1.PREAMBULE Le traitement phytosanitaire engendre des risques certes pour les agents, mais également pour le public et la végétation en place. Il peut alors être nécessaire de réfléchir à la mise en oeuvre de techniques d'entretien des espaces verts limitant l'utilisation de tels produits. Certaines collectivités ont ainsi réussi à mettre en œuvre une politique de réduction de l'utilisation des produits phytosanitaires en privilégiant le désherbage manuel, le désherbage thermique, le développement naturel De plus, des aides financières sont maintenant accordées aux collectivités qui réfléchissent à la mise en place d'une politique de réduction de l'utilisation des produits phytosanitaires. 2.INTRODUCTION Réalisée fréquemment dans les collectivités territoriales pour le soin des cultures et la protection contre les parasites, le traitement phytosanitaire n'en demeure pas moins une activité à risque pour les agents avec l'utilisation de produits chimiques présentant une dangerosité élevée. Les produits phytosanitaires, aussi appelés produits phytopharmaceutiques, antiparasitaires sont utilisés pour la protection des cultures. Ils sont destinés à protéger les végétaux contre les organismes nuisibles, exercer une action sur les processus vitaux des végétaux (régulateurs de croissance ), assurer la conservation des végétaux ou encore, détruire les végétaux indésirables. On distingue 4 familles principales de produits phytosanitaires : - Les Insecticides - Les Fongicides - Les Désherbants - Les Biocides 3.LES RISQUES PROFESSIONNELS Les produits phytosanitaires sont efficaces pour la protection des cultures en détruisant notamment les organismes nuisibles, présents à proximité des végétaux à traiter. Néanmoins, il s'avère que les substances actives présentes dans ces produits, et qui assurent une telle efficacité, peuvent également être néfastes pour l'agent applicateur. 1
Les Risques engendrés : Risque de brûlure ou d'irritation par contact direct avec la peau ou projection dans les yeux. Risque d'irritation des voies respiratoires par inhalation des vapeurs émises par le produit. Risque d'intoxication aiguë par ingestion ou inhalation du produit (troubles nerveux, cardiovasculaires, musculaires ) Risques d'effets cancérigènes, mutagènes (effets génétiques) voire même reprotoxiques (toxiques pour la reproduction). Risque d'incendie. Le mode de pénétration dans l'organisme Les risques engendrés par les produits phytosanitaires sont la conséquence de leur pénétration dans l'organisme humain qui peut avoir lieu de trois façons : Voie cutanée : contact direct avec la peau engendrant des brûlures et irritations Voie orale ou digestive : ingestion généralement accidentelle Voie respiratoire : inhalation de particules, brouillards ou vapeurs. Par ailleurs, les effets sur l'organisme seront différents selon que l'on est en présence : D'une intoxication aiguë : exceptionnelle et généralement provoquée par une absorption massive et accidentelle de produit, elle peut provoquer des troubles importants pouvant aller jusqu'à la mort. D'une intoxication chronique : absorption progressive et répétée de petites quantités de produits qui vont s'accumuler dans l'organisme. Au cours de l'exposition, l'agent ne ressent que des symptômes peu importants, mais à terme, des pathologies importantes peuvent apparaître. 4.LA PREVENTION La prévention des risques liés à l'utilisation des produits phytosanitaires passe par la connaissance du produit, les règles de stockage à respecter et l'acquisition de compétences techniques lors des manipulations. Ces quelques règles pourront être complétées par la mise en place d'une politique d'utilisation raisonnée des produits phytosanitaires au sein de la collectivité. 2
La connaissance du produit Il est nécessaire avant toute utilisation de produits chimiques de lire l'étiquette et de vérifier la mise à disposition de la Fiche de Données Sécurité. Cette lecture attentive doit notamment permettre de connaître les risques engendrés par ces produits et d'appliquer les consignes d'utilisation ainsi définies. L'étiquette : Au titre de l'article L. 4411-6 du Code du Travail, tout produit ou substance dangereux doit comporter un étiquetage conforme présentant les dangers et précautions d'usage du produit. Cet étiquetage doit comporter les éléments suivants : Remarque : Seule la lecture attentive d'une étiquette et notamment des phrases de risques vous permettra de savoir immédiatement si un produit est cancérigène, mutagène ou reprotoxique. La Fiche de Données