CHAPITRE VI : PROPRIETES MAGNETIQUES DES SOLIDES

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Cristallochimie-6 CHAPITRE VI : PROPRIETES MAGNETIQUES DES SOLIDES I/ Rappel sur les propriétés des atomes et ions libres A chaque électron d'un atome, ou d'un ion, correspond un moment magnétique lié au moment cinétique orbital et au moment cinétique de spin. Lorsque la somme des moments est nulle, ce qui se produit si tous les électrons sont appariés, l'atome, ou l'ion, est diamagnétique. A chaque électron non apparié correspond un moment magnétique non nul. La somme des moments magnétiques est donnée par la relation : µ B = n(n + 2) = 2,00. S.(S + 1) où n est le nombre d'électrons célibataires, S est le spin total ( S = Σ i m si, m si = ± ½), et où le moment magnétique est exprimé en magnétons de BOHR dont la valeur est : β = eh/4πm e = 9,27.10-24 A.m 2. L'atome, ou l'ion, est dans ces conditions paramagnétique. II/ Diamagnétisme et paramagnétisme II-1) Généralités Les manifestations du magnétisme des substances sous l'action d'un champ magnétique extérieur (perturbation extérieure), sont omniprésentes dans la vie quotidienne, même si nous ne nous en apercevons pas toujours : les matériaux et systèmes magnétiques sont présents partout en électromécanique, électricité et en électronique. De façon générale les matériaux solides se différencient du point de vue magnétique en deux grandes classes : les matériaux magnétiques non ordonnés et ceux qui sont ordonnés. La première classe correspond au magnétisme non coopératif, catégorie dans laquelle on trouve les diamagnétiques et les paramagnétiques, la seconde au magnétisme coopératif où l'on trouve les ferromagnétiques, les antiferromagnétiques et les ferrimagnétiques. La figure 1 représente les différentes catégories de substances en fonction des caractéristiques des moments magnétiques portés par les atomes ou ions. Quelques définitions : - B est l'induction magnétique, H est l'excitation magnétique; - M est l'aimantation, moment magnétique par unité de volume; - la susceptibilité magnétique c par unité de volume est définie par : c=m/b (cgs) ou c=µ 0.M/B (SI) où µ 0 est la perméabilité du vide (4π.10-7 en SI) et B le module du vecteur induction magnétique; - c D M est la susceptibilité diamagnétique molaire ; - c P M est la susceptibilité paramagnétique molaire; - g est le rapport gyromagnétique ou rapport magnétogyrique, rapport du moment magnétique au moment cinétique : γ.h/2π = g.µ B ; - g est le facteur de LANDE ou facteur de décomposition spectrale; pour un spin électronique isolé,g = 2,00; 89

