Réflexion-Débats. Le génocide des arméniens. Spécificité et difficulté d un enseignement.



Documents pareils
«Les Arabes sont musulmans, les musulmans sont arabes.»

LE 24 MAI 2015 Centenaire de la Reconnaissance du Génocide des Arméniens. Le programme génocidaire des Jeunes-Turcs

UN CRIME IMPRESCRIPTIBLE OUBLIÉ

Une brève histoire de la question arménienne

LES NON-ALIGNÉS D HIER À AUJOURD HUI

Document Pourquoi ce discours de 1995 marque-t-il un moment important?

Le 24 avril 1915, à Constantinople, capitale de l Empire ottoman, débutait le

Chap. 5 : la 2 nd guerre mondiale : une guerre d anéantissement Pourquoi parle-t-on de la 2 nd guerre mondiale comme d une guerre d anéantissement

S engager pour la survie de l enfant: Une promesse renouvelée

Des problèmes de protection ont continué à se produire le long de la frontière de la Turquie avec la Grèce et la Bulgarie.

NATIONS UNIES. Déclaration des droits des personnes appartenant à des minorités nationales ou ethniques, religieuses et linguistiques

CORRIGE DU LIVRET THEMATIQUE NIVEAU 3 ème

utilisés en faveur d un relativisme culturel, allant à l encontre de l universalité des droits de l homme,

Génocide des Arméniens

CORRECTION BREVET PONDICHERY 2014

D A N S L E S PAY S F R A N C O P H O N E S

Le monde a besoin de paix en Palestine

Comité du développement et de la propriété intellectuelle (CDIP)

POLITIQUE D ÉGALITÉ ENTRE LES FEMMES ET LES HOMMES

Bénéficiaires du droit d asile dans l UE, par nationalités, Irak 5% Afghanistan

TURQUIE SITUATION POLITIQUE ET ECONOMIQUE

41/128 Déclaration sur le droit au développement

Déclaration sur le droit au développement

Les Principes fondamentaux

Une religion, deux Eglises

Accord Cosmopolite sur la Guerre et la Paix

Histoire Leçon 15 La marche vers la guerre ( 1938 / 1939) Dates : 1936 : remilitarisation de la Rhénanie 1938 : Anschluss de l Autriche

MASTER EN SCIENCES SOCIALES DES RELIGIONS

27 janvier 2015 Journée de la mémoire des génocides et de la prévention des crimes contre l Humanité

Une religion, deux Eglises

Conférence mondiale sur les déterminants sociaux de la santé. Déclaration politique de Rio sur les déterminants sociaux de la santé

JOURNAL OFFICIEL. de la République Démocratique du Congo CABINET DU PRESIDENT DE LA REPUBLIQUE. Journal Officiel - Numéro Spécial - 09 mai 2009

COMPRENDRE CE QU EST L OTAN

Qu est-ce que l OSCE?

Question 2 Le Proche et le Moyen-Orient, un foyer de conflits depuis la fin de la Première Guerre mondiale

Dossier VI. Le XX ème siècle et le monde actuel (1 ère partie) Questions appelant des réponses concises

LES MASSACRES D'ARMÉNIE. Chambre des députés. Séance du 3 novembre

El Tres de Mayo, GOYA

Ce Concours est ouvert à toute personne physique de plus de 13 (treize) ans résidant en France (ciaprès le «Participant»).

Jean-Claude Guillebaud, Écoutons la vérité de l'autre

NOTE DE SYNTHÈSE DU REM (INFORM)

COMPRENDRE LES ENJEUX GÉOPOLITIQUES DES CHRÉTIENS D ORIENT

CORRECTION BREVET BLANC 2015 PREMIER PARTIE/HISTOIRE

Le christianisme arabe, depuis le XIXe siècle,

Quel est le temps de travail des enseignants?

THEME 2 : MONDE ANTIQUE

Thème 3 : La Seconde Guerre mondiale, une guerre d anéantissement ( )

Où sont les Hommes sur la Terre

Éléments des crimes *,**

Première partie IMMUNITÉ ET JUSTICE : LES CONTRADICTIONS Titre 1 Contradiction des fondements et divergence des sources...

