L'APOGÉE VIENNOIS DE LA CARRIÈRE DE MOZART II EN ATTENDANT LES GRANDS CHEFS-D'OEUVRE Les œuvres instrumentales Après son séjour à Salzbourg qui lui a permis, entre autres, de resserrer des liens d'amitié avec des personnes connues, comme Michael HAYDN, le frère cadet de Josef, Koncertmeister et compositeur, lui aussi, à la cour d'hieronymus Colloredo, MOZART entre, dans les dernières années de l'année 1883 et en 1984, avant l'éclosion des grands chefs-d œuvre, dans une passe où son activité créatrice ralentit. Ce qui reste tout relatif chez le compositeur. Le relâchement, manifeste cependant, est imputable à la série d'une vingtaine de concerts que MOZART doit préparer. Cette période n'en est pas moins jalonnées d œuvres de première importance. Nous en sélectionnerons quelques-unes. On observera que coexistent de plus en plus deux esthétiques : l'une intime, dominée par une émotion profonde, parfois dramatique, révélant une sorte d'inquiétude ; l'autre brillante, pouvant même paraître superficielle parfois, n'était que les œuvres de cette époque sont toujours très élaborées. Nannerl, Wolfgang Anne-Maria (en médaillon) et Léopold Mozart Sonate pour piano-forte N 14 en ut mineur K 457 Bien qu'elles soient parfois nommées les «cinq dernières sonates», ces œuvres de la dernière décennie de la vie de MOZART ne constituent pas, quelle que soit leur importance, un ensemble homogène comme le sont par exemple les six dernières Symphonies ou les six Quatuors dédiés à Haydn. Vers les années 1760 Johann Christian BACH, l'un des fils du grand Jean-Sébastien rencontré lors du voyage à Londres révèle à son jeune collègue l'existence d'un nouvel instrument : le piano-forte. Les cordes sont non pas pincées comme dans le clavecin, mais frappées. De plus, des nuances peuvent être réalisées selon l'intensité de la frappe. Trois ans plus tard MOZART essaye cet instrument chez le facteur Andrea STEIN à Augsbourg et l'adopte définitivement.
La 14 e Sonate est considérée comme l'un des plus belle. Par sa facture, elle évoque déjà BEETHOVEN. Sonate pour piano-forte N 14 en ut mineur K 457 Fragment présenté : 1er mouvement : Molto allegro Le premier thème présente cette particularité de commencer sur une vigoureuse affirmation en doubles octaves FF qui s'achève sur la suite du thème presque plaintif PP. Un passage intermédiaire extraordinairement long : le pont conduit au 2 e thème plus lyrique, joué alternativement dans l'aigu et dans les grave avec croisement de mains). Le développement, assez court, exploite principalement le premier thème. Il laisse apparaître tout l'art du compositeur en la matière. Rompant avec la règle habituelle, la réexposition n'est pas la stricte répétition de la première partie. Elle s'achève sur une coda apaisée. Des traits de virtuosité parsèment ce premier mouvement de sonate. A peu près contemporaine est la Sonate en si b majeur pour violon et piano K 414, qui appartient à un genre musical pratiqué de longue date par MOZART et dont il a déjà été fait état. Cette sonate relève de ce que l'on nomme «le grand style concertant» où les deux instruments, solistes l'un et l'autre, débordent de lyrisme et se répondent. On est tenté d'effecteur un rapprochement avec la future Sonate à Kreutzer de BEETHOVEN. A titre anecdotique, rappelons que pour la création fin avril 1784, la partie de piano n'était pas encore écrite. MOZART a dû improviser, ayant tout de même en tête le schéma auquel il avait réfléchi. On pense à CORNEILLE déclarant : «Ma pièce est faite, je n'ai plus qu'à l'écrire». Sonate pour violon et piano en Si b Majeur K 454 Fragment présenté : 1 er mouvement : Largo-allegro Un prélude lent et majestueux construit sur l opposition constante entre un motif énergique que s'échangent le piano jouant FF et le violon en doubles cordes. Lui répondant, un motif plus doux et plus gracieux s'impose et contribue à la construction d'un premier mouvement de sonate : un allegro à deux thèmes d'une facture toute classique. Même si les œuvres pour les cordes dominent largement dans le domaine de la musique de chambre : sonate pour piano et violon, trios (piano, violon, violoncelle), quatuors, quintettes à cordes avec piano, MOZART a également cherché à exploiter d'autres domaines comme celui des instruments à vent. En 1784, il compose en effet un Quintette pour piano, hautbois, clarinette, cor et basson, une formation extrêmement rare que reprendra BEETHOVEN avec moins de bonheur. Cette œuvre de MOZART est l'un des grands chefsd œuvre de cette année 1784.
