Perspective Open Source Rapport final Projet Nouvelles Plateformes Technologiques

Perspective Open Source Rapport final Projet Observatoire Technologique Centre des technologies de l information République et canton de Genève Patrick Genoud, Giorgio Pauletto 30 juin 2003 Observatoire Technologique Centre des technologies de l information République et canton de Genève 9 route des Jeunes CP 149, 1211 Genève 8 Suisse http://www.geneve.ch/ot/ ot@etat.ge.ch 1

Copyright c 2003 CTI, Observatoire Technologique. This work is licensed under the Creative Commons Attribution-NonCommercial-ShareAlike License. To view a copy of this license, visit http://creativecommons.org/licenses/by-nc-sa/1.0/ or send a letter to Creative Commons, 559 Nathan Abbott Way, Stanford, California 94305, USA. You are free: to copy, distribute, display, and perform the work to make derivative works Under the following conditions: Attribution. Noncommercial. Share Alike. You must give the original author credit. You may not use this work for commercial purposes. If you alter, transform, or build upon this work, you may distribute the resulting work only under a license identical to this one. For any reuse or distribution, you must make clear to others the license terms of this work. Any of these conditions can be waived if you get permission from the author. Your fair use and other rights are in no way affected by the above. This is a human-readable summary of the Legal Code (the full license http://creativecommons.org/ licenses/by-nc-sa/1.0/legalcode). Observatoire Technologique, CTI 2

Table des matières 1 La perspective Open Source 5 2 Les solutions Open Source en regard du référentiel 6 2.1 Aspects humains................................. 6 2.1.1 Besoins des utilisateurs......................... 6 2.1.2 Composante sociétale.......................... 6 2.1.3 Maturité.................................. 7 2.2 Qualités systémiques.............................. 7 2.2.1 Evolutivité................................. 7 2.2.2 Exploitabilité............................... 8 2.2.3 Qualité de service............................ 9 2.2.4 Interopérabilité.............................. 10 2.2.5 Maturité du produit............................ 10 2.3 Organisation................................... 11 2.3.1 Coûts................................... 11 2.3.2 Compétences et formation....................... 12 2.4 Sécurité...................................... 13 3 Remerciements 15 Observatoire Technologique, CTI 3

Résumé Le logiciel Open Source fait aujourd hui partie du paysage des technologies de l information et de la communication. Il s agit de connaître ses forces et ses faiblesses pour mieux comprendre comment le gérer. Les notions de partage des connaissances et de réutilisation de composants sur lequel est fondé l Open Source peut être un moteur pour l administration vis à vis du rôle qu elle devra jouer dans la société. L accessibilité des technologies Open Source fait tomber les barrières d accès économiques pour les utilisateurs privés. Le nombre d utilisateurs du monde logiciel libre est difficile à estimer vu son mode de distribution. Néanmoins, il est clairement de l ordre de plusieurs millions. La maturité de la communauté et des sociétés commerciales soutenant une application Open Source est important pour évaluer la viabilité du projet. De par leur portabilité, la plupart des applications Open Source sont également utilisables sur des systèmes d exploitation propriétaires comme Microsoft Windows. La possibilité de faire interagir plusieurs systèmes ou applications (interopérabilité) repose essentiellement sur le respect des standards ouverts. Par conséquent, on peut tout à fait envisager de migrer vers un environnement Open Source pas à pas et sans big bang, dans une optique d évolution plutôt que de révolution. La stabilité d un système informatique est un critère important pour satisfaire de façon continue aux demandes des clients. Elle est un pré-requis aux notions de disponibilité, de performance et d efficacité. Le logiciel libre est largement reconnu comme étant très stable. Toutefois, des tests concernant la stabilité, la disponibilité, la performance et l efficacité doivent être menés lors du choix d une solution informatique et mesurés en regard des besoins des utilisateurs, que sa provenance soit propriétaire ou Open Source. Les solutions Open Source les plus mûres sont à l heure actuelle les serveurs d infrastructure : Web, messagerie, serveurs de fichiers et d imprimantes. Il faut soigneusement évaluer le coût total de possession ainsi que les coûts induits par une migration des données et une réécriture des applications. Pour cela, un réel projet d évaluation Total Cost of Ownership TCO devrait être mis en œuvre pour avoir des résultats adaptés à l organisation. Fonder une argumentation de changement uniquement sur les coûts sans mise en avant d une valeur ajoutée en termes stratégiques peut représenter un risque quant au cadrage du problème. Les compétences dans les produits Open Source tendent à s élargir et les nouvelles générations sont fréquemment formées (ou ont déjà été exposées) aux logiciels libres. Les logiciels provenant du monde Open Source jouissent d une excellente réputation concernant les aspects liés à la sécurité. Certains départements militaires et milieux financiers utilisent des systèmes Open Source principalement pour des raisons de sécurité. Observatoire Technologique, CTI 4

