L évolution des relations énergétiques entre l Union Européenne et la Russie : accords sectoriels ou partenariat stratégique



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Transcription:

L évolution des relations énergétiques entre l Union Européenne et la Russie : accords sectoriels ou partenariat stratégique Monsieur le Président, Mesdames, Messieurs, Traiter ce thème constitue un défi majeur à l heure où divers irritants nous détournent de l objectif vital de promouvoir l intégration de notre continent. Rapprochement et intégration sur un arrière fond d énergie tels sont d ailleurs les buts principaux considérés par le Club de Nice dès sa création. Premier constat, il y a une déconnection marquée entre les aspects institutionnels et les aspects commerciaux, entre les relations au plan européen et national. D une part, on souligne l absence de valeurs communes, la sécurisation des relations énergétiques en termes de risques et menaces sans oublier d évoquer différents problèmes bilatéraux entre la Russie et certains Etats membres de l Union européenne. D autre part si des partenariats entre Etats membres et Fédération de Russie fonctionnent et sont souvent très efficaces, les relations au niveau européen sont ramenées dans de nombreux cas au plus petit commun dénominateur et donc susceptibles de se concentrer sur ce qui ne fonctionne pas plutôt que sur ce qui renforce la relation. Mais par ailleurs les relations commerciales hormis quelques anicroches récentes sont florissantes. La Russie est le troisième partenaire commercial de l Union européenne et l Union européenne est le premier partenaire de la Russie. Le commerce des biens s est accru de 4,5 % par an entre 2008 et 2012. L énergie représente 80 % des importations de L UE tandis que les produits manufacturés représentent 98 % des exportations de l UE vers la Russie. Si le commerce de matières premières en échange de produits finis peut créer des interdépendances, il ne mènera jamais à une intégration. Alors que l Union européenne a depuis le début des années 90 œuvré à une libéralisation des marchés énergétiques, les pays exportateurs d énergie, y compris la Russie, se sont eux orientés vers une renationalisation des ressources. Les sociétés nationales productrices d hydrocarbures détiennent aujourd hui de par le monde près de 90 % des réserves. Deux modèles se confrontent donc. 1

Le commerce du gaz naturel qui pendant des décennies avait sous tendu les bonnes relations entre l UE et la Russie et ce même durant les phases les plus critiques de la guerre froide s est progressivement mué au cours de la dernière décennie en un élément de méfiance et de polémique. Avant de m engager dans les complexités des partenariats et autres accords, je désirerais mettre l accent sur quelques observations qui devraient apporter plus d objectivité au débat. Au cours de ces dernières années, fut recommandée non seulement une diversification des approvisionnements énergétiques mais aussi de décroître la dépendance à l égard de la Russie en confondant souvent gaz et énergie ainsi que sécurité de sources et de transit. Qu en est il? Sources d énergie russes. Premièrement, entre 1990 et 2012, la part du charbon russe dans les importations totales de charbon de l UE s est multipliée par un facteur 6 et représente à présent 25 %. La part du pétrole a doublé (30 %). Les services d enrichissement d uranium s élèvent aujourd hui à 42 % de la consommation d uranium enrichi de l Union européenne. Autant d évolutions au sujet desquelles on n entend guère de récriminations. Le seul combustible qui n a pas connu d augmentation, mais au contraire une baisse sensible de sa part de marché est le gaz russe : sa part dans les importations étant passée au cours des dernières décennies de 80 à 30 %. Même en volume il n y a pas eu d augmentation notable. En 2012, le gaz russe représentait moins de 6 % de la consommation d énergie de l Union européenne. Contrairement au charbon, pétrole ou combustible nucléaire, ce qui rend le gaz russe préoccupant ce n est pas son volume ou sa part de marché mais bien une absence de possibilité d approvisionnements alternatifs et en parallèle des politiques de prix qui ne semblent pas toujours refléter strictement les fondamentaux du marché. Y aurait il un marché mondial du gaz naturel et donc une diversité dans les possibilités d approvisionnement de même qu un réseau parfaitement interconnecté, la part du gaz russe ne manquerait pas d augmenter à l instar du pétrole, du charbon ou du combustible nucléaire. Première conclusion paradoxale : une concurrence internationale renforcée profiterait très certainement au gaz russe de par sa proximité. Sur la base des 2

