Lettre d'information - Avril 2015



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Transcription:

Lettre d'information - Avril 2015 1/ L'USM rencontre la Ministre Le 9 mars 2015, le bureau de l'usm a rencontré Christiane TAUBIRA. Compte tenu de l'agenda contraint de la Ministre, les observations présentées ont porté sur 3 points : la souffrance au travail des magistrats, la réforme statutaire et la situation des parquets. La souffrance au travail des magistrats L'USM a indiqué à la Ministre que la réponse adressée à la publication du livre blanc «Souffrance au travail des magistrats. Etat des lieux, état d'alerte», par son courrier du 2 mars 2015, semblait insuffisante. Au-delà du plan d'action ministériel élaboré fin 2013, dans le cadre du groupe de travail sur la souffrance au travail mis en place à la demande de l'usm, et des recrutements supplémentaires annoncés récemment (la promotion ENM 2016 pourrait compter 360 auditeurs), beaucoup reste à faire. Symboliquement, l'usm pense qu'il est important que la Ministre signe officiellement le plan d'action ministériel, qui tarde à se mettre en œuvre concrètement et pour lequel un comité de suivi, où l'usm sera présente, sera prochainement réuni. Alors que la délibération de la conférence des premiers présidents, établissant des critères de priorité des contentieux, peine à être concrétisée individuellement par les chefs de juridictions, il paraît essentiel que la Ministre, prenant acte des conséquences des nombreuses vacances de postes et de l'impossibilité pour les magistrats de remplir l'ensemble des missions qui leur sont confiées, impulse officiellement une priorisation des contentieux au sein des juridictions. L'USM a par ailleurs demandé que le rapport intermédiaire du groupe de travail sur la charge de travail des magistrats et les référentiels quantitatifs, fonctions par fonctions, établis dans ce cadre, soient diffusés et discutés et que ce groupe de travail, qui n'a plus été réuni depuis 2013, reprenne ses travaux. Elle a insisté sur l'absolue nécessité de respecter les droits des magistrats, s'agissant des temps de repos, des récupérations, du droit (et obligation) de formation... Enfin, elle a réitéré ses demandes pour que soient communiqués les chiffres relatifs au nombre et à la durée des arrêts maladie au cours des dernières années, au nombre et au pourcentage de temps partiels et de congés divers. La Ministre s'est engagée à communiquer ces données et à réfléchir sur les enseignements qui peuvent en être tirés. La réforme statutaire Le projet de loi organique sur la réforme du statut des magistrats a fait l'objet d'une réelle concertation 1

avec la Chancellerie. L'USM a exprimé son approbation sur certaines dispositions du projet, notamment celles concernant la consécration du droit syndical pour les magistrats, le déblocage de l'accès à la hors-hiérarchie ou la création des postes statutaires de JLD. Elle a également précisé que d'autres dispositions lui paraissent insuffisantes. Ainsi, la protection statutaire doit pouvoir être accordée en cas de plaintes de justiciables, pendant toute la procédure devant le Conseil supérieur de la magistrature, sans être limitée à la procédure devant la commission d'admission des requêtes. La situation des parquets * L'indemnité d'intervention Même si l'indemnité d'intervention créée le 30 décembre 2014 ne concerne pas uniquement les magistrats du parquet, il a été fait état à la Ministre de la vexation et de l'incompréhension éprouvées face à la volonté de la Chancellerie de limiter cette indemnité à leurs seuls déplacements au cours d'une astreinte. La circulaire du 2 janvier 2015, dont il résultait que seul un déplacement pouvait être entendu comme un travail effectif, à l'exclusion de toute intervention téléphonique, pourtant très fréquente au cours d'une astreinte, a été particulièrement mal perçue par les magistrats. L'USM a exprimé sa totale désapprobation face à l'annonce du remplacement prochain du décret prévoyant cette indemnité d'intervention par une indemnité de déplacement. La Ministre a indiqué qu'elle avait toujours indiqué souhaiter réévaluer les indemnités d'astreintes en cas de déplacement et que la notion «d'intervention» retenue par le décret du 30 décembre 2014 était celle de la Direction de la Fonction publique. Ainsi, selon elle, le futur décret correspondrait directement à ses annonces