1 La perspective Open Source Ces dernières années, l intérêt lié aux solutions Open Source s est largement accru aussi bien dans le secteur privé que public. L adoption de l Open Source peut sembler déstabilisante car son modèle économique est fondé avant tout sur les services plutôt que sur les licences. De plus son mode de développement est réalisé en réseau plutôt que de façon centralisée. Ce nouveau type de composant technologique entre désormais dans le paysage informatique des entreprises privées et des administrations publiques. Son rôle peut être très favorable, mais doit aussi reposer sur une politique d adoption équilibrée. D une part les barrières à l entrée de l Open Source doivent être abaissées. L inclusion de telles solutions vient élargir la palette des options à disposition, ce qui en soi est une bonne chose. Néanmoins, des critères d évaluation doivent également être mis en œuvre afin de tenir compte d un large éventail d aspects aussi bien au niveau des avantages que des inconvénients. Une telle grille de lecture est d ailleurs également nécessaire avec des solutions propriétaires plus classiques. Il serait tout aussi risqué de ne pas considérer les solutions Open Source que de les favoriser sans arguments valables. Comme déjà présenté en partie dans le document Le logiciel libre dans les administrations plusieurs états considèrent l adoption du logiciel libre dans leur système informatique. Le référentiel apporte un outil dans ce cadre de travail. Les composants informatiques sont analysés en termes d insertion dans une architecture au travers des couches allant du matériel concret à la notion de système d information (Hardware Plateforme inférieure Plateforme supérieure Applications et in fine Système d information) et des tiers allant des données aux utilisateurs (Ressources Intégration Métier Présentation Client). Les critères sont évalués par rapport à plusieurs dimensions regroupées en 4 grands thèmes : les aspects humains, les qualités systémiques, l organisation et la sécurité. La mise en œuvre des politiques publiques par les services centraux et décentralisés de l Etat, comme par les organismes qui en dépendent, exige des échanges d informations qui favorisent l ouverture de l administration. Mettre l administration en réseau implique de rendre plus efficace le travail quotidien de l administration en responsabilisant mieux les agents de l Etat et en utilisant des outils indispensables à ses échanges. La mise en commun d informations permet d imaginer de nouvelles organisations du travail plus collectives, plus souples et plus réactives. En particulier, des compétences dispersées sur plusieurs sites ou dans plusieurs services peuvent être mises en synergie. L approche de développement en réseau du monde de l Open Source représente un modèle extrêmement intéressant pour l administration. Il repose sur les communautés de pratique et favorise le choix de solutions fondées sur l excellence de la qualité et la reconnaissance par les pairs. L indépendance vis à vis d un fournisseur ou un éditeur particulier est non seulement grandement favorisée, mais le tissu économique et social local est aussi largement promu. Le partage et la réutilisation de composants logiciels et de connaissances qui est souhaitable aussi bien à l intérieur de l administration qu entre différentes administrations et la société civile s inscrit naturellement dans le modèle de développement et d utilisation de solutions Open Source. Observatoire Technologique, CTI 5

