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RÉPUBLIQUE FRANÇAISE DIVISION DE PARIS Paris, le 13 mai 2014 N/Réf. : CODEP-PRS-2014-019864 Le Directeur général de l ASN à Madame la Préfète de Seine-et-Marne 12 Rue des Saints-Pères 77000 MELUN Monsieur le Préfet de Seine-Saint-Denis 1 Esplanade Jean Moulin 93007 BOBIGNY CEDEX Objet : Références : Avis portant sur le projet de démolition des bâtiments de l ancien site du CEA du Fort de Vaujours [1] Mon courrier du 25 mars 2014 référencé CODEP-PRS-2014-013654 [2] Document de Placoplâtre reçu par l ASN le 6 mars 2014 sur le suivi radiologique des travaux de démolition du Fort de Vaujours Phase 1 [3] Rapport de BURGEAP-NUDEC n RNUCIF00657-01 du 4 novembre 2013 «Cartographie radiologique initiale des bâtiments à démolir en phase n 1 et des zones de stockage des matériaux» [4] Avis IRSN n 2014-00155 reçu le 23 avril 2014 sur les modalités d exécution des travaux de démolition de la phase 1 [5] Avis ASN du 4 novembre 2013 référencé CODEP-PRS-2013-038972 portant sur le projet de démolition de l'ancien site du CEA du Fort de Vaujours Par courrier du 25 mars 2014 cité en référence [1], je vous ai informés de ma sollicitation de l Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire (IRSN) afin de rendre un avis sur les modalités de radioprotection, de surveillance de l environnement et d évacuation des déchets à mettre en œuvre pour les opérations de démolition des bâtiments de l ancien site du CEA du Fort de Vaujours. Cette saisine de l IRSN fait suite, pour mémoire, à la transmission par la société Placoplâtre, le 6 mars 2014, du programme de surveillance radiologique [2] qu elle envisageait de mettre en œuvre pour la phase 1 de démolition qui comprend la démolition des structures superficielles de 26 bâtiments, accompagné d une cartographie initiale des bâtiments à démolir et des zones de stockage des matériaux [3]. L IRSN a remis à l Autorité de Sûreté Nucléaire (ASN) son avis le 17 avril 2014 [4]. Il considère en substance que le dossier présenté par Placoplâtre ne fournit pas d éléments suffisants pour apprécier le risque de contamination radiologique lié aux travaux de démolition et la qualité des dispositions retenues pour en prévenir le cas échéant les effets. Les éléments manquants ainsi que des recommandations sont notamment détaillés par l IRSN. De l analyse des informations à sa disposition, l ASN considère que les documents fournis par Placoplâtre apportent des précisions sur les points soulevés dans l avis de l ASN du 4 novembre 2013 mais restent insuffisamment précis sur les dispositions de radioprotection des travailleurs et de l environnement. En conséquence, l ASN renouvelle et précise les demandes qu elle avait formulées dans son avis [5]. www.asn.fr 10, rue Crillon 75194 Paris cedex 04 Téléphone 01 71 28 44 02 Fax 01 71 28 46 02

En effet, les documents restent globalement imprécis ou incomplets sur : - la stratégie de caractérisation des bâtiments et des gravats, qui ne permet pas de garantir qu une éventuelle contamination en uranium pourrait être identifiée : sur ce point, une approche historique de l exploitation passée des bâtiments et des éventuels travaux d assainissement qui y ont été menés pourrait également utilement contribuer à identifier les bâtiments sur lesquels une attention plus particulière doit être portée ; - l évaluation du risque d exposition, notamment interne, des travailleurs et du public ; - la justification des mesures envisagées pour le suivi et la protection radiologique des travailleurs, du public et de l environnement au regard de l analyse des risques ; - la gestion des déchets et des gravats. Vous trouverez en annexe l'avis technique détaillé de l ASN, que je vous invite à transmettre à Placoplâtre. Cet avis, dans la continuité de l avis rendu par l ASN le 4 novembre 2013 [5], précise, eu égard aux nouveaux documents transmis par Placoplâtre, certaines modalités d exécution des travaux de démolition qui paraissent importantes à l ASN pour garantir la radioprotection des travailleurs, du public et de l environnement. Il est en outre à souligner que le périmètre