LE PROJET ÉNERGIE EST DE LA SOCIÉTÉ TRANSCANADA MÉMOIRE Rédigé et transmis à la consultation publique sur le projet d oléoduc Énergie Est de TransCanada organisée par la Communauté Métropolitaine de Montréal (CMM) PAR Albert Geuzaine 1187, route Marie-Victorin Verchères Québec J0L 2R0 4 octobre 2015 1
Contenu Présentation...3 Introduction...3 Préoccupations environnementales, inquiétudes et non acceptabilité...4 Les caractéristiques environnementales sur le tracé de l oléoduc...5 Manquement aux obligations en matière de protection de l environnement...6 Passage à l Est d un tiers de la production des sables bitumineux de l Ouest...6 Débit volumétrique de l oléoduc Énergie Est...7 Valeur économique de ce projet...7 Conclusions...8 Recommandations aux décideurs de la CMM...9 2
Présentation Je m appelle Albert Geuzaine, citoyen canadien, je suis domicilié à Verchères. Je milite depuis cinq ans, au sein de diverses associations sans but lucratif, contre les diverses formes d envahissement des hydrocarbures (industrialisation et transport des énergies fossiles non conventionnelles) et pour la transition sans délai vers les énergies renouvelables. Introduction Vivant en campagne au bord du Saint-Laurent, je suis particulièrement préoccupé par les multiples dangers qui menacent ce fleuve ainsi que les autres cours d eau qui sillonnent le Québec. L ensemble fluvial du Québec représente une richesse naturelle, renouvelable, de valeur inestimable; c est un capital d autant plus précieux qu à l aube du 21 ième siècle le monde entier est confronté aux aléas des changements climatiques. Les états voisins en ressentent les effets que ce soit par l extension constante de sécheresses persistantes soit par l accroissement du nombre des intempéries de plus en plus dévastatrices. Élevé au sein du monde rural, je connais l importance vitale des terres de culture ou d élevage. Un pays riche de terres fertiles, de forêts luxuriantes sillonnées par autant d eaux abondantes est un paradis terrestre. Aujourd hui, c est cela qu est le Québec. Malheureusement, cet état privilégié m apparaît de plus en plus menacé. La redoutable menace vient de l envahissement des énergies fossiles qu elles soient extraites ici ou qu elles viennent d ailleurs. Nous devons défendre notre Québec, notre territoire. Ne nous laissons pas duper par les offres fallacieuses de partages des richesses des industriels fossiles de l Ouest qui ne veulent que nous museler alors qu elles nourrissent le noir dessein de traverser nos terres et nos cours d eau sans égard aux risques de destruction que leurs entreprises hasardeuses et envahissantes font encourir à notre environnement de vie. C est dans ce cadre circonstanciel que je dépose un mémoire d opposition au projet Énergie Est de TransCanada. 3
Préoccupations environnementales, inquiétudes et non acceptabilité Bien que les informations présentées dans le présent mémoire aient été portées plusieurs fois à l attention du public par divers médias, je trouve important de rappeler plusieurs éléments essentiels reliés aux oléoducs 9B et Énergie Est. Par ces rappels, j ose espérer que les instances décisionnelles aux différents niveaux de gouvernance et d appréciation du dossier, prendront en compte le fait qu un très grand nombre de citoyens bien informés et soucieux de protéger tant leur bien-être que celui des communautés concernées, s opposent de façon responsable à la réalisation du projet Énergie Est. Les inquiétudes des personnes touchées directement ou indirectement par ce projet d oléoduc gigantesque sont fondées : de nombreuses études scientifiques, des articles de presse et des reportages sérieux en témoignent. Les citoyens se mobilisent et font tout ce qui est légitimement possible afin de protéger ce dont ils bénéficient actuellement : l eau, l air, les terres et les forêts. Des ruptures d intégrité des pipelines que TransCanada projette de construire, d autres déraillements de trains de marchandises comme celui de Lac-Mégantic peuvent survenir à toute heure du jour. De nombreux indicateurs rendent cette hypothèse fondée : vétusté ou défaut de tuyauteries et d équipements, fragilité ou arrêt des appareils de détection, réduction des équipages de trains et de navires, erreurs humaines ou actes malveillants, délégation ou abandon de contrôles essentiels, maillon faible et concours de circonstances néfaste, etc. Les entrepreneurs dans le domaine agro-alimentaire ainsi que les grandes agglomérations humaines subiraient les plus grands dommages en cas déversements important de pétrole des sables bitumineux. Ce mémoire veut souligner les inquiétudes que ressentent les citoyens et citoyennes et conséquemment la non acceptabilité sociale ne cesse de grandir parmi la population. 4
