Avis complémentaire. sur le projet de loi portant

Documents pareils
Guide de la pratique sur les réserves aux traités 2011

Position AMF n Notions essentielles contenues dans la directive sur les gestionnaires de fonds d investissement alternatifs

Peut-on envisager un effet direct?

Copie préliminaire du texte authentique. La copie certifiée par le Secrétaire général sera publiée ultérieurement.

AVIS N 118 DU 13 FEVRIER 2009 DU BUREAU DU CONSEIL DE L EGALITE DES CHANCES ENTRE HOMMES ET FEMMES, RELATIF A LA PROPOSITION DE DIRECTIVE PORTANT

ECVET GUIDE POUR LA MOBILITÉ

CODE DE CONDUITE FOURNISSEUR SODEXO

PROJET D ARTICLES SUR LES CLAUSES DE LA NATION LA PLUS FAVORISÉE 1978

Convention de Vienne sur le droit des traités entre Etats et organisations internationales ou entre organisations internationales

Je suis honnorée de m' addresser à vous à l'occasion du Onzième Congrès des Nations Unis pour la Prevention du Crime et la Justice Penale.

REGLEMENT INTERIEUR TITRE I : DISPOSITIONS GENERALES

Proposition de directive relative au timeshare 1

Conférence des Cours constitutionnelles européennes XIIème Congrès

ATELIER DROIT DES CONTRATS, DE LA CONSOMMATION ET DU COMMERCE ELECTRONIQUE

CONVENTION CONCERNANT L ASSISTANCE ADMINISTRATIVE MUTUELLE EN MATIÈRE FISCALE

Accord-cadre CES, UNICE et CEEP sur le travail à durée déterminée

27. Procédures de l Assemblée concernant la non-coopération (ICC-ASP/10/Res.5, annexe)

Lignes directrices concernant les contrôles à l importation dans le domaine de la sécurité et de la conformité des produits

Conseil économique et social

A/RES/55/25 II. Protection des victimes de la traite des personnes

N 518 SÉNAT QUATRIÈME SESSION EXTRAORDINAIRE DE

GUIDE POUR LA MISE SUR LE MARCHÉ DE DISPOSITIFS MÉDICAUX SUR MESURE APPLIQUE AU SECTEUR DENTAIRE

Licence ODbL (Open Database Licence) - IdéesLibres.org

Définition et exécution des mandats : analyse et recommandations aux fins de l examen des mandats

Objet: Traitement fiscal des sociétés exerçant des transactions de financement intra-groupe

Octobre Food and. Agricultura. Organization of the United Nations. Cent cinquante et unième session. Rome, novembre 2013

PROTOCOLE SUR LES AMENDEMENTS A L ACTE CONSTITUTIF DE L UNION AFRICAINE

LES SOCIÉTÉS DE GESTION D ORGANISMES DE PLACEMENT COLLECTIF EN DROIT LUXEMBOURGEOIS

Groupe de travail. Renforcer la confiance mutuelle RAPPORT

Maximiser l utilisation des pertes lorsqu on jette l éponge

E 5040 TREIZIÈME LÉGISLATURE SESSION ORDINAIRE DE

Bureau du commissaire du Centre de la sécurité des télécommunications

Section 1 La Spécialité. Section 4 L unité. Section 2 L Annualité. Section 5 L Universalité. Section 3 Le caractère limitatif des crédits

Décision du Défenseur des droits n MLD

LETTRE CIRCULAIRE N

Proposition de DÉCISION DU CONSEIL

LICENCE SNCF OPEN DATA

Circulaire de la DACG n CRIM 08-01/G1 du 3 janvier 2008 relative au secret de la défense nationale NOR : JUSD C

F OMPI ORGANISATION MONDIALE DE LA PROPRIÉTÉ INTELLECTUELLE GENÈVE. Dix-septième session Genève, 7 11 mai 2007

