Séquence 9. Les Français et la République. Sommaire

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1 Séquence 9 Les Français et la République Sommaire Introduction 1. La République, trois républiques 2. La République et les évolutions de la société française Séquence 9 HG11 1

2 Introduction Des années 1870 à nos jours, la France a connu quatre régimes politiques différents dont trois républiques. Le régime républicain est inséparable de l histoire contemporaine de la France. Il trouve ses origines dans la Révolution française au cours de laquelle, pour la première fois, la République a été proclamée en France, en septembre Néanmoins, il a fallu plus d un siècle pour que la République s installe de façon pérenne. C est en 1870 que la III e République voit le jour. Née dans le contexte peu favorable d une défaite militaire et d abord dominée par une majorité monarchiste, la III e République est pourtant le régime qui va parvenir à installer le fait républicain en France. Inséparable de l œuvre scolaire et de l affirmation de valeurs qui demeurent aussi fondamentales que la laïcité, la III e République va parvenir à faire des Français d authentiques républicains. La fin du régime est particulièrement dramatique puisqu il sombre dans la défaite de 1940 et dans le vote des pleins pouvoirs au maréchal Pétain, le 10 juillet Alors, pour quatre ans se met en place le régime autoritaire, collaborationniste de l État français installé à Vichy. Mais, dès la Libération, le régime républicain renaît de ses cendres. En 1946, les Français adoptent la constitution d une nouvelle République, qui ressemble beaucoup à la précédente. La IV e République s écroule finalement dans le contexte de la guerre d Algérie. De Gaulle revient alors au pouvoir ; nous sommes en Il fait adopter une constitution dont l esprit s éloigne largement des deux précédentes républiques. Désormais, ce ne sont plus le Parlement et le pouvoir législatif qui dominent dans l équilibre des pouvoirs mais l exécutif. Et, au sein de l exécutif, c est désormais le président de la République et non plus le chef du gouvernement qui domine. En 1962, une révision constitutionnelle majeure va permettre aux Français d élire le chef de l État au suffrage universel direct. Cette réforme s applique pour la première fois en 1965, élection présidentielle dans laquelle le général de Gaulle se trouve confronté, au deuxième tour, à François Mitterrand. Même si elle demeure critiquée par certains, l élection présidentielle constitue depuis cette date un des moments clés de la vie politique française et la constitution de la V e République, conçue en 1958 pour «l homme du 18 juin» s est révélée remarquablement souple au cours de son demi-siècle d existence. 2 Séquence 9 HG11

3 Problématique Comment une démocratie républicaine va-t-elle finir par s imposer en France à partir de la fin du XIX siècle? Plan Notions clés Repères 1. La République, trois républiques A. L enracinement de la culture républicaine dans les années 1880 et B. Les combats de la Résistance et la refondation républicaine. C : Une nouvelle République 2. La République et les évolutions de la société française A. La République et la question ouvrière : le Front Populaire. République Démocratie Régime libéral Collaboration Résistance Libération Gaullisme Pouvoir exécutif Front Populaire Syndicat Communisme Grève Étude d un texte de loi : les lois Ferry sur l école. Analyse d un document iconographique : l Affaire Dreyfus. Étude de texte : le témoignage d un Résistant de la première heure, Jean-Pierre Vernant. Étude de texte : le discours de Bayeux, 16 juin Étude d un organigramme : les institutions de la Ve République en Étude d un texte : discours du Général de Gaulle annonçant la réforme institutionnelle de Analyse d une affiche : le Front Populaire, marionnette de Moscou. Étude d un discours prononcé par Léo Lagrange le 10 juin B. La République, les religions et la laïcité depuis les années Laïcité Cléricalisme Anticléricalisme Sécularisation Concordat Étude de plusieurs documents : la Séparation de l Église et de l État. C. Les femmes dans la vie politique et sociale de la France au XX e siècle Code civil Suffragettes Parité Étude d un texte : extrait du Deuxième Sexe, Simone de Beauvoir. Séquence 9 HG11 3

4 1 La A République, trois républiques L enracinement de la culture républicaine dans les années 1880 et 1890 Comment la III e République a-t-elle réussi à s enraciner durablement après un siècle d instabilité politique chronique? 1. Des débuts difficiles E La III e République naît de la défaite militaire de la France contre la Prusse en Cette défaite a eu pour conséquence l effondrement du Second Empire et a débouché sur un épisode révolutionnaire, la Commune de Paris, en 1871 (voir cours sur la République et les ouvriers). Elle a été proclamée le 4 septembre 1870 par Léon Gambetta. Les élections organisées le 8 février 1871 portent au pouvoir une assemblée conservatrice, dominée par les monarchistes qui espèrent profiter de l incertitude politique pour rétablir une monarchie constitutionnelle. Néanmoins, c est une république qui se met en place. E Jusqu en 1875, l avenir de la République ne semble donc guère assuré. Le régime républicain fait encore peur : il est associé à la Terreur de 1793, aux barricades Pour les Républicains, l enjeu est donc de transformer l image du régime pour s assurer du soutien de la majorité des électeurs par le vote au suffrage universel. E En 1875, le maréchal de Mac Mahon, favorable à une restauration monarchique, est élu président de la République et succède à Adolphe Thiers. Pourtant, cette restauration butte sur le refus du prétendant au trône, le comte de Chambord (descendant de Charles X), d accepter tout geste d apaisement, et notamment d abandonner le drapeau blanc (donc le drapeau de la monarchie absolue d avant 1789), au profit du drapeau tricolore. La solution monarchique est donc jugée irréaliste par les monarchistes modérés, qui acceptent de voter les lois constitutionnelles de E La situation se dénoue avec la crise de 1877 : les républicains gagnent par une écrasante majorité les législatives de 1876 ; mais ils doivent toujours composer avec un président de la République monarchiste. Le 16 mai 1877, Mac-Mahon tente d imposer le retour d Albert de Broglie et il décide de dissoudre la Chambre le 25 juin Les législatives 4 Séquence 9 HG11

5 des octobre 1877 confirment la victoire des républicains. Mais il faut attendre le 30 janvier 1879 pour que Mac-Mahon démissionne ; il est alors remplacé par Jules Grévy. La République s est donc imposée sur le plan des institutions. Elle doit encore s imposer sur le plan de la culture politique collective. 2. Le triomphe de la République et de ses valeurs Quelles sont les valeurs du nouveau régime et comment parvient-il à les enraciner? a. Quelles valeurs? Une république libérale et parlementaire : le nouveau régime se veut conforme aux principes de Il fonde donc une démocratie libérale, c est-à-dire un régime politique fondé sur les principes libéraux de 1789 égalité civile, libertés fondamentales, souveraineté nationale - et sur les acquis ultérieurs de la démocratie suffrage universel, égalité sociale. La devise du régime reflète cet idéal : Liberté Egalité Fraternité. Le nouveau régime garantit donc les libertés fondamentales, par une série de grandes lois : 1881 : Liberté de la presse et droit de réunion : La loi Waldeck-Rousseau autorise les syndicats, accorde au monde ouvrier la possibilité légale de s organiser et de défendre ses intérêts. 1901: Liberté d association Une république démocratique : le régime repose sur l exercice de la démocratie lors des élections. Le suffrage universel masculin direct permet d élire les représentants du peuple à la Chambre des députés. Cette démocratie qui exclut les femmes (voir le chapitre sur la République et les femmes) s exerce aussi au niveau communal, avec l élection du conseil municipal. La fin du XIX e siècle correspond donc à une intense phase d apprentissage politique, qui se structure au début du XX siècle dans le cadre de partis politiques : Parti Radical en 1901, SFIO (le parti socialiste) en Cette vie politique est doublée d une intense vie associative. b. L apprentissage de la République Cet apprentissage repose sur des symboles issus de la Révolution française, qui s imposent dans l espace public : le drapeau tricolore création de la Révolution française, drapeau officiel depuis la Monarchie de Juillet - la Marseillaise, qui devient l hymne national en 1879, la fête nationale du 14 juillet à partir de Séquence 9 HG11 5

6 Document 1 La rue Saint-Denis à Paris, fête du 30 juin 1878, Tableau de Claude Monet akg-images/ Erich Lessing Surtout, la culture républicaine s apprend à l école républicaine. L école est au cœur du projet républicain car elle forme les futurs citoyens, détenteurs du suffrage universel. L œuvre scolaire est donc essentielle pour les Républicains, et se met en œuvre avec les lois Ferry de ). Il serait inexact de croire que tout commence avec Jules Ferry. La loi Guizot de 1833 qui impose aux communes de créer une école primaire de garçons, avait permis de notables progrès au cours du XIX e siècle. Néanmoins, vers 1880, il demeurait de fortes inégalités 6 Séquence 9 HG11

7 entre une France du nord et de l est plus urbaine et plus scolarisée et une France du sud et de l ouest plus rurale et où l analphabétisme était plus répandu. À cela s ajoutait le retard très net de l enseignement féminin. n Lois Jules Ferry : 1881 : l enseignement primaire devient gratuit 1882 Article 2 Les écoles primaires publiques vaqueront 1 un jour par semaine, en outre 2 du dimanche, afin de permettre aux parents de faire donner, s ils le désirent, à leurs enfants, l instruction religieuse en dehors des édifices scolaires. Article 3 L instruction primaire est obligatoire pour les enfants, âgés de six ans révolus à treize ans révolus ; elle peut être donnée soit dans les établissements d instruction primaire ou secondaire, soit dans les écoles publiques ou libres, soit dans les familles, par le père de famille lui-même ou par toute autre personne qu il aura choisie. Ces lois instituent donc l instruction laïque et obligatoire et l école publique. Questions 1 À quoi sert le jour de congé instauré par l article 2? Que cela signifiet-il pour les écoles publiques? 2 Quelle va être la conséquence principale de la généralisation de l instruction primaire? Pourquoi la gratuité est-elle importante? 3 Pourquoi ces lois sont-elles pleinement républicaines? Réponses 1 Le jour de congé sert à donner une instruction religieuse aux enfants, hors de l école publique. 2 La généralisation de l instruction primaire va permettre à la république d enraciner son projet politique au sein des familles en diffusant ses valeurs de liberté, égalité et fraternité auprès des enfants. Les familles seront d autant plus intéressées à envoyer leurs enfants à l école que celle-ci devient gratuite. 3 Ces lois s insèrent dans le projet républicain d instaurer une nation unie autour de ses valeurs de laïcité, de progrès et de patriotisme. Les lois Ferry vont avoir pour objet de généraliser l école pour tous les petits garçons et les petites filles de France. Elles apportent également un changement en terme qualitatif en modifiant le contenu et l esprit des programmes scolaires. 1. Cela signifie que les élèves n ont pas cours ce jour là. 2. en plus Séquence 9 HG11 7

