Les câbles sous-marins



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INSA-Lyon Département Télécommunications Services & Usages Les câbles sous-marins COMMENT EN COMPRENDRE LES INNOVATIONS? MARTEL Julien MIHAILA Simona N DIAYE Youssoufa ROTENBERG Stéphane SARR Oumou ENSEIGNANTS : GUEDAT Claude BRETTE Olivier

Le vent se lève!... il faut tenter de vivre! L'air immense ouvre et referme mon livre, La vague en poudre ose jaillir des rocs! Envolez-vous, pages tout éblouies! Rompez, vagues! Rompez d'eaux réjouies Ce toit tranquille où picoraient des focs! - Paul Valery

SOMMAIRE Introduction... 5 I) Un peu d histoire des câbles sous-marins?... 6 A) L APPARITION des premiers câbles... 7 B) La conquête du fonds des mers... 8 C) La fin d une ère : résultat d une coévolution entre le besoin et la technique... 9 D) LES câbles coaxiaux... 10 E) CONCLUSION... 11 II) Evolutions Techniques : des réponses à de nouveaux besoins... 13 A) Composition d'une fibre... 13 B) Principes de bases de propagation en fibre optique... 14 1) Généralités... 14 2) Fibres multimodes... 14 3) Fibres monomodes... 16 C) Emission/Réception des signaux.... 16 1) Systèmes pré-émission... 17 2) Emetteurs : Diodes / Lasers, Diodes Lasers... 17 3) Récepteurs : photodiodes, phototransistors... 18 D) Atténuations dans les lignes de transmissions optiques, régénération de signaux, fibres dopées.... 18 1) Atténuation du signal... 18 2) Régénération du signal optique... 18 E) Offre de débit et capacité des câbles... 19 a) Capacités des supports optiques :... 19 b) DWDM (Dense Wave Data Multiplexing), multiplexage en fréquence... 20 III) Mise en œuvre... 21 3

A) Les différentes étapes de mises en œuvres... 21 1) Une étude du fond des mers... 21 2) Embarquement... 21 3) Pose d'un atterrissement... 22 4) Pose ensouillée... 22 5) Pose principale... 22 B) Exemple de pose d un câble sous marin du leader mondial Nexans... 22 IV) Structure du réseau... 25 A) Une distribution inégale du réseau... 25 B) Un réseau reposant sur des structures... 26 C) Des menaces physiques sur le réseau... 27 V) Entreprises et économie dans le secteur des câbles sous-marins.... 29 A) Une présentation des principaux acteurs économiques.... 29 1) Généralités :... 29 2) Alcatel-Lucent... 30 B) Les évolutions du domaine économique... 31 c) Statuts Juridiques... 32 Conclusion... 33 Bibliographie... 34 4

INTRODUCTION Comme si les terres ne suffisaient pas, le monde des télécommunications a dû s'approprier les océans. Les hommes, aujourd'hui dispersés aux quatre coins du monde ont dû trouver de nouveaux médiums pour relier leurs continents. Faites-en l'expérience, demandez aujourd'hui autour de vous si les communications intercontinentales transitent majoritairement par satellite ou câble sous-marins? L'on vous répondra très probablement, et avec assurance, que la majorité des communications passent par satellite, idée très communément répandue. Savez vous alors que 90% du trafic communiquant (principalement internet et téléphone) est écoulé par câbles sous-marins? Le câble sous-marin est donc le fruit d'un premier besoin né au début du XIXème siècle qui n'a cessé de croître jusqu'à l'explosion de l'internet dans les années 90. Ce besoin de communication intercontinentales, mal défini en 1900 est exacerbé par les innovations multiples qui permettent d'offrir des trafics de plus en plus importants. L'innovation dans le domaine des câbles sous-marin est donc complexe. Le besoin et l'innovation sont intimement liés : l'innovation fait naître le besoin et le besoin intensifie l'innovation. Le développement technique est évidemment dépendant des demandeurs. Le besoin quant à lui, évolue avec les offreurs. «Comment comprendre l'innovation dans le domaine des câbles sousmarins?» est la question à laquelle nous allons tenter de répondre dans ce dossier. Nous voulons montrer que les deux facteurs, besoin et innovation, sont conjoints et que l'on peut parler de cofacteurs d'évolution. Pour cela nous remonterons le temps dans une première partie pour nous intéresser à l'histoire des câbles sous-marins : de leur naissance à l'ère des câbles coaxiaux. Nous chercherons quels sont les besoins qui ont poussé le développement de la communication intercontinentale. Nous montrerons comment les innovations techniques qui ont jalonnées le XXème siècle ont répondu à ces besoins et en ont proposés de nouveaux. La fin des câbles coaxiaux est marquée par l'avènement de la fibre optique. Nous analyserons dans une seconde partie par quelles innovations ce nouveau support de transmission à su s'imposer. Nous en étudierons quelques caractéristiques électriques et mécaniques. Nous nous intéresserons particulièrement aux réseaux qui en ont émergés et les besoins nationaux et internationaux auxquels ils ont répondu. Ces réseaux de câbles sont les enfants d'une industrie peu connue. Fournisseurs, constructeurs, entreprises de déploiement et de mise en œuvre, exploitants, utilisateurs seront les protagonistes de notre troisième partie. Nous parlerons aussi de leur statut juridique et ferons le point sur le droit de la mer qui les encadre. Toujours dans l'optique de démontrer le lien entre innovation et besoin. 5