de cet avis couvre la méthodologie de démolition des structures superficielles des bâtiments (dépose des toits et des murs), et exclue tous travaux de terrassement qui nécessiteraient d autres dispositions de caractérisation et de suivi radiologiques. L ASN souhaite être consultée sur les dispositions qui seront envisagées par Placoplatre pour ces opérations. Par ailleurs, les opérations de démolition de phase 1 ont été initiées avant que l ASN ne rende cet avis ; l ASN considère que celles de phase 2 ne devront pas démarrer avant que des réponses satisfaisantes n aient été apportées aux points soulevés dans cet avis. En tout état de cause, l ASN rappelle qu au regard des incertitudes subsistant quant à l état radiologique du site, il appartient à Placoplâtre de mettre en œuvre les mesures adaptées pour assurer la radioprotection des travailleurs et de l environnement au cours des opérations de démolition prévues. La division de Paris de l ASN reste à votre disposition pour les informations complémentaires que vous souhaiteriez. SIGNE PAR : J.C. NIEL 2/7

Annexe au courrier CODEP-PRS-2014-019864 du 13 mai 2014 Avis technique détaillé Cet avis fait suite à l avis précédemment rendu par l ASN le 4 novembre 2013. Il est basé sur les nouveaux éléments transmis par Placoplâtre le 6 mars 2014 relatifs à la phase 1 de démolition, à savoir un document sur le suivi radiologique des travaux de démolition du Fort de Vaujours Phase 1 [2] et un rapport de BURGEAP NUDEC sur une cartographie radiologique initiale des bâtiments à démolir en phase n 1 et des zones de stockage des matériaux [3]. La phase 2 de démolition n est pas documentée dans cet envoi du 6 mars 2014 ; néanmoins, le présent avis technique est valable pour l ensemble des démolitions des structures superficielles des bâtiments du site (dépose des toits et des murs), hors travaux de terrassement qui nécessiteraient d autres dispositions de caractérisation et de suivi radiologiques. Cet avis est également formulé en tenant compte de l avis de l IRSN du 17 avril 2014 [4]. I. ÉLÉMENTS DE CONTEXTE Le contexte radiologique de l ancien site du CEA du Fort de Vaujours est rappelé dans l avis de l ASN du 4 novembre 2013. Il y est notamment précisé que «les éléments relatifs aux modalités de décontamination des bâtiments du Fort par le CEA ne permettent pas d attester de l absence de radioactivité résiduelle dans les matériaux et les structures que la société Placoplâtre envisage de démolir» et qu «un suivi radiologique rigoureux de chacune des phases de démolition s avère indispensable». Le 12 février 2014, l ASN a été sollicitée par la préfecture de Seine-et-Marne pour faire réaliser des mesures de radioactivité en certains points du site du Fort de Vaujours. Ces mesures ont concerné trois points d une casemate, à l intérieur du site du Fort de Vaujours, où une association de défense de l environnement aurait relevé en 2011 une élévation de radioactivité. Les mesures, réalisées le 25 février 2014, par l IRSN, l association pour le Contrôle de la Radioactivité dans l Ouest (ACRO) et la Commission de Recherche et d Information Indépendantes sur la RADioactivité (CRIIRAD), ont montré la présence d une radioactivité ajoutée à la radioactivité naturelle en deux points, avec le détachement d un fragment de la paroi au cours des mesures. Les analyses de ce fragment ont mis en évidence la présence d uranium témoignant vraisemblablement des activités passées du Fort. Une note d information sur ces mesures a été mise en ligne par l ASN sur son site internet le 15 avril 2014 (www.asn.fr/informer/actualites/fort-de-vaujours-77-93). Bien que les limites de cet exercice de mesures aient été soulignées, il confirme la nécessité de caractérisation et de suivi radiologique rigoureux des phases de démolition rappelée précédemment. 3/7

