SO N I A WIEDER AT H E RTO N C H A N TAL A KE R M A N D EST E N M US I Q U E P R ES E N TAT ION
Un concert avec images conçu par SONIA WIEDER ATHERTON D après les images du film D EST de CHANTAL AKERMAN
SONIA WIEDER-ATHERTON / CHANTAL AKERMAN, scénographie SONIA WIEDER-ATHERTON, violoncelle LAURENT CABASSO, piano Ces personnages qui attendent un train, un bus, qui marchent dans les rues enneigées les bras chargés de paquets, ce sont des gens qui se taisent. Parce que l histoire leur a appris à se taire. Si j ai choisi la Sonate de Rachmaninov, c est parce que elle me donne l impression de se glisser dans leur univers secret et par son âme si russe, ses thèmes d une tendresse inouïe, dialogue avec eux, et nous permet peut-être d imaginer ce que ces hommes et ces femmes nous raconteraient, ce qu ils se racontent à eux même durant ces interminables attentes qui ponctuaient la vie quotidienne en Union Soviétique. Au contraire de Rachmaninov, la sonate de Shnittke souligne le côté menaçant de l architecture Stalinienne, de la lumière jaune des lampadaires dans les rues ou des halls de gare. Même les cris des enfants dans la neige ne parviennent pas à soulever la chape qui pèse. La construction sans compromis de cette œuvre dramatise encore ces images. Mais la vie est là et c est elle qui gagne quand on se trouve face à des couples endimanchés dansant dans un grand hôtel de Moscou. Ils dansent gauchement et c est bouleversant. L adagio de Prokofiev donne l impression qu ils dansent en rêve parfois avec la musique, parfois décalés, mais à ce moment là ils oublient tout et s échappent. Sonia Wieder-Atherton
PROGRAMME MUSICAL Sergei RACHMANINOFF - Vocalise pour violoncelle et piano Sergei RACHMANINOFF - Sonate opus 19 pour viooncelle et piano JANACEK- KRAWCZYK «Chant sur un poème morave» pour violoncelle seul Alfred SCHNITTKE - Sonate N.1 pour violoncelle et piano Serge PROKOFIEV - Adagio Opus 67 pour violoncelle et piano Durée: 1h 15 sans entracte Création lumières, Franck Thévenon Co-production with la Ferme du Buisson scène nationale de Marne la Vallée/ festival Temps d images 2005, La Filature scène nationale de Mulhouse, Arsenal de Metz, la Cité de la Musique (Paris), Romaeuropa Festival 2005.
SONIA WIEDER-ATHERTON Violoncelliste, concertiste, Sonia Wieder-Atherton occupe une place à part dans le monde musical d aujourd hui, questionnant inlassablement la notion de répertoire. Née à San Francisco d une mère d origine roumaine et d un père américain, elle grandit à New-York puis à Paris où elle entre au Conservatoire national supérieur dans la classe de Maurice Gendron. A 19 ans elle part vivre à Moscou pour étudier avec Natalia Chakhovskaïa au conservatoire Tchaïkovski. Elle gardera en elle de ces années Russes, en plus d un enseignement d excellence, un rapport particulier au temps, aux histoires et aux hommes. Lauréate du concours Rostropovitch à 25 ans, elle aime décrypter et comprendre la langue de compositeurs contemporains. Avec la même recherche, elle aborde les pièces du répertoire dit «classique». Ces dernières années, Sonia Wieder-Atherton conçoit et met en scène de nombreux projets : Chants juifs, Chants d Est, Vita Monteverdi Scelsi, Odyssée pour violoncelle et choeur imaginaire, D Est en musique, spectacle conçu avec les images du film D Est de Chantal Akerman, ou encore Danses Nocturnes, avec Charlotte Rampling, sur les oeuvres de Benjamin Britten et de Sylvia Plath. Little Girl Blue, from Nina Simone est sa dernière création en 2014. CHANTAL AKERMAN cinéaste, est née en 1950 à Bruxelles. Elle intègre l INSAS, Ecole de cinéma de Bruxelles, à 17 ans et réalise son premier court-métrage, Saute ma ville, en 1968. Aux Etats-Unis, elle découvre les cinéastes américains expérimentaux, Andy Warhol, Jonas Mekas, Michael Snow. Adepte d un «cinéma vérité», elle tourne successivement Hôtel Monterey, (1972), Je, tu, il, elle, (1974), et obtient son premier succès public avec Jeanne Dielman, 23 quai du Commerce, 1080, Bruxelles, (1975). Depuis, elle a réalisé un certain nombre d œuvres, pour la télévision et pour le cinéma, fictions et documentaires. Parmi les plus récents : Histoires d Amérique (1988, en hommage aux émigrés juifs aux Etats-Unis et à sa famille déportée à Auschwitz), La Captive (2000, libre adaptation de La Prisonnière de Marcel Proust), De l autre côté (2002, film et installation), Avec Sonia Wieder-Atherton (2003).
LAURENT CABASSO Né en 1961, Laurent Cabasso fait ses études au Conservatoire National Supérieur de Musique de Paris où il obtient les Premiers Prix de piano et de Musique de Chambre. Lauréat de grands concours internationaux de piano (Zurich, Tokyo..) Laurent Cabasso mène une carrière harmonieusement répartie entre les récitals, concertos avec orchestre, musique de chambre et enseignement. Des récitals à Paris, Zurich, Amsterdam, Genève, Salzburg; des Festivals tels que la Roque d Anthéron, Piano aux Jacobins, Besançon, Montpellier Radio- France; des concerts en soliste d orchestres tels que la Suisse Romande,, Zurich, Orchestre National de Lyon, Orchestre Philharmonique et Orchestre National de France; sa collaboration avec des chefs comme Ch.Dutoit, F.Leitner, A.Jordan, E.Krivine, M.Plasson, R.Zollman...; la musique de chambre avec des partenaires tels que Sonia Wieder-Atherton, Raphaël Oleg, Gérard Caussé, Silvia Marcovici, Mireille Delunsch font de Laurent Cabasso un pianiste omniprésent dans le monde musical.