LICENCE SNCF OPEN DATA

UNIVERSITÉ DU QUÉBEC À RIMOUSKI

ACCORD ENTRE LA COMMISSION BANCAIRE ET LA BANQUE NATIONALE DE ROUMANIE

Convention du 4 janvier 1960 instituant l Association européenne de Libre-Echange (AELE)

C. LISTE DES ACCORDS INTERNATIONAUX CONCLUS PAR LA BELGIQUE EN 1963

Assemblée des États Parties

PROTOCOLE RELATIF À L ARRANGEMENT DE MADRID CONCERNANT L ENREGISTREMENT INTERNATIONAL DES MARQUES

CRÉDIT D IMPÔT POUR LA PRODUCTION DE TITRES MULTIMÉDIAS VOLET GÉNÉRAL INVESTISSEMENT QUÉBEC

Accord négocié régissant les relations entre la Cour pénale internationale et l Organisation des Nations Unies. Préambule

Les Cahiers du Conseil constitutionnel Cahier n 24

DOCUMENT DE CONSULTATION

Projet de loi n o 94. Présentation. Présenté par Madame Kathleen Weil Ministre de la Justice

4./4/14 DE DROIT AÉRIEN. (Montréal, 26 CONVENTION SURVENANT. (12 pages) DCTC_WP_DCTC_

Convention pour la reconnaissance mutuelle des inspections concernant la fabrication des produits pharmaceutiques.

Protocole n 15 portant amendement à la Convention de sauvegarde des Droits de l'homme et des Libertés fondamentales (STCE n 213) Rapport explicatif

Résumé du projet de loi n 43 visant à modifier la Loi sur les mines

Barème des quotes-parts pour les contributions des États Membres au budget ordinaire en 2015

PROJET D ARTICLES SUR LA RESPONSABILITE DE L ÉTAT POUR FAIT INTERNATIONALEMENT ILLICITE

Arrêtons. «Article 11

Convention sur la réduction des cas d apatridie

OFFICE DES NATIONS UNIES CONTRE LA DROGUE ET LE CRIME Vienne

AVIS RENDU EN VERTU DE L'ARTICLE 228 DU TRAITÉ CE. Prise de position de la Cour

Les partenaires du projet EJE, qui réunit les organisations représentatives de la profession

PROJET D ARTICLES SUR LA RESPONSABILITE DE L ÉTAT POUR FAIT INTERNATIONALEMENT ILLICITE

Ce texte est une version provisoire. Seule la version qui sera publiée dans la Feuille officielle

Sécurité nucléaire. Résolution adoptée le 26 septembre 2014, à la neuvième séance plénière

OCRCVM Règles des courtiers membres Règle 2800 (auparavant le Principe directeur n o 5 de l ACCOVAM)

PROTOCOLE DE KYOTO À LA CONVENTION-CADRE DES NATIONS UNIES SUR LES CHANGEMENTS CLIMATIQUES

LE CONSEIL DES COMMUNAUTÉS EUROPÉENNES,

RESPONSABILITÉ DE L ÉTAT POUR FAIT INTERNATIONALEMENT ILLICITE PREMIÈRE PARTIE LE FAIT INTERNATIONALEMENT ILLICITE DE L ÉTAT CHAPITRE PREMIER

Négociations commerciales entre le Canada et l Union européenne 7. Les obstacles techniques au commerce et la coopération en matière de réglementation

Lignes directrices relatives à la notion de personnes politiquement exposées (PPE)

Mécanisme d examen de l application de la Convention des Nations Unies contre la corruption Documents de base

JUNIOR ESSEC CONSEIL NATIONAL DU NUMÉRIQUE. Compte-rendu de l atelier 5 : Souveraineté numérique

GROUPE DE RÉDACTION SUR LES DROITS DE L HOMME ET LES ENTREPRISES (CDDH-CORP)

TRAITÉ SUR L'UNION EUROPÉENNE (VERSION CONSOLIDÉE)

RECUEIL DE LEGISLATION. A N novembre S o m m a i r e RÉGIME TEMPORAIRE: GARANTIE DE L ÉTAT