Les caractéristiques environnementales sur le tracé de l oléoduc L oléoduc Énergie Est va devoir traverser quelque 256 cours d eau au Québec, révèle une analyse menée par la Fondation Rivières et obtenue par Le Devoir. Cette compilation indépendante indique que plus d une centaine de ces cours d eau sont de moyenne ou de grande taille. La liste dénombre un total de 70 rivières qui seraient traversées par le pipeline d un mètre de diamètre. À cela s ajoutent quelque 185 ruisseaux ainsi que le fleuve Saint-Laurent, selon le tracé préliminaire élaboré par TransCanada. Ce tracé va être modifié en raison de l abandon du projet de port à Cacouna, lieu propice de reproduction des bélugas déjà menacés d extinction, et de la possibilité qu un tel port d exportation de pétrole des sables bitumineux soit construit ailleurs sur les rives du Saint- Laurent. Si l oléoduc est construit, ce sont un million cent mille barils de pétrole qui traverseront chaque jour les terres et les cours d eau du Québec. Parmi les traverses de rivières, on compte les rivières majeures suivantes : des Outaouais, des Mille Îles, des Prairies, Mascouche, L Assomption, Maskinongé, Yamachiche, Saint- Maurice, Champlain, Batiscan, Sainte-Anne, Portneuf, Chaudière et Etchemin. Sans oublier le fleuve Saint-Laurent. Dans ce cas, le pipeline doit traverser en plein cœur de la réserve naturelle des battures de Saint-Augustin-de-Desmaures. Une étude commandée l'an dernier par TransCanada et rendue publique par Le Devoir en décembre 2014 révèle par ailleurs que pour la portion du pipeline qui sera construite sur la rive nord du Saint-Laurent, on compte pas moins de 19 cas où le passage d'un cours d'eau se fera dans une zone présentant des risques évidents de glissements de terrain en raison de l'instabilité des rives. L'étude, menée par la firme Golder Associates, conclut en outre que sur la rive sud, la région de Lévis compte un total de six zones où les cours d'eau traversés présentent des risques connus de glissements de terrain. Dans certains cas, les traverses proposées ont également soulevé des questions quant aux moyens techniques pour les réaliser. C'est le cas du fleuve Saint-Laurent, mais aussi des rivières des Outaouais et Batiscan. Selon ce qu'a indiqué TransCanada, des travaux doivent être menés, dont des forages, afin de préciser la façon dont le pipeline les traversera. Pour enfouir un tel tuyau dans le sol au moment de franchir un cours d eau, il existe trois méthodes. Dans le cas d un ruisseau, on peut creuser une tranchée et y déposer le tuyau. On peut également réaliser un «forage horizontal directionnel» et y faire passer le tuyau. Dans le cas des grandes rivières et des fleuves, un tunnel en béton peut être construit sous le lit. Les trois méthodes ne rassurent personne. 5
Manquement aux obligations en matière de protection de l environnement Pour la Fondation Rivières, le gouvernement du Québec manque à ses obligations en matière environnementale dans le dossier des franchissements de cours d eau. «Les enjeux liés aux constructions en rivière sont multiples et des mesures de sécurité exceptionnelles s imposent compte tenu des risques de bris et des impacts encourus», fait valoir Geneviève Marquis, vice-présidente de l organisme et spécialiste en hydrologie et dynamiques sédimentaire et morphologique des cours d eau. Elle affirme que la formule retenue pour l étude du Bureau d audiences publiques sur l environnement (BAPE) ne permettrait pas une évaluation exhaustive des risques. Le gouvernement a en effet décidé de procéder