DROITS DE FEMMES, RÔLE DES FEMMES :



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Transcription:

FORUM AFRIQUE-CANADA SYMPOSIUM 2005 RAPPORT DROITS DE FEMMES, RÔLE DES FEMMES : COMMENT ÉCOUTER, COMMENT AGIR? Chaffey s Locks (Ontario) Les 2 au 5 octobre 2005 Conseil canadien pour la coopération internationale

Le Forum Afrique-Canada remercie le Secrétariat des conférences de l Agence canadienne de développement international (ACDI) et le Centre de recherche pour le développement international (CRDI) pour leur contribution financière pour cette initiative. Ce rapport peut être photocopié librement pour utilisation sans but lucratif. Sylvie Perras Coordonnatrice, Forum Afrique-Canada 1, rue Nicholas, bureau 300 Ottawa (Ontario) K1N 7B7 Canada Téléphone : (613) 241-7007, poste 321 Télécopieur : (613) 241-5302 Site Internet : www.ccic.ca Conseil canadien pour la coopération internationale Octobre 2005

DROITS DES FEMMES, RÔLE DES FEMMES : COMMENT ÉCOUTER, COMMENT AGIR? INTRODUCTION Le Forum Afrique-Canada a tenu son 5 e symposium du 2 au 5 octobre 2005 à Chaffey s Locks, en Ontario. Ce rendez-vous annuel du FAC a réuni plus de 65 participant(e)s, dont plusieurs conférencier(e)s d Afrique et du Canada, ainsi qu un groupe de Canadiennes et d Africaines participant à un échange sur la violence envers les femmes. Organisé sous l égide de Carrefour canadien international, cet échange a favorisé l apprentissage mutuel par le partage des expériences. La plupart des participantes africaines sont issues d organisations de femmes mises en nomination pour la bourse 2004 du Fonds Betty Plewes. Des discussions aussi fructueuses que stimulantes ont permis d aborder divers enjeux : droits des femmes en Afrique, violence envers les femmes, rôle des femmes en agriculture, en économie et dans le commerce, type de relations et de collaboration que nous entretenons entre partenaires. La participation d autres secteurs de la société civile ici, des groupes de femmes du Canada a été une expérience très puissante sur laquelle il faut tabler dans nos rencontres et activités futures en vue de créer des alliances et les renforcer. Ce bref rapport présente les observations et recommandations issues des exposés et des discussions pendant les trois jours du symposium. Le Forum Afrique-Canada remercie toutes les personnes qui ont pris le temps de présenter un exposé ou de participer aux discussions. Leur énergie et leur enthousiasme ont fait de ce symposium une expérience enrichissante et stimulante. Nous adressons des remerciements particuliers à nos personnes ressources africaines Micheline Ravololonarisoa, Emily Sikazwe, Fahima Hashim, Crecentia Mofokeng et Tetteh Hormeku qui nous ont fait profiter de leur présence malgré un horaire très serré et aux participantes africaines qui sont venues de loin pour partager avec nous leurs espoirs et leurs points de vue. Les exposés de Micheline Ravololonarisoa et Crecentia Mofokeng sont présentés dans la langue où ils ont été livrés sur le site Web du CCCI, www.ccic.ca. SOMMAIRE DES OBSERVATIONS 1 1.0 Les femmes doivent agir sur les politiques à plusieurs niveaux 1.1 Les femmes ont perdu du terrain dans le débat sur l égalité entre les sexes depuis quelques années. Au Canada et en Afrique, les organisations de femmes doivent de toute urgence s intéresser davantage aux priorités politiques à tous les niveaux, local autant que mondial. Des enjeux comme les droits des femmes et l égalité entre les sexes font de moins en moins partie 1 Ces observations ont été présentées le deuxième jour du symposium par Betty Plewes et Tetteh Hormeku dans un sommaire des observations issues des panels et des interventions des participant(e)s depuis deux jours. DROITS DES FEMMES, RÔLE DES FEMMES : COMMENT ÉCOUTER, COMMENT AGIR? 1

