Méthode mixte versus méthode synthétique : Comparaison du niveau de langage écrit atteint en fin de CE1

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Méthode mixte versus méthode synthétique : Comparaison du niveau de langage écrit atteint en fin de CE1 Mémoire présenté par Lorette HOUVENAEGHEL (2005-2006) L objectif de cette étude est de comparer les résultats obtenus, lors d un bilan de langage écrit en fin de CE1, par des enfants ayant appris à lire avec deux méthodes de lecture différentes : méthode mixte d un côté, et méthode synthétique de l autre. Ce travail prend la suite d une étude réalisée en fin de CP, qui avait déjà montré d importantes différences de niveaux entre ces deux groupes : les enfants qui apprenaient à lire avec une méthode synthétique obtenaient des scores significativement meilleurs dans de nombreux domaines explorés. Une étude réalisée en fin de CE1 permet donc d examiner la théorie des enseignants utilisant les méthodes mixtes, selon laquelle cette différence de niveaux serait compensée en fin de cycle II. C est en effet à cette date que l enseignement de la lecture est supposé terminé pour leurs élèves. I - RECRUTEMENT DE LA POPULATION L objectif étant d évaluer le niveau de langage écrit atteint en fin de CE1 pour les enfants ne présentant pas de pathologie particulière, il a été décidé de ne pas prendre en compte les élèves souffrant de troubles associés à leurs difficultés de langages écrits. Deux écoles en milieu rural (dans la Sarthe), dont les classes avaient été suivi dans le cadre de la première étude sur les niveaux de lecture en fin de CP : - la classe M1, ayant appris à lire avec la méthode mixte Abacadalire, et composée de deux niveaux d enseignement (CE1 et CE2) - la classe S1, ayant appris à lire avec la méthode synthétique Léo et Léa Deux écoles en milieu urbain (écoles de centre ville, non ZEP) : - la classe M2 (à Tours), ayant appris à lire avec la méthode mixte Mika, et composée de deux niveaux (CE1 et CE2). - La classe S2 (à Roncq, près de Lille), ayant appris à lire avec la méthode synthétique Léo et Léa. II - PROTOCOLE D EXAMEN A) Evaluations de début d année Ces évaluations avaient pour but de mesurer les habiletés considérées comme pré-requises au développement de la lecture : le langage oral, la mémoire, l attention et le raisonnement non verbal. Les tests utilisés sont décrits dans l ordre dans lequel ils ont été administrés : 1. Le langage oral Le lexique : choisir l image correspondant au mot entendu parmi 4 images proposées (1) puis dénommer l image qui est présentée (2). La phonologie : répétition de 32 mots de complexité phonétique croissante. La compréhension : désignation de la bonne image parmi les 4 présentées, à partir d une phrase proposée. La morphosyntaxe : épreuve de complétion de 25 phrases (1) puis écoute d une phrase pour apprécier si elle est correcte ou pas. 2. La mémoire La mémoire de travail auditivo-phonologique : on donne à l enfant des mots qui n existent pas et il doit les répéter. Ce test permet de révéler un éventuel trouble de la programmation ou de la réalisation motrice de l articulation, avec une altération de la fluidité ou de l intelligibilité du langage. La mémoire immédiate : épreuve de répétition de chiffres dans l ordre direct, afin de déterminer le nombre maximal de chiffres que l enfant est capable de répéter dans l ordre où ils lui ont été énoncés (empan de chiffres). 1

3. L attention La mémoire de travail : : l enfant doit répéter les chiffres dans l ordre inverse de celui dans lequel il les a entendus (empan de chiffres envers). Test des cloches : l enfant doit rayer dans un temps chronométré le maximum de cloches sur une feuille où 35 cloches figurent parmi 112 objets. 4. Le raisonnement non verbal La complétion des formes (épreuve de raisonnement visuo-spatial) : retrouver, parmi des intrus, la forme la plus adaptée pour compléter une figure. B) Evaluations de fin d année (juin) L évaluation finale consistait en un bilan de langage écrit complet. Les deux voies de lectures y sont explorées, mais aussi l orthographe, et les autres compétences cognitives mises en jeu dans ces processus : métaphonologie, capacités de traitement visuel ou encore accès aux représentations lexicales. Il est alors possible d évaluer l utilisation des différentes procédures de lecture et écriture, ou encore la présence éventuelle de troubles associés, phonologiques et/ou visuels. 