- ß ou µ B est le magnéton de Bohr : µ B = e.h/4π.m e.c (cgs) ou e.h/4π.m e (SI); il est égal au moment magnétique de spin d'un électron libre; - µ L est le moment magnétique orbital : µ L 2 = l(l+1) µ B ; l est le nombre quantique secondaire; - µ S est le moment magnétique de spin : µ S 2 = s(s+1) µ B ; s est le nombre quantique de spin; - les niveaux d'énergie d'un système placé dans un champ magnétique sont donnés par : U = - µ.b = m J.g.µ B.H, où m J est le nombre quantique azimutal m J = J, J-1,...-J+1, -J, avec J = L + S ou J = L - S selon les cas; pour un spin simple sans moment orbital : m J = ±½ et g = 2,00, d'où U=± β.b. Le magnétisme non coopératif ne développe pas d'interactions à longue distance et n'est donc pas caractérisé par une aimantation spontanée macroscopique. Lorsque les atomes porteurs de moments se trouvent dilués dans le réseau cristallin, sont éloignés les uns des autres, la substance est paramagnétique. Si la substance est constituée d'atomes non porteurs de moment, elle est diamagnétique. II-2) Le diamagnétisme Les substances diamagnétiques sont composées d'atomes dont la configuration électronique ne laisse apparaître que des doublets ou des orbitales vides : il n'y a pas d'électrons non appariés donc pas de moment magnétique de spin. Leur susceptibilité magnétique est faible, négative et indépendante de la température, de l'ordre de : - 1,0.10-6 uem.cgs. Le diamagnétisme existe toujours dans les espèces chimiques, même si elles possèdent un moment magnétique, puisqu'il est dû à la présence d'électrons appariés : son ordre de grandeur est tel qu'il est masqué, ou bien qu'il n'intervient que comme une correction, lorsque la substance est globalement porteuse d'un moment magnétique. II-3) Le paramagnétisme Les substances paramagnétiques sont composées d'atomes porteurs de moments magnétiques dus à la présence d'électrons non appariés (célibataires) dans leur configuration électronique. Leur susceptibilité magnétique est parfois forte, positive et dépend de la température. En absence de champ magnétique extérieur, les moments sont statistiquement désordonnés et leur résultante est nulle : la substance ne possède pas d'aimantation spontanée macroscopique. paramagnétisme des ions libres dépend principalement de leur niveau fondamental. Pour exprimer le moment magnétique total µ J on doit calculer le facteur de LANDE g : g = 1 + [J(J+1) + S(S+1) - L(L+1)]/2J(J+1) Le champ magnétique extérieur décompose et sépare les 2J+1 composantes équidistantes, chacune étant séparée de la suivante par l'énergie d'interaction g.µ B.H. A chacun de ces sous-états est associé un moment magnétique donné par : µ i = g.j i.µ B Le principe de calcul de la susceptibilité consiste à faire la somme de ces moments en faisant une pondération statistique suivant une loi de BOLTZMANN, c'est à dire en tenant compte de l'énergie d'agitation thermique k B.T, dans l'hypothèse où la largeur du multiplet (le multiplet est l'ensemble des composantes) est grande devant k B.T. Le résultat s'exprime alors sous la forme : c P = [(N.g 2 µ B 2 )/3kT].[J(J+1)] que l'on peut mettre sous la forme : 1/c P = T/{[(N.g 2 µ B 2 )/3k].[J(J+1)]} 90 Le

Cristallochimie-6 où le terme entre accolades constitue la constante de CURIE C de l'espèce chimique responsable du moment magnétique. Les variations de l'inverse de la susceptibilité paramagnétique suivent alors la loi de CURIE : 1/c P = T/C En unités cgs : C = g 2.J(J+1)/8 car le terme N.µ B 2/3k vaut 1/8. On en déduit que le moment effectif peut encore s'exprimer sous la forme : µ eff = 8C si toutefois J est un bon nombre quantique pour résoudre la question. Le tableau 1 donne, pour les ions lanthanides Ln 3+ et pour quelques ions de métaux de la première série de transition les moments effectifs calculés à partir des états fondamentaux et mesurés expérimentalement. On peut remarquer dans ce tableau que les valeurs calculées et mesurées concernant les ions lanthanides sont en très bon accord alors que celles qui concernent les ions des métaux de transition sont assez éloignées : en particulier il semble que J ne soit pas un bon nombre quantique pour ces ions et qu'en réalité on se trouve dans une situation où le moment de spin intervient presque seul, le moment orbital est bloqué. Il n'y a quasiment pas de couplage spin-orbite et le bon nombre quantique est S, avec g = 2. La justification se trouve dans la nature des orbitales occupées par les électrons non appariés et par le fait que ceux-ci subissent une interaction plus ou moins forte de la part des ions voisins : on ne peut pas les considérer comme des ions entièrement libres. Les orbitales 3d de ces ions sont externes (non recouvertes). La situation des ions lanthanides est différente en ce que les orbitales 4f partiellement occupées sont internes, recouvertes par des orbitales de rang supérieur (5s et 5p) et de ce fait ne subissent pratiquement pas d'interactions des ions voisins. Remarque : dans le cas des ions lanthanides, J = L - S (4f moins qu'à moitié remplies) pour les premiers jusqu'au gadolinium, puis J = L + S. Tableau 1 Ion configuration fondamental µeff µeff µeff terme g. J(J+1) 2 S(S+1) expérimental Ce3+ 4f1/5s2/5p6 2F5/2 2,54 2,4 Pr3+ 4f2/5s2/5p6 3H4 3,58 3,5 Nd3+ 4f3/5s2/5p6 4I9/2 3,62 3,5 Pm3+ 4f4/5s2/5p6 5I4 2,68 - Sm3+ 4f5/5s2/5p6 6H5/2 0,84 1,5 Eu3+ 4f6/5s2/5p6 7F0 0,00 3,4 Gd3+ 4f7/5s2/5p6 8S7/2 7,94 8,0 Tb3+ 4f8/5s2/5p6 7F6 9,72 9,5 Dy3+ 4f9/5s2/5p6 6H15/2 10,63 10,6 Ho3+ 4f10/5s2/5p6 5I8 10,60 10,4 Er3+ 4f11/5s2/5p6 4I15/2 9,59 9,5 Tm3+ 4f12/5s2/5p6 3H6 7,57 7,3 Yb3+ 4f13/5s2/5p6 2F7/2 4,54 4,5 91