II. CARACTERISATION DES ZONES, CONTROLES RADIOLOGIQUES ET MESURES DE GESTION L ASN a indiqué dans son avis du 4 novembre 2013, que de manière générale, «compte tenu des incertitudes quant à l état radiologique des terres et des structures, elle considère que des opérations de caractérisation préalables ou en cours de chantier doivent être menées et que les mesures de gestion des différentes situations pouvant se présenter doivent être décrites de façon précise et portées à la connaissance de l ensemble des intervenants du chantier. Cette caractérisation des zones lors de la phase de démolition et d excavation doit répondre à un double objectif : définir les modalités de surveillance et les mesures de protection à mettre en œuvre afin d assurer la radioprotection des travailleurs intervenant sur le chantier, s assurer de la protection de l environnement et garantir une gestion des déchets appropriée». L ASN a en outre indiqué que la méthodologie retenue pour cartographier les bâtiments et les sols méritait d être précisée, afin d assurer la représentativité des mesures effectuées et l adéquation entre le type d appareil utilisé et les mesures à réaliser. Placoplâtre, au travers du rapport de BURGEAP-NUDEC sur la «cartographie radiologique initiale des bâtiments à démolir en phase n 1 et des zones de stockage des matériaux» [3], a apporté des précisions méthodologiques et a fourni des données de débits de dose gamma pour chacun des 26 bâtiments concernés par la phase 1 de démolition. Placoplâtre conclut, eu égard à ces valeurs, à l absence de risque d irradiation pour les travailleurs. Avis de l ASN Comme l indique l expertise rendue par l IRSN, les données de débits de dose gamma fournies par Placoplatre ne permettent pas, à elles seules, d exclure la présence d une contamination en uranium des bâtiments du fait des moyens de mesure utilisés, ne permettant que difficilement la détection de rayonnements de faible intensité et de faible énergie. La méthodologie retenue ne permet donc pas, sans élément complémentaire, d écarter la présence d une contamination résiduelle susceptible de générer une exposition interne par inhalation (ou ingestion involontaire) des travailleurs. A cet égard, le risque d exposition interne par inhalation des travailleurs n est pas pris en compte dans la méthodologie retenue, qui s attache à évaluer uniquement le risque d exposition externe. Ainsi, l ASN considère que, pour tout projet de démolition de structures superficielles de bâtiments du site, il convient, en amont de toute opération de démolition, de : - revoir la méthode de détection employée afin de l adapter au terme source recherché, c est-àdire l uranium. - présenter, sur la base des données de caractérisation disponibles obtenues par une méthode adaptée et des incertitudes associées, une analyse de risques, afin d évaluer le risque d exposition, notamment interne, des travailleurs et du public liés aux travaux de démolition. Cette analyse de risques devra être utilisée en vue de définir les dispositions permettant de prévenir et de limiter ce risque. En amont, il serait utile d étayer, de façon bibliographique, l historique des bâtiments du site, afin d approfondir la connaissance des activités qui y étaient menées et de recueillir d éventuelles informations sur la localisation de contaminations résiduelles. Ces informations constitueraient une aide pour dimensionner et proportionner la caractérisation des bâtiments, en identifiant notamment les bâtiments et les zones pouvant être cartographiés par sondage et ceux où une attention plus particulière doit être portée qui devront faire l objet d une recherche de contamination plus systématique. 4/7

III. MESURES PROTECTION RADIOLOGIQUE DES TRAVAILLEURS L ASN a estimé dans son avis du 4 novembre 2013, que «les modalités de mise en œuvre du suivi radiologique des travailleurs [demeuraient] insuffisamment documentées. [ ] En tout état de cause, compte-tenu des données parcellaires de caractérisation des terrains et de l incertitude sur les conditions d intervention des travailleurs, il appartient à l employeur de déterminer les mesures utiles et adaptées pour s assurer de la radioprotection des travailleurs. En particulier, il appartient à l employeur de se prononcer sur le classement et le suivi dosimétrique des travailleurs, ainsi que sur les mesures de protection radiologique à mettre en œuvre afin de limiter et d