des priorités. Par ailleurs, les femmes ressentent l impact des politiques et sont actives sur la scène locale, nationale, régionale, panafricaine et mondiale. Nous devons cependant apprendre à mieux lier la problématique de l égalité entre les sexes à notre travail de plaidoyer. Ainsi, quel est l impact exercé par les politiques commerciales mondiales sur le rôle des femmes, leurs moyens de subsistance ou la violence dans la collectivité? Il faut poser des questions et déterminer comment l expérience des femmes sur le terrain peut étayer le travail de plaidoyer sur les politiques que nous réalisons à d autres niveaux. Nous devons adopter une démarche globale qui fait le lien avec les réalités locales et toujours rester conscients de l impact exercé par la violence structurelle sur la vie des femmes. Par exemple, quel est l impact des politiques commerciales canadiennes sur la situation particulière des femmes, soit la majorité des personnes vivant dans la pauvreté en Afrique? Il est évident que les négociations commerciales en cours vont continuer de miner l activité économique des Africaines en agriculture, dans les services et la production industrielle à petite échelle. La position du Canada exercera un impact négatif dans tous ces secteurs si l Afrique est forcée d ouvrir sans réserve ses marchés de produits non agricoles. Comme d autres pays développés, le Canada s acharne à imposer cette formule à l Organisation mondiale du commerce (OMC). 1.2 Dans les mois qui précèdent la rencontre ministérielle de l OMC, comment inciter nos gouvernements à ne pas imposer à l Afrique une libéralisation coulée dans le béton? Et comment s assurer qu ils tiennent compte de la souveraineté alimentaire et de l impact sur les pauvres et les femmes au moment d adopter des politiques mondiales sur le commerce? Le Canada détient une expertise intéressante en matière de structures de soutien des marchés agricoles par les agriculteurs eux-mêmes les pays en développement pourraient s en inspirer. On peut envisager une collaboration, vu l intérêt des pays africains, fondé sur leur propre expérience des offices de commercialisation, une option stratégique qu ils ont peur de voir éliminée à jamais par les accords de l OMC. 1.3 Les organisations de la société civile (OSC) africaines doivent s occuper au jour le jour des besoins pressants des femmes africaines, mais il ne faut pas séparer ces activités des droits des femmes et du travail sur les politiques en vue de revendiquer ces droits. Ainsi, les femmes jouent un rôle crucial dans l économie informelle. Il est certes important de transformer celle-ci en économie formelle pour garantir les moyens de subsistance, mais il faut le faire en appuyant le maintien de l activité économique et les droits des femmes, et de façon à répondre à leurs besoins spécifiques. 1.4 Pour assurer le caractère global de la démarche et étayer les politiques aux divers niveaux d intervention des organisations africaines et canadiennes, les organisations de plaidoyer doivent prendre des mesures en vue d accroître la diversité des points de vue des femmes de tous les segments de la société dans le dialogue sur les politiques. 1.5 Il faut de toute urgence rebâtir et entretenir un mouvement des femmes solide et coordonné, tant au Canada qu en Afrique. Partout au pays, les Canadiennes participent activement aux divers enjeux liés aux droits des femmes à l échelle des collectivités. Mais le DROITS DES FEMMES, RÔLE DES FEMMES : COMMENT ÉCOUTER, COMMENT AGIR? 2