Tableau 1 (suite) Ti3+, V4+ 3d1 2D3/2 1,55 1,73 1,8 V3+ 3d2 3F2 1,63 2,83 2,8 Cr3+, V2+ 3d3 4F3/2 0,77 3,87 3,8 Mn3+, Cr2+ 3d4 5D0 0,00 4,90 4,9 Fe3+, Mn2+ 3d5 6S5/2 5,92 5,92 5,9 Fe2+ 3d6 5D4 6,70 4,90 5,4 Co2+ 3d7 4F9/2 6,63 3,87 4,8 Ni2+ 3d8 3F4 5,59 2,83 3,2 Cu2+ 3d9 2D5/2 3,55 1,73 1,9 III/ Magnétisme coopératif L'existence du magnétisme coopératif est liée à la présence d'électrons non appariés organisés, c'est à dire en interaction mutuelle. III-1) Le ferromagnétisme Dans les substances ferromagnétiques les moments magnétiques sont ordonnés parallèlement dans le réseau cristallin. Leur aimantation est forte au-dessous d'une température d'ordre appelée température de Curie ferromagnétique. Un corps ferromagnétique possède une aimantation spontanée même en absence de champ magnétique extérieur. Comme il a été dit plus haut, ce fait est dû à la présence de spins électroniques ordonnés contribuant au moment spontané ou de saturation. Pour comprendre que l'organisation des spins puisse être spontanée en absence de toute intervention extérieure, il faut faire intervenir une interaction entre spins, un champ d'échange ou champ moléculaire (appelé aussi champ de WEISS). Ce champ "interne" qui tend à ordonner les moments élémentaires est contrecarré par l'agitation thermique : à haute température l'énergie d'agitation thermique est suffisamment importante pour détruire l'ordre des spins. Le champ moléculaire peut être considéré comme l'équivalent d'un champ magnétique B E, proportionnel à l'aimantation M (moment magnétique par unité de volume). Chaque espèce chimique de la substance est soumise à l'action du champ moléculaire moyen : B E = q.m où q est une constante indépendante de la température. Chaque spin subit en fait l'action des plus proches voisins. La température de CURIE ferromagnétique T C est la température au-dessus de laquelle l'aimantation spontanée disparaît; elle sépare la phase paramagnétique désordonnée pour T > T C de la phase ferromagnétique ordonnée pour T < T C. Dans la phase paramagnétique le champ appliqué B a provoque une aimantation finie qui engendre à son tour un champ moléculaire fini B E. Si χ P est la susceptibilité paramagnétique : M = c P.(B a + B E ) (cgs) ou µ 0.M = c P.(B a + B E ) (S.I) or dans ce domaine : c P =C/T où C est la constante de CURIE; on en déduit : M.T = C.(B a + q.m) et c P = M/B a = C/(T - q.c) 92