1. Les compétences cognitives associées La métaphonolgie, i.e. capacité à isoler et manipuler des phonèmes : on demande à l enfant de retirer puis d ajouter le phonème initial de mots qui ne veulent rien dire (exemple : ZAR moins le Z/zed/devient AR ; ITA avec un S devient SITA ) Le traitement visuel, qui conditionne notamment le bon développement du lexique orthographique : on demande à l enfant de comparer une suite de lettres présentée sous forme d une liste de vingt paires des trois à cinq lettres sans signification. L enfant doit déterminer si les séquences sont identiques ou différentes. L accès aux représentations lexicales : test de dénomination rapide de dessins (ce test est souvent difficile en cas de dyslexie). La segmentation de mots : l enfant doit découper six mots attachés ensemble, pour former les mots exacts (les erreurs de segmentation sont typiques des cas de dyslexiedysorthographie). 2. Les compétences en lecture L identification de mots écrits : à travers le test IME (Identification du Mot Ecrit) de l ECS Cycle II, on détermine quelle voie de lecture l enfant privilégie, entre lecture directe et lecture indirecte. L enfant doit vérifier sur une planche de 50 vignettes la congruence des dessins et des mots. La voie indirecte de lecture : lecture de logatomes de l Exalang (mots inventés, qui permettent de mesurer la connaissance et l application des règles de correspondance graphème-phonème dans le cadre d une lecture par assemblage). La lecture de mots : l enfant doit lire dans un temps limité une liste de mots de complexité croissante, réguliers et irréguliers. Cette épreuve permet d explorer les deux voies de lecture et la qualité du lexique orthographique de l enfant. Lecture de texte et compréhension : la lecture du texte est suivie d un QCM qui permet d évaluer la compréhension de lecture. En mettant cette épreuve en rapport avec les deux précédentes, on peut vérifier si la rapidité de lecture de l enfant est corrélée à la qualité de sa compréhension. 2

3. Les compétences en orthographe III - RESULTATS La voie non lexicale d écriture : épreuve de transcription de logatomes de l Exalang, à travers la dictée de huit pseudo-mots. La voie lexicale d écriture : épreuve Closure de mot (L enfant doit compléter le nom d un animal. 12 de ces noms doivent être phonologiquement plausibles ; les 9 autres doivent être correctement orthographiés), et épreuve Closure de texte (l enfant doit compléter les mots manquants). A) Des résultats nettement supérieurs des classes S sur les classes M dans les domaines suivants : 1. Métaphonologie (capacité à isoler et manipuler des phonèmes) 2. Traitement phonologique (retrait ou ajout d un phonème initial). Quelques élèves des classes M obtiennent même des résultats pathologiques dans ces épreuves. Les capacités de fusion phonémiques, essentielles pour l acquisition de la lecture, sont mieux développées chez les enfants ayant appris à lire avec une méthode synthétique que chez les enfants ayant suivi une méthode mixte de lecture. 3. Vitesse de traitement visuel : les vitesses de traitement de l épreuve sont supérieures, l effectif d élèves ayant obtenu la moyenne plus élevé, et les scores pathologiques moins importants dans les classes S que dans les classes M. 4. Lecture de logatomes (voie indirecte de lecture) : concrètement, cela signifie que les élèves du groupe S maîtrisent mieux la voie indirecte de lecture que les enfants du groupe M. L importance du taux d élèves n atteignant pas la moyenne dans les classes M (75%) témoigne d un manque d efficience de la voie d assemblage pour ces enfants. Leur déchiffrage manque encore de précision. Par ailleurs le temps de lecture est plus court pour les enfants des classes S. 5. Lecture de mots (voie directe de lecture) : les enfants des classes S maîtrisent beaucoup mieux l activité de lecture. L assemblage est suffisamment automatisé pour que la répétition de la rencontre avec les mots écrits permette à ces enfants de commencer à les fixer dans leur lexique orthographique. Ainsi la reconnaissance du mot est plus immédiate et les temps de réponse s en trouvent diminués. La lecture des mots irréguliers («chrysanthème») était aussi plus aisée pour les enfants des classes S ; les mots de fréquence plus élevée («Monsieur», «madame») étaient rarement erronés, alors que les mots courts de haut fréquence («six», «sept», «ville») étaient régulièrement échoués chez les classes M. 6. Lecture de texte : les enfants des classes S ont une vitesse de lecture supérieure. Cette vitesse de lecture est finalement supérieure parmi les classes S, quelle que soit la modalité de lecture (logatomes, mots ou texte). 