8 Il s agit notamment de laïciser l enseignement primaire, tant dans les lieux scolaires on retire les crucifix des salles de classe que dans les programmes enseignés. Ceux-ci sont totalement refondus afin d offrir aux élèves un condensé du savoir de la science moderne et de les soustraire à l influence exclusive de l Église tout en lui apprenant l amour de la liberté, de la République et de la patrie. Document 2 Les lois scolaires Loi du 16 juin 1881 sur la gratuité «Il ne sera pas perçu de rétribution scolaire dans les écoles primaires publiques ni dans les salles d asile publiques.» ( ) Loi du 28 mars 1882 sur l obligation scolaire Il est institué un certificat d études primaires décerné après un examen public auquel pourront se présenter les enfants dès l âge de 11 ans. Loi du 30 octobre 1886 sur la laïcité de l enseignement «Dans les écoles publiques de tout ordre, l enseignement est exclusivement confié à un personnel laïque.» L opinion et les polémistes catholiques comme Louis Veuillot s opposent avec violence à cette nouvelle école. Pour eux, l école sans Dieu est une école sans morale. Les républicains répondent à ces attaques en mettant en avant la morale laïque. Les nouveaux instituteurs de la République vont constituer de puissants vecteurs de la «républicanisation» des Français. Surnommés par Charles Péguy les «hussards noirs de la République», ils atteignent une dimension quasi mythique dans l imaginaire français. Document 3 Les «hussards noirs» de la République «De jeunes maîtres de l école normale venaient chaque semaine nous faire la classe. Ils étaient toujours prêts à crier «Vive la République, Vive la Nation!» On sentait qu ils l eussent crié jusque sous le sabre prussien (référence à la guerre de ). Nos jeunes maîtres étaient beaux comme des hussards noirs. Sveltes, sévères, sanglés. Sérieux et un peu tremblants de leur précoce, de leur soudaine omniprésence. ( ) Ils croyaient, et si je puis dire ils pratiquaient, que d être maître et élève, cela constitue une liaison sacrée, fort apparentée à cette liaison qui de filiale devient paternelle. Ils pensaient que l on a pas seulement des devoirs envers ses maîtres mais que l on en a aussi, et peut-être surtout envers ses élèves. Nous allions au catéchisme le jeudi (c est alors le jour de congé) je pense, pour ne pas déranger les heures de classe. La République et l Église nous distribuaient des enseignements diamétralement opposés.» Charles Péguy, L Argent. Éditions GALLIMARD. «Tous les droits d auteur de ce texte sont réservés. Sauf autorisation, toute utilisation de celui-ci autre que la consultation individuelle et privée est interdite». 8 Séquence 9 HG11

9 L armée à travers la généralisation du service militaire en 1883 contribue également à «nationaliser les Français» dans la mesure où elle est un puissant vecteur de diffusion de la langue française. c. Bases sociales solides Enfin, l enracinement de la République se fait par la conquête d une majorité de la population en faveur du régime. Deux groupes sociaux en particulier apportent leur soutien au régime : Les paysans, pourtant perçus comme conservateurs. Il était d autant plus important pour les Républicains de conquérir cet électorat que les ruraux représentent encore 55% de la population en Ces ruraux apprécient les références à 1789 année de l abolition des privilèges la garantie apportée à la petite propriété et l œuvre scolaire des Républicains. La République finit donc par représenter la stabilité garante de prospérité. L importance des «couches nouvelles» : c est Léon Gambetta, le fondateur de la République, qui prend en compte cette nouvelle catégorie sociale, qu on peut appeler classe moyenne, dès le début des années Cette catégorie est sensible à l idéal de méritocratie républicaine, permettant l ascension sociale des meilleurs élèves, aux valeurs de modernité portées par le régime, à l ouverture de la vie politique notamment au niveau local. 3. Une grande crise de la III e République : l Affaire Dreyfus «L Affaire», c est-à-dire l affaire Dreyfus est la crise politique la plus grave de la III e République. Celle-ci va mettre aux prises deux France, une France cléricale, nationaliste, militariste et antisémite, et une autre pour laquelle les droits de la personne sont imprescriptibles et passent avant tout, y compris la Revanche ou l honneur de l armée. Document 4 Chronologie de l «Affaire» ( ) 1894 : condamnation du capitaine Alfred Dreyfus pour haute-trahison. Le conseil de guerre le condamne au bagne à perpétuité : janvier, le lieutenant-colonel Picquart devient chef des services de renseignement militaires : 2 novembre, faux Henry. Le colonel Henry, arrêté le 30 août 1898 se tranche la gorge le lendemain dans son cachot du Mont Valérien : 10 janvier, acquittement d Esterhazy par le Conseil de guerre, à l unanimité : 13 janvier, «J Accuse» de Zola, publié dans «l Aurore», le journal de Clemenceau. Le titre est de Clemenceau lui-même. Séquence 9 HG11 9

10 1899 : nouveau procès de Dreyfus à Rennes, condamné à 10 ans de réclusion mais il est grâcié par le Président de la République Emile Loubet : réhabilitation de Dreyfus et du lieutenant-colonel Picquart qui réintègrent l armée : Dreyfus est blessé par balles à l occasion du transfert des cendres d Emile Zola au Panthéon, à Paris. L Affaire Dreyfus commence comme une banale affaire d espionnage. Les services secrets français se rendent compte que des «fuites» ont lieu au niveau de l état-major et que des informations confidentielles sont ainsi obtenues par les Allemands. Après une enquête bâclée et sans preuve aucune, la justice militaire croit avoir découvert le coupable. Il s agit du capitaine Alfred Dreyfus. Né à Strasbourg dans une famille juive qui a choisi la France après le traité de Francfort, Alfred Dreyfus constitue un coupable idéal. Il est dégradé et condamné au bagne à perpétuité en Il part pour le bagne de Cayenne, en Guyane. La «Libre parole» de Drumont titre le 1 er novembre 1984, «Haute trahison. Arrestation de l officier juif A. Dreyfus». La famille de Dreyfus qui ne croit pas à sa culpabilité fait appel au journaliste Bernard Lazare pour reprendre l enquête et, en 1896, le lieutenantcolonel Picquart, nouveau chef du renseignement militaire, découvre que le traître est en fait le commandant Esterhazy qui touche de l argent de l ambassade d Allemagne. Dans le même temps, le colonel Henry, ami d Esterhazy et en conflit avec Picquart transmet à ses supérieurs un document, émanant soi-disant de l ambassade d Allemagne qui attesterait de manière irréfutable la culpabilité de Dreyfus. Il s agit en fait d un faux grossier composé par ses soins. Devant les preuves apportées par Picquart, l état-major va chercher à étouffer l affaire. Peine perdue, l Affaire Dreyfus prend de plus en plus d importance dans la presse et dans les débats. En 1898, Esterhazy passe devant le Conseil de guerre mais est lavé de tous soupçons. Ce déni de justice manifeste pousse Emile Zola à publier son article intitulé «J accuse» où il dénonce les militaires qui ont condamné Dreyfus et qui le maintiennent au bagne. Dans la presse, la haine atteint son paroxysme. Dreyfusards, parmi lesquels Jean Jaurès, Clemenceau, Zola, l écrivain Octave Mirbeau, et antidreyfusards se déchirent par journaux interposés. Des émeutes antisémites éclatent dans plusieurs régions françaises, faisant même des morts notamment à Alger Finalement, Dreyfus est rejugé en 1899, à Rennes. L autorité militaire le condamne à nouveau en lui accordant les circonstances atténuantes. Devant l ineptie d un tel jugement, le Président de la République Emile Loubet gracie Dreyfus qui devra cependant attendre jusqu en 1906 pour réintégrer l armée. Première grande crise antisémite de la modernité, l «Affaire» a profondément divisé la France, la plaçant au bord de la guerre civile. L événe- 10 Séquence 9 HG11

11 ment a également eu un retentissement international. Très suivie dans les pays germaniques, elle a notamment contribué à convaincre l Autrichien Theodor Herzl, de l impossibilité de l assimilation et de la nécessité pour les Juifs de créer leur propre État. Document 5 L Affaire Dreyfus vue par le caricaturiste Caran d Ache, Le Figaro, 14 février 1898 Caricature 1 Caricature 2 Roger-Viollet. Questions 1 Quelle est la scène représentée par Caran d Ache? Dans quel milieu social se trouve-t-on? 2 Qu est-ce que cette caricature illustre avec humour? Séquence 9 HG11 11

12 Réponses 1 La scène représentée est celle d un repas de famille. Nous nous trouvons dans une famille fort «convenable», une famille de la bonne bourgeoisie parisienne comme en témoigne la présence des domestiques et les toilettes des dames et des messieurs. La caricature est publiée dans un des journaux de la bourgeoisie, Le Figaro qui fut un des très rares journaux de droite à défendre des positions dreyfusardes. 2 Dans le milieu policé de la bonne bourgeoisie, les controverses ne sont pas censées, d ordinaire, se régler à coups de poings. Afin d augmenter l effet comique, l artiste représente un pugilat général où même les femmes se battent. À travers l outrance, cette caricature témoigne, avec un grand sens politique, des haines et des oppositions qui se développèrent à l occasion de l affaire Dreyfus. B Les combats de la Résistance et la refondation républicaine 1. La France vaincue n La Drôle de guerre et la France occupée La France déclare la guerre à l Allemagne, avec la Grande-Bretagne, le 3 septembre Hormis l opération de Narvik, marquée par une tentative de débarquement de troupes françaises et britanniques en Norvège pour couper à l Allemagne «la route du fer» et qui se solde par un échec même si les troupes alliées résistent à la contre-offensive allemande jusqu au 7 juin, le front ne bouge pas pendant plusieurs mois. L armée française, est en partie enfermée dans la ligne Maginot et massée le long de la frontière belge avec le corps expéditionnaire britannique qui ne bouge pas. C est la «Drôle de guerre». En mars 1940 ; Edouard Daladier est remplacé par Paul Reynaud au poste de Président du Conseil. En avril l invasion des Pays-Bas et de la Belgique par les troupes allemandes provoque l avancée des troupes franco-britanniques au delà de la frontière. C est alors que les chars du Général Guderian percent le front français à Sedan, le 10 mai L avance allemande est irrésistible malgré plusieurs engagements de chars remportés par les Français. Dès le 14 juin, elles pénètrent dans Paris, déclarée ville ouverte et défilent sur les Champs Elysées et sous l Arc de Triomphe alors que le gouvernement français s est replié sur Bordeaux. Dès le 10 juin, c est l Exode. Près de huit millions de Français fuient devant la Wehrmacht sur les routes du nord de la France, souvent mitraillés par les avions de la Luftwaffe. Ils sont le plus souvent mal accueillis dans les régions où ils cherchent refuge. 12 Séquence 9 HG11