même s il n a pas en main d étude d impact du promoteur, ce qui est habituellement la façon de faire avec ce type de projet d envergure. «Un BAPE dûment mandaté dans le cadre de la procédure réglementaire d évaluation et d examen des impacts sur l environnement aurait obligé le promoteur à soumettre ses méthodes de construction, à répondre aux questions du public et à améliorer la prise de décision du gouvernement québécois quant aux méthodes de construction à être utilisées», souligne Mme Marquis. Ce ne sera pas le cas avec le projet Énergie Est, selon la Fondation Rivières. En plus des cours d eau, le pipeline traversera de nombreux secteurs agricoles et le territoire de plusieurs dizaines de municipalités des deux rives du Saint-Laurent. Selon une recension non exhaustive du Devoir, des municipalités régionales de comté (MRC) représentant au moins 75 municipalités rejettent le projet Énergie Est ou exigent une évaluation environnementale du Québec. Passage à l Est d un tiers de la production des sables bitumineux de l Ouest Ce pipeline conçu pour répondre aux besoins de l'industrie pétrolière albertaine transportera un million cent mille barils de brut chaque année en territoire québécois, sur une distance d'environ 720 kilomètres. Avec le transport quotidien d autant de barils, Énergie Est ferait du de nos cours d eau, de nos terres de culture, de nos forêts et de nos villes le parcours, le plus grand forum de tous les dangers qui puissent frapper le Québec en n importe quel moment du jour, en n importe quelle circonstance de l année. Par cet oléoduc, qui deviendrait le plus important du genre en Amérique du Nord, plus du tiers de la production des sables bitumineux passerait en sol québécois d ici cinq ans. Sur un parcours de plus de 700 km au Québec, on ne peut écarter l occurrence de défaillances, de bris, voir même de sabotage; c est déjà arrivé plusieurs fois. 6
Énergie Est pourrait très bien devenir le théâtre de désastres environnementaux qui frapperaient des eaux de surface et souterraines, des végétations naturelles, des terres de culture, des bassins de pêche et d élevage, l air ambiant, les habitants la faune, la flore. Les maigres apports anticipés en termes monétaires et d emplois seraient rapidement annulés en cas de déversement important. Un bris de conduite en proximité d un cours d eau ou dans la section de son franchissement aurait des conséquences désastreuses à cause de l énorme débit volumique de pétrole brut qui s échapperait de l oléoduc. Débit volumétrique de l oléoduc Énergie Est Ce serait plus de deux mille litres (deux mètres cubes) à la seconde, soit sept mille deux cents mètres cubes à l heure qui s écouleraient en cas de bris important du tube de transport. Une telle amplitude de déversement serait du même ordre pour toute section de l oléoduc qui se trouverait à découvert. Rappelons l épisode du déversement de quelque cinq millions de litres d un mélange de bitume, d eau et de sable survenu près de Fort McMurray, en Alberta en juillet 2015. L oléoduc, propriété de Nexen, n était vieux que d un an. Les systèmes de détection avaient fait défaut. Il a fallu plusieurs jours de recherche avant de trouver la cause de la fuite. Valeur économique de ce projet Les projets de transport de pétrole des sables bitumineux vers le Québec ne produiraient que des retombées économiques «négligeables» pour le Québec a conclu un rapport produit par un cabinet d experts en énergie à la demande de groupes environnementaux. Ce rapport évaluait que le secteur du pétrole brut contribue actuellement à 0,5 % de l ensemble de l économie du Québec et à 0,3 % de tous les emplois de la province. Et même avec l inversion de la ligne 9B d Enbridge, la réalisation du projet de cokéfaction de Suncor à Montréal et la construction de l oléoduc Énergie Est de TransCanada, «l apport économique relatif aux activités d exploitation serait négligeable», fait valoir le document rendu public lundi. «En effet, l ensemble du secteur du pétrole brut continuerait probablement de contribuer à environ 0,5 % de l ensemble de l économie et à 0,3 % de tous les emplois de cette province.» Au cours de la phase d exploitation, 203 emplois directs seraient créés au Québec, selon la pétrolière albertaine. Quant à l apport au PIB de la province, on l estime à 6,4 milliards de dollars sur une période totale de 46 ans 138 millions par année comprenant la construction et l exploitation du pipeline. 7