et répondrait à l'impossibilité de payer ces indemnités d'intervention, faute de budget suffisant. Il est avéré que la Ministre avait annoncé, lors du congrès de l'usm à Bordeaux en octobre 2014, la création d'une indemnité de déplacement. Pour autant, l'usm a toujours demandé la création d'une indemnité d'intervention, venant compléter l'indemnité d'astreinte et ainsi reconnaître le travail accompli lors des astreintes. Et c'est bien une telle indemnité d'intervention qui a été créée fin 2014. La différence entre «intervention» et «déplacement» est claire et connue. Il est donc incompréhensible que la Fonction publique et la Chancellerie aient pu créer une indemnité d'intervention, supposée n'être qu'une indemnité de déplacement... Alors que les conditions d'exercice des magistrats du parquet, dont les temps de repos et de récupérations ne peuvent être respectés, sont particulièrement difficiles, cette marche arrière indemnitaire est déplorable. L'USM veillera à ce que l'indemnité d'intervention soit effectivement versée pour la durée de son existence. NOTE : un décret n 2015-352 du 27 mars 2015 a finalement restreint l'indemnisation des interventions aux seuls déplacements (voir ci-dessous, point n 8). 2

* L'estrade du parquet de la Cour d'appel de Fort de France Suite au courrier adressé le 5 mars, l'usm a rappelé à la Ministre sa ferme opposition à la décision de céder aux demandes des avocats de Fort-de France pour que le parquet soit désormais au niveau des parties. La Ministre a indiqué que cette décision avait été prise avec l'approbation des avocats, certes, mais également des magistrats sur place, ce que nous avons démenti. Cette décision semble avoir été prise sur la base erronée d'un consensus local. L'USM est persuadée que la Ministre ne pourra que revenir sur cette décision, contraire aux principes et vexatoire, sur laquelle ne manqueraient pas de s'appuyer les autres barreaux pour former des demandes similaires. La ministre s'est engagée à communiquer le courrier adressé au bâtonnier de Fort-de-France. L'USM espère que cette rencontre inaugurera une nouvelle ère, faite de rencontres plus régulières et d'un dialogue réel. 2/ L'USM rencontre le cabinet du Président de la République Le 10 mars 2015, l USM a rencontré Françoise TOME, conseillère Justice, et Thierry LATASTE, directeur de cabinet du Président de la République. L USM a évoqué les fortes attentes des magistrats suite à la diffusion du livre blanc "Souffrance au travail des magistrats. Etat des lieux, état d'alerte". L USM a notamment insisté sur l'impérieuse nécessité que les pouvoirs publics actent l'impossibilité pour les juridictions de faire face à l'ensemble de leurs missions et prennent l'initiative de déterminer les contentieux prioritaires, à décliner ensuite selon les juridictions. Une telle décision ne nous semble pas devoir peser sur la seule responsabilité des juridictions, mais être impulsée au niveau national. L USM a exprimé le vif regret que la réforme constitutionnelle du CSM et la réforme statutaire du parquet n'aboutissent pas. Il nous a été répondu que cette réforme, à laquelle s'est engagé le Président de la République, ainsi qu'il l'a rappelé lors de ses vœux, était toujours d actualité en ce qui concerne l avis conforme pour les magistrats du parquet et la compétence de la formation disciplinaire du parquet. Au-delà de ces indispensables réformes, l USM a déploré le peu de considération actuellement portée aux magistrats du parquet par le Ministère de la Justice. L USM a exprimé à la conseillère Justice et au directeur de cabinet sa totale réprobation quant au remplacement de l'indemnité d'intervention par une indemnité de déplacement et quant à la décision inepte de la Ministre, prise sans l'adhésion des magistrats locaux contrairement à ses affirmations, de placer le parquet de Fort de France au même niveau que les parties, niant son rôle de défenseur de l'intérêt général et de protecteur de la société. Il est des symboles forts, dont les répercussions, à plus ou moins long terme, risquent d'être particulièrement négatives sur l'ensemble du territoire de la République. Ce riche entretien a permis de sensibiliser le cabinet du Président de la République aux préoccupations 3

