MADAGASCAR : quel avenir?



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Transcription:

MADAGASCAR : quel avenir? Jean-André Audissou (France) La visite des réserves de Madagascar permet d évaluer l importante richesse de la faune et de la flore de cette île dont la superficie dépasse celle de la France. Mais il suffit de sillonner le pays hors des sentiers battus pour se rendre compte que la situation est plus tragique qu elle n apparaît en réalité. Les premiers occupants de l île arrivent il y a environ 2500 ans. A l époque, le pays est couvert de forêts. La déforestation commence dès le début des premiers peuplements, mais s accélère avec la croissance démographique. Depuis 1950, la forêt primaire a régressé de plus de 50%. 300000 hectares sont détruits chaque année. On considère qu à l heure actuelle, 92% de la forêt originelle a disparu, entraînant par conséquence la disparition de nombreuses espèces végétales et animales. Sur les 36 espèces de Lémuriens ayant vécu à Madagascar, 14 ont déjà disparu. Les voyages que j ai effectués dans l île ces dernières années m ont permis d évaluer l accélération de la dégradation de certains biotopes. Les 3 fléaux les plus importants sont la déforestation, le brûlis et le surpâturage, et l invasion des plantes étrangères. Déforestation: L abattage des arbres est interdit. Néanmoins, les autochtones pénètrent la forêt et font des coupes ponctuelles en espérant que leur activité passe inaperçue. Ces coupes provoquent des trous de lumière qui entraînent la disparition des plantes ombrophiles. Ainsi, dans la Montagne des Français au nord de l île, il est facile de constater la raréfaction des orchidées épiphytes, des orchidées terrestres (Oeceoclades), des Impatiens tuberosa etc. dans les endroits où la couverture végétale est devenue insuffisante. En 2006, j ai pris le temps de revenir voir la forêt primaire d Ambositra après une première visite 3 ans plus tôt. Les changements étaient considérables. Une partie avait été coupée et brûlée (photos 1A & 1B). Quelques caméléons qui n avaient pas péri dans ce chaos erraient au sol dans la cendre. Pour le reste, des coupes sauvages avaient éclairci la forêt et j ai retrouvé ce que j avais pu remarquer dans la Montagne des Français. A savoir la disparition de nombreuses orchidées, Kalanchoe et Peperomia épiphytes etc 2

1A 1B 1A. En 2003, forêt primaire S. Ambositra. (photo : J.A. Audissou). 3 1B En 2006, forêt primaire partiellement brûlée S. Ambositra (photo : J.A. Audissou). Au Cap d Ambre, d immenses pâturages ont remplacé la forêt. Seuls subsistent quelques îlots de végétation originelle (p. 9), grâce à leur statut de Fady. Les Fady sont un ensemble d interdits visant à respecter la mémoire des ancêtres. Il n est pas prudent d enfreindre ces règles souvent très compliquées. Dans certaines régions comme celle de Tuléar, la déforestation a rendu le bois rare et le prix du charbon de bois y est actuellement cinq fois plus élevé que la moyenne nationale. John Lavranos, avec lequel je parcourais la région d Ambalavao en 2005, me confiait que cette région était encore couverte de forêts il y a une trentaine d années. La minuscule réserve d Anja (photo 3A, 3B & 3C) est l illustration de ce que pouvait être le paysage à l époque. Les mangroves ont également subi des dommages irréversibles sur de nombreuses côtes, entraînant un profond déséquilibre des écosystèmes côtiers. Surpâturage et brûlis : Le cheptel malgache, composé d une dizaine de millions de Zébus et d un grand nombre de chèvres exerce une pression importante sur les écosystèmes, quand ils existent encore. En effet, certaines régions ne sont plus que d immenses plaines herbeuses qui ont remplacé la forêt xérophile (photo 4). Le brûlis, qui, dans un premier temps, a permis de libérer de vastes étendues de pâturage, est destiné maintenant à induire la repousse des graminées sauvages pendant la saison sèche (photo 5) et est pratiqué une à deux fois par an. Avec le feu, la population rurale dispose d un outil précieux pour la conduite des pâturages, mais l utilise trop souvent sans discernement. De grandes surfaces sont ainsi incendiées inutilement provoquant une sélection très sévère de la flore naturelle. Dans les régions montagneuses du centre, seules les dômes rocheux épargnés par le feu hébergent encore une flore originelle composée principalement de plantes succulentes et d orchidées. C est également dans ces régions que l on peut mesurer l ampleur de l érosion causée, à la saison des pluies, par le ruissellement de l eau sur des sols dénudés (photo 6). L Aloe macroclada est l exemple type de ces plantes autrefois très abondantes et qui