Le Proche et le Moyen-Orient, un foyer de conflits depuis la fin de la Première Guerre Mondiale

PROGRAMMES DE BOURSES ET DE FORMATION DU HCDH

Pourquoi et comment le monde se divise-t-il après 1945? I/DEUX BLOCS FACE A FACE ( p90/91)

Les relations de l Union européenne avec ses voisins

Charte d'hébergement des sites Web sur le serveur de la Mission TICE de l'académie de Besançon

23. La situation au Moyen-Orient

REPUBLIQUE ET FAIT RELIGIEUX DEPUIS 1880

HISTOIRE / FRANCAIS CYCLE 3 TITRE : L UNION FAIT LA FORCE (1915), LA FRANCE ET SES ALLIÉS

4./4/14 DE DROIT AÉRIEN. (Montréal, 26 CONVENTION SURVENANT. (12 pages) DCTC_WP_DCTC_

I) La politique nazie d extermination

Communiqué de presse. Les Voies de la Liberté. Exposition temporaire 2015 Mémorial National de la Prison de Montluc

L antisémitisme et les premières actions contre les juifs

27 Janvier : Journée internationale de commémoration en mémoire des victimes de l'holocauste

LA DEFENSE DEVANT LES JURIDICTIONS PENALES INTERNATIONALES

Le Kosovo, nouvel Etat? Oppositions juridiques entre Etats à propos de l avis de la Cour internationale de justice (CIJ) du 21 juillet 2010

La IIe Guerre mondiale, une guerre d anéantissement et génocides Introduction : «radicalisation de la violence» une guerre d anéantissement

Règlement - Jeu «Rencontrez les TALE OF VOICES et écoutez avec eux leur nouvel album en avant-première»

Gouverner en Islam entre le xe siècle et le xve siècle (Iraq jusqu'en 1258, Syrie, Hijaz, Yémen, Égypte, Maghreb et al-andalus).

La Question kurde en Turquie : UNE QUESTION DE DÉMOCRATIE ET D'ÉGALITÉ

L Organisation mondiale du commerce...

La Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones

De l Etat français à la IVème République ( )

Le Moyen-Orient et le pétrole. pp32-39

Division Espace et Programmes Interarméeses. État tat-major des armées

Le coût du rachat de trimestres pour carrière à l étranger multiplié par 4 au plus tard le 1 er janvier 2011

PACTE DE NON-AGRESSION ET DE DEFENSE COMMUNE DE L UNION AFRICAINE

22 & 29/ JUIFS & MUSULMANS. série documentaire

Le Moyen-Orient depuis `1990: carte `1

Il ne faut pas trop s attarder à parler de l influence de la mondialisation

REVENDICATIONS PARTICULIÈRES : NÉGOCIER L ACQUITTEMENT DE LA DETTE NATIONALE DU CANADA

Les Français et la liberté de la presse. Ifop pour Metronews et Reporters sans frontières

Déclaration universelle des droits de l'homme

DÉCLARATION UNIVERSELLE DES DROITS DE L'HOMME ONU - 10 Décembre Texte intégral

Impôt de solidarité sur la fortune La holding animatrice malmène le conseil

A/RES/55/25 II. Protection des victimes de la traite des personnes

AZ A^kgZi Yj 8^idnZc

TEXTS ADOPTED Provisional edition

Analyse de la carte :

J ai droit, tu as droit, il/elle a droit

Le vol à l étalage 1

10 Février Moyen-Orient: les alliances en temps de troubles

les services de renseignement évolution et actions et de sécurité en syrie roger tebib

Leçon n 11 : «Géopolitique du monde actuel»

LES DROITS CULTURELS. Déclaration de Fribourg

Shahsavan (au service du Shah)

Responsabilité civile et pénale de l instituteur

Ce que les parents devraient savoir

Les 7 Principes fondamentaux

Info-assurance Séance d information de l IASB du 19 mars 2015

Transcription:

Réflexion-Débats Le génocide des arméniens. Spécificité et difficulté d un enseignement. Par Sophie Ferhadjian Présentation du génocide des Arméniens, 1915 L Arménie est un territoire situé entre l Euphrate et le Caucase. C est le foyer d un peuple parlant une langue indo-européenne et uni par une religion issue du christianisme mais autocéphale depuis le VI e siècle. Entre le XI e siècle et 1375 se succèdent, soit sur le sol arménien, soit en Cilicie, des structures étatiques indépendantes. Il n en existera plus jusqu en 1918, date de la naissance, lors du traité de Sèvres, de l Etat d Arménie, suite au génocide de 1915. C est cet événement «structurant» qui fait l objet ici d une brève présentation dont l objectif n est pas l exhaustivité historique mais plutôt une analyse de sa spécificité et des difficultés que présente son enseignement. I/ Les phases du Génocide. Les massacres du «sultan rouge», les prémices du génocide Le peuple arménien au XIX e siècle est partagé entre trois «empires», les Empires ottoman, russe et perse. La majorité réside dans l Empire ottoman. Tout comme pour de nombreux peuples, le XIX e siècle est le siècle du réveil nationaliste et la question arménienne s inscrit naturellement dans la question d Orient. Les révoltes des populations bulgares influencent fortement les mouvements nationalistes dans leur quête d égalité et de liberté. L idée d indépendance n est aucunement avancée dans les revendications. Le règne du sultan Abdul-Hamid annonce les prémices du génocide. Affaibli par la défaite face aux Russes et le traité de Berlin de 1878 qui l oblige à engager des réformes dans les provinces arméniennes (article 61), le sultanat se lance dans les années 1894-1896 dans l organisation systématique et planifiée de l élimination des Arméniens dans l Empire ottoman, élimination confiée à des régiments kurdes afin de calmer leur révolte. Entre 200 000 et 300 000 Arméniens périssent dans ces massacres sans compter les conversions forcées à l Islam et les nombreux départs vers l Egypte, les Etats-Unis et les Balkans. La seconde étape : la révolution «jeune-turque» de 1908 et les massacres d avril 1909 La chute de «l homme malade de l Europe» se produit en 1908 avec la révolution conduite par le «Comité Union et Progrès» ou «Ittihad». Cette révolution «jeune-turque» promet dans un premier temps de nombreuses réformes libérales et émancipatrices fondées sur le principe de laïcité. Les Arméniens sont donc confiants et reçoivent même, dans un premier temps, un statut théorique de citoyen à part entière ce qui n est pas sans provoquer 1

d inquiétude parmi les notables turcs traditionalistes. En réalité, ce gouvernement mène une politique d assimilation forcée. La seconde étape du processus génocidaire a lieu en avril 1909 dans la province de Cilicie. Environ 30 000 Arméniens sont massacrés. Bien que responsable de ce massacre, l Ittihad montre du doigt le sultan et en profite pour proclamer en 1913, une dictature militaire dirigée par Djemal, Enver et Talaat. 1915-1916 : Le génocide des Arméniens L entrée en guerre de la Turquie en 1914 aux côtés des Puissances centrales annonce l étape finale du génocide des Arméniens puisqu elle fournit le cadre idéal pour l accomplissement de leur extermination totale. En effet, les Arméniens étaient partagés géographiquement entre deux camps. Quelque 1,5 million vivait en Russie tandis que l Empire ottoman en abritait environ deux millions. Le gouvernement «jeune-turc» crée «l Organisation Spéciale» chargée de la mise en application de la politique d extermination. C est celle-ci qui est chargée de convaincre le parti nationaliste «Tachnag» de provoquer le soulèvement des Arméniens en faveur de la Russie. N y parvenant pas, le gouvernement turc se décide alors à présenter les Arméniens comme «des ennemis de l intérieur». Ils deviennent le bouc émissaire et le prétexte de leur extermination est tout trouvé. Dès janvier 1915, les soldats arméniens ottomans sont désarmés. Des massacres sporadiques sont menés. Les belligérants étant occupés dans diverses opérations militaires, les conditions sont donc réunies pour mettre en œuvre le plan de déportation et d extermination de la population arménienne de l Empire ottoman. Ce plan de déportation se veut «provisoire» afin d éloigner «des populations civiles des zones de combat». Le samedi 24 avril, les élites arméniennes de Constantinople sont arrêtées. En un mois, plus de mille intellectuels sont déportés en Anatolie et massacrés en route. Les Arméniens se retrouvent sans aucune tête pensante. C est le même processus qui est suivi dans toutes les provinces de l Empire accueillant des populations arméniennes. Les notables sont arrêtés puis déportés et fusillés. L ordre de déportation est ensuite donné pour l ensemble de la population. Les hommes valides entre 20 et 40 ans sont mis à l écart et fusillés. Le reste est regroupé dans des convois dont les trajets, préalablement définis, ont pour destination la Syrie avec Alep comme plaque tournante. A la fin du mois de Juillet 1915, c est-à-dire trois mois après les premiers massacres, les Arméniens de l Anatolie orientale ont quasiment disparu. Ils étaient plus d un million. La même démarche est appliquée à partir de l hiver 1915-1916, aux provinces de l Ouest et notamment la Cilicie bien que le prétexte de la proximité du front ne puisse plus être évoqué. La Syrie reste la destination finale. Les survivants sont envoyés dans les déserts syriens, lieux de massacre des derniers survivants à l image du charnier de Deir ez Zor. Le bilan humain de ce génocide varie entre 1,5 million et 800 000, chiffre reconnu par le ministère de l Intérieur turc en 1919. Le parachèvement du génocide : 1920-1922, la liquidation des derniers Arméniens par Mustafa Kemal La défaite ottomane à l issue de la Première Guerre Mondiale entraîne la fin du gouvernement «jeune-turc». Le traité de Sèvres de 1920 entérine la naissance d une 2