coûts (à ne pas confondre avec les prix), le gaz russe est potentiellement le plus compétitif. Indépendance énergétique Dans la foulée des nouvelles en provenance des Etats Unis en ce qui concerne leur indépendance énergétique possible, ce concept a commencé à émerger également dans certains Etats membres principalement d Europe centrale et des Etats baltes sauf que là on se réfère souvent à une indépendance à l égard de la Russie ce qui est tout différent. Mais dans un cadre plus global, les nouvelles sont encourageantes. Si l on en croit divers scenarios développés par d importantes sociétés énergétiques à l horizon 2030, ce continent de Lisbonne à Vladivostok pourrait techniquement être totalement indépendant. Le seul obstacle est donc politique. La Russie demeurera, qu on l aime ou que l on ne l aime pas, la source d approvisionnement la plus importante de l Union européenne. Et sur la base des décennies écoulées et de l environnement international, c est une nouvelle plutôt rassurante en termes de sécurité d approvisionnement. L Europe devra cependant également balayer devant sa porte : construction de terminaux GNL et de nouveaux gazoducs pour renforcer la diversité de choix et de transit, achèvement du marché intérieur, assurer la réversibilité des interconnections et obtenir une meilleure transparence du transit du gaz russe. Interdépendance Ce leitmotiv s est concentré au cours des dernières années sur le gaz naturel et présenté dans un cadre de politisation intense de part et d autre comme un phénomène négatif : «il n y a pas d autres alternatives». Je continue pour ma part à défendre le point de vue que cette interdépendance est asymétrique, les exportations de gaz naturel n étant pas, en termes de revenus, essentielles pour l économie russe. Sur 350 milliards de dollars d exportation d hydrocarbures, le gaz ne représente que 65 Milliards soit moins de 20 % toutes destinations confondues et environ 12 % pour le compte de l Union européenne. En fait, c est l Union européenne qui a rendu le gaz russe important. Peu se souviennent encore du temps (jusqu en 1991) ou l utilisation du gaz naturel pour la production d électricité était fortement déconseillée sinon interdite par une directive européenne. Ayant défini le paysage passons à présent à l autre partie de l équation. Les accords dans lesquels s insère la coopération énergétique 3

L accord de partenariat et de coopération (PCA) Cet accord conclu en 1994, entré en vigueur en 1997 (après une longue période de ratification par les Etats membres) pour une période de 10 ans est actuellement prolongé annuellement en vertu de son article 106. Dès 1999, la Russie avait demandé l élaboration d un nouvel accord d une part parce qu elle estimait que la référence à une économie en transition n était plus de mise et d autre part que l art 55 qui prévoyait une mise en conformité de la législation russe avec l acquis communautaire ne correspondait pas à un dialogue sur une base d égalité. Au sommet de Sankt Peterburg en 2003 fut mis en place le concept devant mener à long terme à quatre espaces communs (économique, de liberté sécurité et justice, de sécurité extérieure, de recherche et d éducation), mais comme pour le PCA, cette approche ne s est pas fondamentalement traduite par une stratégie apportant une réponse à l avenir à long terme de notre continent. Le début des négociations pour un nouvel accord fut décidé en 2006 mais les négociations furent d abord bloquées par un véto polonais et ensuite mises en question par la Lituanie pour se voir lancées lors du Sommet de Khanty Mansyisk in 2008. Un premier problème pour un tel accord est celui de la base juridique. Un accord d association du type proposition faite à l Ukraine (Art 217 TFUE), semble politiquement inacceptable par la Russie. L article 8 du TUE prévoit lui l établissement de relations spéciales avec des pays du voisinage mais la référence au fondement sur les valeurs de l UE ne correspond pas aux vues de la Fédération de Russie. L article 207 TFUE prévoit une coopération avec les pays tiers plus limitée au niveau économique, financier et technique mais ici encore la référence à l article 21 TUE et aux valeurs de l UE ne facilitent pas le débat. Deuxièmement, le cadre détaillé d un tel accord requiert outre l unanimité du Conseil, l approbation du Parlement Européen et la ratification par chacun des 28 Etats membres. Si l on se remémore que l accord précédent avait nécessité déjà trois ans pour une Union européenne non élargie, les délais ne seront certes pas plus courts pour une UE à 28. Troisièmement, la Russie a d ores et déjà indiqué que les négociations pourraient conduire à un accord régional entre l Union européenne et l Union 4