13 Document 6 La France divisée en 1940 Lille Paris Strasbourg Loire Seine Bordeaux L i g ne de d é m arcation Garonne Vichy Rhône Lyon 100 km Occupation allemande Occupation allemande de la zone libre en novembre 1942 Zone annexée Occupation italienne de la zone libre Zone rattachée militairement à la Belgique Document 7 Discours radiodiffusé du maréchal Pétain, 20 juin 1940 «J ai demandé à nos adversaires de mettre fin aux hostilités. J ai pris cette décision, dure au cœur d un soldat, parce que la situation l imposait. Cet échec vous a surpris, vous en cherchez les raisons, je vais vous les dire. Le 1 er mai 1917, nous avions encore hommes aux armées. A la veille de la bataille actuelle, nous en avions de moins. L infériorité de notre matériel a été encore plus grande que celle de nos effectifs. L aviation française a livré ses combats à un contre six. Moins forts qu il y a vingt-deux ans, nous avions aussi moins d amis, trop peu d enfants, trop peu d armes, trop peu d alliés. Depuis la victoire de 1918, l esprit de jouissance l a emporté sur l esprit de sacrifice. On a revendiqué plus qu on a servi. On a valu épargner l effort, on rencontre aujourd hui le malheur. J ai été avec vous dans les jours glorieux. Chef du gouvernement, je suis et je resterai avec vous dans les jours sombres.» Séquence 9 HG11 13

14 Questions 1 Quelles sont les raisons matérielles qui expliquent, selon Pétain, la défaite de la France en mai-juin 1940? 2 Quelles sont les raisons morales? 3 Qu annonce-t-il aux Français sur son propre avenir politique? 4 Quel ton Pétain prend-il pour justifier l armistice? Réponses 1 Pétain cherche à expliquer la défaite de la France, en premier lieu, par son infériorité matérielle par rapport à l Allemagne. Elle disposait de moins d hommes ( de moins qu en 1918), de moins de matériels, il prend l exemple de la supériorité aérienne écrasante des Allemands, et de trop peu d alliés, sous entendant pour l occasion que les Britanniques constituaient des alliés peu sûrs. Même si ces éléments ne sont pas totalement dénués de vérité, force est de constater que Pétain oublie la nette supériorité numérique des Franco-Britanniques en matière de chars et le fait que la défaite française, c est d abord la défaite de l état-major français qui, inspiré par les idées de ce même Pétain, misa tout sur une stratégie défensive alors que les Allemands cherchèrent à exploiter au maximum la mobilité de leurs blindés. 2 Plus encore que son infériorité matérielle, la France doit sa défaite à son indignité morale. D après Pétain, les Français ont désappris depuis 1918 le sens du sacrifice et du devoir, ils se sont abandonnés à l esprit de jouissance. Même s il demeure dans l implicite, Pétain attaque ici le Front populaire et les deux semaines de congés payés instaurées par celui-ci Pour que la France se relève, il faudra donc mener une «œuvre de restauration nationale» qui mettront fin aux errements de la période précédente. 3 Tout en restant évasif, Pétain annonce aux Français qu il restera à leurs côtés dans cette épreuve. Dès le 20 juin 1940 il a bien l intention de demeurer au pouvoir même s il ne dit encore rien des formes que celui-ci prendra. 4 Le discours du maréchal Pétain évolue entre divers registres émotionnels. Celui de l accusation à l égard de ceux qui se sont abandonnés à l esprit de jouissance, mais aussi celui de la compassion à l égard du peuple français. Arguant de la douleur et de la souffrance de ce dernier, il prétend déjà «faire don» de sa personne pour sauver la France. n L État français et la révolution nationale L effondrement militaire de la France se double d un effondrement politique. La petite ville de cures thermales Vichy est choisie par défaut comme capitale de la zone libre. Elle est proche de la ligne de démarcation et dispose d une hôtellerie capable d héberger le gouvernement 14 Séquence 9 HG11

15 les principaux services centraux de l État français, le 10 juillet 1940, les sénateurs et les députés votent les pleins pouvoirs au maréchal Pétain, seuls 80 d entre eux, dont Léon Blum, sur 649 votent contre. Pétain reçoit tous les pouvoirs pour une durée indéterminée. Il s agit d une véritable dictature qui repose sur la popularité du vainqueur de Verdun. Pétain et les hommes qui l entourent entendent profiter de «la divine surprise» (voir Charles Maurras) pour reconstruire la France selon leurs principes qui s incarnent dans la devise Travail, Famille, Patrie en prenant, à cette occasion, leur revanche sur la République, la démocratie et la gauche en particulier. Cette révolution nationale doit s incarner dans le culte du chef, protecteur et sauveur de la France, le maréchal Pétain, restaurer la France traditionnelle faite d agriculture, de ruralité, contre la ville jugée corruptrice (voir le slogan de l époque, «La terre, elle, ne ment pas!») et d artisanat, d attachement à la famille (le divorce est interdit par le nouveau régime), de retour à la religion catholique Ce choix peut paraître tout à fait paradoxal de la part d un libre penseur comme Pétain! Les hommes de gauche, syndicalistes (les syndicats sont interdits) militants politiques, instituteurs sont poursuivis comme corrupteurs de la jeunesse. La légion des volontaires français, créée en août 1940 par Xavier Vallat et qui regroupera jusqu à anciens combattants, est chargée de propager ces valeurs. Le régime de Vichy est essentiellement composé d hommes de droite et d extrême droite mais quelques personnalités de gauche le rejoignent comme René Belin, ministre du Travail, ancienne personnalité notable de la CGT. 2. La Résistance, de la lutte contre l occupation allemande à la réaffirmation de l idéal républicain n Les débuts de la Résistance On doit distinguer au sein de la Résistance, la Résistance intérieure et la Résistance extérieure qu on appelle la France Libre. L acte de naissance de la France libre, c est l appel du 18 juin du général de Gaulle. L appel à la résistance de ce général encore peu connu sur les ondes de la BBC ne fut sans doute entendu que par bien peu de Français. De fait, les débuts de la France Libre furent extrêmement modestes. En juin 1940, de Gaulle n avait encore autour de lui que quelques milliers d hommes et de femmes et Félix Eboué, le gouverneur du Tchad, seul gouverneur colonial à s être rallié à lui dès Le premier acte de la résistance intérieure fut le dépôt d une gerbe de fleurs sur la tombe du Soldat inconnu, sous l Arc de triomphe, le 11 novembre 1940 par un groupe d étudiants. Séquence 9 HG11 15

16 Dès la fin de l année 1940, on voit apparaître les premiers journaux, les premiers tracts appelant à la résistance contre l occupant nazi. La motivation première de l entrée dans la Résistance est donc le refus de l occupation allemande. Document 7 Le témoignage d un résistant de la première heure, l historien Jean-Pierre Vernant Le 18 juin 1940, je me trouve à Narbonne avec mon frère, ma belle-sœur et ma femme. Je m étais retrouvé là, affecté comme aspirant, avec les débris de mon régiment. Je n ai pas entendu le général de Gaulle, j ai écouté pour la première fois la radio de Londres quelques jours après ( ). Le 17 juin, le discours de Pétain a été diffusé par haut-parleurs dans les rues de Narbonne, précédé d une Marseillaise qu on écoutait au garde-à-vous. J étais effondré. J avais honte. Rien ne serait plus comme avant. Avec ma femme et ma belle-sœur, à mes côtés, nous pressentions le pire. Autour de nous pourtant l armistice était bien accueilli ( ). Alors, avec mon frère, ma belle-sœur et ma femme, nous avons commencé notre résistance à notre façon, seuls, tous les quatre, en famille, avec une petite imprimerie portative. Nous tirions des tracts. Je les ai en mémoire : «Si la France est par terre, c est la faute à Hitler, son drapeau dans l eau sale, c est la faute à Laval». Entretien avec Jean-Pierre Vernant, chef FFI de Haute-Garonne, Le Matin, 18 juin 1985 Questions 1 Dans quel contexte se situe l entrée en Résistance de Jean-Pierre Vernant? 2 Quelles motivations donne-t-il pour expliquer son entrée en Résistance? 3 Fait-il au début partie d un mouvement organisé? Réponses 1 Jean-Pierre Vernant situe son refus de l occupation allemande très tôt, dès l effondrement militaire de la France. Le Maréchal Pétain, auréolé du prestige de Verdun et de la Première Guerre Mondiale a remplacé Paul Reynaud au poste de Président du Conseil le 16 juin. Dès le lendemain, il a annoncé son intention de signer un armistice avec l Allemagne : c est ce discours qui est diffusé à la population de Narbonne, où se trouvent J.-P. Vernant et sa famille. 2 Ce résistant de la première heure évoque la honte qu il a alors ressentie : «j avais honte», et un sentiment d accablement «J étais effondré». Le sentiment que le pire est à venir semble aussi avoir joué un rôle important dans sa décision. Ce sentiment de honte face à la défaite de la France revient souvent dans les témoignages de résistants. 16 Séquence 9 HG11

17 3 En 1940, J.-P. Vernant et sa famille n appartiennent à aucun mouvement : leurs actes de résistance sont des actes individuels. Cela passe dans un premier temps par la diffusion de tracts visant à entretenir le sentiment patriotique et à lutter contre la propagande officielle allemande et vichyste. n Lutter contre l occupation allemande L invasion de l URSS, le 22 juin 1941 change la situation en provoquant l entrée des communistes l appareil du parti et le nombre de ses militants dans la Résistance. De fait, même s ils ne furent pas seuls, les communistes jouèrent un rôle essentiel dans la Résistance. Ils organisent ainsi la première structure militaire de la résistance, les FTP (Francs tireurs et partisans). Le 21 août 1941, Pierre Georges, dit le Colonel Fabien, tue un soldat allemand sur le quai du métro de la station Barbès-Rochechouart, à Paris. Les Allemands répondent à ce genre d action en fusillant des otages. L instauration du service du travail obligatoire (STO) en 1943 pousse de nombreux jeunes gens à rejoindre les premiers maquis qu on trouve dans les zones montagneuses, comme le Vercors, ou encore en Bretagne. En 1943, on peut estimer le nombre des maquisards à quelques centaines de milliers d hommes qui mènent des actions de guérilla contre l occupant et les collaborateurs : embuscades, déraillement de trains, etc. En 1943, grâce à Jean Moulin, se met en place le CNR (Conseil national de la Résistance) qui permet à la fois de coordonner l action des différents réseaux de résistance et d assurer le lien entre le général de Gaulle et la résistance intérieure. Ce n est qu avec difficulté, et grâce au soutien de la Résistance intérieure, que de Gaulle parvient à s imposer aux Alliés, et notamment à Roosevelt qui ne l aimait pas, comme le seul représentant officiel de la France. Le 2 juin 1944, c est la naissance du GPRF (Gouvernement provisoire de la République française) dont de Gaulle a la présidence. La Résistance participe également à l effort de guerre aux côtés des Alliés. Les FFL (Forces françaises libres) jouent également un rôle important dans la Libération. Ce sont plus de Français qui débarquent en Provence le 15 août (pour un total de hommes) et, après l insurrection de Paris lancée par le communiste Rol-Tanguy le 19 août, c est la 2 e DB du général Leclerc qui libère Paris le 25 août Le 26 août, le général de Gaulle descend les Champs Elysées au milieu d une foule immense et d un enthousiasme indescriptible alors que quelques miliciens embusqués sur les toits des immeubles tirent encore sur le cortège. Séquence 9 HG11 17