se raréfient considérablement malgré une aire de répartition très grande. Ce grand Aloe a la capacité de résister à un grand nombre de feux répétés, mais pas éternellement.(photo 7A & 7B); Un autre exemple concerne l Aloe albiflora qui n a jamais plus été rencontré depuis sa découverte par Boiteau en 1939. En 2003, j ai participé à une prospection dirigée par Norbert Rebmann pour tenter, entre autre, de retrouver dans la région de Tsivory cette espèce très localisée, en vain. C est une région très affectée par les brûlis et il est fort probable qu elle ait à jamais disparu. C est dans le Sud malgache que le surpâturage est le plus dévastateur. Les forêts xérophiles à Didiéracées sont envahies par des millions de zébus et de chèvres, surtout à la saison sèche, c est-à-dire pendant les deux tiers de l année. Tout le couvert végétal est brouté ou piétiné entraînant la disparition de nombreuses plantes ombrophiles telles que Ceropegia sp., Senecio sp., Euphorbia sp., Stapelianthus sp. etc La région du Lac salé d Ihoda, à l Est de Tsiombe, en est un des nombreux exemples. La forêt autour de ce lac était réputée bien conservée il y a encore peu de temps. Mais ma visite de 2006 a pu mesurer l ampleur des dégradations. La disparition du tapis végétal dans ces forêts entraîne par conséquence une dégradation des sols. En témoigne l état de ce vieil Aloe suzannae bicéphale (photo 8A & 8B), qui a fini par se coucher alors qu il avait résisté à tout, même aux cyclones, durant des siècles. Plantes introduites : Les plantations d Agave sisalana est l exemple type de l introduction d une plante étrangère à des fins économiques. Dans la région d Amboasary, des milliers d hectares de forêts xérophiles ont été détruits pour permettre la culture de cet Agave, connu depuis des siècles pour la qualité de ses fibres (photo 9). Des reliques de forêt originelle subsistent sur les collines environnantes, mais là comme partout ailleurs, la dégradation de la végétation entraîne l érosion et la disparition de nombreuses espèces endémiques. Ayant visité la région à deux reprises en l espace de 3 ans, j ai pu remarquer sur certains sites la disparition d Euphorbia ambovombense var. ambatomenaensis. L Aloe ruffingiana n est pas mieux loti. Bien qu encore abondant dans certains endroits, il souffre de la disparition des Didiéracées qui lui procuraient l ombre nécessaire à un développement optimal. Agave ixtlii, une forme compacte d Agave angustifolia, est utilisée pour faire des haies et des enclos à bétail, mais c est une espèce qui produit sur ses hampes florales une quantité importante de bulbilles qui, en tombant au sol, prolifèrent et étouffent la végétation locale. Opuntia monacantha, introduite au XVIIIe siècle, est utilisée de la même façon autour des habitations et des champs et forme des barrières de protection impénétrables. Devant l ampleur de la prolifération de cette plante (photo 11), il fût décidé en 1923 d introduire une cochenille pour l anéantir. Ce qui fût fait en seulement 4 ans. Puis le parasite disparut et l invasion reprit de plus belle. Opuntia ficus-indica var. anacantha quant à elle est plantée pour servir de nourriture aux zébus pendant la saison sèche. Les bergers mettent le feu aux pieds pour brûler les épines. 4

3A 3A. Réserve d'anja S. Ambalavo (Photo : J.A. Audissou). 3B 3B. Réserve d'anja S. Ambalavo (Photo : J.A. Audissou). 3C 4 3C. Réserve d'anja, Maki (Photo : J.A. Audissou). 4. Didiera trollii, S. Beraketa. Ce qui reste de la forêt sèche. (Photo : J.A. Audissou). 6 6. Lavaka & brûlis, Itremo (Photo : J.A. Audissou). Brûlis S. Ihosy (Photo : J.A. Audissou). 5