Conclusions Les 3 883 487 citoyens que compte la CMM ne verront guère de retombées économiques reliées directement ou indirectement au passage de l oléoduc dans leur proximité de vie. Ce sont les investisseurs, dont bon nombre d étrangers, qui récolteront les bénéfices tirés du pétrole de sables bitumineux produit à l Ouest. Le carburant ne coûtera pas moins cher aux automobilistes de la CMM. L eau potable pour près de 4 millions de consommateurs sera perpétuellement en danger. Un déversement de pétrole en périphérie mettra peu de temps à polluer le réseau aquifère. Les usines de filtration ne seront pas en mesure de conjurer la pollution venue d un déversement inattendu. Un arrêt pourrait être de longue durée et très coûteux avant que tout le réseau de distribution ne revienne à la normale. L oléoduc servira d abord et avant tout de tuyauterie de livraison de la plus grande part du pétrole de l Ouest aux installations portuaires; lesquelles transborderont le pétrole dans les navires pétroliers à destination des pays étrangers. Une fois que les provinces productrices Alberta et Saskatchewan seront libérées du goulot d étranglement qu est l insuffisance de moyens de transport, l exploitation des sables bitumineux produira au maximum techniquement possible tant que cette catégorie d énergie fossile ne sera pas bannie mondialement pour des motifs supranationaux de lutte contre les changements climatiques. Le développement des énergies renouvelables procure plus d emplois que le développement du pétrole de sables bitumineux. Les emplois dans ce secteur sont de meilleure qualité et la santé des travailleurs y est beaucoup moins compromise. Dans le domaine des investissements dans les énergies, le gouvernement du Québec n aligne pas ses choix en regard de ses engagements de réduction des GES qu il annonce sur les tribunes publiques. Il se montre trop favorable à diverses formes de développement et de transport des énergies fossiles; il ne veut rien savoir des GES qui seraient rattachés au dossier Énergie Est. Donner le feu vert à Énergie Est, serait choisir de prolonger et d accentuer le développement du pétrole des sables bitumineux qui est coûteux à produire, consomme des quantités phénoménales d eau et de gaz pour son extraction, nuit considérablement aux communautés autochtones voisines, produit tant de GES qu il menace les cibles de réduction de GES des provinces. 8
Recommandations aux décideurs de la CMM Dans l intérêt de ses 3 883 487 citoyens et citoyennes, je recommande aux autorités de la CMM de mettre en application toutes les formes de règlementations d utilité pour la protection des personnes, des eaux, de l air et des sols afin que TransCanada prenne la mesure de toutes les dispositions légales et des coûts afférents aux dispositions règlementaires touchant les restrictions, les interdictions, les mesures de prévention, les obligations de surveillance et de contrôle permanents, la disponibilité de spécialistes au sein de la CMM expérimentés en intervention d urgence et rompus aux particularités des hydrocarbures et produits chimiques advenant des ruptures du pipeline ou des explosion, des exigences en terme de protection des biens fonciers, des pénalités en cas de de nuisance, d altération ou de destruction des zones protégées, de fermeture des infrastructures de transport par oléoduc en fin d exploitation, de restauration des lieux de passage, de stockage et d opération. Je recommande également que des documentations exhaustives soient mises à la disposition de la population afin que celle-ci se sente bien informée et bien protégée. Considérant tous les éléments négatifs associés au projet Énergie Est, je recommande à la CMM de se positionner dès maintenant à l encontre de l oléoduc Énergie Est. L acceptabilité sociale du projet n est pas au rendez-vous. Je vous remercie de votre attention. 9