18 3. La refondation de la République au lendemain de la Seconde Guerre mondiale a. Le gouvernement provisoire (septembre janvier 1946) L épisode des Champs Elysées donne une légitimité populaire réelle au général de Gaulle. Bénéficiant du soutien des Britanniques, et en dépit de la méfiance du Président des États-Unis, Franklin Roosevelt, qui envisage même de placer la France sous administration militaire, De Gaulle parvient à s imposer. Il installe le Gouvernement provisoire de la République française (GPRF) à Paris, tout de suite après la libération de la ville. Ce gouvernement rassemble des représentants de toutes les forces politiques du moment, des communistes au centre droit, à l exception de l extrême droite et de la fraction de la droite qui s est compromise avec Vichy. Pour affirmer la légitimité du GRPF, de Gaulle accomplit de nombreux voyages en province. A chaque fois, il met en place des représentants officiels du gouvernement, parfois au détriment des représentants locaux de la Résistance, qui doivent se soumettre aux chefs qu il a nommés. Dans le cadre de cette restauration des pouvoirs de l État, il décide l intégration des FFI (Forces Françaises de l Intérieur) et des FTP (Francs-Tireurs partisans) à l armée régulière. b. La mise en place d une épuration officielle Une «épuration» spontanée s est mise en place à la Libération, visant les collaborateurs et les profiteurs du marché noir. Cette épuration a d abord été spontanée : menée par un sentiment de vengeance, particulièrement forte après les années d occupation allemande, elle prend parfois le visage d un règlement de comptes. Cette épuration sauvage s étend de juin à novembre Elle se traduit par l exécution sommaire de 8000 à 9000 personnes et à la tonte de milliers de femmes accusées le plus souvent d avoir été la maîtresse d Allemands. 18 Séquence 9 HG11

19 Document 8 Alinari/Roger-Viollet. Femme battue et tondue devant la préfecture de police de Paris Le nouveau gouvernement décide de mettre en place une épuration légale, qui relaie et canalise l épuration spontanée. Cette épuration prend la forme de procès, menés par une magistrature qui a elle-même été épurée au préalable. Des cours spéciales de justice examinent les cas de collaboration avec l ennemi ; une Haute Cour de Justice est chargée de juger les principaux responsables du gouvernement de Vichy et des collaborateurs les plus en vue. Cette épuration légale a été d une ampleur incontestable : dossiers ont été ouverts, cela touche presque un Français sur dossiers ont été classés avant information (dossiers vides), après. Il reste donc dossiers, qui ont abouti à 767 exécutions. De nombreuses peines de prison ou de dégradation nationale (cela veut dire que l on est privé de ses droits civils et politiques et exclu de la fonction publique ou des emplois semi publics) ont été prononcées. Cette épuration a néanmoins été sélective : elle a beaucoup plus frappé les intellectuels et les hommes politiques que les milieux économiques, relativement épargnés. Le procès le plus retentissant est celui du Maréchal Pétain à l issue duquel il est condamné à mort. Sa peine a été commuée en peine d emprisonnement à perpétuité : détenu sur l île d Yeu, il y meurt en Ces procès permettent de souder l opinion dans l opposition au régime de Vichy, et à la politique de collaboration d État, incarnée par Pétain et Laval. c. Le vote d une nouvelle constitution Dès octobre 1945, des élections sont organisées pour élire une assemblée constituante (une assemblée qui a à charge de rédiger une nouvelle constitution). Cette assemblée est dominée par le P.C.F. (qui prend l appellation de «parti des fusillés», alors que le nombre des fusillés pendant l Occupation est d environ au total) qui tire bénéfice de son rôle majeur dans la Résistance, la S.F.I.O. et le M.R.P. (mouvement républicain populaire), parti chrétien-démocrate qui se place au centre droit. Cette assemblée propose aux Français un modèle de constitution inspiré de celui de la III e République. Celle-ci favorise le Parlement au détri- Séquence 9 HG11 19

20 ment du Président de la République. Hostile à ce projet, de Gaulle quitte donc le gouvernement en janvier 1946 et, dès le 16 juin 1946, dans le discours de Bayeux il se déclare en faveur d une nouvelle république fondée sur un pouvoir exécutif fort. Il crée en 1947, le R.P.F. (Rassemblement du peuple français), un nouveau parti chargé d assurer un débouché politique à ses idées. Document 9 Le discours de Bayeux, 16 juin 1946 Il est clair et il est entendu que le vote définitif des lois et des budgets revient à une assemblée élue au suffrage universel et direct. Mais le premier mouvement d une telle assemblée ne comporte pas nécessairement une clairvoyance et une sérénité entières. Il faut donc attribuer à une deuxième assemblée élue et composée d une autre manière la fonction d examiner publiquement ce que la première a pris en considération, de formuler des amendements, de proposer des projets. Du Parlement composé de deux Chambres et exerçant le pouvoir législatif, il va de soi que le pouvoir exécutif ne saurait procéder sous peine d aboutir à cette confusion des pouvoirs dans lequel le gouvernement ne serait bientôt plus rien qu un assemblage de délégations. ( ) Or, comment cette unité (du gouvernement), cette cohésion, cette discipline seraient-elles maintenues à la longue si le pouvoir exécutif émanait de l autre pouvoir auquel il doit faire équilibre, et si chacun des membres du gouvernement ( ) n était à son poste que le mandataire d un parti? C est donc du chef de l État, placé au-dessus des partis, élu par un collège qui englobe le Parlement, mais beaucoup plus large, que doit procéder le pouvoir exécutif. Au chef de l État, la charge d accorder l intérêt général, quant au choix des hommes, avec l orientation qui se dégage du Parlement, à lui la mission de nommer les ministres, et d abord, bien entendu, le Premier, qui devra diriger la politique et le travail du gouvernement ; au chef de l État la fonction de promulguer les lois et de prendre les décrets ; à lui la tâche de présider les conseils du gouvernement et d y exercer cette influence de la continuité dont une nation ne se passe pas. Général de Gaulle. Questions 1 Quelles sont les fonctions des Chambres dans l organisation politique proposée par de Gaulle? Est-il surprenant qu il propose l existence de deux chambres? 2 Que signifie la phrase «Du Parlement composé de deux Chambres et exerçant le pouvoir législatif, il va de soi que le pouvoir exécutif ne saurait procéder»? 3 Pourquoi, selon de Gaulle, la dépendance du pouvoir exécutif par rapport au pouvoir législatif est mauvaise? 20 Séquence 9 HG11

21 4 Quelles doivent être les fonctions du chef de l État selon le général de Gaulle? Quelles sont ses relations avec le gouvernement? 5 Les idées du général de Gaulle ont-elles influencé la constitution de la IV e République? Réponses 1 La Chambre des députés a pour fonction, dans l esprit de de Gaulle, de voter les lois et le budget. Mais, elle doit composer avec une deuxième assemblée, en l occurrence le Sénat, pour déterminer le texte définitif des lois. Cet attachement de de Gaulle au système bicaméral n est guère étonnant dans la mesure où la plupart des régimes qui se sont succédés en France depuis 1791 ont possédé deux assemblées législatives. 2 Sous la III e République et sous la IV e également, le chef de l État, c està-dire le Président de la République est élu par le Parlement. Le Président du Conseil quant à lui, c est-à-dire le chef du gouvernement, est investi par la Chambre des députés et n en est que l émanation. De Gaulle critique cette situation où le pouvoir exécutif c est-à-dire le Président de la République et le Président du Conseil - dépend entièrement du pouvoir législatif, c est-à-dire des chambres. 3 Cette soumission de l exécutif au législatif est pour de Gaulle une des raisons fondamentales des difficultés de la III e République finissante. C est elle qui explique la «valse des ministères», c est-à-dire la chute très rapide des gouvernements. Dépendant des Chambres, le chef du gouvernement passe l essentiel de son temps à négocier avec les partis de la Chambre afin de se maintenir au pouvoir au lieu de s occuper des affaires de la France. 4 Le chef de l État, c est-à-dire le Président de la République doit être indépendant des Chambres, il doit être au-dessus des partis. Pour cela, il doit être élu par un groupe beaucoup plus large que celui des parlementaires afin que sa légitimité s impose à tout le pays. Le chef du gouvernement, que de Gaulle appelle Premier ministre, est nommé par ses soins et n est donc plus le résultat d un équilibre politique savant entre les différents partis présents à l Assemblée nationale. 5 Les voies proposées par le général de Gaulle en juin 1946 n inspirent aucunement la constitution de la IV e République. Celle-ci met en place un régime fondamentalement parlementaire où le Président de la République aura peu d influence. L instabilité politique du régime tout au long des années 1950 donnera rétrospectivement raison au général de Gaulle. La nouvelle constitution est rejetée par les Français qui majoritairement votent NON au référendum de mai Une nouvelle assemblée constituante doit donc être élue en juin 1946 et c est en octobre 1946, à la suite d un second référendum, que la constitution de la IV e République est acceptée par les Français. Celle-ci institue un régime de type parlementaire donnant la primauté à l Assemblée nationale. Séquence 9 HG11 21

