Thème 1 histoire - Le rapport des sociétés à leur passé

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Transcription:

Thème 1 histoire - Le rapport des sociétés à leur passé L intérêt des sociétés pour leur passé s est renforcé à partir du XIXe siècle, époque à laquelle l industrialisation a accéléré les mutations des sociétés. Cet intérêt s est encore accru au cours des dernières décennies, en lien notamment avec le processus de mondialisation culturelle qui conduit à la valorisation par les sociétés de leur passé comme vecteur de leur identité. Il existe plusieurs types de rapports au passé. L histoire est une science qui permet aux sociétés de comprendre leur passé. La démarche de l historien, fondée sur une méthode rigoureuse et critique d exploitation des sources, est déterminée par le souci d objectivité et de vérité, même si les résultats auxquels l historien aboutit peuvent ensuite être remis en cause par la découverte d autres sources ou par la réflexion d autres historiens. Mais les sociétés entretiennent d autres rapports avec leur passé : elles font le choix d en conserver des traces, le patrimoine, et des souvenirs, la mémoire. Contrairement à l histoire, les mémoires et le patrimoine relèvent de la subjectivité, c est-à-dire de leur détermination par les sujets qui les conçoivent (choix des vestiges considérés comme patrimoniaux, mémoire sélective et évolutive de certains évènements). L étude de ces choix patrimoniaux ou mémoriels constitue en elle-même un champ d étude historique, visant à comprendre comment les sociétés considèrent leur passé. Chapitre 1 Le patrimoine : lecture historique. Etude du cas de Jérusalem Le patrimoine est une trace de son histoire qu une société décide de préserver et de transmettre. Si cette notion fait d abord

référence à des bâtiments anciens, elle s étend au XXe siècle, pour englober aujourd hui des paysages, des fêtes, des objets Les villes concentrent les principaux vestiges, et la richesse du patrimoine de certaines d entre elles leur vaut une reconnaissance internationale. C est le cas notamment de Jérusalem (carte Israël, plan Jérusalem), dont la vieille ville délimitée par des murailles du XVIe siècle est inscrite depuis 1981 au patrimoine mondial de l humanité par l UNESCO (Organisation des Nations unies pour l éducation, la science et la culture, créée en 1945). En quoi le patrimoine de la vieille ville de Jérusalem est-il exceptionnel et quels enjeux représente-t-il? Jérusalem abrite des bâtiments symboliques des trois grandes religions monothéistes. Depuis le Moyen-Age, ce patrimoine fait l objet de rivalités et constitue l un des enjeux du conflit israélo-palestinien actuel. I) Jérusalem, ville trois fois sainte Jérusalem est une ville sainte pour les juifs, les chrétiens et les musulmans. 1) Ville sainte du judaïsme Vers 1200 av. JC, les Hébreux s installent en Palestine et vers 1000 av. JC le roi David conquiert Jérusalem et en fait la capitale du royaume d Israël. Selon la Bible, son fils Salomon y construit le Temple qui s impose comme le seul lieu saint des Hébreux, qui y viennent en pèlerinage lors des grandes fêtes. Il abrite en effet l Arche d alliance qui contient les tables de la Loi (Dix Commandements donnés par Yahvé à Moïse), signe de l alliance entre Yahvé et les Juifs. Ce temple, détruit lors d une invasion babylonienne en 587 av. JC, est reconstruit au cours du VIe siècle av. JC, et de nouveau au Ier siècle av. JC par le roi Hérode, alors que la Palestine est passée sous domination romaine

(reconstitution Temple). Le Temple est définitivement détruit par les Romains en 70 ap. JC suite à une révolte des Juifs. Depuis, il ne subsiste de ce temple qu un seul vestige, un morceau de son mur d enceinte, le «mur occidental» ou «mur des Lamentations», qui constitue un patrimoine sacré et le principal lieu de pèlerinage pour les Juifs. La répression romaine accélère la diaspora des Juifs dans l ensemble de l empire romain. Et suite à une autre révolte au IIe siècle ap. JC, les autorités romaines expulsent les derniers Juifs de Jérusalem ; les temples païens (des religions polythéistes) se multiplient, avant qu apparaissent des églises. 2) Ville sainte du christianisme Pour les chrétiens, Jérusalem, avec Bethléem et Nazareth, fait partie des lieux saints, c est-à-dire des villes de Palestine où Jésus vécut et mourut. D après les Evangiles, c est à Jérusalem que se déroula la Passion (arrestation, jugement et crucifixion) et la résurrection de Jésus. A partir du IVe siècle, époque à laquelle le christianisme est toléré dans l empire romain, les empereurs font construire des églises à Jérusalem, notamment celle du Saint- Sépulcre, construite en 326 par le premier empereur chrétien, Constantin, à l emplacement supposé de la crucifixion et de la mise au tombeau du Christ. Lorsque le christianisme devient la religion officielle de l empire romain à la fin du IVe siècle, les temples païens sont détruits et la construction d églises se poursuit sous l empire byzantin. Jérusalem devient dès le IVe siècle un des plus importants centres de pèlerinage chrétien. Mais en 638, Jérusalem est prise par les musulmans. 3) Ville sainte de l islam A la fin du VIIe siècle, le calife Abd Al-Malik fait construire la mosquée Al Aqsa sur le mont du Temple (appelé «esplanade des