I) UN PEU D HISTOIRE DES CABLES SOUS-MARINS? En 54 avant JC, Jules César alors en Angleterre envoie une lettre à Cicéron à Rome. La lettre met 29 jours pour arriver. En 1834, un citoyen britannique, alors à Rome, transmet un courrier à Londres qui lui parvient 30 jours plus tard. On remarque que sur une période de presque2 siècles, la vitesse du courrier n a guère évolué. En effet, la vitesse du courrier est très dépendante des moyens de transports de l époque : les chevaux, les navires faisant route au gré de la force et de la direction des vents. Or, au cours du siècle des lumières, la circulation des idées et des personnes en Europe a fait naitre un désir pressant de communiquer plus rapidement. Au début du XIXème siècle, ce désir est accru par les améliorations de la vie publique. L apparition des machines à vapeur a permis de réduire considérablement les temps de parcours. Néanmoins il faut toujours trois jours au courrier pour franchir la Manche entre Paris et Londres, vingt jours pour traverser l Atlantique, plus de trois mois pour joindre l Australie Dès lors de nouvelles technologies apparaissent pour répondre aux besoins de communications. En 1791, le français Claude Chappe invente le premier système de télégraphie aérien et optique de conception mécanique fonctionnant de poste de poste, c est le premier système de télécommunications au monde. Ceci constitue une première révolution. Le 15 août 1794, Chappe annonce la victoire des troupes de la république au Quesnoy en 1h45. Ce moyen de communication rapide est très vite adopté pour les armées de la République Française et les services officiels. Puis grâce aux découvertes majeures en électricité (la pile mise au point par l italien Volta en 1800, l électromagnétisme mis en évidence par le danois Oersted en 1820, les lois de Marie Ampère en 1821 et le galvanomètre à cadre mobile de Deprez et D Arsonval), le télégraphe électrique apparait vers 1837. La première ligne télégraphique mondiale est établie en 1838 entre Londres Paddington et West Drayton(Angleterre). Enfin l apparition du code Morse inventé par l American Samuel Morse constitue une impulsion extraordinaire au télégraphe électrique. Le code morse est le premier système qui s appuie sur le codage de l information. Il utilise deux signes (court et long) pour transmettre. S.Morse (1791-1872) S.Morse (1791-1872) 6

A) L APPARITION DES PREMIERS CABLES Cependant malgré ces avancés, les communications à travers les mers et les océans sont toujours aussi lentes. On réfléchit alors à des moyens pour communiquer plus rapidement à travers les mers et océans. L idée de poser des câbles sous-marins apparait donc. En 1838, des premiers essais de câbles sous-marins isolés au caoutchouc sont effectués sans trop grand succès. On se heurte à plusieurs obstacles. Comment isoler les câbles sous l eau? Quel isolant utiliser? Comment protéger les câbles des engins de pêches et des agressions naturelles (corrosion et abrasion de l armature)? En 1843, le docteur Montgomerie de Singapour découvre la guttapercha. La gutta-percha produite par un arbre proche de l hévéa s avère être un parfait Pose d'un câble sous-marin isolant. Deux ans plus tard, Faraday démontre que les propriétés isolantes de cette matière sont accrues sous l eau. Pendant la même période, deux chercheurs britanniques : H. Bewley et S.W.Silver permettent la production de fils isolés de manière continue. Pour certains historiens, l extrusion (un procédé de fabrication mécanique par lequel un matériau mis sous pression est contraint de traverser une filière qui lui donnera la forme d'un profilé de grande longueur) et le collage de la gutta sur un fil de cuivre ont été découvert par l allemand Werner Von Siemens en 1845. Deux entreprises britanniques, The Gutta Percha Company et R S Newall and Co sont alors créées. Les deux constructeurs, l un fournissant les conducteurs et l autre l armature, s engagent dans la production des câbles sous-marins. Le 10 janvier 1849, le premier câble sous-marin isolé à la gutta est immergé dans le port de Folkestone (Royaume-Uni). Ce câble est relié au télégraphe électrique terrestre. C.V.Walter, en mer à bord du navire Princess Clementine échange des dépêches avec Londres à travers ce câble. Les communications sous-marines sont désormais possibles. Le 19 octobre 1851, Les frères Brett établissent entre Calais (France) et Douvres (Royaume-Uni) la première liaison télégraphique par un câble sous-marin. Cette liaison est permise grâce à un câble constitué de quatre conducteurs armés pour une résistance de huit tonnes. Il est posé par le remorqueur Blazer et fonctionnera pendant 40 ans. Le 1 er décembre 1852, les équipements intermédiaires entre Douvres et calais sont supprimés pour établir une liaison directe entre les deux capitales. Dès lors, des messages sont transmis en moins d heure entre les bourses de Londres et de Paris alors qu il faut encore trois jours pour un courrier rapide. Le Royaume-Uni est désormais connecté au reste de l Europe. C est le début d un grand courant d affaires. De plus en plus de câbles sous- marins sont posés. 7

B) LA CONQUETE DU FONDS DES MERS Bientôt, l idée de relier l Ancien monde et le nouveau immerge. Poser au fond des eaux impétueuses de l Atlantique une gigantesque ligne télégraphique qui relie les côtes d Irlande et de Terre-Neuve est un projet d une audace considérable. L américain Cyrus W. Fields relève le défi. Avec les spécialistes de l époque, les britanniques John W. Brett et Charles Bright, il fonde la société Atlantic Telegraph Company. En 1857, Cyrus W. Fields fait une Cyrus West Field (1819-1892) première tentative pour tirer un câble transatlantique, mais il échoue. Le câble rompt et se perd dans les fonds marins. Le 5 août 1858, Field fait une nouvelle tentative qui réussit. Le câble transatlantique est posé entre Valentia (Irlande) et Trinity Bay (Terre neuve) par les deux navires Niagara et Agamemnon. Le premier message transmis est entre la reine Victoria et le président des États-Unis, M Buchanan. La transmission du message de 100 mots dura 1 heure 7 minutes. Malheureusement, la ligne ne fonctionne que 20 jours jusqu au 1 er septembre 1858. Le câble commence à montrer des signes de faiblesse. La qualité des signaux fléchit de jour en jour. L ingénieur Whitehouse prend donc une décision fatale. Il se dit qu en augmentant le voltage, les impulsions seront plus fortes. Il fait envoyer 2 000 volts dans le câble instable. La première liaison de télégraphie transatlantique reçoit le coup de grâce : le câble est grillé dans les fonds marins. La pose de câbles sous-marins et la conquête sous-marine se poursuivent. Entre 1865 et 1866, deux nouveaux câbles transatlantiques sont posés. En 1870, Londres et relié à Bombay C est le début d une ère de mondialisation, les premières multinationales voient le jour. Puis, on commence à se poser des questions à propos de la juridiction de ces câbles. En effet, les câbles sont sous la juridiction des états côtiers que dans les eaux territoriales soit à trois miles nautiques des côtes. Dans l espace international, les câbles peuvent être détruits impunément par les Etats et les autres usagers de la mer. En 1865, l Union Télégraphiques Internationale (UTI) est crée pour réglementer et gérer cette nouvelle technologie. 1858 1865 1866 1858 1865 1866 8