22 Les premières élections législatives de novembre 1946 confirment la domination du P.C. La S.F.I.O et le M.R.P. forment avec le P.C. un gouvernement de coalition mais ils se divisent au moment de la grande crise sociale, marquée par des grèves très dures, et notamment celle des dockers de Marseille, qui touche la France en Les ministres communistes, dans un contexte de guerre froide qui se met en place, sont alors exclus du gouvernement en mai 1947 par Paul Ramadier, Président du Conseil socialiste. d. Les réformes économiques et sociales de la Libération Le G.P.R.F. mène de nombreuses réformes tant politiques sociales. Une des premières décisions imposées par de Gaulle, par décret, dès avril 1944 fut le droit de vote des femmes. La Libération est également marquée par un vaste mouvement de nationalisations (l État s approprie des entreprises privées avec ou sans indemnités) notamment prévues par le programme du C.N.R. (Conseil national de la Résistance). Celles-ci concernent les secteurs de l énergie avec la constitution d EDF-GDF en 1946 et de Charbonnage de France, certaines banques (La Banque de France), les transports (formation de la Compagnie aérienne nationale Air France). D autres entreprises sont nationalisées sans indemnités pour faits de collaboration, c est en particulier le cas de Renault. L influence de la Résistance, à travers le programme du C.N.R. est également déterminante dans la mise en place d un système de sécurité sociale par les ordonnances d octobre Celle-ci est financée conjointement par les salariés et les employeurs et garantit à chaque salarié une assurance maladie, une assurance chômage et une assurance vieillesse. C : une nouvelle République 1. De nouvelles institutions De Gaulle devient le dernier Président du Conseil de la IV e République le 1 er juin Il confie la rédaction de la nouvelle constitution à un comité composé de parlementaires gaullistes comme Michel Debré mais aussi des MRP, des radicaux et des socialistes comme Guy Mollet qui joua un rôle non négligeable dans la rédaction finale du texte. Présentée aux Français, la nouvelle constitution est adoptée par référendum par une majorité de près de 80 % de OUI (en dépit de l opposition des communistes, de Mendès France et de Mitterrand) le 28 septembre Promulguée le 4 octobre par le président de la République René Coty, elle donne officiellement naissance à la V e République. 22 Séquence 9 HG11

23 La constitution de 1958 met en place un régime de type semi-présidentiel où le chef du gouvernement, nommé par le Président de la République et désormais appelé Premier ministre, demeure responsable devant les chambres (Assemblée nationale et Sénat). Mais le personnage central est désormais le Président de la République qui dispose du pouvoir de dissoudre l Assemblée nationale. Il joue par ailleurs un rôle fondamental en matière de politique étrangère, domaine réservé du Président, et oriente la politique du gouvernement, le Premier ministre devant en principe se contenter d interpréter et d appliquer les volontés présidentielles. Conformément aux idées qu il énonçait déjà dans le Discours de Bayeux, de Gaulle a donné la primauté à l exécutif sur le législatif, seul type d organisation politique susceptible de répondre à la gravité de la situation en Algérie, selon lui. Après une large victoire de l U.N.R. (Union pour la nouvelle république, c est le nouveau nom du parti gaulliste) aux législatives de novembre, de Gaulle est élu Président de la République, au suffrage universel indirect par grands électeurs, en décembre Document 10 Les institutions de la V e République (en 1962) Président de la République (élu pour 7 ans) nomme élisent référendum peut dissoudre Premier ministre gouvernement motion de censure question de confiance Assemblée nationale députés élus pour 5 ans loi art. 16 pouvoirs exceptionnels en cas de crise Sénat sénateurs élus pour 9 ans renouvelables par tiers élisent élit députés conseillers régionaux conseillers généraux conseillers municipaux électeurs Suffrage universel direct Séquence 9 HG11 23

24 Document 11 La réforme constitutionnelle de 1962 annoncée par le général de Gaulle «Depuis que le peuple français m a appelé à reprendre officiellement place, à sa tête, je me sentais naturellement obligé de lui poser, un jour, une question qui se rapporte à ma succession, je veux dire celle du mode d élection du chef de l État. Qui ne se souvient pas de la mortelle échéance devant laquelle se trouvait, en mai 1958, le pays et la République, en raison de l infirmité, organique, du régime d alors? Dans l impuissance des pouvoirs, apparaissaient tout à coup l imminence des coups d État, l anarchie généralisée, la menace de la guerre civile. C est alors qu assumant de nouveau le destin de la patrie, j ai, avec mon gouvernement, proposé au pays l actuelle constitution. Celle-ci, qui fut adoptée par 80 % des votants, a maintenant quatre ans d existence. Or, la clé de voûte de notre régime, c est l institution nouvelle d un président de la République désigné par la raison et le sentiment des Français pour être le chef de l État et le guide de la France. Sans que doivent être modifiés les droits respectifs, ni les rapports réciproques des pouvoirs exécutifs, législatif, judiciaires, tels que les fixe la constitution, mais en vue de maintenir et d affermir nos institutions vis-àvis des entreprises factieuses de quelque côté qu elles viennent, ou bien des manœuvres de ceux qui de bonne, ou de mauvaise foi, voudraient nous ramener au funeste système d antan, je crois donc faire au pays la proposition que voici : quand sera achevé mon propre septennat, ou si la mort ou la maladie l interrompait avant le terme, le président de la République sera désormais élu au suffrage universel.» Discours du général de Gaulle, 20 septembre Questions 1 En observant l organigramme du document 10, quelles différences percevez-vous entre les institutions de la IV e République et celles de la V e? 2 Pourquoi peut-on dire que le gouvernement reste responsable devant le Parlement? 3 De quelle façon de Gaulle décrit-il la situation de 1958? N y a-t-il pas quelque chose de paradoxal dans ce discours? 4 En quoi consiste la réforme constitutionnelle de 1962? Pourquoi modifie-t-elle plus l équilibre des pouvoirs que de Gaulle veut bien l affirmer? Réponses 1 La constitution de la V e République fait désormais du chef de l État l élément principal. Un rééquilibrage se produit au profit de l exécutif. En terme de légitimité, celle du chef de l État ne dépend plus des chambres, elle est beaucoup plus large. Il nomme par ailleurs le Premier ministre. Ce glissement de sens pour nommer le chef du gouver- 24 Séquence 9 HG11

25 nement qui perd désormais son titre de Président du Conseil est également significatif. Il n y a désormais plus qu un seul président, titre qui rehausse encore la primauté du chef de l État. Celui-ci possède encore la possibilité d exercer des pouvoirs exceptionnels en cas de crise en vertu de l article 16 de la constitution. Il nomme encore trois des juges du Conseil constitutionnel, qui constitue une autre innovation de la constitution de Il peut enfin dissoudre l Assemblée nationale et décider souverainement de convoquer de nouvelles élections législatives. À l inverse, hormis des cas de haute trahison, rien ne permet au pouvoir législatif de forcer le Président de la République à quitter son poste. 2 Le chef du gouvernement, désormais Premier ministre est nommé par le Président. Celui-ci doit évidemment tenir compte de la majorité parlementaire mais son choix est souverain quant au choix de l homme qu il désire placer à la tête du gouvernement. Cette situation est encore en rupture avec la pratique parlementaire des III e et IV e Républiques. Pourtant, le gouvernement reste pleinement responsable devant les chambres. En effet, une fois nommé, le Premier Ministre doit recevoir l investiture par un vote de l Assemblée nationale. Afin de relégitimer son pouvoir, il peut demander aux députés un vote de confiance. Enfin, en cas de conflit entre le gouvernement et les députés, ceux-ci peuvent le renverser par une motion de censure. Le Premier Ministre est renversé si plus de la moitié des députés vote contre lui. C est ce qui est arrivé au gouvernement Pompidou, le 5 octobre 1962, après l annonce, par le général de Gaulle, de la réforme constitutionnelle instituant l élection du Président de la République au suffrage universel direct. 3 Lorsqu il revient sur les événements de 1958, et ceux qui ont suivi la guerre d Algérie, la journée des barricades, le 13 mai 1958, le putsch des généraux d Alger en avril 1961 il stigmatise l impuissance de la IV e République qui a mis le pays au bord de la guerre civile. Faisant un parallèle avec 1940, il se présente comme celui qui est venu sauver le pays. Au-delà de l aspect plus ou moins polémique d une telle présentation des faits, de Gaulle omet de préciser que sans la journée des barricades, qui répondait clairement à une logique factieuse, il ne serait sans doute jamais revenu au pouvoir. 4 La réforme de 1962 modifie le fonctionnement constitutionnel plus que le général de Gaulle ne veut le reconnaître. Il est exact que les prérogatives des trois pouvoirs exécutif, législatif et judiciaire telles que fixées dans le texte de 1958 ne sont en rien modifiées. Néanmoins, en décidant de faire élire le président de la République au suffrage universel direct, de Gaulle modifie en profondeur l esprit de la constitution. Tout en donnant un rôle éminemment important au chef de l État, celui-ci était toujours élu au suffrage universel indirect, et en partie par les parlementaires. L élection au suffrage universel direct est à l inverse un processus de démocratie directe qui rompt avec la tradition parlementaire. Séquence 9 HG11 25

26 2. Le renforcement de la fonction présidentielle Le général de Gaulle transforme complètement la fonction présidentielle, en rupture avec les régimes parlementaires de la IIIe et IV e Républiques, et en conformité avec le discours de Bayeux (voir plus haut). Ce renforcement se situe dans le contexte de la crise algérienne. La manière dont de Gaulle va aborder cette crise va aussi lui permettre de renforcer la rôle du Président de la République. Confronté à la question algérienne, de Gaulle se rend en Algérie dès juin D abord hésitant, il s oriente rapidement vers la solution de l autonomie. Dès le mois de septembre 1959, il évoque l autodétermination des Algériens. Les Pieds noirs et les militaires d Alger considèrent ce changement d opinion comme une trahison. Plusieurs anciens officiers de l armée d Algérie (les généraux Salan, Challe, Jouhaud, Zeller) organisent un coup d État militaire à Alger, en avril 1961 que de Gaulle parvient à juguler en appelant les troupes du contingent à désobéir à leurs chefs. La plupart le font. Le coup d État est un échec et la République sort raffermie de cette épreuve. Raoul Salan rentre alors dans la clandestinité et devient un membre actif de l O.A.S. L O.A.S. (Organisation de l armée secrète, créée à Madrid en février 1961), organisation secrète composée de militaires déçus, de Pieds noirs extrémistes et de militants d extrême-droite, organise alors une campagne d attentats en France et en Algérie. On évalue le nombre de ses victimes entre 1700 et 2000 personnes. C est notamment l O.A.S. qui organise l attentat du Petit Clamart, le 22 août 1962, où de Gaulle échappe à la mort de justesse. Document 12 La DS du général de Gaulle criblée de balles après l attentat du Petit Clamart (22 août 1962) Rue des Archives/AGIP. 26 Séquence 9 HG11