2 Les solutions Open Source en regard du référentiel Dans cette section, les éléments les plus saillants concernant les solutions Open Source sont présentés par rapport aux dimensions mises en évidence dans le référentiel NPT. La présentation est nécessairement macroscopique vu la diversité des applications Open Source. Dans la mesure du possible nous faisons ressortir des aspects tangibles et chiffrés. On pourra également consulter l article de David Wheeler [1] qui met aussi en avant des éléments quantitatifs. 2.1 Aspects humains 2.1.1 Besoins des utilisateurs Comme pour toute solution informatique, la prise en compte des attentes des utilisateurs, le respect des besoins fonctionnels, l accessibilité et l ergonomie (ainsi que l apport d une réelle valeur ajoutée) sont des aspects essentiels à une introduction réussie d un produit. Il y a quelques années, la plupart des solutions Open Source avaient une ergonomie faible et un coût d entrée élevé. L évolution des dernières années a mis les interfaces utilisateur du monde Open Source au niveau des logiciels propriétaires les plus évolués. De plus, la flexibilité offerte par l Open Source permet d adapter les applications à des environnements multilingues ainsi que d habiller des applications de la façon la plus adaptée à l utilisateur. Les aspects concernant l intégration pour les personnes ayant un handicap sont aussi fréquemment facilités par l ouverture des logiciels qui permet une profonde adaptation pour une liaison à des interfaces spécialisées. 2.1.2 Composante sociétale Le cadre légal des logiciels Open Source est régi par leur licence, ce qui implique des droits et des devoirs quant à leur utilisation et leur gestion. De façon générale, les licences Open Source sont beaucoup plus permissives que celles des logiciels propriétaires. Pour une explication plus détaillée on consultera le document Licences Open Source [2]. En interne à une organisation, l exécution, la redistribution et la modification des logiciels libres sont totalement permises sans restrictions. En cas de redistribution publique, les modifications et le code source doivent être accessibles à la communauté et à toute personne intéressée. Ces aspects favorisent l accès aux technologies à tout acteur interne ou externe à l administration. Pour autant que son rôle et ses droits le lui permettent, celuici peut venir s insérer dans le système. La liberté d accès aux solutions Open Source et leur cadre commun fondé sur des normes et des standards ouverts en font un instrument résolument tourné vers une vision sociétale en réseau. Les administrations et le monde politique deviennent de plus en plus sensibles aux notions de logiciels Open Source. Les exemples fournis dans le document Le logiciel libre dans les administrations [3] étayent ce point. Les notions de transparence vis-à-vis des citoyens, de développement local, d accès aux technologies et de partage avec l ensemble de la société peuvent devenir des moteurs de l adoption du logiciel libre. Une observation attentive des agendas politiques peut permettre de mieux comprendre le Observatoire Technologique, CTI 6

positionnement du monde politique vis-à-vis des technologies Open Source. Les modèles de licences Open Source (voir le document Licences Open Source ) permettent l exécution et la redistribution libre du logiciel ainsi qu un accès à son code source (en lecture ou modification). Une évaluation du nombre d utilisateurs d un logiciel libre est donc difficile, car il n existe pas de statistiques centralisées et validées vu la nature des licences. L effet de réseau d un tel modèle est néanmoins très puissant et permet une large diffusion du logiciel. Il permet aussi un large ré-appropriation des connaissances et une portabilité de celles-ci d un fournisseur à l autre. L accessibilité du logiciel libre est très large en raison de la possibilité de redistribution. La barrière économique et sociale est abaissée et l accès pour tous et pour tous les usages est garanti dans les licences Open Source. 2.1.3 Maturité Le choix d orientation vers une technologie, d autant plus lorsque celle-ci est stratégique pour l organisation, doit tenir compte de la viabilité du fournisseur. Dans le cas du monde Open Source, cela se traduit par une communauté qui devrait être suffisamment large et organisée pour soutenir activement le développement des produits et assurer un support aux utilisateurs. Ce mode de fonctionnement est celui préconisé par la philosophie Open Source et la communauté est généralement très ouverte et réactive. Un soutien financier, logistique ou autre par une société commerciale à une communauté Open Source est perçu positivement. Les projets n ayant que peu de développeurs ou n ayant pas une bonne organisation interne doivent être évalués quant aux risques potentiels que représente l arrêt de l évolution de l application par la communauté. 2.2 Qualités systémiques 2.2.1 Evolutivité L ouverture du code source et la possibilité de modification qu offre le logiciel Open Source le positionnent très favorablement quant à l évolutivité. Cela permet par exemple des adaptations face à un accroissement de sécurité, à des modifications de règles métiers ou à l amélioration des performances (scalabilité). La portabilité est l une des forces majeures des solutions Open Source. Le respect des normes et standards assure la possibilité de passer d un logiciel à un autre ou d un système d exploitation à un autre de façon transparente. D autre part, le même système d exploitation Open Source peut être exécuté sur une variété de matériel. Par exemple, Linux développé pour les processus compatibles Intel x86 est aujourd hui porté sur PPC, Alpha, Sparc, Itanium, M68K, ARM, S/390. Il est aujourd hui aussi utilisé comme système d exploitation embarqué dans un grand nombre de plateformes (téléphones, PDAs, consoles, etc.). D autres systèmes d exploitation libres comme NetBSD totalisent plus de 50 plateformes d exécution différentes (voir http://www.netbsd.org/). La prise en compte de nouveaux matériels ou périphériques peut parfois être retardée Observatoire Technologique, CTI 7

