilisation Urticaire, eczéma Rhinoconjonctivite et asthme Toxicité systémique Seulement après ingestion ou administration parentérale Troubles de conscience Troubles hémodynamiques Syndrome de détresse respiratoire aiguë Atteinte hépatique NosoPicard 2015 24/03/2015 25
Hexamidine Diamidine Utilisée en solutions aqueuses, alcooliques ou dans des glycols À 1-2 pour mille Toxicité Celle du solvant de support Irritation cutanée Réactions allergiques 24/03/2015 NosoPicard 2015 26
Aldéhydes Principaux aldéhydes utilisés comme désinfectants (ou l ayant été) : Formaldéhyde Glyoxal 24/03/2015 NosoPicard 2015 Glutaraldéhyde 27
Formaldéhyde Très réactif Solutions aqueuses stabilisées au méthanol Volatil aux températures ambiantes habituelles Toxicité Irritation Au-delà de 250 µg/m 3 Effets marqués au-delà de 1 ppm (1200 µg/m 3 ) Odeur âcre perceptible dès 60 µg/m 3 Sensibilisation Urticaire, eczéma Rhino-conjonctivite, asthme Choc anaphylactique, hémolyse Effets sur la reproduction Toxicité testiculaire : seulement après administration parentérale Effets sur le développement fœtal : seulement après administration parentérale 24/03/2015 NosoPicard 2015 28
Formaldéhyde Génotoxicité Tests positifs in vitro Procaryotes Cellules de mammifères Liaison à l ADN, mutations, aberrations chromosomiques, échanges de chromatides-sœurs Test positifs in vivo Voies respiratoires Chez l animal et chez l homme ± Lymphocytes circulants Cancérogénicité Carcinomes épidermoïdes des fosses nasales chez le rat Excès de risque de cancer naso-pharyngé chez l homme IARC : groupe 1 ; UE : catégorie 2 (CLP), en cours de révision 24/03/2015 NosoPicard 2015 29
Glyoxal Toxicité Irritation Sensibilisation Urticaire, eczéma Rhino-conjonctivite et asthme Génotoxicité Mutagène pour procaryote In vitro sur cellules de mammifères : effets mutagènes et clastogènes In vivo : effets génotoxiques au niveau des zones de contact. Cancérogénicité Pas d effet cancérogène observé dans deux études par voie orale (1) et cutanée (1) Mais problèmes méthodologiques En particulier, durée insuffisante des études. 24/03/2015 NosoPicard 2015 30
Glutaraldéhyde Toxicité Irritation Sensibilisation Urticaire, eczéma Rhino-conjonctivite et asthme Génotoxicité Pas d effet génotoxique observé in vitro ou in vivo Cancérogénicité Pas d effet cancérogène significatif observé dans 1 étude de 2 ans par inhalation chez le rat et la souris 24/03/2015 NosoPicard 2015 31
Conclusions Pathologies induites par les biocides utilisés en milieu de soins sont principalement : De contact : cutanées, oculaires et respiratoires Irritatives et/ou allergiques, voire pharmacologiques (histaminolibération) Risques systémiques très faibles Surveillance de l exposition Clinique Signes d irritation ou d allergie (voire histaminolibération) Cutanée, oculaire ou respiratoire Fonctionnelle respiratoire En cas d exposition à des aérosols Boucle débit-volume en début d exposition, périodiquement et en cas de signes d appel Métrologie Atmosphérique en cas d exposition symptomatique à des aérosols Biométrologie généralement sans intérêt. NosoPicard 2015 24/03/2015 32
Conclusions Guère de solution de substitution : Les biocides sont nécessairement biologiquement agressifs et au moins irritants et sensibilisants La prévention doit viser à limiter l exposition : En intervenant sur la mise en œuvre : Généralisation des applications en spray pas justifiée et dangereuse En proposant des EPI adaptés NosoPicard 2015 24/03/2015 33