actuelles des magistrats. 3/ J21 : rencontre avec le cabinet de la garde des Sceaux Le 6 mars 2015, l'usm a rencontré Anne Bériat, directrice adjointe de cabinet et Paul Huber, conseiller services judiciaires et réforme statutaire, qui souhaitaient présenter les grandes lignes du projet de loi ordinaire «J21», avant consultation sur le texte. Il a été indiqué que le projet de loi était en cours de finalisation et que plusieurs dispositions demeuraient en cours de discussions interministérielles. Il devrait être présenté en Conseil des Ministres en mai et au Parlement avant la fin du premier semestre. Les «grandes lignes» sont celles qui résultaient déjà de la plaquette de présentation J21. Il s agirait ainsi de renforcer la politique d'accès au droit, notamment par une modification de la composition des CDAD et l'établissement par le Conseil national de l'aide juridique (devenant Conseil national de l'accès au droit et à la justice) d'un rapport annuel sur l'évolution des conditions locales d'accès à la justice et sur les politiques locales en matière de résolution amiable des litiges. Plusieurs dispositions tendraient à favoriser les modes alternatifs de règlement des litiges (médiation et convention de procédure participative). D'autres viseraient à «améliorer l'organisation judiciaire pour un traitement plus efficace du contentieux». Il est notamment prévu l'organisation des TGI par pôles et une fusion des TASS et des TCI au sein d'un pôle social. Sur ce point, l'usm a indiqué que si elle n'était pas opposée à l'organisation des juridictions en pôles, elle refuse toutefois que les chefs de ces pôles soient choisis par le chef de juridiction ; les magistrats coordonnateurs, chefs de pôles, doivent être nommés par décret et le magistrat coordonnateur des TI doit être un magistrat de l'instance. Les postes de premiers vice-présidents qui devraient être créés dans le cadre de la réforme statutaire ont vocation à remplir ces fonctions. Les précisions du cabinet n'ont pas permis de lever ces réserves. Par ailleurs, certaines dispositions viseraient à recentrer les juridictions sur leurs missions essentielles (sous réserve des discussions interministérielles en cours) ou à mettre en place «un droit commun» procédural dans le code de procédure civile en matière d'action de groupe. Enfin, en complément de la loi Macron, le projet de loi tendrait à réformer les juridictions commerciales et le statut des juges consulaires. Il est manifestement difficile de se positionner avec précision sur ce projet de texte qui n'est pas rédigé et dont la teneur n'a pas évoluée depuis novembre. Si les grandes lignes évoquées ne suscitent pas d'oppositions particulières, il est à craindre que la rédaction des textes ne corresponde pas totalement aux annonces... L'USM veillera en tout cas à ce que les grands principes du juge naturel, d indépendance de la Justice et d égal accès de tous à la justice soient préservés, dans l'intérêt des justiciables. 4

4/ Projet de loi sur le renseignement - la position de l'usm Le 26 mars 2015, le Bureau de l'usm a été entendu à l'assemblée nationale par le président de la commission des Lois, ainsi que plusieurs députés, sur le projet de loi sur le renseignement. Ce projet de loi est bien plus large que ne le laisse penser la communication gouvernementale qui met en exergue la nécessaire prévention du terrorisme. L'USM a fait valoir qu'elle n'était pas opposée à une évolution législative permettant de tenir compte des progrès technologiques en matière de dispositifs de renseignements. Cependant, l'absence de contrôle réel de la mise en œuvre de dispositifs particulièrement attentatoires aux libertés individuelles nous amène à porter les plus vives contestations face au texte proposé. En effet, la composition, le fonctionnement et l'étendue des missions de la Commission nationale de contrôle des techniques de renseignement (CNCTR) destinée à remplacer la CNCIS, ne lui permettront pas d'exercer un réel contrôle préalable à la mise en œuvre des dispositifs de renseignement. Son avis ne lie pas le Premier Ministre qui donne l'autorisation de mise en œuvre des dispositifs de renseignement. Plus encore, cet avis préalable n'est pas obligatoire en certaines hypothèses. De même, paraît purement formel le recours a posteriori instauré devant le Conseil d'etat, dont la compétence peut être discutée, le juge judiciaire ayant naturellement vocation à intervenir pour protéger les libertés individuelles. Par ailleurs, l'élargissement du champ du renseignement (manifestement