en comparaison avec le logiciel propriétaire. Il faut noter qu une grande partie des fournisseurs de matériel tendent à collaborer avec le monde Open Source. La plupart des applications Open Source sont également utilisables sur des systèmes d exploitation propriétaires comme Microsoft Windows. La flexibilité d un logiciel Open Source est fortement garantie par son respect des normes et standards ouverts et par la possibilité d adapter le code à son environnement en utilisant des portions du code ou en en ajoutant d autres. 2.2.2 Exploitabilité Pour exploiter efficacement une application, il est important de pouvoir la distribuer efficacement, la mettre à jour, la tester, avoir accès à une documentation et à un support de qualité. La testabilité d une solution Open Source est excellente : d une part, le développement en réseau doit permettre des tests modulaires forts et, d autre part, le nombre de relecteurs du code et de testeurs est souvent très grand. Cela produit en règle générale un effet positif quant à la qualité du code et son évaluation. Par ailleurs, le produit complet peut être librement déchargé, installé, adapté et testé aussi longtemps que désiré par l utilisateur. Ceci permet de mesurer les éventuels écarts avec les fonctionnalités attendues. La documentation est un aspect important souvent négligé dans un produit informatique. Le logiciel libre est resté très attentif à ce point et fournit une documentation souvent riche et de haute qualité. Par exemple, Linux développe un projet de documentation (LDP, Linux Documentation Project, http://www.tldp.org) contenant des guides d utilisation qui sont de véritables livres ainsi que des HOWTOs qui sont des documents plus courts et spécifiques à l installation, à l exécution et à la mise en œuvre d un composant de Linux. L aide en ligne (manpages) est aussi un élément très développé dans le monde du logiciel libre. Il faut encore noter la fréquente disponibilité de traduction de ces documents en différentes langues et la possibilité de modifier et de redistribuer la documentation grâce à une licence de type Open Source appliquée à celle-ci. L éditeur O Reilly (http://www. oreilly.com/) propose une vaste série de livres sur des logiciels Open Source. Comme mentionné précédemment, le modèle du logiciel libre repose sur les services de support. Les sociétés commercialisant des distributions de Linux offrent également un service de support. Le support offert par la communauté Open Source n est pas à négliger. Si la maturité de la communauté est grande, une question posée dans un forum électronique aura vraisemblablement très rapidement une réponse de qualité. Grâce à l existence d une bonne documentation, certaines réponses peuvent être un simple renvoi vers celle-ci. Bien entendu, il n existe pas de garantie de service de la part d une communauté, mais les expériences pratiques montrent que cette forme de support est très efficace. La maintenance des solutions Open Source est facilitée lorsque le produit atteint sa maturité car la fréquence d apparition des nouvelles versions est réduite. De plus, les amé- Observatoire Technologique, CTI 8