EXTRAITS DE PRESSE Sonia Wieder-Atherton fait partie de ces musiciens qui conçoivent aussi leur discipline que comme une invitation au vagabondage, une manière de faire dialoguer les arts, se rencontrer les sensiblités. Après avoir travaillé avec Chantal Akerman pour ses Histoires d Amérique, la violoncelliste a eu envie d aller plus loin, «de l autre côté», profondément impressionnée par les images du film D Est (1993) long périple documentaire entreprise par la cinéaste de l Allemagne à la Russie, de l été à l hiver, sur le chemin de ses origines (Chantal Akerman est née dans une famille juive originaire de Pologne). Brouillant la frontière entre documentaire et fiction, animée par le désir de porter sur les choses un regard neuf ce que la cinéaste appelle «une écoute flottante» - et en même temps de se laisser porter par ces choses et ces rencontres, D Est (au départ, une commande du Musée de Boston) a éveillé des échos insoupçonnés chez la musicienne, qui a étudié deux années au Conservatoire de Moscou : «Quand j ai regardé un extrait du film, sans son, pendant que la Sonate de Rachmaninov (et Schnittke plus tard) résonnait à pleine voix, j ai vu la musique cette musique transformer les voitures roulant dans la neige en ballerines légères, suivre d un regard de parent des enfants jouant à la luge; Je l ai vue protéger des femmes ramassant des pommes de terre dans un champs mais aussi rendre menaçant un bâtiment caché derrière des arbres, de nuit. Mais sans jamais expliquer ni commenter. [...] Je repense à Glenn Gould qui écoutait les symphonies de Beethoven en roulant dans les paysages de neige sale avec sa famille, et qui disait que ces paysages restaient pour lui accrochés à ces symphonies. Comme ces travellings de D Est, le mouvement libérait une écoute.» Accompagnée de Laurent Cabasso au piano, Sonia Wieder-Atherton joue Rachmaninov, Janacek, Prokoviev, et Schnittke, enveloppée par les images du film ; ce faisant, elle joue surtout des pouvoirs magiques de la musique, dans une mise en espace de Chantal Akerman, elle-même enthousiasmée par le projet : «Les deux petites silhouettes des musiciens se mariaient avec celles qui dansaient à l avant-plan comme si jamais avant le film n avait existé sans elles. Comme si le film, les danseurs, l hôtel, tout attendait qu advienne Prokoviev qui semblait arriver des profondeurs même de leur imaginaire. C était saisissant.» A les entendre défiler au tempo bouleversant de la Sonate de Schnittke, à les voir ainsi se métamorphoser sensiblement, le spectateur se trouve happé par l enchaînement des visages et des paysages. Par la grâce de ces musiques de l exil, qui font librement écho aux images et confèrent à celles-ci un autre rythme, des résonances nouvelles, une profondeur de champ singulière, D Est en musique, odyssée sensationnelle et synesthésique, semble défricher le souvenir, révéler des traves immémoriales. David Sanson (Cité de la musique-paris)
Rien de laissait attendre l accomplissement qui a clos la semaine : le travail à partir de d Est de Chantal Akerman initié par la violoncelliste Sonia Wieder-Atherton. «Quand je jouais certaines musiques, des images de D est défilaient en moi, et inversement les images évoquaient des morceaux. Cela jouait dans les deux sens. Je repense à Glenn Gould qui écoutait les symphonies de Beethoven en roulant dans les paysages de neige sale avec sa famille, et qui disait que ces paysages restaient pour lui accrochés à ces symphonies. Comme ces travellings de D est, le mouvement libérait une écoute.» Il fallait ensuite mettre en scène, au sens littéral, les musiciens dans leur rapport à l image. Des séquences de D Est sont d abord projetées sur un rideau blanc, la musique s élève de derrière l écran. Soudain le rideau coulisse et les images se déposent pour ainsi dire dans le vide. En fait un tulle noir imperceptible les accueille, absorbe leurs couleurs et leur donne une apparence spectrale. Les corps se métamorphosent en grands fantômes qui s agitent dans la nuit : un chien traverse la scène, des ramasseuses de pommes de terre s avancent au-devant de vous comme des colosses. De leur côté, les musiciens soudain éclairés se retrouvent par transparence dans l image, pas simplement comme une incrustation, mis plutôt comme s ils baignaient dans les particules d image, comme si le film était tout autour d eux. Ils ne sont pas noyés, ils se dressent magnifiques tout auréolés par l image. Impression troublante, de profondeur, de relief, d un film qui ne semble plus projeté sur un écran plat, et qui semble moins offrir un défilé d images qu en espace d images. A cet effet troublant vient s ajouter la métamorphose provoquée par le choix musical (Rachmaninov, Prokofiev) de Sonia Wieder-Atherton. Comme le précise Chantal Akerman : «Moi je ne connaissais pas l est, je filmais ces files d attente de l extérieur. Or Sonia a vécu deux ans à Moscou. Avec ces musiques, c est comme si tout était soudain vécu de l intérieur». Impossible de faire le partage entre la musique, le cinéma et le théâtre. Les arts ne sont plus concurrents ni ennemis comme les trois autres pièces pouvaient le laisser entendre : inutile de les jouer les uns contre les autres, il faut trouver l espace de leur réconciliation. Extraits de l article L image en chantier, de Stéphane Delorme dans les Cahiers du cinéma (N 584 novembre 2003
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