République d Arménie, mais il n est pas signé par la Turquie nouvellement dirigée par le général Mustafa Kemal dont l objectif est de fonder un Etat national. Reprenant donc le flambeau nationaliste turc et jouant la carte du péril bolchevique, l armée kémaliste pénètre en septembre 1920 dans la République d Arménie et se lance dans le massacre de toute la population arménienne des zones attribuées à cet état. La chute de la Cilicie, foyer arménien placé sous protectorat français, l incendie de Smyrne, les succès militaires turcs et la conférence de Lausanne de 1923 annulant les accords de Sèvres constituent la dernière étape qui entérine l élimination systématique de la population arménienne. II/ Spécificité du Génocide des Arméniens Le nationalisme turc ou panturquisme : Le facteur territorial lié à la question religieuse C est lorsque l on inscrit le génocide des Arméniens dans la question nationaliste turque que l on comprend sa spécificité. Les Arméniens de l Empire ottoman constituent une «gène» dans la politique expansionniste turque liée à l idéal panturc. En effet, le foyer du peuple turc est le «Touran», l Asie centrale. Au XI e siècle, les Turcs se rendent maître de l Asie Mineure puis de Constantinople et des Balkans au XIV e siècle. La perte de ces provinces occidentales, au XIX e siècle, suite au règlement de la question d Orient, pousse inexorablement le peuple turc à se tourner à nouveau vers son «berceau d origine». Dans ce retour aux sources, les Arméniens constituent le seul obstacle. La doctrine du panturquisme ou pantouranisme peut alors être librement exprimée. Son idée centrale est fondée sur la supériorité de la race turque et la nécessité de réaliser l union de tous les peuples turcs du Bosphore à la Chine. Les autres peuples doivent être, soit détachés de cette entité, ce qui est le cas des populations slaves et arabes de l Empire ottoman, soit expulsés, comme le sont les Grecs, ou exterminés comme les Arméniens puisque ces derniers sont situés aux marges orientales de l Empire et empêchent l union des Turcs ottomans avec les Tatares d Azerbaïdjan, les Ouzbeks, Kazakhs et autres peuples turcs. Ils représentent une menace vitale puisque l Anatolie orientale constitue le «cœur de la patrie turque» et le point de départ de la conquête de la Turquie d Asie. Il ne faut cependant pas considérer le fait nationaliste comme la cause unique du génocide des Arméniens. Les circonstances sont également fondamentales. L originalité du génocide des Arméniens tient au fait que c est leur inclusion dans la société et la vie politique ottomane qui est source du danger. Lorsque les Arméniens s adressent aux puissances étrangères afin qu elles interviennent auprès du sultan pour obtenir des réformes, ils rompent le contrat de protection lié à leur «dhimmitude», contrat qui leur garantie une autonomie religieuse et communautaire en contrepartie de contraintes économiques et sociales de plus en plus intolérables. Ils cessent d être «la nation fidèle», celle qui accepte son statut contrairement aux Grecs, pour devenir des «ingrats», des révolutionnaires et des terroristes. De plus, ils restent les infidèles auprès de la population. Il est donc aisé d invoquer, lorsque la situation l exige, la question religieuse. Il est vrai que l entrée en guerre de l Empire ottoman est proclamée au nom de la guerre sainte. Si cet argument du «djihad» est repris à certains moments du processus génocidaire, il n en constitue cependant pas le fondement essentiel. Certes d autres populations chrétiennes, les Grecs, sont expulsées et victimes de massacres, mais cette politique se situe au tournant kémaliste de l histoire turque. L extermination des Arméniens 3