Comité canadien d'action sur le statut de la femme est devenu invisible en tant qu appareil de coordination des politiques et du plaidoyer au Canada anglais. De même, l Afrique compte très peu de structures de coordination pour représenter le point de vue des femmes qui s élèvent pour leurs droits. Faut-il travailler à la revitalisation de ces structures? 1.6 L «intégration» de la problématique d égalité entre hommes et femmes s est traduite par une réduction globale des appuis au travail sur les droits des femmes et aux activités destinées aux femmes au gouvernement, dans la plupart des organismes et chez les bailleurs de fonds. Un exemple récent de la façon dont les droits des femmes ont été occultés est le peu d attention qu on leur accorde dans les Objectifs du millénaire pour le développement, même si l atteinte de ces objectifs repose largement sur la capacité de changer la vie des femmes pauvres. 2.0 FEMMES, CONFLIT ET INTERVENTION HUMANITAIRE 2.1 Les militant(e)s et les OSC doivent mieux connaître les principes internationaux et les conventions relatives aux droits de la personne, et la façon dont le Conseil de sécurité les applique dans les situations urgentes de conflit. Par exemple, les Conventions de Genève traitant du droit humanitaire interdisent le viol et les autres formes de violences sexuelles. Les tribunaux ad-hoc des Nations unies sur l ex-yougoslavie et le Rwanda ont contribué de façon significative à la reconnaissance explicite du viol comme crime contre l humanité, et ont permis de poursuivre certaines personnes en justice sous ces accusations. D autre part, la reconnaissance explicite de la violence sexuelle fait partie du mandat de la Cour pénale internationale. Cela inclut plusieurs types de crimes de guerre et de crimes contre l humanité dont le viol, l esclavage sexuel, la prostitution contrainte, la grossesse forcée, la stérilisation de force et toute autre forme de violence sexuelle de gravité comparable. Par ailleurs, des pays comme le Soudan n ont pas encore signé certaines conventions clés pour les droits des femmes, entres autres la Convention pour l élimination de toutes les formes de discrimination à l égard des femmes (CEDAW). 2 2.2 Les ONG internationales présentes dans les zones de conflit le Darfour, par exemple doivent adopter un code de conduite et des pratiques conformes à l éthique, vu leur accès parfois privilégié à ces zones par rapport aux OSC locales. Ainsi, le gouvernement empêche presque toute intervention directe de la part des organisations soudanaises au Darfour, et celles-ci sont aussi souvent ignorées par les ONG internationales. Il est certes important de combler les besoins pressants sur le terrain, mais les ONG internationales doivent le faire de manière à renforcer les capacités des OSC locales afin qu elles puissent devenir plus présentes et plus actives à moyen terme. 2.3 Nous devons surveiller plus étroitement l action des soldats canadiens sur le terrain, à l heure où l ONU surveille davantage l application de ses propres politiques dans le cadre des opérations de maintien de la paix. 2 Rapport sur la République Démocratique du Congo, La guerre dans la guerre, Human Rights Watch, 2002. DROITS DES FEMMES, RÔLE DES FEMMES : COMMENT ÉCOUTER, COMMENT AGIR? 3

3.0 LES IMPLICATIONS SUR NOTRE FAÇON DE TRAVAILLER 3.1 Le FAC a pour mandat de stimuler le dialogue sur les politiques et de réfléchir à nos pratiques en tant qu OSC canadiennes. À ce propos, la réunion annuelle du FAC au printemps prochain aura pour but d améliorer les stratégies futures en examinant notre travail sur les politiques et les formes de collaboration que nous adoptons comme partenaires de nos homologues africains. L un des éléments soulevés au symposium est de mieux comprendre les pratiques des ONG internationales en cas d intervention humanitaire pour s assurer qu elles ne minent pas les capacités des OSC locales. Nous devons aussi voir à quel point l intégration de la problématique d égalité entre hommes et femmes dans nos propres organisations a pu occulter l égalité et les droits des femmes dans nos politiques et nos programmes, ou réduire leur importance. 3.2 Il faut explorer de nouvelles façons de travailler en vue de lier à l échelle internationale le travail réalisé à divers niveaux sur les politiques relatives aux droits des femmes. Le dialogue sur les politiques doit être un outil d autonomisation pour les femmes. Les OSC internationales, mais aussi toutes les organisations intéressées au débat sur les politiques, doivent se garder de parler au nom de constituantes qu elles ne représentent pas (qui parle au nom de qui?). Nous devons améliorer nos pratiques et nos processus à tous les niveaux dans notre travail sur les politiques et nos rapports avec le gouvernement, y compris dans la façon de définir nos demandes et nos messages prioritaires. 3.3 Il est très important d établir des alliances entre régions, et entre le Nord et le Sud, pour saisir l impact des politiques, définir des messages pertinents et créer une synergie de nos stratégies en vue d influencer les gouvernements sur le commerce ou d autres enjeux. Mais les alliances doivent se bâtir autour d une cause commune et tenir compte des rapports de pouvoir et de l impact des macropolitiques, y compris le régime commercial actuel. Les mouvements sociaux et les mouvements populaires, dont le mouvement syndical, sont des acteurs essentiels pour organiser la résistance et influer sur les politiques, tant au Canada qu en Afrique. 3.4 Pour renforcer la participation des femmes au dialogue sur les politiques, les ONG et les organisations de femmes du Canada et d Afrique doivent s efforcer d établir un programme vraiment commun et expérimenter des modes de collaboration novateurs. La présence au symposium des participantes de l échange sur la violence envers les femmes est un exemple modeste de la façon dont on peut renforcer les organisations de femmes au Canada et en Afrique, par le partage des expériences et un accroissement de la visibilité et de la crédibilité dans les cercles intéressés aux politiques. 3.5 Nous devons nous inspirer de l Action mondiale contre la pauvreté et de la campagne Abolissons la pauvreté au Canada pour trouver de nouvelles façons de mobiliser les citoyennes et citoyens et demander des comptes aux parlementaires. DROITS DES FEMMES, RÔLE DES FEMMES : COMMENT ÉCOUTER, COMMENT AGIR? 4