liorations apportées sont réelles : il n y a pas de course à la version suivante comme cela peut être le cas dans le logiciel propriétaire. L absence de partenaire commercial procure parfois à l utilisateur un sentiment d incertitude. Or, à la lecture des contrats de licence de ces produits, on se rend bien compte qu ils protègent plus le producteur que le consommateur. Des outils d industrialisation des distributions et de gestion du parc existent aujourd hui pour Linux, mais sont généralement propriétaires et payants. 2.2.3 Qualité de service La stabilité d un système informatique est un critère important pour satisfaire de façon continue aux demandes des clients. La stabilité est un pré-requis aux notions de disponibilité, de performance et d efficacité. Au niveau de la stabilité des systèmes d exploitation, on peut recourir aux données de Netcraft pour se faire une idée sur la population des serveurs web. Par exemple, l illustration 1 montre la durée depuis le dernier ré-amorçage (reboot) du système sur le site de l Etat de Genève. Figure 1 Durée en nombre de jours depuis le dernier ré-amorçage sur le serveur Web de l Etat de Genève. (Source : Netcraft) On peut lire que cette durée a été au maximum de 28 jours et qu en moyenne il se situe, dans cet échantillon, au-dessous de 6 jours. Les 50 sites ayant les durées moyennes les plus élevées entre les ré-amorçages en juin 2003 se situent entre 800 et 1700 jours, voir http://uptime.netcraft.com/. Parmi ces 50 serveurs, 49 ont un système d exploitation Open Source (BSD, FreeBSD, Linux) et 47 utilisent l application Open Source Apache. Les solutions Open Source mûres, comme Apache, mysql et Linux, sont généralement très compétitives concernant les qualités systémiques vis à vis des solutions propriétaires. Les applications moins mûres doivent être évaluées attentivement si leur rôle est Observatoire Technologique, CTI 9

critique. Des tests concernant la stabilité, la disponibilité, la performance et l efficacité doivent être menés lors du choix d une solution informatique et mesurés en regard des besoins des utilisateurs, que sa provenance soit propriétaire ou Open Source. 2.2.4 Interopérabilité La possibilité de faire interagir plusieurs systèmes ou applications repose essentiellement sur le respect des standards ouverts. L ouverture est une notion importante : en ne maîtrisant qu un côté de l équation il devient impossible d assurer une interopérabilité entre des produits des fournisseurs de logiciels différents. En cas de noncoopération, les efforts pour rendre interopérables des solutions restent malheureusement vains. Le document Normes et standards ouverts met en évidence certains de ces aspects et souligne l importance de la notion de standard ouvert. Les systèmes Open Source adhèrent totalement aux standards ouverts. Ils sont une mise en œuvre logicielle de protocoles, de formats de fichiers ou d interfaces applicatives ouverts. L accessibilité au code source d un logiciel libre réduit à néant toute velléité de ne pas respecter ce type de standard. 2.2.5 Maturité du produit Le logiciel Open Source couvre une grande diversité de produits. Il est souvent cité en pensant à ses principaux représentants comme Linux, Apache, ou mysql. En fait, un même produit comme Linux doit analysé selon les différentes utilisations qui en sont faites : par exemple comme système d exploitation du poste client ou comme système d exploitation de serveur. Un même logiciel dans différentes utilisations est souvent dans des phases de maturité différentes, voir la figure 2. Les solutions Open Source les plus mûres sont à l heure actuelle les serveurs d infrastructure : Web, messagerie, serveurs de fichiers et d imprimantes. On pourrait penser que les applications Open Source sont toutes des produits de niche avec un nombre limité d implémentations ou d utilisateurs. Cette fausse idée est aujourd hui très largement balayée par les études chiffrées. Par exemple, le serveur Web ayant la part de marché la plus large actuellement (63% en juin 2003) est Apache qui est un produit Open Source comme l illustre la figure 3. De même, les systèmes d exploitation libres (comme Linux, FreeBSD, NetBSD, OpenBSD, etc.) sont largement utilisés comme plateforme de serveurs Web. La figure 4 donne la répartition des serveurs échantillonnés par Netcraft en juin 2001. Par ailleurs, Linux sur le poste de travail est potentiellement très intéressant, mais n a pas encore le même niveau de maturité que du côté serveur. Il faut également noter que beaucoup de logiciels Open Source (notamment OpenOffice/StarOffice, Apache, mysql, PHP, etc.) sont disponibles non seulement sur Linux mais aussi sur Microsoft Windows. Plusieurs sociétés, comme Oracle [13] et Novell [14], proposent leurs produits sur une plateforme en Open Source. On peut tout à fait envisager de migrer vers un environnement Open Source pas à pas et sans big bang, dans une optique d évolution Observatoire Technologique, CTI 10