ne s inscrit donc pas dans une politique d extermination de minorités chrétiennes de l Empire ottoman. La religion est donc utilisée comme un vecteur de diffusion de la haine et à ce titre facilite la mise en œuvre des massacres d autant que les Jeunes Turcs craignent qu en cas de défaite, les Arméniens n obtiennent des Alliés un statut d autonomie voire d indépendance. C est cette spécificité qui contribue à conférer au génocide des Arméniens son statut de premier crime élaboré par un Etat de type totalitaire et de «schéma reproductible» Le négationnisme turc La seconde spécificité du génocide des Arméniens tient à sa négation, négation qui n est pas l œuvre d individus mais d un Etat qui y met tout son poids diplomatique et géopolitique. La négation accompagne certes bien souvent un génocide, mais elle ne prend jamais sa source à la conception même du processus génocidaire. Le cas arménien constitue à cet égard une exception puisque, avant même le passage à l acte, les futures victimes sont mises en accusation. Les procès de 1919 jugeant certains responsables contiennent également les fondements de ce négationnisme. Il n est donc pas difficile pour la jeune Turquie kémaliste de reprendre à son compte cette idéologie transformant les bourreaux en victimes et les victimes en bourreaux. Elle évite ainsi les potentielles revendications de dédommagements financiers mais surtout territoriaux. Sans entrer dans le détail de la politique de négation menée par l Etat turc, il faut signaler les pressions permanentes sur les gouvernements afin d éviter l emploi de l expression «génocide arménien» ou la reconnaissance du génocide des Arméniens, reconnaissance indispensable au travail de mémoire et de deuil. Les menaces de boycott économique sont nombreuses comme le montrent celles qui sont exercées sur le gouvernement français lors du vote par l Assemblée nationale de la reconnaissance du génocide. C est cette politique de négation qui pousse donc les communautés arméniennes à réclamer cette reconnaissance auprès des organisations internationales ou des différentes nations les ayant accueillies en diaspora. III/ La difficulté de son enseignement Le dernier point à évoquer brièvement, car il mérite à lui seul une analyse plus détaillée, concerne la difficulté à laquelle l enseignant est confronté lorsqu il décide de traiter ce thème. En effet, l enseignement du génocide des Arméniens connaît quelques difficultés à sortir de la confidentialité dans laquelle il est cantonné. L enseignant se heurte donc à plusieurs obstacles. Le premier est celui de la pauvreté voire de l absence de documentation sur ce sujet. Comment aborder le génocide avec une ou des images? Le second, en relation avec le premier, tient au contenu «textuel» des manuels scolaires. Il devient difficile d aborder la notion de génocide lorsque le mot lui-même n est pas employé ou lorsque la légende d un document va même jusqu à préciser qu il ne s agit que d une tentative de génocide. Enfin la dernière difficulté réside dans la mise en œuvre de cet enseignement. Ce dernier ne peut se faire sans situer et expliquer le génocide dans l histoire des Arméniens, mais aussi dans celle de la montée des nationalismes au XIX e siècle. L analyse de la 4

Question d Orient et de la Question arménienne dans laquelle cette dernière s inscrit, est essentielle. Le traitement de ce sujet nécessite donc un profond travail de documentation et demande également d y consacrer un temps certain afin que le génocide des Arméniens soit traité dans sa spécificité et non relégué au sombre bilan humain de la Première Guerre Mondiale. 5