Mosquées» par les musulmans), à l endroit même où s élevait le temple juif détruit en 70 (photo esplanade). Pour les musulmans, Jérusalem est, avec Médine et La Mecque, une ville sainte de l islam. En effet, selon le Coran, c est à Jérusalem que s est déroulé le voyage nocturne du prophète Mahomet, qui se serait élevé dans les cieux pour y entendre la parole d Allah. A proximité de la mosquée, sur le rocher où se serait tenu Mahomet, est érigé en 691 le Dôme du Rocher, monument commémoratif de cet épisode (photo). Conformément à la tradition musulmane, les synagogues, devenues les lieux de culte des juifs depuis la destruction du temple, et les églises, sont tolérées dans la ville, jusqu à l interdiction prononcée en 1009 par le calife Al-Hakim. La destruction des églises qu il ordonne est une des causes de la première croisade. II) Un patrimoine source de tensions Depuis le Moyen-Age, en effet, Jérusalem est devenue un enjeu pour les trois groupes religieux qui se disputent son patrimoine. 1) Jérusalem, enjeu des croisades La destruction du Saint-Sépulcre en 1009 provoque une grande émotion en Occident, renforcée en 1078 par l interdiction faite aux pèlerins chrétiens d accéder à Jérusalem. Le pape Urbain II lance en 1095 le premier appel à la croisade, conçue comme un pèlerinage armé assurant le pardon des péchés en cas de mort au combat. Pour le pape, la croisade a aussi pour objectif de pacifier l Occident en détournant la violence des chevaliers. La première croisade aboutit à la prise de Jérusalem par les croisés en 1099 et à la création d Etats latins d Orient dont le royaume de Jérusalem (carte Etats latins). Ces Etats latins sont dirigés par de grands seigneurs occidentaux et défendus par des moines-soldats

(Templiers et Hospitaliers) qui ont aussi pour mission d accueillir les pèlerins se rendant à Jérusalem. Les Juifs sont de nouveau expulsés et les Croisés s approprient le patrimoine de la ville : le Dôme du Rocher devient une église et la mosquée Al Aqsa, un palais ; l église du Saint-Sépulcre est reconstruite (photo Saint- Sépulcre, mélange roman/oriental). Mais les conquêtes chrétiennes font renaître chez les musulmans l idée de guerre sainte contre les infidèles, qui était tombée en désuétude depuis les conquêtes des VIIe et VIIIe siècles. En 1187, le sultan Saladin reprend Jérusalem aux croisés. Le Dôme du Rocher et la mosquée Al Aqsa retrouvent leur vocation originelle, d autres mosquées et madrasas (écoles coraniques) sont construites. Au XVIe siècle, Jérusalem passe sous la domination du sultan ottoman. Soliman le Magnifique fait construire les murailles qui entourent encore aujourd hui la vieille ville, et réorganise son habitat en quatre quartiers (chrétien, musulman, juif, arménien) autour des principaux sanctuaires de chaque culte. Il valorise le patrimoine musulman (Dôme du Rocher orné de céramiques), mais aussi juif et chrétien puisque des personnages bibliques (Moïse, Jésus) sont cités dans la tradition musulmane. Il aurait fait pendre l architecte responsable de la construction de la nouvelle muraille parce que celui-ci avait exclu du tracé la tombe du roi David. 2) Jérusalem, enjeu pour les sionistes au début du XXe siècle Le sionisme est un mouvement nationaliste juif fondé en 1897 par l austro-hongrois Theodor Herzl, qui se donne pour objectif la création en Palestine d un Etat pour les Juifs du monde entier, en réaction à l antisémitisme et aux persécutions dont les Juifs d Europe sont victimes, notamment en Russie et en Europe centrale. Ce mouvement est encouragé par la déclaration officielle