ASSEMBLÉE PARLEMENTAIRE EURO-MÉDITERRANÉENNE GROUPE DE TRAVAIL SUR LE FINANCEMENT DE L ASSEMBLÉE ET LA RÉVISION DU RÈGLEMENT DE L APEM

CHARTE ETHIQUE GROUPE HEURTEY PETROCHEM

La Régie des rentes du Québec

QU EST- CE QU UNE CONSTITUTION

Synthèse. Loyauté et réciprocité des échanges entre l Union Européenne et les pays tiers. Propositions et axes de réflexion des IEEC

LOI du 21 novembre sur la Cour des comptes LE GRAND CONSEIL DU CANTON DE VAUD

Chapitre 7 Ministère du Développement des ressources humaines / Andersen Consulting

25. la non-coopération (ICC-ASP/10/Res.5, annexe)

Introduction d'un Code de la consommation dans le droit positif luxembourgeois : les mérites du code

RÈGLEMENT DE LA COUR

DONS, D HOSPITALITÉ. Lignes directrices 1. mai 2012 COMMISSAIRE À L ÉTHIQUE ET À LA DÉONTOLOGIE

le QuEbec POUR Enrichir Affirmer les valeurs communes de la société québécoise

ANNEXE A LA CIRCULAIRE SUR LE CONTROLE INTERNE ET L AUDIT INTERNE TABLE DES MATIERES

BUREAU DU CONSEIL PRIVÉ. Vérification de la gouvernance ministérielle. Rapport final

Projets de principes sur la répartition des pertes en cas de dommage transfrontière découlant d activités dangereuses 2006

ET ATTENDU QUE le FRVR comprend une demande, une déclaration de fiducie et des addenda, le cas échéant.

CONSEIL DE L'UNION EUROPÉENNE. Bruxelles, le 30 mars 2009 (OR. en) 7522/09 Dossier interinstitutionnel: 2009/0020 (CNS) VISA 96 AMLAT 28

Les avis de la Chambre des Métiers. Assistance mutuelle fiscale

2.3. Toute modification ou tout complément apporté au contrat nécessite impérativement un accord préalable écrit entre les deux parties.

Notes explicatives relatives à la Loi sur la taxe d accise. Publiées par le ministre des Finances l honorable James M. Flaherty, c.p.

TREETOP ASSET MANAGEMENT S.A. - INFORMATIONS RÉGLEMENTAIRES LA SOCIÉTÉ TREETOP ASSET MANAGEMENT S.A. FORME JURIDIQUE

Protocole d'amendement à la Convention concernant l'assistance administrative mutuelle en matière fiscale

016276/EU XXIII.GP Eingelangt am 25/06/07

Transcription:

Commission consultative des Droits de l Homme du Grand-Duché de Luxembourg Avis complémentaire sur le projet de loi 6141 portant 1. approbation de la Convention relative aux droits des personnes handicapées, faite à New York, le 13 décembre 2006 2. approbation du Protocole facultatif à la Convention relative aux droits des personnes handicapées relatif au Comité des droits des personnes handicapées, fait à New York, le 13 décembre 2006 3. désignation des mécanismes indépendants de promotion, de protection et de suivi de l'application de la Convention relative aux droits des personnes handicapées Luxembourg, le 25 mai 2011 * * * Avis 03/2011