27 Des négociations s ouvrent à Evian le 20 mai 1961 et aboutissent à la signature des accords d Evian le 18 mars Le référendum organisé pour approuver ces accords obtient 90% de oui. E Le poids déterminant de la guerre d Algérie dans la vie politique française au début de la V République a pour effet de renforcer considérablement l autorité du général de Gaulle. E Ces événements dramatiques lui permettent d atteindre une popularité exceptionnelle : la pratique des étapes progressives qu il a choisie vers l indépendance de l Algérie correspond à l évolution de l opinion publique sur le sujet, de plus en plus favorable à l indépendance. E De Gaulle va prendre une série de décisions qui vont toutes dans le sens d un renforcement du rôle du Président dans les institutions. L idée d un «domaine réservé» du Président de la République : la défense nationale, la diplomatie. Le rôle subordonné du gouvernement : le Premier ministre est plus un exécutant de la politique fixée par le chef de l État. La politique du gouvernement est celle décidée par le chef de l État. Le général de Gaulle propose l élection du chef de l État au Suffrage universel direct : cette réforme est approuvée par référendum le 28 octobre C est une victoire de la lecture présidentielle de la Constitution. 3. La pratique gaulliste du pouvoir E Dans le contexte de la forte croissance et de la prospérité des Trente Glorieuses, de Gaulle met en avant l intervention de l État dans l économie.il cherche également à orienter l économie française vers des réalisations de prestige et de haute technologie. C est à ce moment que la France se dote de sa première bombe atomique, qu est lancé commercialement un remarquable avion de ligne, la Caravelle, que le projet Concorde est lancé (premier vol du premier avion supersonique civil en 1969). La firme française Dassault, quant à elle, remporte un succès international avec le Mirage III, un des meilleurs avions de chasse de sa génération. L État échoue cependant à mettre en place une industrie nationale de l informatique performante (Plan Calcul). L agriculture française, favorisée par la mise en place de la politique agricole commune (P.A.C.) dans le cadre de la CEE est alors en plein développement et conquiert de nouveaux marchés, en particulier chez ses partenaires européens. Séquence 9 HG11 27

28 E Le général de Gaulle accompagne ce volontarisme économique de la volonté de faire entendre la voix de la France. Document 13 Voyage officiel de de Gaulle en URSS (1964) akg-images/ria Nowosti. Grâce à la technologie nucléaire, la France se dote de sa propre force de dissuasion en dépit de l hostilité américaine et entend maintenir son indépendance à l égard de l allié américain. De Gaulle se montre critique, dès la fin des années 1960, à l égard de la politique américaine au Viêt- Nam. Il décide surtout de faire sortir la France du commandement intégré de l OTAN en 1966, ce qui se traduit par la fermeture des bases militaires américaines en France dans un contexte général d anti-américanisme. Document 14 Le retrait de la France du commandement intégré de l O.T.A.N. Si la France considère qu encore aujourd hui il est utile à sa sécurité et à celle de l Occident qu elle soit alliée à un certain nombre d États, notamment à l Amérique, pour leur défense et pour la sienne dans le cas d une agression commise contre l un d eux, si la déclaration faite en commun, à ce sujet, sous forme du traité de l alliance atlantique signé à Washington le 4 avril 1949, reste à ses yeux toujours valable, elle reconnaît, en même temps, que les mesures d application qui ont été prises par la suite ne répondent plus à ce qu elle juge satisfaisant, pour ce qui la concerne dans les conditions nouvelles. Je dis : les conditions nouvelles. Il est bien clair en effet qu en raison de l évolution intérieure et extérieure des pays de l Est, le monde occidental n est plus aujourd hui menacé comme il l était à l époque où le protectorat américain fut organisé en Europe sous le couvert de l OTAN. ( ) 28 Séquence 9 HG11

29 D autre part, tandis que se dissipent les perspectives d une guerre mondiale éclatant à cause de l Europe, voici que des conflits où l Amérique s engage dans d autres parties du monde, comme avant-hier en Corée, hier à Cuba, aujourd hui au Vietnam risquent de prendre en vertu de la fameuse escalade, une extension telle qu il pourrait en sortir une conflagration générale. Dans ce cas, l Europe, dont la stratégie est, dans l OTAN, celle de l Amérique, serait automatiquement impliquée dans la lutte lors même qu elle ne l aurait pas voulu. Charles de Gaulle, Conférence de presse du 21 février Le général de Gaulle commence par préciser qu il ne remet pas en cause l alliance militaire française avec les États-Unis, pour autant, il considère que la politique étrangère américaine, fait courir un risque réel à l Europe en général et à la France en particulier, pouvant les entraîner dans des conflits qu elles ne désirent pas. La situation internationale a également grandement évolué depuis l époque de Staline et le président français considère que le bloc de l Est ne menace plus réellement l Europe de l Ouest. Il souhaite donc soustraire les troupes françaises au commandement américain, ce qu il appelle s affranchir du protectorat américain. Le mot est fort et connoté. Le général n est pas loin de sous-entendre en cette occurrence que les États-Unis ont tendance à considérer l Europe en colonie et non en alliée. Le discours de Gaulle à Montréal où il clame, «Vive le Québec libre», le 24 juillet 1967, est l occasion d une nouvelle brouille avec les États- Unis. Les médias américains, et notamment Newsweek, se déchaînent contre la France et son président. Dans le même temps il cherche à créer des liens privilégiés avec certains pays du Tiers monde, les pays arabes en particulier en menant une politique objectivement pro-arabe notamment visible à partir de la guerre des Six Jours, en La France maintient également des liens politiques et militaires (présence de bases militaires françaises dans plusieurs États dont la Côte-d Ivoire et la République centrafricaine ou encore Djibouti et Madagascar) privilégiés avec les anciennes colonies françaises d Afrique noire (le «Pré carré»). Au niveau européen, la réconciliation franco-allemande, lancée sous la IV e République, est réaffirmée en 1963 par le traité de l Elysée, signé avec le chancelier Konrad Adenauer. Le couple franco-allemand joue alors un rôle moteur dans la construction européenne. Séquence 9 HG11 29

30 2 La République et les évolutions de la société française Cette partie s intéresse à la façon dont la République s est adaptée aux évolutions de la société française de 1880 à nos jours. Le régime républicain tel qu il se définit et s enracine dans les années 1880 ne prend quasiment pas en compte les ouvriers en tant que groupe social. Ces derniers sont d autant plus absents des préoccupations des fondateurs du régime qu ils sont associés aux désordres de la Commune de Les femmes, quant à elles, ne sont pas considérées comme dignes de se voir confier la responsabilité de l exercice du droit de vote. Il va falloir bien des combats et des évolutions pour que la citoyenneté se féminise sans parler du pouvoir politique. Enfin, la IIIe République définit une approche originale des rapports entre l Eglise et l État :la laïcité. Ce mouvement correspond à une tendance générale à la sécularisation des États et des sociétés en Europe. Elle constitue en même temps une singularité française, intrinsèquement liée à son identité républicaine. Problématique Comment la République va-t-elle contribuer à faire évoluer la société française? Pourquoi l épisode du Front Populaire reste-il une étape essentielle pour le monde ouvrier? Comment la République a pu garantir aux femmes un accès progressif vers l égalité des droits? A La République et la question ouvrière : le Front Populaire 1. La République et les ouvriers avant le Front Populaire Un traumatisme initial : la Commune de De mars à mai 1871, la population de Paris s est soulevée contre le gouvernement conservateur dirigé par Adolphe Tiers. La Commune naît du refus de la défaite militaire contre la Prusse et du rejet de Thiers, symbole 30 Séquence 9 HG11

31 du conservatisme. La Commune autonome de Paris proclame la liberté de la presse, accorde le droit de vote aux femmes. Elle se prononce en faveur de nombreuses réformes sociales comme le moratoire sur les loyers, la relance des ateliers municipaux qui donnent du travail aux chômeurs, la séparation de l Eglise et de l État Mais elle est violemment réprimée lors de la semaine sanglante, du 21 au 28 mai 1871 ; les Versaillais, sous les ordres de Mac-Mahon, reprennent la ville et c est la semaine sanglante entre les 21 et 28 mai En représailles, les Communards, également appelés Fédérés, exécutent plusieurs dizaines d otages, en particulier des prêtres dont l archevêque de Paris Georges Darboy, mais aussi le président de la cour de cassation Bonjean. Plusieurs bâtiments officiels sont incendiés dont l Hôtel de ville et le château des Tuileries. Le Louvre échappe à la destruction grâce à Gustave Courbet. La répression est terrible. Les derniers communards sont fusillés sur les barricades, comme Eugène Varlin à Montmartre et surtout au cimetière du Père Lachaise (XX e arrondissement de Paris) au mur dit des Fédérés. La répression au cours de la Semaine sanglante fait au moins morts, auxquels il faut ajouter les peines d emprisonnement et de déportation en Nouvelle-Calédonie, comme ce fut le cas de Louise Michel, surnommée la Vierge Rouge. L amnistie des Communards n intervint qu en Document 14 Corps de communards exécutés pendant la «semaine sanglante» akg-images. Séquence 9 HG11 31

32 Les ouvriers représentent une catégorie sociale de plus en plus nombreuse avec la diffusion de l industrialisation et prennent progressivement conscience de leur identité collective. Les lois libérales de la République légalisent les syndicats (loi Waldeck-Rousseau de 1884).La C.G.T. (Confédération Général du Travail) est ainsi créée en Progressivement une législation sociale est adoptée, légalisant le droit de grève (1864) et réduisant progressivement le temps de travail : en 1919, la journée de travail ne peut excéder 8 heures. Néanmoins, les manifestations ouvrières sont durement réprimées alors que la grève est le moyen d action le plus utilisé par les syndicats ouvriers. Le 1er mai devient une date phare de mobilisation dans les années 1880, il est chômé à partir de 1919 en France. 2. Le Front Populaire : la reconnaissance des ouvriers par la République n La France du Front populaire Document 15 : Affiche de propagande : Staline faisant main basse sur la France. Le terme de Front populaire désigne à l origine une simple alliance électorale entre les trois partis de la gauche française de l époque, le parti radical, parti essentiellement centriste, la S.F.I.O. et le P.C.F.. Mais c est surtout le changement d attitude du Parti communiste qui rend possible cette alliance. Mais le développement des ligues d extrême-droite et l émeute du 6 février 1934 à Paris, que les partis de gauche ont interprété comme une tentative de coup de force fasciste, modifie l attitude du PCF. Les communistes acceptent à partir de cette date, avec l accord de Staline, de former des Fronts Populaires avec les autres partis de gauche. En effe Jusqu au congrès d Ivry, en juin 1934, le parti communiste et son secrétaire général, Maurice Thorez, dénoncent la S.F.I.O. et les radicaux comme étant des partis bourgeois, traîtres Roger-Viollet. 32 Séquence 9 HG11