Morceaux choisis Quintette pour piano, hautbois, clarinette, cor et basson en Mi b Majeur K 452 Fragments présentés 2 e mouvement : Larghetto Cette conversation apaisée entre les cinq protagonistes évite la structure tripartite traditionnelle, dite forme A B A. Elle adopte la construction d'un premier mouvement à deux thèmes. Le premier thème est confié aux bois, le second au piano seul. On remarquera l'aisance avec laquelle les instruments interviennent en relais. On entend une longue cantilène qui change de coloris au fil du discours, un cantilène qui semble se dérouler avec un naturel confondant. 3 e mouvement : Rondo allegro moderato Un refrain noble et gracieux à la fois alterne avec des couplets inventifs. Il s agit d'un construction en forme de rondo assez libre. Une coda met un terme à un mouvement qui semble refléter la joie de vivre Hautbois Clarinette
Cor Basson Les œuvres vocales autres que les opéras Ce n'est pas la partie la plus connue des œuvres de MOZART. On y découvre pourtant des pièces de premier choix. On peut y distinguer deux domaines distinct : celui du lied pour voix et piano d'une part ; celui de l'air de concert et de l'air de substitution pour voix et orchestre d'autre part. La voix humaine a toujours exercé chez MOZART, une véritable fascination, les voix de femme notamment. C'est en effet grâce à lui que des cantatrices comme Josepha DUSCHEK, Nancy STORACE (d'origine italienne), Aloysia WEBER et dans une certaine mesure sa sœur Konstanze, épouse du compositeur, ont acquis une sorte d'immortalité. Aloysia Weber Konstanz Weber-Mozart Il est étonnant que l'auteur des Noces de Figaro, prompt pourtant à nous faire partager ses sentiments intimes, n'ait pas été attiré plus que cela par le lied, probablement le meilleur facteur de la confidence. L'évolution du style montre à quel point le compositeur a éprouvé des difficultés à s'approprier une forme musical où un jeune SCHUBERT de 17 ans se sentira parfaitement à l'aise. Les premières compositions, des ariettes françaises ne manquent pas de charme, mais elles sont handicapées par des textes assez niais. Les premières romances en allemand échappent évidemment à cet écueil, mais elles paraissent bien fades. A partir de 1780 des progrès sensibles sont accomplis jusqu'à l'explosion du meilleur en 1785 après plusieurs d'années de silence dû à un manque d'intérêt tout autant qu'un besoin de recherches en d'autres domaines. Deux lieder seront extraits de cette production de 1785. Morceaux choisis Lieder Die Zufriedenheit (La Satisfaction) Il s'agit d'une apologie des joies simples, poème de deux strophes de Christian Felix Weiβe qui eut son heure de gloire comme dramaturge.