destiné à contrer la jurisprudence considérée trop restrictive de la CNCIS), nous paraît injustifié et inquiétant. Quant aux dispositifs de renseignement, technologiquement très avancés, ils ne nous semblent pas devoir être indifféremment mis en œuvre. Ils ne doivent pas pouvoir être utilisés dans tous les cas. COMMUNIQUE de l'usm du 26 mars 2015 - Projet de loi sur le renseignement L USM a été entendue aujourd hui par le Président de la commission des Lois de l Assemblée nationale sur le projet de loi relatif au renseignement. L USM a fait part de sa très vive opposition aux dispositions proposées. Il paraît peu contestable que les progrès technologiques rendent nécessaire une évolution des dispositions légales applicables aux dispositifs de renseignement. Pour autant, cette évolution ne doit pas se traduire par une atteinte aux libertés individuelles sans que puisse s'exercer un réel contrôle. En l'occurrence, l USM déplore que les modalités de composition, le fonctionnement et les missions de la Commission nationale de contrôle des techniques de renseignement (CNCTR) ne permettent pas un contrôle réel préalable à la mise en œuvre des techniques de recueil de renseignement. L USM dénonce les pouvoirs exorbitants donnés au Premier ministre pour autoriser la mise en œuvre des dispositifs de renseignement. Elle regrette l'insuffisance de garantie de la procédure de contrôle a posteriori organisée devant le Conseil d'etat alors même que cette compétence n'est pas naturellement du ressort de cette juridiction, s'agissant de la protection de la vie privée. L USM attire l'attention des parlementaires sur le domaine d application excessivement large des techniques de renseignement et l absence de définition stricte de la notion «d intérêts publics». 5

L'USM s'inquiète d'une extension injustifiée de la sphère d intervention des services de renseignement, alliée à des moyens technologiques avancés et une insuffisance caractérisée de contrôle. L USM s'étonne que la procédure accélérée ait été engagée sur un projet d'une telle importance, préparé depuis des mois. Elle appelle le gouvernement et les parlementaires à s extraire de la légitime émotion suscitée par les attentats perpétrés en France en janvier dernier. La loi sur le renseignement est bien plus qu'une loi de prévention du terrorisme. Elle a vocation à s appliquer dans de nombreux domaines mettant en cause des libertés fondamentales et ne doit pas constituer un blanc-seing laissé au pouvoir exécutif. Les droits et libertés de l ensemble des citoyens sont en jeu. 5/ Dialogue de l'usm avec le Directeur des services judiciaires Les 6 et 10 mars 2015, l USM a rencontré Jean-François Beynel, Directeur des services judiciaires (DSJ). Ces réunions avaient été sollicitées pour aborder en premier lieu le livre blanc sur la souffrance au travail des magistrats. Le DSJ a proposé un cycle de rencontres sur ce sujet pour définir une méthode de travail et aboutir à des actions concrètes. Il a exposé certaines améliorations en cours sur le plan des RH : déplacements de la DSJ dans les juridictions en mai et juin, possibilité de consultation par chaque magistrat de son dossier personnel numérisé... Dans le cadre de l évaluation de la qualité de vie au travail, l USM a sollicité les chiffres des arrêts maladie et ceux des départs en retraite pour les années à venir. Sur les arrêts maladie, il a été répondu que seuls les arrêts supérieurs à 3 mois étaient connus de la DSJ, le reste des absences étant communiqué toutes causes confondues. L USM a exprimé son étonnement sur cette information alors que, dans le cadre des dialogues de gestion, la chancellerie est informée par les chefs de juridiction du nombre de jours de congés de maladie ordinaire. Quoi qu'il en soit, l USM a demandé la création d un outil statistique plus fin qui permettrait de connaître le nombre de jours d arrêt pour maladie (évidemment sans les motifs de ces arrêts) et leurs évolutions dans chaque cour d appel. Sur les départs en retraite, les prévisions jusqu en 2020 sont les suivantes : 293 départs en retraite en 2015, 295 en 2016, 299 en 2017. Il a été indiqué que le solde entre les départs et les arrivées serait positif en 2015 (+ 60 à 80), pour la première fois depuis 2008, et qu il devrait le rester, selon les projections réalisées, dans les années qui viennent. Cette perspective est encourageante mais ne permet