Cette technologie devient très vite notamment un enjeu stratégique et militaire pour les puissances de l époque, tant elle permet le contrôle de l information et la gestion administrative. Le Royaume-Uni s empare du monopole de cette technologie. En effet, ce sont les entreprises britanniques qui créent et posent les câbles en grande partie à travers le monde. En 1877, les réseaux britanniques ont une longueur de 103 068 km alors que le réseau mondial atteint 118 507 km. Les autres réseaux ont des longueurs faibles : France (1246 km), Allemagne (752 km), Italie (404 km). Les États-Unis n ont aucun câble international. Seule la compagnie danoise GNTC résiste à l impérialisme britannique et exploite un réseau qui s étend de l Europe au japon et à la Chine par le transsibérien. Face à cela, les états réagissent pour stopper cet impérialisme. Aux États-Unis, l état décide de mettre sous surveillance les compagnies télégraphiques, de contrôler les prix et d imposer la concurrence sur la voie transatlantique. Ailleurs en Europe, la France, l Allemagne et l Italie décident de laisser ce secteur industriel au privé néanmoins les entreprises sont encadrées et protégées par l état. C) LA FIN D UNE ERE : RESULTAT D UNE COEVOLUTION ENTRE LE BESOIN ET LA TECHNIQUE En 1876, Graham Bell invente le téléphone. Il est désormais possible de transporter de la voix par delà les kilomètres. Cette invention prend petit à petit de l ampleur et des réseaux nationaux sont mis en place. On désire alors élargir les réseaux par delà les eaux. En 1891, le premier câble téléphonique est posé entre Sangatte(France) et St Margaret (Royaume-Uni) par le câblier Monarch. Néanmoins ce type de câble ne sera pas davantage exploité. Les communications téléphoniques à travers les eaux ne sont possibles que sur de courtes distances car le signal téléphonique contrairement à celui télégraphique s affaiblit très vite. Au début du XXème siècle, grâce aux travaux du physicien italien Guglielmo Marconi, une technologie concurrente aux câbles apparait : la radio. La radio séduit par le fait qu elle est mobile et comble les insuffisances des câbles. La première guerre mondiale renforce l idée que cette dernière peut-être utilisée en complément aux câbles. La radio présente de nombreux avantages par rapport aux câbles malgré les investissements qu elle nécessite. En effet, les câbles peuvent êtres facilement détruits alors que la radio bien que brouillée reste un moyen rapide et facile pour communiquer. La radio était utilisée pour la communication entre les troupes au combat et les porte-avions. Les câbles étaient favorisés pour l envoi de messages secrets. Cette technologie est d autant plus renforcée au cours des années qui ont suivi la première guerre mondiale. Certaines puissances comme la France y voient un moyen de combler leurs déficiences en termes de câbles. La France construit un réseau colonial indépendant des britanniques et des américains grâce à la radio. Les câbles sont de plus en plus délaissés au détriment de la radio. A partir des années 1920, la radio 9

connait un succès immense avec l apparition des premières émissions. Les câbles sont de plus en plus délaissés au détriment de la radio. Néanmoins la crise de 1929 retarde le developpement de la radio qui nécessite de lourds investissements. Cette crise montre alors l intérêt économique de ces deux technologies et leur complémentarité. En 1932 à Madrid, la Convention Internationale Télégraphique et la Convention Internationale Radiotélégraphique fusionnent pour donner l Union Internationale des Télécommunications, un organisme chargé de régler et réguler toutes les technologies liées à la communication. Apres la première guerre mondiale, les américains ont rattrapé les britanniques. Le réseau allemand est partagé entre les puissances victorieuses. Cette concurrence stimule les recherches sur les câbles. Le britannique Olivier Heaviside démontre que l inductance longitudinale d un câble joue un rôle dans l affaiblissement du signal et la qualité de la transmission. Le danois Krarup et l allemand Pupin proposent plus tard des applications. Western Electric développe un câble comportant un ruban extérieur à la gutta en alliage de nickel et de fer appelée permalloy qui permet de multiplier par 4 la vitesse de transmission et peut-être utilisé sur de longs câbles. En 1950, les répéteurs immergés apparaissent. Ces répéteurs permettent de réamplifier le signal. En 1955, le TAT1, le premier câble transatlantique téléphonique à technologie coaxiale et à modulation de courant et de fréquences est mis en service. TAT est l acronyme de «Trans-Atlantic Telephonic cable». Ce câble avait une capacité de 48 canaux (un canal = 64 Kbit/s). On assiste alors à la fin des câbles télégraphiques peu à peu remplacés par les câbles coaxiaux supportant la téléphonie. Les câbles télégraphiques ont été le premier moyen de communication sous-marine. Leur exploitation et leur mise en place se sont faits pendant plus d un siècle. Ils ont répondu à un besoin pressant de communiquer de plus en plus vite et bientôt sont devenus un atout stratégique en terme de puissance. Néanmoins l apparition de nouveaux besoins a entrainé leur fin. Parmi les entreprises qui se sont le plus illustrées durant cette ère, on peut préciser Western Union racheté par AT&T en 1919, la Commercial Cable Company et l Atlantic Telegraph pour les Etats-Unis, la Compagnie Française des Câbles Télégraphiques et la compagnie des câbles sud américain (SUDAM) pour la France, la Submarine Telegraph Company, the Telegraph Construction and Maintenance Co (Telcon) et la Méditerranée Anglo Telegraph Company pour le Royaume-Uni. D) LES CABLES COAXIAUX La fin de ce type de câbles fait place à une nouvelle ère : c est l ère de l analogie dominée par les câbles coaxiaux. Le besoin de communiquer et d entendre son correspondant efface très vite le télégraphe. Un câble coaxial est constitué d un conducteur central en cuivre entouré d une gaine en polyéthylène et d un conducteur électrique 10