Figure 2 Hype cycle Open Source 2e trimestre 2003. (Source : Gartner Group) plutôt que de révolution. 2.3 Organisation 2.3.1 Coûts Il est indéniable que le coût d acquisition d un logiciel Open Source est très bas. Ceci est dû à la possibilité de redistribuer librement le logiciel et son code source selon les licences du logiciel libre. Le modèle économique Open Source repose sur les revenus engendrés par le support. Ces coûts pour les clients des logiciels Open Source sont souvent amortis sur le long terme en capitalisant sur les compétences internes. Il faut néanmoins soigneusement évaluer le coût total de possession ainsi que les coûts induits par une migration des données et une réécriture des applications. La maintenance d un produit Open Source est généralement plus spécialisée, mais plus modulaire. Ceci permet notamment de faire évoluer une partie du système sans impact pour le reste des applications. De plus, les aspects de fuite en avant dus à des pressions de vente de licences disparaissent et les mises à jour reflètent de réelles nouveautés technologiques du logiciel. Le cycle de vie du produit est donc en général plus long et atteint souvent une grande stabilité en terme de maintenance dans sa phase de maturité. Pour autant que les besoins fonctionnels soient respectés au niveau des solutions alternatives offertes par les logiciels Open Source, les impacts négatifs sur la productivité peuvent être amortis par une formation adéquate. Par ailleurs, l accroissement de stabilité et la diminution de maintenance favorisent une plus grande productivité des utilisateurs et des techniciens. Les études chiffrées publiques sur le Total Cost of Ownership (TCO) de solutions Open Source sont multiples, contradictoires et souvent sponsorisées par un fournisseur [4], [5], [6], [7]. De plus, il serait faux de penser qu en choisissant la plateforme matérielle Observatoire Technologique, CTI 11

Figure 3 Parts de marché des serveurs Web publics d après les noms de domaine juin 2003. (Source : Netcraft [15]) et logicielle ayant le TCO le plus bas, les coûts vont automatiquement diminuer. Les résultats dépendent largement de l utilisation faite des logiciels Open Source, du type de matériel utilisé, de l existant et des compétences internes comme le souligne Bill Kirwin du Gartner Group, le père de la méthode TCO [8]. Il est donc recommandé de mener un réel projet TCO pour avoir des résultats adaptés à l organisation. Le document La méthode TCO du Gartner Group donne plus d informations recueillies dans le cadre du projet NPT sur un projet d étude de TCO. Les études du Gartner Group de juin 2003 [9], [10], [11] et [12] montrent comme l illustre la figure 5 que les coûts sont essentiellement similaires entre les différentes combinaisons possibles de Windows95, WindowsXP, Linux, MSOffice et StarOffice. Les coûts liés à la migration des données et au re-développement d applications sont également à prendre en compte. Il faut encore souligner le fait que fonder une argumentation de changement uniquement sur les coûts sans mise en avant d une valeur ajoutée en termes stratégiques peut représenter un risque quant au cadrage du problème. 2.3.2 Compétences et formation Comme pour le logiciel propriétaire, l aspect de la formation et des compétences à disposition joue un rôle crucial pour l intégration de nouveaux logiciels. Bien entendu seules les applications touchant le tiers client nécessitent une formation des utilisateurs. Un changement de serveur web est, par exemple, transparent pour l utilisateur final. Les technologies Open Source reposent sur des outils similaires à ceux du monde Unix, ce qui demande, pour les techniciens, une réadaptation forte par rapport au monde Windows. Un passage d une solution à une autre demande donc une vraie gestion du changement, plus ou moins large en fonction de l effort de réadaptation à fournir. Toutefois, Observatoire Technologique, CTI 12