A l occasion de l élaboration du projet de loi 6141 portant ratification de la Convention relative aux droits des personnes handicapées et son protocole facultatif du 13 décembre 2006, la Commission consultative des Droits de l Homme du Grand-Duché de Luxembourg (CCDH) a émis un avis en date du 29 octobre 2010 1, dont elle tient à rappeler ses recommandations. La CCDH s est principalement penchée sur l article 33 de ladite Convention, qui traite du sujet primordial de l application et du suivi au niveau national. La CCDH renvoie notamment au point 8 de ses recommandations (dispositif de promotion, de protection et de suivi de la Convention). Suite à l avis complémentaire du Conseil d Etat du 8 avril 2011, la CCDH souligne la nécessité de mener une réflexion supplémentaire et une clarification quant au choix des mécanismes nationaux chargés de mettre en œuvre la Convention. Article 33, paragraphe 2, de la Convention sur le dispositif de promotion, de protection et de suivi de l application La Convention prévoit un mécanisme indépendant de suivi au niveau national, précisé dans son article 33, paragraphe 2, qui stipule que «les Etats Parties, conformément à leur systèmes administratif et juridique, maintiennent, renforcent, désignent ou créent, au niveau interne, un dispositif, y compris un ou plusieurs mécanismes indépendants, selon qu il conviendra, de promotion, de protection et de suivi de l application de la présente convention. En désignant ou en créant un tel mécanisme, ils tiennent compte des principes applicables au statut et au fonctionnement des institutions nationales de protection et de promotion des droits de l Homme». L article 33, paragraphe 2, mentionne donc trois missions essentielles, dont celle de promotion, de protection et de suivi de l application de la Convention. Dans son avis du 29 octobre 2010, la CCDH a déclaré qu elle ne voit pas la nécessité de créer une structure nouvelle au Luxembourg, mais qu il lui semble indispensable de renforcer les institutions existantes et de procéder à des ajustements aux mécanismes mis en place afin de garantir l effectivité du dispositif d ensemble. La CCDH a identifié les missions de promotion et de suivi de l application des droits de la Convention comme les siennes. Au regard de son mandat général en matière de droits de l Homme et de sa conformité aux Principes de Paris, la CCDH s est en outre proposée d assumer le rôle de coordinateur naturel des différents mécanismes. 1 Projet de loi 6141 portant approbation (1) de la Convention relative aux droits des personnes handicapées, faite à New York, le 13 décembre 2006 et (2) du Protocole facultatif se rapportant à la Convention relative aux droits des personnes handicapées relatif au Comité des droits des personnes handicapées, fait à New York, le 13 décembre 2006, Avis de la Commission consultative des Droits de l Homme du Grand-Duché de Luxembourg du 29 octobre 2010, N 6141/ 8. 1

Amendements adoptés par la Commission parlementaire de la Famille, de la Jeunesse et de l Égalité des Chances 2 Les amendements de la Commission parlementaire visent à compléter le texte du projet de loi qui se limitait à l approbation formelle de la Convention et du Protocole facultatif. En ce qui concerne le paragraphe 2 de l article 33, elle désigne dans l article 2 du projet de loi la Commission consultative des Droits de l Homme et le Centre pour l égalité de traitement (CET) comme mécanismes nationaux indépendants de promotion et de suivi, et le médiateur comme mécanisme de protection de la Convention tout en élargissant le champ de compétences de ce dernier. Si la CCDH approuve sa désignation comme mécanisme de promotion et de suivi, elle regrette cependant que le rôle et les devoirs de la CCDH et du CET ne soient pas précisés dans le texte. Avis complémentaire du Conseil d État 3 Le Conseil d Etat a rendu un avis complémentaire daté du 8 avril 2011 dans lequel il s est prononcé exclusivement sur l article 33 paragraphe 2 relatif à l application et au suivi de la Convention au niveau national. D'après le Conseil d Etat, le rôle en question dans l article discuté revient «de droit au Centre pour l égalité de traitement, en vertu de l article 9 de la loi du 28 novembre 2006, qui a pour objet de promouvoir, d analyser et de surveiller l égalité de traitement entre toutes les personnes sans discrimination fondée sur l handicap». Mais le Conseil d Etat reconnaît que rien n empêche la participation de la CCDH à la mise en œuvre de la Convention. Si la CCDH est tout à fait d accord pour reconnaître sa compétence dans la mise en œuvre des instruments internationaux, elle estime aussi que la mission de promotion et de suivi d application de la Convention fait intégralement partie de ses compétences. Les arguments du Conseil d Etat, à savoir le risque de conflits entre institutions et la compétence de droit et «quasi-exclusive» du CET pour la promotion et le suivi de la Convention, ne sont pas partagés par la CCDH, qui souhaite dans ces conditions clarifier et compléter sa position. 2 Projet de loi 6141 portant (1) approbation de la Convention relative aux droits des personnes handicapées, faite à New York, le 13 décembre 2006, (2) approbation du Protocole facultatif se rapportant à la Convention relative aux droits des personnes handicapées relatif au Comité des droits des personnes handicapées, fait à New York, le 13 décembre 2006 et (3) désignation des mécanismes indépendants de promotion, de protection et de suivi de l application de la Convention relative aux droits des personnes handicapées, Amendements adoptés par la Commission de la Famille, de la Jeunesse et de l Egalité des chances du 16 février 2011, N 6141/ 10. 3 Projet de loi 6141 portant (1) approbation de la Convention relative aux droits des personnes handicapées, faite à New York, le 13 décembre 2006, (2) approbation du Protocole facultatif se rapportant à la Convention relative aux droits des personnes handicapées relatif au Comité des droits des personnes handicapées, fait à New York, le 13 décembre 2006 et (3) désignation des mécanismes indépendants de promotion, de protection et de suivi de l application de la Convention relative aux droits des personnes handicapées, Avis complémentaire du Conseil d Etat du 8 avril 2011, N 6141/ 11. 2