eurasiatique. Cette dernière devenant une réalité fin 2015 inclurait dans l état des discussions actuelles la Russie, Le Kazakhstan et la Biélorussie. Pour l UE un tel scénario ne semble possible que si ces pays sont tous membres de l OMC et ont signé des Partenariats avec l UE. Quatrièmement, après 12 rondes de négociation entre 2008 et 2010, une pose fut décidée. A ce jour, la nature et l objectif du nouvel accord demeurent ouverts. Pour la Russie il devrait s agir d un document court définissant le cadre et les grandes orientations des quatre espaces avec les réglementations détaillées à discuter ultérieurement. Et pour la partie économique et commerciale, les engagements envers l OMC sans plus et donc pas d engagements additionnels du type OMC +. Pour l UE, au contraire, l accord devrait être complet et intégrer des engagements légalement contraignants dans tous les domaines de coopération. Entretemps fut mis sur pied un partenariat pour la modernisation (P4M) afin de renforcer la coopération au sein des quatre espaces. Dans le domaine de l énergie, l accent est mis sur une société économe en carbone et l efficacité énergétique et porte soutien au dialogue énergétique. Mais ici encore on constate une différence dans l approche à l égard du P4M. La Russie considère que l effort doit porter sur la technologie, l innovation, une Europe sans visas et des initiatives publiques. L UE privilégie une approche holistique renforçant l Etat de droit, la société civile, la lutte contre la corruption, la libéralisation, la recherche et la science et les projets conjoints. Le Traité de la Charte de l énergie Développé à une époque où la Russie était en transition, cette charte de l avis de la Russie est déséquilibrée en mettant trop l accent sur les pays consommateurs. D une perspective russe, ce traité est considéré comme un traité soutenu par l Union européenne. La Russie s est retirée de la Charte en 2009 tout en restant active dans les travaux du secrétariat et dans les réunions de travail. En parallèle, la Russie a soumis une proposition pour une convention internationale dans le domaine de l énergie qu elle estime plus équilibrée. 5

Le 24 novembre 2010, une feuille de route pour la modernisation du traité de la Charte de l énergie fut adoptée et fait par ailleurs référence à la proposition russe. Le dialogue énergétique Je ne reviendrai pas ici sur la genèse du dialogue énergétique. Mais je rappellerai que son objectif tel que défini en 2003 était la création de relations institutionnelles qui ouvrirait la voie à la création «d une réelle Communauté de l Energie». Ce projet, d ailleurs soutenu au plus haut niveau tant par la Commission européenne que la Russie, aurait dû conduire à une alliance juridiquement contraignante, équitable et mutuellement bénéfique. Mais cette approche probablement trop ambitieuse céda le pas à une intégration des objectifs de coopération énergétique dans les quatre espaces. En 2005, une autre Communauté de l Energie a vu le jour ayant elle pour objectif de réunir au plan énergétique les pays du Sud Est de l Europe auxquels se sont joints l Ukraine et Moldova et qui prévoit la mise en œuvre de l acquis communautaire y compris le troisième paquet énergie. Cette évolution qui est vue de manière positive par l Union européenne et les Etats concernés fut et demeure une sérieuse source d irritation dans les relations entre l UE et la Russie. Les interruptions de transit du gaz russe par l Ukraine en 2006 et 2009 constituèrent un dur réveil tant pour l Union européenne que la Russie, même si à l occasion de ses disputes commerciales avec l Ukraine, la Russie n a jamais visé l Union européenne. Du côté européen on constata un appel vigoureux à la diversification des approvisionnements et du côté russe à une diversification tant des voies de transit que des régions destinataires et notamment l Asie. Au plan du transit entre la Russie et l UE, la capacité devrait être portée à plus de 350 bcm en 2030 par rapport à des exportations qui ne devraient pas dépasser sur la base des estimations actuelles 220 bcm : une contribution à la sécurité d approvisionnement par la diversification des voies de transit. Pour conclure, je désirerais verser dans l optimisme. En l absence d un cadre juridiquement contraignant, plusieurs accords et initiatives porteurs d avenir 6

ont cependant vu le jour ces dernières années, un mécanisme d alerte précoce pour l énergie dans les situations d urgence, la mise sur pied d un Conseil Consultatif UE Russie pour le gaz naturel et surtout une feuille de route pour la coopération énergétique entre la Russie et l Union européenne à l horizon 2050. L objectif stratégique réside dans la mise en place d ici à 2050 d un espace énergétique paneuropéen entre la Russie, l Union européenne et leur voisinage commun. Les hypothèses de base sont ambitieuses puisqu elles supposent que l UE et la Russie seront des alliés stratégiques avec un marché commun, le tout encadré par un rapprochement politique. L énergie a un rôle capital à jouer dans ce processus d intégration qui se doit d être tant social, qu économique, politique et sécuritaire. Cette feuille de route formule pour chaque secteur énergétique des plans d action, de recommandations et fixe des étapes d ici à 2050. Elle constitue une initiative importante dans la formulation d une stratégie commune. Mesdames, Messieurs, notre continent eurasiatique est encore à la recherche de son identité. L UE, la Russie et leur voisinage commun sont encore à la recherche de leur place dans le monde de demain. Et dans ce monde «Size does matter». Quelle que soit la forme d un futur accord, il faut penser long terme et donc stratégiquement afin de créer un continent intégré allant de Lisbonne à Vladivostok en mesure d aborder avec confiance et assurance les défis du XXI siècle. 7