optimiser les doses externes et internes susceptibles d être reçues par les travailleurs.» Le document de Placoplâtre sur le suivi radiologique des travaux de démolition du Fort de Vaujours Phase 1 [2] apporte des précisions sur les mesures de suivi et de protection radiologiques des travailleurs. En particulier, le programme de suivi de Placoplâtre prévoit le contrôle systématique de la surface des engins en contact avec les matériaux, le contrôle du personnel et des postes de travail au moyen d un contaminamètre, un suivi dosimétrique par dosimétrie opérationnelle ainsi qu un contrôle atmosphérique de la zone de travail. Une formation de sensibilisation du personnel est également prévue. En matière de protection des travailleurs, Placoplâtre envisage d équiper ces derniers de masques à poussières, sans préciser le niveau de protection apporté par ce masque ni démontrer sa suffisance au regard du risque éventuel de contamination interne, ce dernier n étant pas évalué. Par ailleurs, des précisions sur la gestion des écarts sont apportées : le seuil d écart est fixé à deux fois le bruit de fond et les conditions d arrêt et de poursuite du chantier en fonction de ce seuil d écart sont documentées. Avis de l ASN Comme abordée au paragraphe II, l absence d analyse de risques ne permet pas à l ASN de se prononcer sur l adéquation des mesures proposées de suivi et de protection radiologique aux risques d exposition, notamment interne. Les mesures envisagées par Placoplâtre devront être étudiées à l aune des résultats de cette analyse de risques. IV. SURVEILLANCE DE L ENVIRONNEMENT En matière de surveillance pendant et à l issue des travaux, l ASN a indiqué qu «il [convenait] de préciser et de justifier les modalités de surveillance et les seuils d alerte et d arrêt de chantier retenus, y compris en vue de la surveillance environnementale en bordure de site». En matière de suivi environnemental, Placoplâtre envisage la mise en place d un appareil de prélèvement atmosphérique placé en vent aval du chantier permettant le contrôle des aérosols. Compte-tenu de l historique des bâtiments démolis en phase 1, Placoplâtre n envisage de contrôler les eaux de ruissellement qu en cas d anomalie identifiée. 5/7

Avis de l ASN L ASN considère que des compléments sur le dispositif de surveillance environnementale envisagé doivent être apportés. En effet, la localisation de l appareil de prélèvement atmosphérique n est tout d abord pas clairement explicitée quant à sa situation au sein du site-même ou en bordure du site. En outre, si un suivi sous le vent des poussières générées par la démolition semble approprié, aucune justification sur la capacité du dispositif prévu à garantir la détection d une éventuelle contamination, compte tenu des actions requises pour en assurer l efficacité, n est apportée. En effet, suivant la direction du vent et l endroit exact de démolition, l adaptation du dispositif de mesures est nécessaire. De manière générale, l ASN considère, pour l ensemble des phases de démolition, qu une réflexion plus approfondie doit être menée sur le dimensionnement et l adaptabilité du dispositif de surveillance environnementale, à la fois sur site et en bordure du site, visant à garantir la maîtrise des impacts sur l environnement et le public. L ASN considère que Placoplatre devra également prévoir des modalités d information des populations riveraines quant aux résultats de cette surveillance. Concernant les eaux de ruissellement, il conviendra de justifier leur absence de contrôle et de développer une stratégie de contrôle plus globale en fonction de la caractérisation des bâtiments. Enfin, aucune disposition de protection particulière visant à éviter la dissémination de poussières dans l environnement lors des travaux n est présentée, le risque d exposition du public n ayant pas été évalué (cf point II). L ASN considère que de telles dispositions devraient être mises en place si l analyse de risques mettait en évidence un risque de dispersion de poussières contaminées. V. GESTION DES DECHETS ET DES GRAVATS L ASN, dans son avis du 4 novembre 2013, a indiqué que «la