33 à la classe ouvrière. Ils récusent toute idée d alliance. En effet, afin d éviter de voir la totalité de l Europe occidentale basculer dans le fascisme, Staline intime l ordre aux communistes français de changer de stratégie et de s allier aux autres partis de gauche. La campagne électorale pour les législatives se déroule dans une atmosphère de tensions où les violences entre militants des différents partis ne sont pas rares. Questions 1 Que représente la scène? 2 Quel est le sens de ce message de propagande? Réponses 1 On voit au premier plan un paisible village symbolisé par son église. Au second plan, le géant Staline s approche, comme dans une légende, tel le Diable surgissant de l horizon et va s emparer d un pays dans l incapacité de se défendre. 2 Cette affiche de propagande des républicains sociaux (parti de droite) est destinée à faire peur à l électorat conservateur, rural et catholique du pays qui peut s identifier à ce village français. Ici, le message est que le Front populaire est le jouet de Moscou et des communistes ou acheté par Staline et le Komintern, les socialistes et les radicaux sont des traîtres qui vont vendre la France à l étranger. Cette affiche témoigne de la violence des rapports politiques des années Trente. La France est alors coupée en deux, avec deux France qui se haïssent et ne vont pas tarder à en découdre pendant l Occupation (voir la séquence 4 «La guerre au XX e siècle», chapitre 2, partie C). n La victoire de la gauche aux élections législatives de 1936 Le Front populaire gagne les élections législatives d avril-mai 1936 et le premier secrétaire de la S.F.I.O., Léon Blum, devient le nouveau Président du Conseil. Il forme un gouvernement de coalition avec des socialistes, comme Léo Lagrange nommé titulaire du nouveau sous-secrétariat au sport et aux loisirs, ou Roger Salengro au ministère de l Intérieur et des radicaux comme Jean Zay à l éducation nationale (exécuté par les milice de Vichy en 1944). Edouard Daladier devient ministre de la Défense. Officiellement pour ne pas effrayer l électorat radical, les communistes refusent d entrer au gouvernement. À l annonce de la victoire électorale du Front populaire, les ouvriers déclenchent un vaste mouvement de grève et d occupation des usines, sans violences. On compte bientôt deux millions de grévistes dans l industrie mais aussi les transports et même les grands magasins. Dans ce vaste mouvement social, l atmosphère rappelle davantage celle d une Séquence 9 HG11 33

34 fête populaire que celle de la révolution communiste pourtant crainte par la droite. Les négociations entre le patronat et la CGT (Confédération générale du Travail) du socialiste Léon Jouhaux, menées sous la conduite de Léon Blum, aboutissent aux accords Matignon, signés le 8 juin Par ce texte, le patronat consent à des augmentations importantes de salaires (de 7 à 15 %) et reconnaît l existence des syndicats à l intérieur de l entreprise. Le gouvernement de Léon Blum complète ces mesures par la création des premiers congés payés qui offrent à des millions d ouvriers l opportunité de partir pour la première fois en vacances, la semaine de 40 heures (non appliquée par le patronat), la création d un Office du blé afin de garantir un revenu minimum aux agriculteurs. Le gouvernement mène également une ambitieuse politique de loisirs confiée à Léo Lagrange. Document 16 Discours radiodiffusé de Léo Lagrange, 10 juin 1936 Notre but, simple et humain, est de permettre aux masses de la jeunesse française de trouver dans la pratique des sports la joie et la santé et de construire une organisation des loisirs telle que les travailleurs puissent y trouver une détente et une récompense à leur dur labeur. J ai employé le mot «masse» et je l ai employé volontairement. En effet, dans le sports nous devons choisir entre deux conditions différentes : la première se résume dans le sport-spectacle et la pratique de sports restreints à un petit nombre de privilégiés. Selon la deuxième conception, tout en ne négligeant pas le côté spectacle et la création de champions qui ont leur raison d être, c est du côté des grandes masses qu il faut porter le plus grand effort. La plus grande partie de la jeunesse de France ne peut pas pratiquer aujourd hui les sports. Les causes sont multiples. Manque de terrains et de stades, manque d instructeurs et d entraîneurs, manque de temps pour les jeunes qui travaillent, frais trop élevés. Nous allons attaquer de front tous ces problèmes. Nous ne voulons pas que notre action ait pour seul objet de mettre dans les mains de nos jeunes un fusil. C est en messager de la vie et non pas de la mort que nous voulons nous présenter». Questions 1 Quelle est la vision du sport que défend Léo Lagrange? À quoi s oppose-t-elle? 2 Quelles sont les raisons pour lesquelles le sport n est pas assez pratiqué en France selon Léo Lagrange? Quelles mesures compte-t-il prendre à ce sujet? 34 Séquence 9 HG11

35 3 Que veut dire Léo Lagrange lorsqu il déclare «Nous ne voulons pas que notre action ait pour seul objet de mettre dans les mains de nos jeunes un fusil. C est en messager de la vie et non pas de la mort que nous voulons nous présenter»? Réponses 1 Léo Lagrange constate l opposition entre deux visions du sport. Celle du sport comme pratique élitiste, qui peut à la rigueur faire l objet d un spectacle pour les masses. C est la conception originelle du sport tel qu il est apparu aux XVIII e -XIX e siècles en Angleterre. De nombreux sports ont conservé, ou conservent encore ces caractéristiques, ainsi le tennis, le golf, le polo. Ce n est pas cette vision du sport qui intéresse Léo Lagrange, même s il lui reconnaît une légitimité. Ce que le nouveau sous-secrétaire d État au sport et aux loisirs cherche à développer, c est la pratique des sports de masse dans une sorte de visée hygiéniste. La pratique du sport rendra les vies ouvrières plus saines, elle les détournera également du bistrot, souvent le seul loisir offert aux classes populaires. 2 La France manque de stades, de gymnases, d entraîneurs. La pratique du sport est par conséquent souvent onéreuse et hors de portée des catégories populaires. Léo Lagrange annonce donc une ambitieuse politique de loisirs. Le Front populaire va en effet financer la construction de nombreux stades, aider les municipalités à mettre en place des activités sportives. 3 Dans les années 1930, le sport est à la mode, en particulier dans les dictatures totalitaires qui l utilisent comme un moyen fort efficace de propagande. La pratique du sport est également encouragée par ces régimes afin de faire des jeunes de futurs bons soldats. Récusant cette conception guerrière du sport, Léo Lagrange, fidèle au pacifisme des socialistes français, considère que le développement de la pratique sportive aura pour objet exclusif de rendre la jeunesse française plus heureuse et plus saine. n La fin du Front Populaire Le Front Populaire est rapidement confronté à d importantes difficultés. Le gouvernement Blum refuse de soutenir officiellement les Républicains espagnols pendant la Guerre d Espagne, alors que les troupes de Franco reçoivent le soutien de l Allemagne nazie et de l Italie fasciste. De plus, le gouvernement est confronté à l opposition des milieux financiers et patronaux, et doit dévaluer deux fois le franc en un an ce qui entretient l inquiétude et l hostilité de ces milieux. Après s être vu refuser les pleins pouvoirs financiers par le Sénat, Léon Blum est contraint à la démission le 22 juin Séquence 9 HG11 35

36 3. Le Front Populaire et le renouvellement de l identité ouvrière Le Front Populaire constitue un moment important de la mémoire ouvrière. Les grèves de mai-juin 1936 sont largement un mouvement festif, incluant des catégories qui étaient jusque-là peu habituées à se mobiliser collectivement, comme les vendeuses des Grands Magasins parisiens. Document 17 Les grèves de mai-juin 1936, ouvriers de Singer occupant leur usine Collection Dupondt/akg-images. De plus, la politique d amélioration de la vie congés payés, loisirs et éducations populaires permet aux ouvriers d accéder à une revendication qui leur était jusque-là interdite : le droit au bonheur. En témoigne l importante production cinématographique qui prend pour sujet la vie, le travail, les aspirations des ouvriers au moment du Front Populaire : La vie est à nous de Jean Renoir ou La Belle Equipe de Julien Duvivier datent tous deux de B La République, les religions et la laïcité depuis les années La laïcité républicaine : la Séparation de l Église et de l État «Le cléricalisme, voilà l ennemi!». Cette exclamation de Gambetta, prononcée le 4 mai 1877 pendant la campagne électorale pour les législa- 36 Séquence 9 HG11

37 tives qui allait voir la victoire des républicains, en dit long sur les rapports conflictuels entre l Église catholique et la République. Malgré des accommodements ponctuels, l Église et la République s opposèrent à de nombreuses reprises. La première crise éclate à l occasion de la mise en place de l école laïque par Jules Ferry. Un conflit larvé se poursuit tout au long de la fin du XIX e siècle. Après des années d oppositions (politique scolaire, lois sur les congrégations ), les tensions avec le pape Pie X, qui succède à Léon XIII en 1903, aboutissent à la rupture des relations diplomatiques entre le Saint-Siège et la III e République, alors dirigée par le gouvernement d Emile Combes. Grande figure de l anticléricalisme républicain, Emile Combes prépare le chemin à la rupture définitive entre l Église et l État. La loi de séparation de l Église et de l État est finalement votée le 9 décembre 1905, sous le successeur d Emile Combes à la Présidence du Conseil, Maurice Rouvier. La loi est suivie en 1906 de la campagne des inventaires où l État veut dresser l inventaire des biens possédés par les églises. Les milieux catholiques tentèrent de s y opposer et on assista à de véritables batailles rangées devant les églises de France entre les activistes catholiques et les forces de l ordre. Document 18 La loi du 9 décembre 1905 (extraits) Art. 1 er : La République assure la liberté de conscience. Elle garantit le libre-exercice des cultes sous les seules restrictions édictées ciaprès dans l intérêt de l ordre public. Art. 2 : La République ne reconnaît, ne salarie, ni ne subventionne aucun culte. Art. 3 : Dès la promulgation de la présente loi, il sera procédé par les agents de l administration des domaines à l inventaire - 1 e des biens mobiliers et immobiliers des établissements publics de culte (c est-à-dire les paroisses catholiques et protestantes, les synagogues juives). 2 e des biens de l État, des départements et des communes dont les mêmes établissements ont la jouissance. Art. 4 : Dans le délai d un an à partir de la promulgation de la présente loi, les biens et immobiliers des établissements publics du culte seront transférés aux associations qui, en se conformant aux règles d organisation générale du culte dont elles se proposent d assurer l exercice, se seront légalement formées pour l exercice du culte. Art. 19 : Ces associations devront avoir exclusivement pour objet l exercice d un culte. Art. 26 : Il est interdit de tenir des réunions politiques dans les locaux servant habituellement à l exercice d un culte.» Séquence 9 HG11 37