pas de combler à court terme les nombreuses vacances de postes. Il est avéré que les recrutements ont augmenté depuis 2012, ce qui a conduit l USM à poser la question des moyens de l ENM pour faire face à ces nouvelles charges, sans sacrifier la qualité de la formation initiale et de la formation continue. L organisation et le budget de l ENM en vue d accueillir la promotion 2016 seront débattus lors du prochain conseil d administration, le 23 mars, auquel assistera l USM. Il a d ores et déjà été indiqué que 20 recrutements étaient prévus sur 2 ans, ainsi qu'un abondement d un million d'euros en 2015 et de 2,5 millions en 2016. L USM a bien entendu souhaité évoquer les travaux en cours à la cour d appel de Fort-de-France et la décision unilatérale de la ministre de faire supprimer l estrade pour le parquet. Elle a clairement fait 6

valoir que cette décision n était pas acceptable pour les magistrats du parquet, rappelant le courrier envoyé à la ministre le 5 mars 2015. Enfin, l USM a souhaité savoir pourquoi le comité de suivi des évaluations, créé par la réforme de 2011, n avait jamais été réuni. L USM a toujours participé à la réflexion sur l évaluation. Il est clair que la réforme de 2011 est très perfectible mais il semble indispensable d en faire un bilan avant de réfléchir à d'éventuelles nouvelles modifications. Le DSJ s est engagé à réunir ce comité de suivi avant la fin du semestre. L USM a également déploré le fait que la circulaire sur les primes modulables ne soit pas appliquée par tous les chefs de cour, les tableaux anonymisés des taux de prime n étant pas souvent diffusés. Il a été sollicité que les critères d attribution, transmis par les premiers présidents et procureurs généraux aux présidents et procureurs, soient communiqués à tous les magistrats. L'USM a également rappelé sa revendication très ancienne d intégration des primes dans le traitement. Ces réunions régulières avec le DSJ sont indispensables dans le cadre d un dialogue social réel, pour obtenir des réponses sur les préoccupations d ordre général mais aussi pour trouver des solutions à des situations particulières, notamment de souffrance au travail. Sur ce dernier point, l USM a accepté la proposition d un cycle de rencontres et sera particulièrement vigilante sur les suites données à son livre blanc. 6/ L'USM aux côtés des auditeurs Comme chaque année, l'usm a tenu à être présente fin mars à l'enm afin d'apporter son soutien aux auditeurs de la promotion 2013 réunis pour cette période particulière de la répartition des postes. Elle a ainsi distribué un Flash «Jeunes magistrats», petit guide pratique pour faciliter la prise de fonction. Soucieuse de permettre aux auditeurs de faire un choix en disposant du plus d'informations possibles, l'usm a mis à leur disposition des fiches relatives aux juridictions proposées dans la liste des postes. En outre, grâce à ses adhérents, l'usm a pu mettre en relation les auditeurs avec des magistrats exerçant au sein de ces juridictions. L'USM tient d'ailleurs à remercier tous les collègues qui ont ainsi pu apporter des réponses pratiques aux auditeurs. Par ailleurs, l'usm a été alertée sur le nombre de redoublements et d'exclusions, et surtout sur les conditions dans lesquelles ces décisions ont été prises. Elle a donc décidé d'écrire à la garde des Sceaux et au président du Conseil d'administration de l École nationale de la magistrature afin de réclamer une plus grande transparence au sujet des décisions d'inaptitude et de redoublement, ainsi que l'instauration d'un recours gracieux concernant les décisions prises par le jury. Le peu de place laissé aux déclarations d aptitude formulées par le directeur de l École et les magistrats, qui ont évalué les auditeurs pendant leur stage, traduit une méconnaissance de la réforme de l'évaluation des auditeurs de justice, opérée en 2008, et du rôle des coordonnateurs régionaux de formation. L'USM a également exprimé à la ministre son regret lié à l'absence de «volant de postes» dans la liste proposée aux auditeurs. Ce qui est d'autant plus préoccupant que plus d'une dizaine de ces postes se trouve outre-mer. L'USM a d'ailleurs rappelé sa demande d'une meilleure prise en charge financière de l'installation des 7