7. Transcription de logatomes : les enfants des classes S ont bien intégré les correspondances graphème-phonème, à l inverse des enfants des classes M. En effet plus de la moitié des enfants des classes M n a pas pu obtenir la moyenne à cette épreuve, ce qui montre qu ils ne maîtrisent pas encore la stratégie alphabétique décrite par Frith. 8. Closure de mots : les résultats de cette épreuve corroborent les résultats de la transcription de logatomes. Les enfants ayant appris avec une méthode mixte ont une moins bonne performance au niveau de la phonologie comme au niveau du lexique orthographique. 9. Closure de texte : l épreuve de closure de texte reproduit les résultats de l épreuve de closure de mots, et confirme la supériorité des résultats des enfants des classes S, tant sur le plan phonologique que sur le plan lexical. Les enfants des classes S maîtrisent à présent la stratégie alphabétique, et commencent à entrer dans le stade orthographique sans difficulté. En revanche, plus de deux tiers des élèves des classes M n atteignent pas la moyenne au niveau de la phonologie et du lexique. Ils n ont donc pas encore développé les compétences alphabétiques suffisantes pour pouvoir entrer, en fin de cycle II, dans la constitution d un lexique orthographique suffisant. 3

B) Des résultats équivalents dans d autres domaines 1. Le traitement visuel est aussi efficace quelle que soit la méthode, mais se fait plus vite dans les classes S. 2. Accès aux représentations lexicales (dénomination rapide de dessins) : les temps de dénomination sont sensiblement équivalents dans toutes les classes. 3. Segmentation de mots. L identification de mots écrits et l utilisation de la voie directe de lecture sont assez similaires dans cette épreuve pour tous les enfants. 4. Identification de mots écrits (IME) : aucune méthode de lecture ne semble engendrer de meilleure performance pour ce qui est de la vitesse de réalisation de l exercice, de la maîtrise des conversions graphème-phonème ou du niveau d utilisation des connaissances orthographiques des enfants. 5. La compréhension du texte ne semble pas être meilleure dans un des groupes, même si la vitesse de lecture est supérieure dans le groupe S. IV - ANALYSE GLOBALE 1. Commentaire du Graphique 26 L analyse de ces résultats prouve que les classes en méthode mixte ont de moins bons résultats que les classes en méthode synthétique. Le tableau récapitule les différentes moyennes calculées pour chaque épreuve. Ces moyennes ont été transformées en notes réduites (pour des raisons d échelle graphique) en se référant aux moyennes et écarts-types donnés par les normes des tests utilisés. Les classes S obtiennent toujours une moyenne supérieure à la moyenne de l épreuve, en dehors de trois notes : le temps de réalisation en discrimination visuelle, la lecture de pseudo-mots et le QCM de compréhension. Toutefois pour ces trois notes les écarts aux moyennes des épreuves sont relativement réduits. A l opposé, les moyennes des classes M sont beaucoup plus souvent inférieures aux moyennes des épreuves. Les seules moyennes positives des classes M sont les épreuves suivantes : dénomination rapide, segmentation de mots, les deux scores IME, la lecture de mots et l orthographe phonologique pour les mots. Cependant, même lorsque les moyennes des classes M sont positives, elles restent inférieures à celles obtenues par les classes S. Si l écart entre les deux groupes se retrouve dans tous les domaines explorés, la différence de niveaux la plus marquée se situe au niveau de l orthographe. Les classes M ont effectivement obtenu des résultats très inférieurs à ceux des classes S dans toutes les épreuves de transcription. 