concentrique au premier, le tout revêtu d une gaine extérieure en polyéthylène. Une armature d acier, doublée près des côtes, le protège des agressions extérieures. Ces câbles véhiculent des signaux analogiques, mais peuvent évidemment transmettre des informations numériques lorsque celles-ci sont codées par des fréquences grâce à des modems (modulateurs-démodulateurs).la liaison est équipée à intervalles réguliers (tous les 10 km à l origine) de répéteurs immergés. Les câbles coaxiaux connaissent vite un très grand succès. Comme le réseau téléphonique, l exploitation de cette technologie est régie par l Etat. Les câbles appartiennent aux opérateurs nationaux sur toute la durée de leur vie. La radiotéléphonie en ondes décamétriques n est pas un sérieux concurrent aux câbles. Elle s appuie sur la réflexion des ondes sur l'ionosphère. Mais ces Schéma d'un câble coaxial résultats sont très variables et dépendent des modes de propagation du cycle solaire, de l'heure de la journée ou de la saison. Mais tout change en 1967 avec l entrée en scène des satellites. En effet ils utilisent les mêmes fréquences que les câbles et peuvent supporter des circuits téléphoniques -en moins grands nombres. La mondovision (diffusion simultanée d'un programme de télévision dans un maximum de pays du monde) favorise les satellites et tout le monde croit à la fin des câbles coaxiaux. Néanmoins les coaxiaux savent bien tenir leur place et connaissent un important développement jusqu en 1985. Le réseau posé fait alors près de 317 000 km. Cependant, en 1988, les câbles sous -marins connaissent une nouvelle évolution majeure avec la pose du TAT8, un câble optique. Ce câble optique relie simultanément la France, l Angleterre et les Etats Unis. Le TAT8 offrait une capacité de 48 000 canaux téléphoniques. Brusquement la fabrication et la pose des câbles coaxiaux sont interrompues. E) CONCLUSION Les premiers câbles apparaissent au milieu du XIXème siècle, nécessitant de communiquer plus vite et plus loin. Cette naissance a été permise grâce à d importantes innovations qui ont rendu jusqu alors l impossible : possible. Au départ, ces câbles n étaient conçus et utilisables que par le réseau télégraphique. Leur arrivée a contribué à une nouvelle ère : celle de la mondialisation. 11

L apparition de la radio, un sérieux concurrent, a contribué à l amélioration de ces derniers. Les innovations techniques apportent de nouvelles possibilités et créent de nouveaux besoins. En 1956, les câbles connaissent une révolution : l avènement du coaxial utilisable pour la téléphonie. Même si l apparition des satellites, pouvaient sembler leur fait de l ombre, ses câbles sont un immense succès. Enfin en 1988, on assiste à une deuxième évolution majeure. C est l ère du numérique. Les informations sont transmises sous forme de 0 et de 1. La transmission l information le plus rapidement possible en devient un des uniques objectifs. Les câbles coaxiaux sont remplacés par la fibre optique. 12

II) EVOLUTIONS TECHNIQUES : DES REPONSES A DE NOUVEAUX BESOINS En 1976 le réseau coaxial mondial dispose d'une assise importante. Des prévisions de trafic pour les années qui suivent tablent sur une rapide croissance et des besoins en perpétuel augmentation. Les recherches tentent alors de concevoir des supports de transmissions capables de conserver cette longueur d'avance pour écouler le trafic mondial, encore «faible» à l'époque. Les études se tournent alors vers une amélioration du coaxial, et n'aboutissent finalement pas. Dès cette année on envisage des transmissions via des systèmes optiques sousmarins et des études de faisabilités sont alors lancées. Une fois les craintes dissipées quant à la réalisation technique de ces projets, des tests sont lancés en 1982 et les premiers systèmes voient le jour en 1986. L'histoire n'aime pas les changements brusques et radicaux et la technologie optique n'échappe pas à la règle. Que fait-on de ce réseau coaxial sous-marin présent au fond des mers? La première idée consiste à le relier au nouveau réseau optique naissant. Cependant, les capacités «faibles» des câbles coaxiaux annoncent leur mort certaine à plus ou moins long terme. De plus la réalisation optique des cœurs de réseaux terrestre va favoriser l'émergence de l'optique sous-marine. Penser l'intégration et l'interconnexion des réseaux sous-marins et terrestre est déjà une priorité. L'avènement de la fibre optique a lieu en 1988 avec la pose des câbles TAT8 et TPC3 dans l'atlantique et le Pacifique. Ce sont les premiers câbles munis de fibres optiques. Après différents progrès techniques et technologiques que nous détaillerons dans cette partie la fibre optique est généralisée en 1995 et est encore aujourd'hui améliorée : répéteurs, affaiblissement linéique etc. A) COMPOSITION D'UNE FIBRE Une fibre optique est composée de trois couches : Une première couche cylindrique appelée cœur et composée de silice (matériaux fragile -au sens physique du terme : qui ne possède presque pas de déformation élastique, déformation avant rupture) constitue le métier même de la fibre optique : la propagation lumineuse. C'est dans le cœur de la fibre optique que la lumière circule. 13

Une seconde couche nommée gaine optique est un manchon cylindrique de silice, entourant le cœur et participant lui aussi à la propagation lumineuse. Le revêtement polymère (plastique) quant à lui protège la gaine optique et évite les interférences lumineuses qui pourraient être causées par une onde extérieure au circuit. Ces différentes couches «superposés» induisent le comportement même de la propagation lumineuse que nous détaillons dans le paragraphe suivant. En effet on constate sur le schéma que le cœur et la gaine optique disposent de deux indices de réfraction différents notés nc et ng dûs aux différentes silices utilisées. B) PRINCIPES DE BASES DE PROPAGATION EN FIBRE OPTIQUE 1) GENERALITES La fibre optique utilise le principe de guide d'onde. Il s'agit d'un guide optique fondé sur les propriétés réfractrices de la lumière. Deux types de fibres optiques aux caractéristiques et fonctionnalités différentes se distinguent : - Les fibres multimodes : ce sont les premières à avoir été découvertes et mises en place. Comme leur nom l'indique, ces fibres peuvent transporter plusieurs modes, c'est à dire que des propagations différentes (plusieurs trajets lumineux différents) sont possibles au cœur de la fibre. - Les fibres monomodes quant à elles n'acceptent qu'un mode de propagation (c'est à dire un unique trajet lumineux). Ces fibres sont technologiquement plus évoluées car elles nécessitent un cœur très fin (< 10 μm) et sont donc plus «récentes». 2) FIBRES MULTIMODES On trouve deux grandes catégories de fibres multimodes : les fibres à saut d'indice et les fibres à gradient d'indice. 14