auditeurs, particulièrement outre-mer. 7/ Observations de l'usm sur le volet relatif à la justice prud homale et aux tribunaux de commerce du projet de loi pour la croissance et l'activité L USM a été entendue au Sénat par le sénateur François PILLET, rapporteur du projet de loi pour la croissance et l activité sur le volet relatif à la justice prud homale et aux tribunaux de commerce. Le projet tente de remédier aux dysfonctionnements bien connus de la justice prud homale notamment en rapprochant le statut des conseillers prud hommes de celui des magistrats professionnels et en modifiant le fonctionnement des conseils de prud hommes. Après son adoption à l Assemblée nationale le projet de loi prévoit de soumettre les conseillers prud hommes aux mêmes obligations déontologiques que les magistrats professionnels, à l exception du devoir de réserve, avec la création d une commission nationale de discipline et des sanctions disciplinaires étendues. Une obligation de formation est désormais consacrée pour la formation initiale et pour la formation continue. Le bureau de conciliation devient le bureau de conciliation et d orientation et sa mission de conciliation est renforcée. L USM a insisté pour que soit organisée, dès ce stade de la procédure, la communication entre les parties de leurs pièces et arguments. Ce bureau de conciliation et d'orientation a compétence aussi pour renvoyer une affaire le cas échéant devant une formation restreinte composée d'un conseiller employeur et d'un conseiller salarié. Le texte réserve désormais aux seuls conseillers prud hommes la décision de renvoi immédiat vers la formation présidée par le juge professionnel en cas de non-conciliation. L USM a exprimé son opposition à voir confier la mise en état des affaires au bureau de conciliation et d orientation. Pour une plus grande efficacité, elle préconise qu elle soit confiée au greffier, sous le contrôle du président de section. Le juge chargé du départage sera désormais aux termes de ce projet de loi un juge du tribunal de grande instance, désigné par le président du tribunal de grande instance notamment en fonction de ses aptitudes et connaissances particulières. L ensemble des dispositions va globalement dans le bon sens. Même si l hypothèse du renvoi de droit devant la formation présidée par le juge professionnel à la demande de toutes les parties ne figure plus dans le projet actuel, des charges supplémentaires pour les magistrats en découlent. L USM a, une fois de plus, attiré l attention du législateur sur l incapacité absolue du corps à supporter sans renforts préalables une charge nouvelle compte tenu du nombre actuel de postes vacants. A propos des tribunaux de commerce il est prévu d en spécialiser certains en cas de litiges complexes ou compte tenu des enjeux économiques en cause. L USM est favorable à ce projet de réforme. 8/ Indemnité d'intervention : consternante nouvelle 8

Le 6 mars 2015, sur interpellation de l'usm, la Direction des Services Judiciaires a indiqué qu'un nouveau décret allait être publié pour remplacer «l'indemnité d'intervention» créée fin décembre 2014 par une «indemnité de déplacement». (NOTE : Le décret a été publié, cf. décret n 2015-352 du 27 mars 2015 modifiant le décret n 2003-1284 du 26 décembre 2003 relatif au régime indemnitaire de certains magistrats de l'ordre judiciaire). Le constat est donc clair : reconnaissant que l'indemnité d'intervention devait être versée en cas déplacement ou non, et en l'absence de budgets suffisants (circonstance forcément connue en décembre 2014), la Chancellerie a fait le choix de retirer ce qu'elle avait accordé il y a moins de 3 mois... L'USM a contesté avec force cette pratique, compte tenu de l'attente des magistrats du parquet et du symbole désastreux d'une telle marche arrière. Ce faisant, la Chancellerie reconnaît l'exactitude de l'interprétation, selon laquelle une intervention, même téléphonique, au cours d'une astreinte, justifie le versement de l'indemnité. Il est à espérer que la Chancellerie revienne à un plus juste et à plus respectueux traitement des droits et des charges des magistrats du parquet. L'USM fera tout pour que l'indemnité d'intervention soit versée pour la période pendant laquelle elle aura existé. UNION SYNDICALE DES MAGISTRATS Directrice de publication : Virginie DUVAL / Rédactrice en chef : Véronique LEGER 18 rue de la Grange Batelière 75009 PARIS - Tél. : 01 43 54 21 26 - Fax : 01 43 29 96 20 E-mail : contact @union-syndicale-magistrats.org - Site : www.union-syndicale-magistrats.org 9