de Lord Balfour, ministre des Affaires Etrangères du Royaume-Uni, qui se prononce en 1917 en faveur de «l établissement en Palestine d un foyer national pour le peuple juif». En effet, la Palestine est devenue en 1917 une possession britannique suite à l effondrement de l empire ottoman. Conformément au programme sioniste, des Juifs s installent en Palestine par vague d immigration successives dès le début du XXe siècle. L extension de Jérusalem dans les «nouveaux quartiers» autour de la vieille ville, amorcée au XIXe siècle, s accélère alors. Mais l installation des Juifs se heurte au nationalisme des Arabes palestiniens, qui voudraient également faire de Jérusalem la capitale d un Etat palestinien. Les tensions culminent avec la naissance de l Etat d Israël au lendemain de la Seconde guerre mondiale. 3) Jérusalem, enjeu du conflit israélo-palestinien Après 1945, la révélation de la Shoah et le nombre important de réfugiés juifs souhaitant quitter l Europe fait de la question juive un problème international dont se saisissent les Nations Unies. En 1947, l ONU adopte un plan de partage de la Palestine prévoyant la constitution d un Etat juif et d un Etat arabe, avec un statut international pour Jérusalem (carte 1947). Israël est ainsi proclamé en 1948 mais les Etats arabes, qui rejettent ce plan de partage, entrent immédiatement en guerre contre le nouvel Etat. C est cependant Israël qui l emporte en 1949 (carte 1949), et qui prend le contrôle de 77 % de l ancienne Palestine au lieu des 56,5 % prévus dans le plan de partage. Aucun Etat palestinien ne voit le jour : la bande de Gaza passe sous administration égyptienne et la Cisjordanie, avec la partie est de Jérusalem où se trouve la vieille ville, est annexée par la Jordanie ; la partie ouest de Jérusalem passe sous contrôle israélien. En 1967, la guerre des Six-Jours est

une nouvelle victoire pour Israël qui défait les armées égyptienne, syrienne et jordanienne et occupe le plateau du Golan, le Sinaï, Gaza, la Cisjordanie et Jérusalem-Est (carte 1967). La prière des soldats israéliens devant le mur des Lamentations, inaccessible pour les Juifs depuis 1948, est le symbole de cette victoire pour Israël (photo soldats). Jérusalem est alors proclamée capitale de l Etat hébreu, décision non reconnue par la communauté internationale. La vieille ville d Israël est donc un des théâtres du conflit israélopalestinien. Des heurts éclatent régulièrement (texte affrontements en 2010). Ainsi, en 2000, la visite de l homme politique israélien Ariel Sharon sur l esplanade des Mosquées, interdite aux nonmusulmans, a été l élément déclencheur de la seconde Intifada (révolte palestinienne). Toute action touchant au patrimoine d une autre communauté peut être perçue comme une provocation ou une menace. La gestion de ce patrimoine est donc très difficile, et les fouilles archéologiques constituent un véritable enjeu politique. Fiche «Jérusalem : un patrimoine source de tensions» 1) La restauration du Saint-Sépulcre pose problème car l église est partagée entre six confessions chrétiennes qui ont chacune reçue la charge de l entretien d une partie du bâtiment. Mais les rivalités entre ces confessions empêchent la mise en œuvre de travaux de grande ampleur. En 2002, les autorités musulmanes qui gèrent l esplanade des Mosquées ont refusé la restauration d une partie du mur bordant cette esplanade par crainte que les travaux ne fournissent l occasion à Israël d accroître son contrôle sur cet espace. 2) Les fouilles entreprises par des archéologues israéliens se heurtent à une vive hostilité palestinienne qui peut conduire à des affrontements comme en 2008 dans le quartier arabe de Silwan. Les autorités palestiniennes interdisent aux musulmans de vendre

leur maison ou leur terrain aux organismes qui entreprennent les fouilles. Les Palestiniens redoutent en effet que les fouilles israéliennes conduisent à affirmer l identité «juive» de la ville au détriment de l identité musulmane. 3) Il est vrai que les résultats des fouilles israéliennes peuvent être sujets à caution : les archéologues travaillent souvent avec l objectif de confirmer par leurs découvertes le récit biblique, ce qui peut conduire à des erreurs d interprétation. En effet, les fouilles sont souvent financées par des donateurs dont les motivations peuvent être plus religieuses et politiques que scientifiques. Jérusalem se distingue donc par un patrimoine d une extrême richesse, relevant des plusieurs civilisations et reflétant l histoire millénaire de la ville. Son importance pour les trois grandes religions monothéistes en fait une référence culturelle pour plus de trois milliards de croyants et un lieu majeur de pèlerinage. Mais dans le contexte du conflit israélo-palestinien, ce patrimoine est indissociable d enjeux politiques qui en font une source permanente de tensions.