Sur l architecture institutionnelle A titre liminaire, il paraît important pour la CCDH de rappeler l architecture institutionnelle qui a prévalu à sa création. La CCDH a été instituée par la loi du 21 novembre 2008 portant création d'une Commission consultative des droits de l'homme au Grand-Duché de Luxembourg. La création de toute institution nationale chargée des droits de l Homme et d appliquer les conventions internationales est basée sur le respect des Principes de Paris, approuvés par la Commission des droits de l Homme 4 des Nations unies et par son Assemblée générale 5. Ces principes énoncent les conditions nécessaires sur le statut et les fonctions des institutions nationales chargées des droits de l Homme. L institution nationale doit promouvoir et veiller à l harmonisation de la législation nationale avec les instruments internationaux relatifs aux droits de l Homme, encourager la ratification desdits instruments et s assurer de leur mise en œuvre. Sa contribution aux rapports que les Etats doivent présenter aux organes et comités de Nations Unies, en application de leurs obligations conventionnelles, et la coopération avec l Organisation des Nations Unies est souhaitée. De même que la Convention qui fait l objet du projet de loi, la CCDH trouve donc sa source dans une architecture onusienne et dans le droit international. En revanche, le CET a été institué par la loi du 28 novembre 2006 6. Cette création est en rapport avec deux directives européennes : la première est la directive 2000/43/CE du Conseil du 29 juin 2000 relative à la mise en œuvre du principe de l égalité de traitement entre les personnes sans distinction de race ou d origine ethnique, qui dans son article 13 charge les Etats membres de mettre en place des organismes de promotion de l égalité de traitement ; la deuxième est la directive 2000/78/CE du Conseil du 27 novembre 2000 relative à la création d un cadre général en faveur de l égalité de traitement en matière d emploi et de travail. Le champ d application de ces dernières couvre tant le secteur public que le secteur privé. Il en découle que le CET trouve sa source dans le droit de l Union européenne. Sur la portée générale de la Convention relative aux personnes handicapées Il en ressort que le CET est une construction de l UE qui se fonde uniquement sur des directives portant sur l égalité de traitement. Mais la portée de la Convention va bien au-delà de l'égalité de traitement, qui illustre une vision plus restreinte et défensive de ces droits: elle est le premier traité relatif aux droits de l Homme qui décrit de façon exhaustive l'ensemble des droits des personnes handicapées et précise les obligations qui incombent aux États s agissant du respect, de 4 Résolution 1992/54. 5 Résolution A/RES/48/134 du 20 décembre 1993. 6 Loi du 28 novembre 2006 portant (1) transposition de la directive 2000/43/CE du Conseil du 29 juin 2000 relative à la mise en œuvre du principe de l'égalité de traitement entre les personnes sans distinction de race ou d'origine ethnique; (2) transposition de la directive 2000/78/CE du Conseil du 27 novembre 2000 portant création d'un cadre général en faveur de l égalité de traitement en matière d'emploi et de travail; 3. modification du Code du travail et portant introduction dans le Livre II d'un nouveau titre V relatif à l'égalité de traitement en matière d'emploi et de travail; 4. Modification des articles 454 et 455 du Code pénal; 5. modification de la loi du 12 septembre 2003 relative aux personnes handicapées. 3