Cristallochimie-6 T C = q.c et c P = C/(T-T C ) expression de la loi de CURIE-WEISS. T C est la température de transition réelle; à haute température (T» T C ) la susceptibilité paramagnétique suit une loi en C/(T - T 0 ) où T 0 est supérieure à T C. La constante de champ moléculaire θ est calculable si l'on connaît T C et C. Le tableau 2 rassemble, pour quelques corps simples ou composés, les aimantations spontanées au zéro absolu M S, le nombre effectif de magnétons de Bohr nb et la température de Curie T C. III-2) L'antiferromagnétisme et le ferrimagnétisme Les antiferromagnétiques sont caractérisés par le fait que les moments magnétiques sont ordonnés antiparallèlement dans deux sous-réseaux cristallins dont les aimantations se compensent; leur susceptibilité magnétique passe par un maximum pour une température T N appelée température de Néel. Les ferrimagnétiques sont organisés comme les antiferromagnétiques, mais les aimantations des deux sous-réseaux ne se compensent pas exactement : il existe une aimantation résiduelle forte au-dessous de la température de Néel. Dans le tableau 2 on peut remarquer que certains corps ferromagnétiques ont des aimantations spontanées à T=0 K qui ne correspondent pas à l'alignement parallèle de tous les spins car alors le nombre effectif de magnétons serait égal au nombre de spins de l'état paramagnétique. Dans l'exemple de la magnétite Tableau 2 substance M S n B (0 K) T C ( K) 300 K 0 K Fe 1707 1740 2,22 1043 Co 1400 1446 1,72 1388 Ni 485 510 0,606 627 MnAs 670 870 3,4 318 CrO2 515 2,03 386 Y3Fe5O12 130 200 5,0 560 MnFe2O4 410 5,0 573 Fe3O4 480 4,1 858 NiFe2O4 270 2,4 858 MgFe2O4 110 1,1 713 CuFe2O4 135 1,3 728 Fe 3 O 4, oxyde de Fe +II et Fe +III à structure spinelle, le parallélisme de tous les spins donnerait un moment à saturation au zéro absolu de 14 magnétons (5 + 5 + 4); or l'aimantation mesurée expérimentalement n'est que de 4,1 magnétons, ce qui signifie que les moments portés par les ions Fe 3+ s'annulent et que seuls comptent les moments portés par les ions Fe 2+. Le terme ferrimagnétisme a été créé pour rendre compte de l'ordre des spins ferromagnétiques intervenant dans les composés tels que la magnétite : les ferrites spinelles ou grenats. Les ferrimagnétiques 93

peuvent être considérés comme des ferromagnétiques dans lesquels les spins sont répartis en deux (ou plusieurs) sous-réseaux magnétiques, correspondant le plus souvent avec des sous-réseaux cristallins, à l'intérieur desquels les interactions sont ferromagnétiques, les spins sont parallèles entre eux. Ce sont les aimantations des sous-réseaux qui se composent. Dans le cas des ferrites spinelles, le couplage des deux sous-réseaux A et B, dû aux champs moléculaires (AA, BB et AB), est antiparallèle, les corps sont ferrimagnétiques. Pour chaque sous-réseau on peut définir une constante de CURIE C A et C B et la température de CURIE ferrimagnétique s'exprime par : T C = a.(c A.C B )½ Dans le domaine paramagnétique la susceptibilité s'exprime par : où α est une constante positive. cp = [(C A + C B ).T - 2 a.c A.C B ]/(T2 - T C 2) Dans le cas où deux sous-réseaux magnétiques ont la même aimantation et sont couplés antiparallèlement, le composé est un antiferromagnétique parfait, son aimantation spontanée au zéro absolu est nulle par compensation. Lorsque le couplage n'est pas parfaitement antiparallèle, le corps est un antiferromagnétique imparfait (on dit aussi "incliné"). Un corps antiferromagnétique est donc un cas particulier de corps ferrimagnétique. Dans un corps antiferromagnétique les spins sont ordonnés en un arrangement antiparallèle de moment résultant nul aux températures inférieures à la température de NEEL T N. La susceptibilité ne devient pas infinie à T = T N mais passe par un maximum. Dans le domaine paramagnétique elle s'exprime par : c P = 2C/(T + T N ) et c P = 2C/(T + T 0 ) à T» T N III-3) Les matériaux magnétiquement doux III-3-a) Courbe de première aimantation (figure 2) Considérons un échantillon macroscopique de fer, un clou par exemple. Il est constitué d'une multitude de petits cristaux accolés les uns aux autres selon des joints de grain pouvant avoir des formes variées. A l'intérieur de chaque cristallite il existe des domaines magnétiques, appelés domaines de WEISS, caractérisés par une aimantation spontanée dans une direction bien définie. L'ensemble des domaines de WEISS de chaque cristallite possède une aimantation nulle par compensation en l'absence de champ magnétique extérieur et bien entendu le clou ne possède pas d'aimantation spontanée macroscopique. Que se passe-t'il lorsqu'on soumet, pour la première fois, le clou à un champ magnétique? L'expérience montre qu'il s'aimante : il acquiert une aimantation dans la direction du champ appliqué. Si l'on mesure son aimantation en fonction de l'intensité du champ appliqué, on constate qu'on obtient assez rapidement une aimantation à saturation qui correspond à l'alignement de tous les moments magnétiques élémentaires dans le champ appliqué. Dans chaque cristallite les domaines de WEISS (figure 3) qui se trouvent dans une direction proche de celle du champ appliqué croissent aux dépens des voisins jusqu'à ne former qu'un seul domaine dont l'aimantation est parallèle au champ extérieur. Pendant l'aimantation, seules les parois des domaines de WEISS, les parois de BLOCH, se déplacent, pas les joints de grains. Lorsqu'on diminue le champ extérieur depuis sa valeur maximum, celle qui a produit la saturation magnétique de l'échantillon, on constate qu'il y a retour à la situation antérieure avec plus ou moins de retard. En effet, à 94