2. Synthèse L analyse des données recueillies confirme les résultats obtenus en CP l année précédente par E. Berrnard. L écart de niveau entre les élèves n a pas été compensé au cours de l année de CE1, mais s est au contraire encore approfondi. Les élèves ayant appris à lire avec une méthode synthétique ont développé de bonnes compétences métaphonologiques, notamment au niveau de la fusion phonémique. Il n est donc pas surprenant de constater, conformément aux données théoriques sur le sujet, une supériorité de leurs résultats en lecture. Dans les classes mixtes en revanche, le déchiffrage est encore mal maîtrisé et la lecture directe consiste souvent à deviner le mot sur la base d une prise d indices partielle. Ainsi observe-t-on de nombreuses erreurs de lecture entre des mots relativement proches, en général, mais parfois aussi plus éloignés. Il est donc fondamental d identifier les compétences déficitaires de ces enfants lors du bilan orthophonique, tout en se renseignant sur la méthode utilisée en CP, pour ne pas les cataloguer de dyslexiques. D autre part l étude de l orthographe a révélé d importante difficultés pour les enfants des classes M. Il arrive encore que les mots écrits par les élèves des classes M ne respectent pas la forme phonologique du mot-cible, alors que ce type d erreur devient beaucoup plus rare dans les classes S. La méthode synthétique de lecture, en privilégiant l automatisation des processus de conversion graphophonologique, semble donc favoriser le développement des aptitudes de transcription écrite. 4

Cependant, en ce qui concerne les capacités de compréhension écrite, l étude réalisée ne permet pas d émettre une opinion plus favorable envers une des deux méhodes d enseignement. L épreuve utilisée n est pas suffisamment discriminante pour affirmer qu une méthode est plus efficace à ce niveau. V CONCLUSION La différence des niveaux de langage écrit observée en CP entre des enfants ayant appris à lire, d un côté avec une méthode mixte, et de l autre avec une méthode synthétique se retrouve à l évaluation de fin de CE1. Cet écart semble même s être encore accentué, et de nombreux élèves des classes utilisant une méthode mixte se retrouvent en difficulté. Les performances réalisées en lecture et en orthographe par ces enfants sont souvent inférieures aux moyennes des épreuves considérées, voie parfois pathologiques. Dans ces classes, le constat d un manque de maîtrise des processus de lecture et d orthographe est inquiétant. En effet, le développement de ces habiletés devrait être terminé en fin de cycle II, et le retard accumulé par ces enfants risque d entraver leurs acquisitions futures. Au cycle III, la lecture est supposée progresser en termes de rapidité et de fluidité, mais le déchiffrage ne devrait plus poser de problèmes. Or on ne peut pas considérer que le décodage et le lexique orthographique sont suffisamment efficients dans ces classes pour permettre aux élèves d accéder rapidement au stade orthographique. L impact psychologique de ces difficultés se ressent nettement sur la façon dont ces enfants appréhendent l écrit. En dehors des meilleurs élèves de ces classes, les activités faisant intervenir la langue écrite sont souvent pour eux source de stresse et leur goût pour la lecture n est que très modéré. Dans les classes utilisant une méthode synthétique, les résultats sont généralement supérieurs aux moyennes des épreuves utilisées. Par ailleurs, les scores de ces élèves sont également meilleurs que ceux des élèves des classes utilisant la méthode mixte dans la plupart des activités de métaphonologie, de lecture et d orthographe. De plus, l accent mis sur les compétences phonologiques dans ces classes permet à leurs élèves rencontrant des difficultés de développer des systèmes de compensation. Ainsi, cela les conduit-il à transcrire les mots selon leur forme phonologique, à rédiger de cette façon des phrases compréhensibles. Il semblerait donc pertinent de proposer aux enfants avec un mauvais pronostic de langage écrit d apprendre à lire à l aide de la méthode synthétique. Le seul domaine pour lequel il a été impossible de conclure à la supériorité d une méthode de lecture est celui de la compréhension écrite. Il pourrait donc être intéressant, dans l objectif de poursuivre cette recherche, d évaluer plus finement cette compréhension par des épreuves plus significatives. Il serait également pertinent d observer les niveaux de langage écrit atteints dans des milieux socio-culturels plus défavorisés, tels que les ZEP. 5