Figure 4 Systèmes d exploitation des serveurs Web publics juin 2001. (Source : Netcraft [15]) une formation Unix est plus facilement transférable d un système à un autre. Par exemple, tout ingénieur Solaris retrouvera les mêmes concepts et outils de base dans Linux. Il faut aussi noter que l intégration de solutions Open Source est de plus en plus réalisée par des grandes entreprises ou administrations publiques. Ceci tend à créer un effet d entraînement et des retours d expérience très utiles. Le marché des compétences et des formations dans les solutions Open Source tend à s élargir et à se structurer fortement depuis ces dernières années. Par exemple, des programmes de certification sur Linux voient le jour depuis quelques années, consulter par exemple [16], [17], [18]. L offre de travail sur le marché des ingénieurs spécialisés dans les logiciels Open Source est aujourd hui certainement moindre que celle du monde propriétaire. Il faut néanmoins garder à l esprit que les nouvelles générations qui arriveront sous peu sur le marché du travail seront vraisemblablement mieux formées dans ce domaine. Les environnements Open Source étant souvent utilisés dans le milieu académique, les étudiants auront de grandes chances d avoir été exposés à ces technologies durant leur cursus. Une attention particulière doit être portée à l intégration des comportements propres aux paradigmes Open Source : les notions de partage des connaissances et de communauté en tant que ressource sont fondamentales. 2.4 Sécurité Un argument souvent avancé en faveur des systèmes Open Source est la possibilité de vérifier que l application ne contienne pas de code malicieux. Ceci n est possible que si l on a accès au code source et que l on est sûr que c est bien ce même code qui est utilisé pour générer l exécutable. Les problèmes liés aux virus sont également quasiment inexistants pour l instant dans le monde du logiciel libre. Ceci est dû en grande partie à deux raisons. Premièrement, la modularisation et le cloisonnement sont plus forts entre les applications et le système Observatoire Technologique, CTI 13

Figure 5 TCO du poste de travail avec les combinaisons de Windows95, WindowsXP, MSOffice et StarOffice. (Source : Gartner Group) d exploitation. Deuxièmement, les macros du monde Microsoft ne s exécutent pas dans les applications équivalentes Open Source. Les vulnérabilités des logiciels Open Source sont en général détectées plus rapidement que celles des logiciels propriétaires de par l accès au code source et la quantité importante de correcteurs potentiels. De plus, les correctifs sont mis à disposition dans un délai très court, souvent d ailleurs par la même personne qui a détecté la faille. Les possibilités de chiffrement des données sur les disques durs ainsi que la journalisation par le système d exploitation existent aussi bien dans les solutions propriétaires que Open Source. Les logiciels provenant du monde Open Source jouissent d une excellente réputation concernant les aspects liés à la sécurité. Certains départements militaires et milieux financiers utilisent des systèmes Open Source principalement pour des raisons de sécurité. Le projet OpenBSD très souvent cité pour ses qualités en termes sécurité, portabilité, stabilité et correctitude quant au système d exploitation qu il offre (http://www.openbsd. org/). Les stratégies de sécurité et les rôles sont indépendants des systèmes pour autant que ceux-ci puissent les mettre en œuvre notamment au niveau des annuaires et de leur liaison avec les applications. Observatoire Technologique, CTI 14