- Les fibres multimodes à saut d'indice utilisent les principes basiques de l'optiques géométriques : la réfraction à angle limite en jouant sur le saut d'indice (la différence d'indice entre le cœur nc et la gaine optique ng). - Les fibres multimodes à gradient d'indice utilisent elles un cœur de silice plus fin dans lequel l'indice de réfraction varie de manière continue (alors que dans la fibre multimode à saut d'indice, l'indice de réfraction est constant). Récapitulatif : Les deuxièmes graphes indiquent pour la fibre à saut d'indice et la fibre à gradient d'indice la variation de l'indice en fonction de la position dans le cœur. Les quatrièmes schémas montrent différents modes de propagation en bleu le trajet direct et en rouge et noir des modes de propagation. Enfin pour une impulsion en entrée les cinquièmes schémas indiquent la réponse impulsionnelle de la fibre (qui agit comme un filtre passe bas). On observe alors que la fibre à gradient d'indice offre une réponse impulsionnelle «moins déformée». Conclusion : Les fibres multimodes ne sont pas très adaptées à la transmission sur de longues distances, en effet la dispersion modale (c'est à dire la déformation de la réponse impulsionnelle en fonction des différents trajets empruntés) étant telle qu'il est inenvisageable de les utiliser sur de longues distances. Un rayon empruntant un trajet rectiligne le long de l'axe de la fibre arrive en effet plus tôt qu'un rayon de même vitesse empruntant un trajet guidé. Les fibres multimodes sont alors plutôt utilisées sur des réseaux petites distances, car elles disposent d'une capacité bien plus faible (si l'on imagine que l'on envoie deux impulsions séparées par un temps très faibles, -i.e un débit très élevé- le trajet du rayon rectiligne de la seconde impulsion arrivera avant le trajet du rayon le plus lent de la première. On recevra donc des impulsions mélangées et indiscernables). 15

3) FIBRES MONOMODES Les fibres monomodes quant à elles n'acceptent qu'un mode de propagation : le trajet axial rectiligne. On comprend dès lors que l'on dispose alors d'un débit qui n'est limité théoriquement que par la diode ou le laser source à l'entrée de la fibre. Récapitulatif : La fibre monomode possède un cœur beaucoup plus fin < 10 μm, ce qui la rend plus chère car technologiquement plus difficile à produire. Ce n'est cette fois ci pas sur l'indice de réfraction que repose la propagation mais sur la finesse du cœur de silice. Comme le montre le schéma, la réponse impulsionnelle est égale à l'entrée appliquée (en effet il n'existe qu'un mode, on conserve donc intégralement le signal, il n'est pas déformé). Conclusion sur la propagation : La fibre monomode est particulièrement adaptée pour les longues distances, l'on peut atteindre des débits très hauts qui sont limités par l'électronique actuelle. C'est donc la fibre utilisée pour les câbles sous-marins. Remarque : Persistent encore quelques points à éclaircir pour comprendre toute la problématique liée aux fibres optiques dans les câbles sous marins : nous n'avons jusque là pas parlé de l'atténuation du signal dans la fibre qui revêt une importance primordiale (les distances transatlantiques sont de l'ordre de 6-7000 km...) -utilisation de régénérateur de signal/fibres dopées, ni de l'émission du signal -utilisation de diode/lasers. C) EMISSION/RECEPTION DES SIGNAUX. Nous nous sommes jusqu'à présent intéressés au support de la transmission, au canal : la fibre. Pour un système de communication optique tel que ceux que l'on utilise dans les câbles sous marins l'on doit aussi s'intéresser aux émetteurs et récepteurs qui permettent la 16

communication. 1) SYSTEMES PRE-EMISSION Avant d'émettre quelconque signal dans la fibre optique on doit «convertir» le signal électrique en «signal optique». Analogique : Un des moyens consiste à utiliser des matériaux transparents dont les propriétés de biréfringences (variation de l'indice optique suivant la position dans le matériau) sont modifiées par un courant électrique. Le signal électrique à «convertir» en signal optique est envoyé sur le matériau, traversé par un rayon lumineux. La biréfringence du matériau changeant temporellement par le signal électrique, le signal lumineux est «modulé» par le signal électrique. Une transmission analogique sur une fibre optique ne représente pas un intérêt fou. La fibre optique a été développée pour des transmissions hauts débits actuelles, qui sont numériques. Numérique : Une transmission numérique est facile à envisager sur une fibre. On peut coder un 0 par une certaine intensité lumineuse (en générale le 0 est codé par une absence de lumière) et un 1 par une autre intensité lumineuse. On a alors simplement à commander l'émetteur par le signal électrique numérique. D'autres systèmes sont utilisés pour la conversion électrique/optique : ils tiennent du domaine de l'optoélectronique. 2) EMETTEURS : DIODES / LASERS, DIODES LASERS Pour l'émission dans la fibre, différents composants sont utilisés. Leur utilisation dépend de la longueur d'onde à laquelle on communique. (On préfèrera utiliser certaines longueurs d'ondes à d'autres plus absorbées dans certaines fenêtres fréquentielles). Les DEL (visibles) (850 nm). Les DEL IR (infrarouge) (1300 nm). Les lasers / diode lasers (1300-1550 nm) 17