DISCUSSIONS EN SOUS-GROUPES TRAVAIL MONDIAL DE PLAIDOYER SUR LES ENJEUX RELATIFS AUX DROITS DES FEMMES 1. Il faut étayer plus solidement notre travail de plaidoyer auprès des décideurs, et ce, à tous les niveaux. Dans les rapports avec le gouvernement, un élément crucial est «la légitimité accordée à l information et aux expériences réelles», et ce, avec tous les interlocuteurs gouvernementaux. Les acteurs externes déforment-ils à leur insu les réalités locales quand ils recueillent de l information à leurs propres fins et pour leurs propres campagnes? Pour autonomiser les femmes et leur donner directement la parole, un moyen très efficace est d utiliser les histoires. La méthodologie du récit peut constituer un point de départ solide avec les fonctionnaires, même s il faut parfois ajouter de l information pour situer le récit dans un contexte global. Pour toutes sortes de raisons, plusieurs organisations actives sur le terrain ne consignent pas les récits institutionnels, au Canada comme en Afrique. Dans les deux cas, il faut se donner les moyens d améliorer ce type de documentation (voir le projet spécial du CCCI pour accroître les connaissances de ses membres en vue d influer sur les politiques, en insistant sur le rôle des histoires). Les récits et l information contextuelle doivent aller au-delà des faits vécus par les femmes pour en cerner les causes profondes (violence structurelle envers les femmes, réduction des moyens de subsistance imputable aux règles du commerce, etc.). Les histoires doivent aussi mettre l accent sur les solutions de rechange souhaitées. On doit présenter à la fois des images positives et négatives pour dépasser les stéréotypes et révéler les réalités sous-jacentes. Compte tenu de l éloignement et des coûts impliqués, comment le FAC peut-il contribuer à faire connaître au Canada les récits des femmes africaines? 2. Les organisations de la société civile du Nord doivent accepter de prendre des risques. Les actions collectives ne doivent pas se limiter à un geste isolé, il faut les soutenir à long terme et les transformer en mouvement. Il faut tenir compte des dynamiques sociales et politiques à l œuvre dans les pays africains, et de leur impact sur les femmes. Les ONG du Nord ont un accès privilégié aux espaces politiques dans le Nord et dans le Sud, et elles doivent le reconnaître. Le rôle de la société civile canadienne doit être d aider à créer et à cultiver une synergie africaine par l entremise de réseaux, d alliances, de rencontres, etc. On a suggéré, par exemple, que les membres du FAC présentent leurs homologues africains et mettent sur pied une base de données de partenaires pour faciliter la définition de positions communes au FAC. 3. Le Forum Afrique-Canada est considéré comme un vecteur important de la solidarité Nord- Sud, notamment en ce qui a trait aux droits des femmes et au mouvement féministe en Afrique. La diversité des démarches utilisées par les membres n est pas perçue comme un problème. On estime cependant qu il est crucial de renforcer les connaissances sur des enjeux particuliers pour assurer la cohérence et définir une analyse commune. On suggère de s éloigner de l intégration de l égalité hommes-femmes pour intégrer plutôt les droits des femmes à tous les aspects du travail de plaidoyer, ainsi que dans nos programmes et nos pratiques. DROITS DES FEMMES, RÔLE DES FEMMES : COMMENT ÉCOUTER, COMMENT AGIR? 5