8A. à G. En 2003, Aloe suzannae bicéphale Ranomainty. 8B. au-dessus : Le même en 2006. (photos : J.A. Audissou). Malgré son statut, la réserve du Cap Sainte Marie, à l extrémité sud de l île, paraît à l abandon. Chaque année, les oponces s étendent un peu plus et les chèvres broutent sans contrainte. En 2005, les gardes me confiaient qu ils allaient procéder à l éradication des oponces, mais à mon passage suivant un an après, rien n avait l air d avoir changé. Les tentatives de reboisement sont également source d introduction d espèces étrangères. Des plantations de différentes essences (Eucalyptus sp., Pinus sp., Acacia sp.) ont débuté il y a un siècle pour pallier au manque de bois de chauffage et de bois d œuvre et stopper l érosion des sols. Malheureusement, l érosion continue à progresser car il n est pas rare que les forêts ainsi créées soient victimes de brûlis non contrôlés. Il faut aussi dire que plus rien ne pousse sous certaines espèces, tels les Eucalyptus et les Pinus. Au sud de Manambaro dans la région de Fort Dauphin, la végétation originelle disparaît petit à petit au profit de l Eucalyptus qui stérilise les sols. Ainsi, l Euphorbia francoisii (photo 10) est gravement menacée d extinction. Dans la région d Ambositra, des plantations de Pinus sp. ont pris le pas sur la végétation locale. A Ivato, l Aloe conifera ne subsiste plus que sur des dômes granitiques impropres à l établissement de ces conifères. De nombreux autres exemples pourraient encore être 9 cités. 7

11 Opuntia dans forêt xérophile (photo : J.A. Audissou). Enfin, il faut parler de l aménagement du territoire, notamment des exploitations minières, même si le phénomène est encore anecdotique. Dans la région de Fort Dauphin au Sud-Est de l île, un immense gisement de charbon a été découvert et devrait être mis en exploitation prochainement. C est un gisement à ciel ouvert qui détruira des centaines d hectares de végétation. La région est connue pour sa grande diversité de plantes succulentes (Aloe sp., Euphorbia sp. etc ), de plantes carnivores (Nepenthes sp.), d Orchidées etc Il est regrettable qu aucune prospection botanique n ait été décidée avant l ouverture de la mine. Pour l évacuation et le transport du charbon, de gros travaux routiers et portuaires sont en cours. Un nouveau port est en projet et tout le littoral à l ouest de Fort Dauphin est défiguré. En témoignent ces collines (photo 12A & 12B) qui abritaient en particulier Aloe bakeri et qui sont détruites à coups d explosifs pour niveler le terrain et produire des matériaux de construction. Certes, il reste encore de nombreuses espèces à découvrir. En témoigne la description 8

de nouvelles espèces chaque année. En général, ces plantes poussent dans des endroits difficiles d accès et sont souvent découvertes par des équipes de prospecteurs autochtones, capables de parcourir de longues distances à pied pendant 15 jours à 3 semaines, de camper n importe où et de se nourrir frugalement. Les Aloe pronkii, A. florenceae etc décrits récemment ont été découverts dans ces conditions et leur description ne comporte pas de références de sites précises. Mais à côté de cela, de nombreuses espèces, rencontrées fréquemment il y a un siècle, ont disparu à jamais. Sans compter celles qui ont disparu avant d avoir pu être découvertes. Il est illusoire de penser qu il soit possible un jour de replanter les zones où toute végétation a disparu. En effet, les sols qui ne sont plus protégés de l érosion par un couvert végétal sont devenus stériles. Les «Lavaka», ces profondes plaies dues à cette érosion, en témoignent (photo 6). Cet article n a pas pour objet de porter un jugement sur les traditions ancestrales et les comportements sociaux d une population classée parmi les plus pauvres de la planète. Il s agit 2 pour ce peuple misérable de survivre par tous les moyens mis à leur disposition par la nature, même si ces moyens les condamnent à une paupérisation encore plus grande à très court terme. La croissance démographique et la carence des autorités politiques font craindre pour ce pays un avenir noir irréversible. 9 10 13 Texte & photos : J.-A Audissou j-a.audissou@wanadoo.fr

12A. En 2003, Site Aloe bakeri Fort Dauphin (photo : J.A. Audissou). 12B. Le même site d Aloe bakeri Fort Dauphin en 2006 (photo : J.A. Audissou). REFERENCES BIBLIOGRAPHIQUES : Attenborough D. : Madagascar, a natural History, Preston-Mafham (1991) Audissou J-A. : Aloes of Madagascar, Part.1, Alsterworthia International, Vol. 5, N 1 (2005) : 24-32. Audissou J-A. : Aloes of Madagascar, Part. 2, Alsterworthia International, Vol. 5, N 2 (2005) : 5-10. Audissou J-A. : A Colour-illustrated of an expedition to central, south & southwestern Madagascar, Alsterworthia International, Special Issue N 8 (2005) : 41-90 Guillaumet J-L., Koechlin J. & Morat P. : Flore et végétation de Madagascar, Gantner (1997) Rauh W. : Succulent and xerophytic plants of Madagascar Vol. 1 & Vol. 2 (1998). 10