3) RECEPTEURS : PHOTODIODES, PHOTOTRANSISTORS Qu'il s'agisse de photodiodes ou de phototransistors, ces composants sont des transducteurs : énergie lumineuses énergie électriques. Ils permettent donc d'effectuer la conversion du signal lumineux recueilli dans la fibre en signal électrique. Photodiodes : Les photodiodes présentent la caractéristique pour la plupart de ne pas être des composants électriques linéaires. En somme, le signal électrique de sortie n'est pas proportionnel au flux lumineux reçu par le composant. Phototransistors : Les phototransistors quant à eux sont des composants linéaires dont la sortie électrique varie linéairement avec l'entrée du flux lumineux. D) ATTENUATIONS DANS LES LIGNES DE TRANSMISSIONS OPTIQUES, REGENERATION DE SIGNAUX, FIBRES DOPEES. 1) ATTENUATION DU SIGNAL Comme le montre le schéma de la partie IV)b) l'atténuation du signal est fonction de la fenêtre spectrale utilisée, elle présente des pics dû à l'absorption par des ions ou molécules. Les fibres actuelles disposent d'atténuations très faibles contrairement au premières utilisées dans les années 70-80. Voici un tableau des atténuations en fibre optique d'hier à aujourd'hui. Années Atténuation Entreprises 1970 20 Corning Glass Work 1974 2 3 ATT, Bell Labs 1976 0,47 NTT, Fujikara 1979 0,2 NTT 1986 0,154 Sumitomo 2002 0,1484 Sumitomo 2) REGENERATION DU SIGNAL OPTIQUE La transmission optique n'est donc pas sans pertes, et un calcul facile montrera que 7000 km * 1,484 db/km = 10 388 db d'atténuation, on admet souvent qu'au delà de 40 db (20log(E/S)=40dB => E/S=100 <=> S=1/100*E <=> 100 fois moins de puissance) 18

d'atténuation, un signal utilisable ne l'est plus tel quel (sans amplification préalable). La transmission optique sous marine nécessite donc des répéteurs et régénérateurs de signaux. Bien sûr depuis les années 70 où les premiers essais de fibres optiques voient le jour, la transparence des fibres est améliorée en vue d'une minimisation du nombre de répéteurs. En 2002 on atteint alors presque les limites physiques de propagation dans la fibre. Il est alors intéressant de considérer les évolutions possibles en matière de régénérateurs visant à corriger l'affaiblissement dans ce support. Les premiers régénérateurs sont des convertisseurs optique/électrique régénération électrique convertisseurs électrique/optique. Apparaît alors un problème majeur : on perd lors de la conversion électrique toute la bande passante que l'on avait pu exploiter dans le système optique. Et à moins d'utiliser une grande énergie pour augmenter la fréquence de traitement du signal optique en électrique (ce qui implique un grand échauffement des composants électroniques et une baisse de fiabilité), la solution de la transduction optoélectrique ne semble pas être viable. La deuxième solution technologique pour la construction des régénérateurs est basée sur un effet aujourd'hui bien connu et découvert par Einstein en 1916 : l'effet LASER (Ligth Amplification by Stimulated Emission of Radiation). Grâce à une fibre dopée avec de l'erbium (élément chimique de n atomique 68) on agit comme une pompe qui lors de la réception d'une lumière incidente en excite les atomes. Quand arrive leur désexcitation ces atomes émettent des photons de même énergie (effet LASER), on a alors réussi à régénérer le signal optique sans conversion électrique. E) OFFRE DE DEBIT ET CAPACITE DES CABLES Nous nous sommes jusqu'à présent concentrés sur ce qu'était la fibre optique, sa composition, son utilisation pour la propagation d'un signal, les avantages indéniables qu'elle possède et les limites qu'elle présente malgré tout. Simplement nous devons garder à l'esprit que le but de tout support de transmission est par définition l'acheminement d'un flux d'information. Nous ne sous sommes pas encore intéressés à l'offre de débit et aux capacités des fibres alors qu'il s'agit après tout de l'objectif primordiale de ces dernières : offrir une capacité de transmission jusqu'à présent inégalée! A) CAPACITES DES SUPPORTS OPTIQUES : Dans la partie IV)b) nous avons vu que la taille de la fenêtre fréquentielle de transmission utilisée de nos jours autour de 1,55um était de 12,5 THz. En supposant (ce qui est tout à fait justifiée dans notre cas) que le rapport signal sur bruit S/N est de 1 (hypothèse simplificatrice), on obtient grâce à la loi de Shannon : C = B log2{ 1 + (S/N) } = B log2 { 2 } = B. avec C la capacité et B la bande passante du canal. En d'autres termes, on assimilera la capacité en bit/s à la largeur fréquentielle de la fenêtre temporelle. 12,5 THz => 12,5 Tbit/s de capacité. 19

B) DWDM (DENSE WAVE DATA MULTIPLEXING), MULTIPLEXAGE EN FREQUENCE Le DWDM est une technique de multiplexage en fréquence. Supposons que nous pouvons utiliser les 12,5 Tbit/s de la fibre optique. Aucun appareil électronique n'est capable de travailler et de transmettre à un tel débit. L'idée est alors de diviser la bande de 12,5 THz en sous bandes. Comme il s'agit de bande de transmission dans le domaine optique (même si non visible) on appelle communément ces sous-bandes des «couleurs». On peut ainsi pour une capacité de 12,5 Tbit/s utiliser 5000 couleurs de 2,5 Gbit/s, 1250 de 10 Gbit/s ou 312 de 40 Gbit/s. De plus la technologie DWDM permet une économie notable sur les équipements : un équipement de 40Gbit/s coute environ 2,5 fois plus qu'un équipement traitant à 10 Gbit/s. Globalement, lorsque la capacité est multipliée par 4, le prix de l'équipement est multiplié par 2,5. On a alors tout intérêt à diviser le support optique, pour le multiplexer en fréquence. 20