4. Conditions favorisant l efficacité des stratégies de plaidoyer : Il faut élaborer les stratégies directement en fonction du contexte où elles s inscrivent, tout en restant sensibles aux diverses réalités vécues par les femmes dans leur milieu respectif. Ces stratégies adopteront ensuite divers instruments en fonction des buts et du contexte local. Les stratégies doivent être flexibles et s adapter à divers contextes et divers auditoires (OSC et leurs constituantes, législateurs, médias, décideurs). Les nouvelles technologies des communications peuvent assurer cette flexibilité, mais elles coûtent cher et sont inabordables pour bien des organisations africaines locales et nationales. Les stratégies doivent être axées sur la création de coalitions, notamment avec d autres secteurs que celui de l initiateur (syndicats, organisations de femmes, syndicats agricoles et mouvements représentés à ce symposium). Les stratégies doivent tenir compte du temps requis pour atteindre les objectifs il faut à la fois être capable de réagir sur une base quotidienne à des cas pressants de violence envers les femmes et envisager des changements de politiques à long terme. Bien souvent, le plus dur est de maintenir l impulsion assez longtemps pour obtenir des résultats. Dans le cadre de projets à durée et objectifs déterminés, les bailleurs de fonds exigent des homologues africains des résultats plus immédiats. Cela fausse les délais et prive les organisations de la flexibilité requise pour s adapter et saisir les occasions offertes par l évolution du contexte. Les organisations africaines sont bousculées par les exigences des campagnes mondiales. Ainsi, l Action mondiale contre la pauvreté a engendré des tonnes de courriels et les organisateurs sur le terrain sont débordés. Comme l a dit une collègue africaine : «Les campagnes, ça ne se fait pas assis derrière un bureau!» AUTRES COMMENTAIRES TIRÉS DE L ÉVALUATION FINALE DU SYMPOSIUM L éducation réalisée par le FAC pour changer la perception de l Afrique est un travail important (Images de l Afrique). Il faut changer la perception négative de l industrie des ONG. La seule différence entre les ONG canadiennes et les africaines, c est l ampleur des ressources. Nous devons améliorer la communication avec les bailleurs de fonds, soit l ACDI. On n a pas du tout abordé la question du trafic des personnes, malgré son importance extrême en Afrique en rapport avec des enjeux comme le travail des enfants, l exploitation sexuelle et les droits des femmes. Il faut mettre en doute les termes utilisés, être conscient du pouvoir des mots (par ex., le terme «États fragiles»). DROITS DES FEMMES, RÔLE DES FEMMES : COMMENT ÉCOUTER, COMMENT AGIR? 6

On apprécie énormément la démarche collective et l éventail diversifié de participant(e)s du Canada et d Afrique. Une analyse globale de la conjoncture faisait défaut à ce symposium. À chaque occasion, nous devrions faire le suivi avec les participant(e)s pour voir l impact de la dernière réunion (du dernier symposium) sur leurs connaissances et leurs pratiques. Plus d échanges informels serait souhaitable et apprécié. DROITS DES FEMMES, RÔLE DES FEMMES : COMMENT ÉCOUTER, COMMENT AGIR? 7