la protection et de la mise en œuvre de ces droits. Elle constitue une approche proactive visant à promouvoir l accès aux droits de l Homme. A ce titre, la Convention a une portée générale et ne se limite pas à l égalité de traitement ni à la sphère publique ou administrative. Son principal objectif consiste en effet à réunir dans un texte unique l ensemble des libertés et des droits retenus par les instruments internationaux des droits de l Homme, en les adaptant aux besoins des personnes handicapées. Il s agit de promouvoir, de protéger et d assurer la pleine et égale jouissance de tous les droits de l Homme et de toutes les libertés fondamentales par les personnes handicapées et de garantir le respect de leur dignité intrinsèque 7. C est la raison pour laquelle la CCDH, qui a une compétence élargie en matière de droits de l Homme, est en mesure d apprécier efficacement tous ces droits au niveau des personnes handicapées. Comme la CCDH n entend pas se prévaloir de la mission de protection, il n y a guère le risque qu elle entre en conflit avec une autre institution, pas plus que cela ne s est produit de manière générale depuis sa création en 2000. Ce qui est vrai par contre est que les champs de compétence de la CCDH et du CET sont complémentaires. Ainsi, en Irlande du Nord, la Commission de l égalité et la Commission des droits de l Homme ont été désignées conjointement en tant que mécanismes dans le cadre du dispositif de suivi. Sur les mécanismes de suivi indépendants et les Principes de Paris De plus, le paragraphe 2 de l article 33 a pour objet de mettre en place des mécanismes de suivi indépendants, nouvellement créés ou existants, chargés de promouvoir, protéger et suivre l application de la Convention 8. L Etat qui doit mettre en place le ou lesdits mécanismes indépendants doit, conformément à la Convention, prendre en considération les Principes de Paris. La CCDH, ayant un lien «organique» avec l ONU et les conventions internationales en matière de promotion et protection des droits de l Homme, elle a toutes les compétences pour répondre aux missions imposées par l article 33, paragraphe 2. A cet égard, la CCDH dispose d un mandat et des attributions 9 qui correspondent à ce qui est énoncé dans la Convention et dans les Principes de Paris. Conclusion La CCDH renvoie à son avis du 29 octobre 2010 et notamment à la recommandation 8 portant sur l article 33 de la Convention sur la promotion, la protection et le suivi de la Convention. 7 Projet de loi 6141, exposé des motifs, objectifs de la Convention, p.3. 8 Article 33 paragraphe 2. 9 Loi du 21 novembre 2008 portant création d une Commission consultative des Droits de l Homme au Grand-duché de Luxembourg, Mémorial A- N 180, article 1 à 4. 4

Au regard de son mandat général en matière de droits de l Homme et de sa conformité aux Principes de Paris, la CCDH se propose d assumer le rôle de coordinateur naturel des différents mécanismes. La CCDH insiste sur les propositions qu elle a formulées quant aux paragraphes 1 (mise en œuvre et responsabilité gouvernementale) et 3 (participation de la société civile, notamment des personnes handicapées) de l'article 33. Elle regrette que ni la Commission parlementaire ni le Conseil d Etat n aient traité cet article de façon plus complète et précise, La CCDH recommande à la Chambre des Députés de mener une réflexion approfondie sur ces questions afin de clarifier le sujet d application et le suivi au niveau national, sans quoi la ratification de la Convention risque de n être considérée que comme une simple mesure d ajustement technique. 5