38 Document 19 La papauté contre la loi «Rien n est plus contraire à la liberté de l Église que cette loi. En effet, la loi de séparation empêche les pasteurs (c est-à-dire les membres du clergé et notamment les évêques) d exercer la plénitude de leur autorité quand elle attribue la juridiction suprême sur associations au Conseil d État. Que fait-elle sinon placer l Église dans une sujétion humiliante. ( ) Aussi n est-ce pas seulement en restreignant l exercice de son culte ( ) que l État blesse l Eglise, c est encore en faisant des obstacles à son influence toujours si bienfaisante sur le peuple, en paralysant de mille manières différentes son action.» Pie X, Encyclique Vehementer nos, 11 février Document 20 Ouverture par la force de l église Saint-Pierre du Gros Caillou (7 e arrondissement de Paris) pendant la campagne des inventaires (1906) akg-images. Questions 1 Quelles sont les dispositions de la loi de Séparation de l Église et de l État? Quel est son objectif principal? 2 Quelle est la réponse de l institution catholique? Comment justifie-telle sa position? 3 En quoi consiste la campagne des inventaires? Que s est-il passé, pourquoi? Réponses 1 La loi du 9 décembre 1905 affirme que l État ne reconnaît, ne subventionne ni ne salarie plus aucun culte. En effet, en vertu du concordat signé entre Napoléon et le pape Pie VII en 1801, l État versait un salaire aux religieux. En contrepartie, il exerçait une tutelle sur les différents cultes. La loi de 1905 met fin à cette situation. Désormais, la 38 Séquence 9 HG11

39 République ne versera plus d argent aux cultes, et ceux-ci reprennent leur indépendance. La finalité de la loi est donc de couper la relation entre religion et politique. Pour la République, la religion est une affaire privée qui n a pas à interférer dans les débats publics comme le précise l article 26 qui déclare qu «Il est interdit de tenir des réunions politiques dans les locaux servant habituellement à l exercice d un culte.» 2 L institution oppose une fin de non-recevoir à la loi. C est pourquoi elle refuse également de créer les associations prévues par la loi pour gérer et administrer les lieux de culte. Devant ce refus, l État sera donc contraint de devenir propriétaire des lieux de culte catholiques mais non protestants ou juifs car ces deux communautés ont quant à elles accepté la loi et donc de pourvoir à leur entretien. Les raisons avancées par le pape Pie X sont d ordres divers. Il considère que les associations cultuelles seraient en fait placées sous le contrôle de l État, ce qui constituerait une atteinte insupportable à la liberté de l Eglise. Mais l essentiel est ailleurs. Le pape considère surtout qu il est inacceptable pour le gouvernement républicain de prétendre interdire à l Église d intervenir dans le débat public. Il faut cependant remarquer qu une fraction minoritaire du monde catholique français, par exemple le courant social incarné par Marc Sangnier, accueillit favorablement cette loi qui rendait toute leur liberté d action aux catholiques. 3 En raison du refus de l Église catholique d accepter la séparation, la campagne des inventaires des biens d Église se solda par de multiples violences, des blessés et même des morts. Face à cette situation qui risquait d entraîner la révolte des catholiques des grandes villes de France, le président du Conseil Georges Clemenceau conseilla la prudence aux forces de l ordre. Celles-ci reçurent ainsi comme consignes de concentrer leur action sur les églises non barricadées. 2. L apaisement La Première Guerre mondiale constitue un tournant majeur dans l histoire des rapports entre la IIIe République et les Catholiques. L expérience combattante vécue pendant le conflit apaise les divisions et permet l intégration des catholiques à la République laïque. Cet apaisement se traduit par un ralliement officiel de l Église catholique à la République pendant l Entre-deux-guerres. En effet, le retour de l Alsace et de la Moselle pose un problème particulier, ces territoires n étant pas français au moment de l adoption de la loi de Ils connaissent donc un statut particulier, leur permettant de continuer d appliquer les lois antérieures à On appelle ce statut concordataire, par référence au statut antérieur, celui du Concordat napoléonien de Séquence 9 HG11 39

40 Ce statut repose sur la reconnaissance officielle par l État français des quatre cultes de l époque, catholique, luthérien, réformé et israélite. Les archevêques de Strasbourg et de Metz, le président et le vice-président des organisations protestantes et les présidents de consistoires juifs sont juridiquement nommés par l État. L État prend en charge la rémunération des ministres de ces quatre cultes. Enfin, l enseignement religieux est obligatoire dans les écoles publiques, même si les parents peuvent demander une dispense. Enfin, le pape Pie XI lui-même accepte le principe de laïcité en 1924, dans son encyclique Maximam gravissimamque. 3. Les nouveaux défis de la laïcité à la française Le principe de laïcité est inscrit dans le préambule de la Constitution de la IV e République, en Ce principe s exprime dans l enseignement mais aussi dans l encadrement des relations financières entre les collectivités publiques et les religions et par le principe de neutralité des services publics. À partir de la Seconde Guerre mondiale, les grandes religions et le catholicisme en particulier sont confrontés à un fort déclin de la pratique religieuse. En 2006, si 65% des Français se déclarent catholiques, ils ne sont que 10% à pratiquer régulièrement cette religion. La question scolaire reste un enjeu sensible. En 1959, la loi Debré crée les écoles privées sous contrat. Ces écoles bénéficient d un financement public leurs enseignants sont rémunérés par l État mais sont soumises aux obligations de service public. Pour autant, les tensions autour de la division école publique/école privée n ont pas disparu. En 1984, le projet du gouvernement socialiste porté par le Ministre de l Education Nationale, Alain Savary, vise à créer un «service public unifié et laïc de l éducation nationale». Les associations des parents de l école libre se mobilisent contre ce projet de loi et organisent le 24 juin 1984 des manifestations qui regroupent entre et 2 millions de personnes selon les sources, en présence des responsables de l Église catholique. A l inverse, la tentative de réforme de la loi Falloux par François Bayrou en 1993, ministre de l Education Nationale d un gouvernement de droite, est vivement critiquée par les partis de gauche et entraîne une manifestation de plusieurs centaines de milliers de personnes. Aujourd hui, la laïcité est confrontée à de nouveaux enjeux. La loi du 15 mars 2004 encadrant le port de signes ou de tenues manifestant une appartenance religieuse dans les écoles, collèges et lycées publics limite le port de signes religieux dans le cadre scolaire. Discutée dans son principe même, cette loi semble plutôt bien respectée et n a pas entraîné d opposition profonde. 40 Séquence 9 HG11

41 C Les femmes dans la vie politique et sociale de la France au XX e siècle 1. Une condition féminine en contradiction avec les idéaux républicains Document 21 Statue de la République Statue de la République, inaugurée le 14 juillet 1883, Place de la République à Paris. La République est personnifiée par le personnage de Marianne, habillée à l antique, portant le rameau d olivier, en signe de paix, elle tient les tables de la Loi de sa main gauche. akg-images. Les femmes avaient été largement tenues à l écart de l émancipation politique de Le Code civil de 1804 a, quant à lui, institutionnalisé leur infériorité. La femme doit obéissance à son père, puis a le statut d être mineur et incapable quand elle se marie. Elle n a aucun droit politique. L évolution se fait très lentement : en 1875, une loi permet aux femmes mariées d ouvrir un livret de Caisse d Epargne, mais il faut attendre 1895 pour que les femmes puissent en retirer leur argent sans l autorisation de leur mari. Pourtant, c est une femme, Marianne, qui est l allégorie de la République. Séquence 9 HG11 41

42 Dans les faits, les Républicains s opposent à l idée d accorder le droit de vote aux femmes. Leur crainte principale est liée à l idée que les femmes sont plus pratiquantes que les hommes, et seraient influençables : dès lors, leur donner le droit de vote, c est autoriser le curé à influencer leur suffrage. 2. La conquête des droits politiques Cette situation est de plus en plus dénoncée par des groupes actifs de militantes, les féministes. Elle est en effet en contradiction avec : E Le désir d émancipation des femmes qui accèdent progressivement aux études. Ainsi en 1900, Jeanne Chauvin devient la 1ere femme à prêter le serment d avocat, ce qui donne lieu à une importante production de caricatures représentant un monde bouleversé par l irruption des femmes dans les bastions masculins. Document 22 La femme avocat - suspension d audience, carte postale des années 1900 Photo : MORINET Jean Vigne / Kharbine-Tapabor 42 Séquence 9 HG11

43 E Le tableau suivant fait apparaître le caractère tardif de cette obtention : instauration du vote des femmes en Nouvelle-Zélande 1902 : instauration du vote des femmes en Australie 1907 : Finlande 1913 : Norvège 1915 : Danemark 1918 : Grande-Bretagne, Suède, Allemagne, Russie soviétique, Pologne, Canada (sauf le Québec, en 1919) 1934 : Turquie 1935 : Philippines ; les femmes votent dans tous les pays d Europe à l exception de la Suisse, de l Italie, des États des Balkans et de la France Dès lors, la conquête des droits politiques va être entreprise par une action militante, sur le modèle des mouvements de suffragettes très actifs aux États-Unis et en Grande-Bretagne avant la Première Guerre mondiale. A la fin du XIX e siècle, quelques militantes lancent des mouvements féministes et expriment leurs revendications dans des publications : Hubertine Auclert lance le journal La Citoyenne en 1881, Maria Martin crée le Journal des femmes dix ans plus tard, Marguerite Durand, la Fronde en Les mouvements féministes se regroupent dans le Conseil national des femmes françaises en 1901 et organisent des manifestations, lancent des pétitions, perturbent les séances de l Assemblée nationale ou la tenue des élections. Le mouvement reste limité à des cercles très restreints : la grande manifestation suffragiste organisée à Paris en juillet 1914 ne réunit que 6000 personnes. La Première Guerre mondiale constitue un tournant important dans l histoire des femmes : mobilisées à l arrière, émancipées de fait par l absence des hommes partis au combat, elles obtiennent à son issue le droit de vote dans de nombreux pays européens encore réticents, comme la Grande-Bretagne (voir chronologie). Pourtant, en 1922, le Sénat refuse d examiner les articles de la proposition de loi sur le vote des femmes. Dès lors, la mobilisation féministe prend de l ampleur. La militante Louise Weiss mène cette mobilisation : son association «la femme nouvelle» fondée en 1934 en faveur de l égalité des droits civiques multiplie les actions spectaculaires. Le 2 juin 1936, elles apportent devant le Sénat des chaussettes où est brodée cette inscription : «même si vous nous accordez le droit de vote, vos chaussettes seront raccommodées». En 1936, Léon Blum fait entrer trois femmes dans son gouvernement au poste de sous-secrétaires d État, alors qu elles ne peuvent voter ni être élues : Cécile Brunschvig à l Education Nationale, la grande scientifique Séquence 9 HG11 43

44 Irène Joliot-Curie, fille de Marie Curie, à la recherche scientifique et Suzanne Lacore à la santé publique. Document 23 Une de l hebdomadaire La Française, 5 juin 1936 «Trois femmes font partie du gouvernement». Bibliothèque Marguerite Durand / Roger-Viollet Néanmoins, il faut attendre la fin de la Seconde Guerre mondiale pour que les Françaises obtiennent le droit de vote, le 21 avril 1944, qu elles exercent pour la première fois en avril Cette conquête consacre l engagement des femmes dans la Résistance française, incarnées par de grandes figures comme Emilie Tillion (gazée à Ravensbruck en 1945), 44 Séquence 9 HG11

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