Rachel Mac Kay Entre ombre et lumière 2
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Le monde est ravagé par les guerres de pouvoir. Deux nations s affrontent, non pour la religion, non pour l indépendance, mais dans une notion d immortalité et d intemporel ; ces peuples, unis par le passé grâce à la magie, se sont de nouveau emportés, vaincus par le désir de grandeur et de pouvoir. Le pouvoir, fléau du monde actuel. Mais pas un pouvoir sur l homme. Un pouvoir sur l éternité. Lieu où règnent l ombre et la lumière. 2 3
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Versus 1 L Estacle L Estacle juin 3025 Le printemps est passé, les fleurs toutes ouvertes jonchent le sol de leurs couleurs chatoyantes. La vie est belle, il règne un calme et une sérénité absolus dans ces espaces de paix et ces immensités vertes. Le ciel bleu renvoie sur nous tout l amour des êtres de lumière. J entends et j écoute les conversations des adultes, sans bien comprendre toutes les notions et valeurs qu ils veulent nous inculquer à mon frère et à moi. Il faut dire qu à cette époque, nous étions plus préoccupés par nos jouets et jeux d enfants que par ces discussions. J aimais regarder ma mère. Cette femme qui était la douceur incarnée. Son grand regard bleu intense et ses longs cheveux bruns frisés qui brillaient 2 5
intensément. Elle m a donné tout l amour qu une mère peut apporter, par sa présence, ses paroles et ses petites attentions. Mon père était un homme important pour l Estacle, car il incarnait toutes les valeurs que chaque être de lumière doit apprendre. Mon frère et moi étions destinés au plus grand des avenirs. Ne sachant pour l heure quel allait être le mien, je contemplais le monde avec mes yeux d enfant. Mon frère, Karoll, avait un tempérament de feu qui rendait ma mère tellement complaisante et ébahie, devant sa vivacité d esprit, qu elle en oubliait parfois qu en chaque être de lumière, la source pouvait être présente. L Estacle était en paix depuis tellement d années que nul ne croyait que cela changerait un jour. Personne n aurait imaginé qu un conflit générerait le chaos. Mes premières années d enfance furent heureuses, pleines d amour, d attentions et de joie de vivre. La source était blanche, neutre et lumineuse. Cette boule intense de lumière était juchée en haut d un immense pilier en argent fin avec une base épaisse et se terminant par le sigle de l Estacle. Sa douce lumière dégageait de la pureté et de l amour. 26
Mon père, seul, avait le pouvoir de la tenir entre ses mains en tant que sourcier. Selon lui, le sourcier était choisi par la source elle-même, car seuls un cœur pur et une âme charitable faisaient briller le feu ardent et lumineux de la source. Je trouvais qu il était l homme le plus beau et le plus merveilleux. Son pouvoir étant immense, il transmettait à son peuple tout l amour qu il recevait de la source. Nous vivions tout près d elle. Mon père avait son rituel et ses incantations matinales. Aussi, il se devait de se tenir à proximité pour profiter de sa luminescence et de sa puissance, afin de transmettre son aura vers l Estacle. Notre vie était bercée d illusions de sagesse et de transpositions irrationnelles. Nous profitions de chaque instant, de tous ces petits moments de bonheur et de simplicité. J aimais me promener le soir avec ma mère toujours dans les mêmes lieux. Un cadre qui pour moi représentait la beauté, l intelligence et la vérité. Cet espace naturel se trouvait sur la rive en face de notre habitation. La lumière impressionnante de la source irradiait l allée qui menait à cet immense étang. D un côté l étang et de l autre une longue allée parsemée de cerisiers. 2 7
Le cerisier étant mon arbre préféré, je me sentais renaître à son contact. Il m apportait sa chaleur et sa majesté. Ses fleurs aux mille couleurs m imprégnaient d une immensité profonde et d un silence majestueux. Maman aimait ce lieu mais nous devions toujours nous arrêter avant le dernier cerisier de la première allée. Je ne savais pas trop pourquoi, mais papa me mettait en garde car de l autre côté, nul n était allé. Nous pouvions apercevoir un autre chemin avec des cerisiers, celui-ci ne se terminait pas. J avais envie d y aller, maman ne voulait pas. Nous contemplions ainsi, chacune de notre côté, et en silence, ces arbres face à nous et leur splendeur. Je restais là ébahie à m émerveiller devant cette image, avec toute l admiration d une enfant de cinq ans. À chaque retour, je sentais chez maman une certaine tristesse. Elle était plus distante, et pourtant si proche de moi par la pensée. Nous aimions communiquer ensemble juste par l esprit. Je n étais pas très douée, mais maman souhaitait que je m entraîne encore et toujours plus. Elle aimait me faire deviner ses pensées. 28
Lors de ces promenades, j aurais tant aimé pouvoir faire preuve de brio et enfin déceler en elle les raisons de ce désarroi. Mais hélas, rien. Le silence, le cri du hibou une fois la nuit venue pour seule mélodie. Nos pas retournant en direction de la maison afin de retrouver la chaleur de notre foyer. Les pensées s estompent avec le temps, et les souvenirs de la prime enfance deviennent une fiction si lointaine que l on croit finalement avoir tout inventé. 2 9
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Versus 2 L apprentissage L Estacle septembre 3025 Voici mes six ans venus, mon apprentissage en tant qu être de lumière devait commencer. Karoll avait huit ans et veillait déjà sur moi avec une attention particulière. Mon frère avait, tout comme mon père, des cheveux très blonds et des yeux d un bleu si limpide que nous aurions pu croire que c était de l eau. Ma rentrée en classe de lumière premier niveau fut un moment particulier, car tous les enfants de ce cycle pensaient et croyaient pouvoir un jour être choisis par la source, afin de la tenir et faire ainsi vibrer le monde de sa couleur chatoyante. C était un tel honneur de pouvoir sublimer l Estacle. Une intensité si puissante que chaque être de 2 11