Cristallochimie-6 champ nul, il peut subsister une aimantation rémanente de l'échantillon, ce qui signifie que les parois de BLOCH de tous les domaines de WEISS n'ont pas retrouvé leur position initiale. Pour obtenir une aimantation nulle, il faut soumettre l'échantillon à un champ inverse appelé champ coercitif. Le retard à la désaimantation peut avoir diverses causes, mais la principale est en général la qualité cristalline : les défauts cristallins permettent aux parois de BLOCH de s'ancrer solidement, les gênant par conséquent dans leur déplacement. III-3-b) Cycle d'hystérèsis (figure 4) Si l'on poursuit la variation du champ appliqué inverse, on obtient une aimantation à saturation en sens inverse correspondant à l'alignement de tous les moments élémentaires dans l'autre sens. De nouveau à champ nul on observera une aimantation rémanente qu'il faudra annuler par un champ coercitif, mais le matériau n'aura jamais plus le même comportement que pendant sa première aimantation, sauf s'il subit un traitement thermique par exemple.lors de la variation du champ extérieur de +H m à -H m, après la première aimantation, l'aimantation du matériau suit ce qu'on appelle un cycle d'hystérèsis, caractérisé par une aimantation à saturation pour un champ maximum, une aimantation rémanent et un champ coercitif. Si l'aimantation à saturation est une grandeur qui ne dépend que de la nature du matériau, l'aimantation rémanente et le champ coercitif dépendent aussi des traitements subis par le matériau, traitements thermiques ou autres.les matériaux magnétiquement doux sont ceux dont le cycle d'hystérèsis est fin, incliné, avec des aimantation rémanentes et des champs coercitifs faibles. Ils suivent facilement les variations du champ appliqué. III-4) Les matériaux magnétiquement durs A l'inverse des matériaux magnétiquement doux, les magnétiquement durs sont caractérisés par un cycle d'hystérèsis carré avec des aimantations rémanentes et champ coercitifs forts. Les matériaux qui possèdent des aimantations rémanentes fortes mais des champs coercitifs faibles sont très intéressants puisqu'ils changent rapidement d'état magnétique (de +B r à -B r ) très facilement. Ils ont été utilisés dans les calculateurs à mémoires magnétiques sous forme de tores de ferrites spinelles pour leur aptitude à traduire la logique binaire. 95

TABLEAU DES FIGURES DU CHAPITRE VI VI-1 : différentes catégories de substances en fonction des caractéristiques des moments magnétiques portés par les atomes ou ions VI-2 : courbe de première aimantation VI-3 : domaines de WEISS VI-4 : cycle d'hystérèsis 96

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