III) MISE EN ŒUVRE Les câbles sous marins ne répondent évidemment pas aux mêmes contraintes mécaniques que des câbles plus classiques terrestres, et leur pose et déploiement constitue aussi un challenge. L'innovation dans le domaine des câbles ne réside donc pas seulement au niveau de la transmission de l'information, mais aussi dans leur structure mécanique et leur pose. Après nous être intéressé à ces principes de base de propagation et de transmission de l'information, intéressons nous à l'installation sous-marine de ces câbles. A) LES DIFFERENTES ETAPES DE MISES EN ŒUVRES Les étapes pour la pose d un câble sont les suivantes : 1) UNE ETUDE DU FOND DES MERS Une étude de documents ou une cartographie est faite pour choisir le tracé potentiel de la liaison. Le choix des atterrissements (c'est-à-dire son point de contact avec la terre) est établi en fonction du réseau terrestre et de l'environnement marin. On étudie alors les cartes géographiques et bathymétriques (cartes des fonds marins), les lois et règlementations dans les zones traversées, les activités humaines (pêche, zones pétrolières...). Après avoir retenu un tracé sur carte, une mission de sondage est effectuée à l'aide d'un navire océanographique. Un couloir d'une dizaine de kilomètres de large est étudié, définissant la bathymétrie de la zone au mètre près. Sur les zones ensouillables (les zones où on peut enfouir les câbles) de 0 à 1000m de profondeur, des prélèvements par carottages déterminent la nature et la dureté du sol. L'étude de ces informations permet de choisir le tracé définitif, les types de câbles à utiliser et les longueurs nécessaires à la fabrication. Un calcul de mou est effectué pour prendre en compte les particularités du profil des fonds et du type de câble utilisé. Un mou insuffisant provoque des suspensions qui augmentent les risques d'usure du câble. Un mou trop important peut aussi nuire à la viabilité du câble. La résistance des câbles à utiliser est aussi étudiée. 2) EMBARQUEMENT L'opération d'embarquement correspond au chargement du câble et des répéteurs sur le navire. Un plan de chargement est déterminé pour répartir la charge sur le câblier, mais surtout en fonction des opérations de pose à suivre, sens de pose, ordre des opérations. Le câble extrait de l'usine de fabrication par une machine de traction à Câblier René DESCARTES de France télécom 21

pneus, est lové manuellement dans les cuves du navire. Les répéteurs sont chargés par grue et stockés hors cuve sur des étriers en zone climatisée sur le pont de travail. À la fin de l'embarquement, l'ensemble de la liaison jointée est testée par échométrie, mesure de la résistance, capacité, isolement, test de transmission optique OTDR (Optical Time Domain Reflectometer) et permet de vérifier le bon fonctionnement de la liaison avant pose. 3) POSE D'UN ATTERRISSEMENT Le navire mouille sur le tracé retenu le plus près possible de la côte. Le câble est remorqué vers la plage, porté par des ballons flottants. À son arrivée sur la plage il est solidement ancré et connecté au réseau terrestre. Des plongeurs libèrent les ballons pour que le câble se pose sur le fond. 4) POSE ENSOUILLEE Sur les zones sensibles aux causes de dérangements et lorsque la nature du fond le permet, le câble est ensouillé à environ 80 cm sous le sol par une profondeur de 20 à 1500 m. Le navire-câblier remorque une charrue qui creuse un sillon. Le câble est déroulé depuis ce même navire, passe dans la charrue et est déposé dans le sillon qui a été creusé. Charrue utilisée pour l ensouillage des câbles 5) POSE PRINCIPALE En dehors des zones côtières du plateau continental, la pose classique "grand fond" s'effectue grâce à une machine à câble installée sur le pont du navire. Elle extrait le câble des cuves de stockage, contrôle sa longueur en fonction de la vitesse du navire et de la surlongueur (mou) nécessaire pour recouvrir au mieux le profil du fond. En cas de poses multiples nécessitant des épissures intermédiaires, la partie dernièrement posée est mise sur bouée avant récupération et épissure de la section finale. Après la réalisation de l'épissure finale, le navire débarque les réserves de la liaison dans le dépôt désigné par l'autorité de maintenance. B) EXEMPLE DE POSE D UN CABLE SOUS MARIN DU LEADER MONDIAL NEXANS L'opération de pose des câbles sous-marins n'est que la dernière étape d'un long processus de fabrication. Le site de production de la société Nexans est spécialisé dans la fabrication de câbles ombilicaux (câbles spéciaux pouvant à la fois transporter de l'énergie, des données et différents types de fluides) et de câbles haute tension sous-marin. 22

Voici le laboratoire "Haute Tension" au sein de l'usine Nexans à Halden en Norvège. Il permet de tester, grandeur nature, les câbles haute tension sous-marins fabriqués dans l'usine. Outre des tests à des voltages très élevés (jusqu'à 800 kv), on vérifie également la résistance des câbles à la pression. Un piston hydraulique est ainsi capable de simuler une pression de 150 tonnes sur un câble. Dernière étape avant la mise en place du câble : l'étude topographique des fonds marins exige une grande précision. Une vue 3D du "paysage sous-marin" est réalisée pour étudier la meilleure trajectoire, en évitant autant que possible les reliefs et en cherchant les terrains relativement meubles puisque, lorsque cela est possible, les câbles sont enterrés à 2 mètres de profondeur. Le navire câblier "Bourbon Skagerrak" permet l'installation des câbles sous-marins. Il est capable d'embarquer à son bord une cinquantaine de kilomètres de câbles de gros gabarit (135 kg par mètre) et jusqu'à plusieurs milliers de km pour des câbles de petit gabarit. Au total, la plate-forme d'enroulement est d'une capacité de 7000 tonnes. La pose du câble exige une grande précision : le positionnement du bateau doit être juste à 10m près. C'est pourquoi les bateaux spécialisés dans ces opérations disposent de moteurs latéraux de stabilisation. En cas d'enterrement du câble, le niveau de précision est encore accru et exige une vitesse de progression très réduite, de l'ordre de 1 km/h. Nexans, a développé un système sous-marin innovant de dragage et d'intervention. Le Spider est en effet la seule technologie capable de niveler le fond marin dans des zones escarpées (jusqu'à 35 de pente). Le Spider, qui incorpore un système de commande évolué, est conçu pour fonctionner jusqu'à une profondeur de 2.000 mètres. 23

Le Spider, qui pèse 15 tonnes, creuse des tranchées au moyen de puissants jets d'eau (25 bar, 2x400 kw) qui ameublissent le sol. Il enfouit (on dit "ensouiller") les câbles ou les pipelines au fur et à mesure de son avancée. Entièrement géré depuis la surface, il est doté de 6 caméras et de 2 capteurs sonar qui permettent d'avoir une vision 3D en temps réel de l'opération. 24