Das Veilchen (La Violette) Poème de Goethe, seule rencontre du grand écrivain et du compositeur. L'expression «air de concert» pour voix et orchestre se définit elle-même. L' «air de substitution», de même nature trouve sa place dans un opéra en remplacement d'un air d'origine MOZART en compose pour ses propres œuvres et, ce qui est plus inattendu, car sans leur accord, pour celles d'autres compositeurs. Ces pages sont taillées sur mesure pour valoriser un interprète, en tenant compte des spécificités de sa voix (tessiture étendue, aisance dans le suraigu, aptitudes à la vocalise etc.) Air «Vorrei spiegarvi, o Dio» (Je voudrais vous dire, ô dieu [quel est mon tourment]) Il s'agit d'un des trois airs de substitution écrits à l'intention d'aloysia WEBER pour un opéra du très oublié Pasquale ANFOSI : Il Curioso indiscrerto. Clorinda, l'héroïne est près de succomber à un séducteur quand elle se ressaisit et repousse l'importun. MOZART force un peu la nature de son interprète extraordinaire virtuose mais qui avait une réputation de froideur en lui confiant une page consistant, dans le cantabile initial, en un ardent abandon amoureux où la sensualité de la voix répond aux épanchements amoureux du hautbois sur fond de cordes en pizzicati. La cabalette qui couvre deux octaves et une quarte culminant au contre-mi et comporte maints traits de virtuosité appelle les prouesses vocales auxquelles pouvait se livrer Aloysia. D'autres compositions MOZART avait fait la connaissance à Salzbourg de Josef Ignaz LEITGEB (parfois désigné du nom de LEUTGEB) un éminent corniste qui passait pour être le meilleur de son temps. Il le retrouvera à Vienne établi comme marchand de fromage, ce qui ne l'empêche pas de continuer d'exercer son talent. Trois concertos et peut-être même un quatrième ont été écrits à son intention par MOZART. Concerto pour cor N 3 en mi b majeur K 447 Fragment présenté 1 er mouvement allegro Contrairement au trois autres, il ne comporte pas de dédicace non plus que des annotations dont MOZART truffait habituellement les œuvres dédiées à LEITGEB. Il en résulte donc un doute quant au destinataire de ce concerto. Mais quel autre corniste aurait été capable, à l'époque, d'exécuter une œuvre plus difficile encore que les trois autres? On retrouve ici la structure ordinaire du concerto classique, à ce détail près que le compositeurs donne à quelques motifs additionnels la même importance qu'aux deux thèmes, pivots habituels de tout premier mouvement de concerto.
Musique alimentaire, penchant pour la fantaisie, réhabilitation de la musique légère? Peut-être tout cela à la fois. L'habitude avait été prise de donner dans les cours princières d'autriche, notamment à Vienne, un bal de fin d'année. A cet effet, MOZART a composé nombre de menuets, de danses allemandes et de contredanses, qui, sans compter au nombre des œuvres majeures portent trace de l'originalité et du savoir-faire du compositeur. Il est difficile de dater ces danses avec exactitude. Morceaux choisis Danse allemande en ut majeur K 605 N 3 La «danse allemande» à ne pas confondre avec l'»allemande» l'un des pièces de la»suite» est apparue au XVIIIe siècle. Par sa structure à trois temps, elle s'apparente «Ländler» folkloriques et fait pressentir la valse, non sans une certaine lourdeur. La Danse allemande présentée ici est sans doute un peu plus tardive. L'utilisation de grelots analogue à ceux que portent les chevaux d'attelage lui a valu son sous-titre de Promenade en traîneau, son caractère pittoresque et sa popularité Contredanse en ut majeur K 587 La contredanse est une danse de groupe à plusieurs figures, préfigurant ce que certains pays appelleront plus tard le quadrille. Références : - clichés Wikipedia - documentation : sites sur le web et sources diverses personnelles sur les compositeurs cités ; - Sonate pour piano N 14 par Clara Würtz in Intégrale Mozart» (BRILLANT) ; - Sonate pour violon et piano par Salvatore Accardo et Bruno Canino in Intégrale Mozart» (BRILLANT) ; - Quintette pour piano hautbois, clarinette cor et basson par ensemble néerlandais in Intégrale Mozart» (BRILLANT) ; - Lieder par Claron McFadden et Bart van Oort in Intégrale Mozart» (BRILLANT) ; - Air de concert par Francine van der Heyden in Intégrale Mozart» (BRILLANT) ; - Concerto N 3 pour cor par Dennis Brain & Herbert von Karajan in «The complete EMI recordings» (EMI Classics) ; - Danses par Taras Krysa & le Slovak Sinfonietta in Intégrale Mozart» (BRILLANT).