procédure d identification et de gestion des déchets contaminés et des déchets conventionnels mériterait d être développée [ ] pour les travaux de démolition des bâtiments et de défrichage pour lesquels la procédure de tri des déchets devra être explicitée. Au regard des valeurs limites mentionnées dans l arrêté n 05 DAI 2IC 173 du 22 septembre 2005 instituant les servitudes d utilité publique, l ASN considère que des éléments complémentaires doivent être apportés sur ce point dans la mesure où, en l état, la mise en œuvre de ces dispositions conduirait à stocker sur le site des terres qui présentent une radioactivité ajoutée. Si ces dispositions étaient effectivement mises en œuvre, leur impact devrait au préalable être évalué afin d en évaluer la compatibilité avec l usage du site, et des modalités de surveillance devraient être définies». Placoplâtre indique dans son document sur le suivi radiologique des travaux de démolition du Fort de Vaujours Phase 1 [2] les modalités de gestion envisagées pour les matériaux de démolition. Il prévoit notamment un contrôle radiologique des gravats avec prélèvement de six échantillons qui feront l objet de mesures approfondies (spectrométrie gamma). En cas de dépassement du seuil d écart établi à deux fois le bruit de fond, une mesure au contaminamètre alpha/bêta prévoit d être réalisée. Si aucune anomalie n est identifiée, les matériaux seront transportés et entreposés dans une zone de stockage aménagée sur une dalle béton, abritée du vent. Un seuil opérationnel de décontamination de 2 Bq/g est fixé par Placoplâtre, qui indique que ce seuil sera abaissé à 1 Bq/g pour les mesures réalisées dans des laboratoires agréés. 6/7

Enfin, il est précisé dans le document que les déchets seront conditionnés selon les spécifications de l Andra et qu une étude d acceptabilité sera réalisée pour une évacuation vers la filière adéquate. Avis de l ASN La mesure du débit de dose gamma retenue pour la caractérisation radiologique des volumes de gravats générés par la démolition des bâtiments peut être utile en vue de détecter une contamination importante des matériaux en uranium qui n aurait pas été identifiée lors de la phase de diagnostic des bâtiments et, le cas échéant, une contamination d une autre nature liée à l exploitation passée du site. Toutefois, comme indiqué pour le diagnostic des bâtiments, la mesure du débit de dose gamma ne permet pas d écarter la présence d une pollution en uranium significative. Au vu de l approche proposée, la vérification du «seuil opérationnel de décontamination» préconisé par l exploitant de 2 Bq/g pour la somme des activités massiques des chaînes de l uranium 238 et de l uranium 235 ne repose que sur la mesure par spectrométrie gamma des six échantillons que l exploitant prévoit de prélever sur différents matériaux constitutifs des gravats. Ce nombre est très faible en comparaison du volume de gravats susceptibles d être produit. Enfin, l absence d impact sur l environnement de la gestion des gravats n est justifiée par aucun élément de démonstration. En conséquence, l ASN considère que les dispositions retenues par Placoplâtre pour la caractérisation radiologique des gravats doivent être complétées en : justifiant la valeur de contamination massique en uranium retenue pour la gestion opérationnelle des gravats et précisant les opérations envisagées en cas de dépassement de ce seuil ; complétant la méthode de caractérisation radiologique des gravats en présentant une stratégie de mesure permettant de garantir que les seuils fixés sont respectés. A cet égard, il apparaît nécessaire de privilégier l usage plus systématique de méthodes de mesure permettant une meilleure détection de l uranium et de réaliser un nombre de prélèvements pour analyse par spectrométrie gamma qui puisse être statistiquement représentatif des caractéristiques des gravats à gérer ; démontrant l absence d impact significatif sur l environnement des modes de gestion sur site retenus pour les déchets, sur la base des seuils opérationnels retenus et des incertitudes résiduelles sur la caractérisation radiologique des gravats. 7/7