IV) STRUCTURE DU RESEAU A) UNE DISTRIBUTION INEGALE DU RESEAU Dans les paragraphes précédents, nous nous sommes intéressés aux technologies qui permettent la propagation «physique» dans le câble. Ensuite, nous avons fait le point sur la pose des câbles sous-marins. Abordons maintenant le point de vue «réseau». Nous avons vu précédemment que les innovations techniques permettaient d obtenir des débits intercontinentaux pouvant atteindre jusqu à 12,5 Tbit/s. Cependant, il est important de considérer que ces débits s inscrivent dans un contexte d offre et de demande. Il ne s agit pas d installer entre tous les pays des câbles à capacité maximale. On est bien dans une coévolution entre le besoin et l innovation. C est en étudiant les trafics nationaux et internationaux, ainsi que leurs évolutions, qu est prise la décision de développer la pose des câbles. Comme les flux d informations circulant sur internet ne sont pas homogènes à la surface du globe, le réseau de câbles sous-marins ne l est pas non plus. Capacités des câbles sous-marins (en GBps) - 2008 De plus, l arrivée de la fibre dans les années 80 ainsi que la révolution du multiplexage en longueur d onde (WDM) appliqué à la fibre, permettant le doublement voire le triplement de la capacité des premiers systèmes amplifiés, a instauré une sorte de frénésie dans le développement des câbles. Ainsi, les années 1998-2005 ont vu les câbles de transmission par fibre passer de 8 à 16, puis 64 et finalement 160 brins, si bien qu en 2008 encore, moins d un tiers des capacités transocéaniques étaient effectivement utilisées. Ces évolutions (principalement menées par les Etats-Unis, et dans une moindre mesure suivies par l Europe et l Asie) expliquent aussi l inégale répartition des câbles à travers le monde. 25

Zoom sur la répartition des câbles sous-marin - 2007 On comprend donc que les Etats-Unis, l Europe et le Japon forment les nœuds les plus actifs du réseau sous-marin. De manière liée, ils possèdent d une part les constructeurs les plus capables de développer de nouvelles technologies et de nouvelles lignes, et d autre part la quasi-totalité des informations circulant sur internet. Tout flux de données circulant sur la planète a donc de grandes chances de passer par un de ces nœuds. Ce sont pour ces mêmes raisons que certaines parties des littoraux du globe sont très peu présentes sur le réseau maritime. Pour des raisons évidentes, le littoral est-sibérien n est pas encombré de câbles sous-marins. Cependant, il existe quelques zones géographiques ponctuelles qui semblent déroger à cette règle. On peut notamment citer le cas du Groenland. Il y a quelques années, le Groenland n envisageait pas d installer des câbles. La faible population (57 000 habitants) et le territoire difficile ont entraîné que depuis les années 1970, le pays ne communique avec l extérieur presque exclusivement par satellite. Mais l explosion récente de l utilisation d internet a rendu la situation ingérable, si bien que le Groenland a fini par signer un contrat avec Alcatel-Lucent pour poser 4600km de câbles, reliant enfin la capitale aux réseaux mondiaux, mais laissant le pays avec un gros retard technologique. On peut également citer l Afrique du Sud, qui, victime de la coupe du monde 2010, se verra installer des infrastructures sous-marines conséquentes, permettant à des centaines de millions de personnes de visionner la compétition sur des téléviseurs haute définition. Reste à savoir si, une fois la coupe terminée, la demande dans les pays d Afrique de l Est nécessitera autant d infrastructures. B) UN RESEAU REPOSANT SUR DES STRUCTURES Ce réseau maritime ainsi construit ne doit pas être considéré comme une structure marginale. En effet, il s inscrit dans une structure plus complexe et déjà existante. Ces câbles n ont que fonction de relai entre différents réseaux nationaux. Il existe alors plusieurs méthodes d intégration du réseau sous-marin au réseau national. 26

La plupart des pays, France incluse, se contentent de raccorder leur réseau national au réseau maritime. Ainsi, la structure terrestre reste presque inchangée, à part quelques points de raccordement sur le littoral. Dans le cas de la France, on trouve trois grandes zones de raccordement : la Bretagne, pour la liaison TAT avec les Etats-Unis ; le Nord (Dunkerque et Dieppe) pour rejoindre la Grande-Bretagne ; et le Sud (Marseille, Cannes) pour atteindre la Corse ainsi que tout le bassin Méditerranéen. Les liaisons ainsi formées communiquent au travers du réseau interne national. Cela s explique par la présence antérieure de la fibre dans ces pays. La structure terrestre est alors parfaitement adaptée au branchement avec la structure maritime. Dans les années 90 apparaissent les liaisons sans répéteurs. Cette technologie n utilise pas d optoélectronique active immergée, et de ce fait leur portée est limitée à quelques kilomètres mais leur coût est assez faible. Elles ont donc le double avantage d être économiques et facilement intégrables dans les réseaux terrestres. Ces câbles connaissent un certain succès et permettent de nouveaux types de structures de raccordement aux réseaux nationaux. Certains pays, comme l Italie ou les Philippines, ont choisi de rebâtir leur structure terrestre en la basant sur des liaisons courte portée sans répéteurs. L Italie possède désormais une ligne câblée longeant le littoral est, rejoignant la côte en plusieurs points, ainsi que la Sicile et la Sardaigne. Cette ligne forme l épine dorsale sur laquelle repose tout le réseau national. Pour être efficace, ce réseau a été pensé comme tous les autres. Les liaisons ne sont pas seulement de type point-à-point entre les états. En effet, la pose du premier câble transatlantique en fibre optique vit l apparition du premier routeur maritime : l Unité de Branchement en Mer (UBM). Elle fut installée à l arrivée du TAT8 vers l Europe, entre la Grande-Bretagne et la France. On trouve désormais des UBM dans tous les grands systèmes qui furent installés par la suite. Son rôle est donc d exploiter de manière optimale le fait qu un système à fibre optique comporte plusieurs canaux de transmission indépendants qu il est possible de rediriger vers différentes destinations. Progressivement, grâce aux UBM et aux liaisons sans répéteurs, les réseaux tendent vers la complexification. Cela a l avantage considérable de partager les coûts d investissement entre un nombre croissant d opérateurs vers un nombre croissant de destinations. Les réseaux «routés» à branches deviendront dans les années qui suivent une spécialité française. C) DES MENACES PHYSIQUES SUR LE RESEAU De l originalité de ce support de transmission découlent des contraintes multiples qui peuvent engendrer autant de menaces potentielles. Indépendamment des défauts qui peuvent résulter de leur construction, ils sont exposés à différentes causes de rupture. Parmi ces causes, on dénote les bancs de glace, les frottements et l usure contre les 27