3 Remerciements Nous tenons à remercier ici toutes les personnes qui nous ont aidé dans cette étude et dont les réflexions, les remarques et les suggestions ont contribué à enrichir ce rapport sur le poste de travail et en particulier : Chantal Bass (Observatoire Technologique) pour son aide logistique tout au long du projet NPT Olivier Liechti (Sun Microsystems) pour les aspects plus techniques qu il a développés avec nous, spécialement dans le cadre du référentiel NPT Les membres du comité de pilotage du projet NPT pour l intérêt qu ils ont porté à notre travail Bertrand Mercier (Département des Finances) et Laurent Dami (Palais de Justice) Raymond Morel et Jean-Luc Corsini (CPTIC) Alain Jacot-Descombes et Jean-Raymond Fischer (Université de Genève) Daniel Brunner (Tribunal Fédéral, Lausanne) Jean-Paul Degorce-Dumas (ADAE, France) Dominique Hausser (Observatoire Technologique) Nous remercions également les auteurs du Rapport sur l adoption de logiciels libres à l Etat de Genève publié le 16 août 2000, N.-O. Barrelet, M. Wenger, N. Buss, P. Loutan, E. Lienhardt, E. Acevedo et D. Queille. Références [1] Wheeler, D.A., Why Open Source Software/Free Software (OSS/FS)? Look at the Numbers!, révision du 7 mai 2003. [En ligne] juin 2003, URL http://www. dwheeler.com/oss_fs_why.html. 6 [2] Genoud, P., Pauletto, G., Les licences Open Source, Annexe, Projet NPT, Observatoire Technologique, CTI, juin 2003. 6 [3] Genoud, P., Pauletto, G., Le logiciel libre dans les administrations, Annexe, Projet NPT, Observatoire Technologique, CTI, juin 2003. 6 [4] Six, N., Linux plus coûteux que Windows?, JDNet Solutions (Benchmark Group), 6 décembre 2002. [En ligne] juin 2003, URL http://solutions.journaldunet. com/0212/021206_winux.shtml. 11 [5] Cybersource, Linux vs. Windows Total Cost of Ownership Comparison, 2002. [En ligne] juin 2003, URL http://www.cyber.com.au/cyber/about/linux_vs_ windows_tco_comparison.pdf. 11 [6] Robert Frances Group, Total Cost of Ownership for Linux Web Servers in the Enterprise, septembre 2002. [En ligne] juin 2003, URL http://www.rfgonline.com/ subsforum/linuxtco.pdf. 11 Observatoire Technologique, CTI 15

[7] IDC, Windows 2000 Versus Linux in Enterprise Computing, An IDC White Paper Sponsored by Microsoft Corporation, 27 décembre 2002. [En ligne] juin 2003, URL http://members.microsoft.com/partner/includes/sitemetrics/ downloads.aspx?docid=006193&docname=idc.pdf. 11 [8] Hoffman, T., Gartner : Debunking five myths of TCO, 11 juin 2003, Computerworld, IDG.net. [En ligne] juin 2003, URL http://www.idg.net/go.cgi?id=808148. 12 [9] Silver, M., Linux Desktop TCO : An Overview, 19 juin 2003, Note Number COM-19-8811, Gartner Group. 12 [10] Silver, M., Linux Desktop Migration Cost Model, 19 juin 2003, Note Number COM- 19-4628, Gartner Group. 12 [11] Silver, M., Linux Desktop TCO : Hardware and Software Details, 19 juin 2003, Note Number COM-19-4567, Gartner Group. 12 [12] Silver, M., Linux Desktop TCO : Labor Details, 19 juin 2003, Note Number COM-19-4568, Gartner Group. 12 [13] Oracle, Oracle on Linux. Site Web http://www.oracle.com/linux/. 10 [14] Enck, J., Novell s Linux Option Gives Reason to Reconsider NetWare, 22 avril 2003, Gartner News Analysis, Gartner Group. [En ligne] juin 2003, URL http://www3. gartner.com/displaydocument?id=392274. 10 [15] Netcraft. Site Web, http://news.netcraft.com/. 12, 13 [16] Sair Linux and GNU Certification. Site Web http://www. linuxcertification.com/. 13 [17] Linux Professional Institute. Site Web http://www.lpi.org/. 13 [18] LinuxCertified. Site Web http://www.linuxcertified.com/. 13 Observatoire Technologique, CTI 16