Sécurité : Cet étiquetage doit être complété par la mise à disposition de la Fiche de Données Sécurité par le fournisseur du produit. Cette fiche, obligatoirement rédigée en français doit comprendre 16 points réglementaires et doit être mise à disposition du médecin du travail. Les règles de stockage Le stockage des produits phytosanitaires est régi par plusieurs codes ; le Code du Travail, le Code rural, le Code de la santé publique et le Code de l'environnement. Le stockage de ces produits doit être spécifique, séparé des autres produits dangereux et doit répondre à quelques préconisations particulières. Prévoir un dispositif de stockage spécifique : o Local spécifique pour les grosses quantités : Doit être solide et hors gel, éloigné si possible des habitations 3
Pourvu d'un sol imperméable formant une cuvette de rétention Dépourvu d'humidité Ventilé (mécanique ou naturel) et constamment fermé à clef. o Une armoire spécifique pour les plus petites quantités : Placée dans un local ventilé ne comportant pas de poste de travail permanent Armoire métallique ou en matériaux résistant aux produits corrosifs Pourvue d'un dispositif de rétention, ventilée et fermée à clef. Stockage des produits par catégories de risques Le stockage devra être réalisé sur des étagères métalliques, chaque catégorie disposant de sa propre cuvette de rétention. Les produits placés au sol doivent être placés sur des caillebotis. Veiller au respect des incompatibilités de stockage Les produits T, T+ et CMR doivent disposer d'un stockage qui leur est réservé (armoire spécifique ou étagère distincte avec rétention). Etiquetage obligatoire des produits Les produits doivent être conservés dans leur emballage d'origine. En cas de transvasement, l'étiquetage doit être reproduit. Autres préconisations Les ustensiles utilisés pour les préparations sont rangés dans ce local et identifiés. Un extincteur, du matériel absorbant et un point d'eau doivent être mis en place à proximité du local, à l extérieur. Une signalisation de danger et de prescription doit être apposé sur la porte du local. La protection individuelle L'application de produits phytosanitaires engendre une exposition importante des agents aux produits chimiques dangereux. La protection collective, qui doit être recherchée avant toute mise en oeuvre de protection individuelle, est difficilement réalisable pour cette activité. Dès lors, seule la protection individuelle est envisageable. Elle doit alors obligatoirement comprendre une combinaison en coton ou imperméable, des gants adaptés, un masque respiratoire anti-gaz et anti-vapeur, des lunettes ou un écran facial et des bottes de sécurité. Elle doit être portée dès le début de la préparation du traitement jusqu'à la fin du nettoyage du matériel. 4
La combinaison : La combinaison doit répondre à la norme NF EN 466, être de catégorie 3, au minimum de type 5 et de marque tyvek jetable (attention aux déchets) ou lavable. Le masque : Le masque peut être facial complet ou un demi masque complété de lunettes. Il doit répondre à la norme NF EN 140 et comporter une cartouche filtrante de type A2P2 ou A2P3 au minimum. Des masques jetables sont utilisables et fortement conseillés pour les traitements ponctuels et de faible importance (traitement de 1 à 5 jours par an) Les masques anti-poussière sont totalement inefficaces pour les vapeurs et gaz. Ils n'apportent aucune protection de l'agent lors du traitement phytosanitaire Les cartouches filtrantes présentes sur les masques doivent être régulièrement changées (tous les 6 mois) et leur péremption contrôlée. Les gants : Ils doivent répondre à la norme NF EN 374-3 La matière utilisée devra être de préférence du Néoprène ou du Nitrile, substances les plus protectrices contre les produits chimiques. Les lunettes : Elles doivent répondre à la norme NF EN 166 Elles complètent les demi masques et doivent disposer de coques latérales. Les bottes de sécurité : Les bottes ou chaussures montantes limitent la pénétration du produit au niveau des pieds. 5
Les règles d'utilisation Préparation du traitement : Lire attentivement les étiquettes des produits et prévoir des consignes de sécurité rappelant notamment le dosage des produits, les risques engendrés et les EPI à porter. Porter les EPI Ne pas fumer, manger ou boire pendant la préparation Prévoir un emplacement spécifique pour la préparation, à proximité d'un point d'eau Vérifier le bon fonctionnement du matériel de pulvérisation et de traitement. Respecter la dose prescrite Eviter tout mélange de produits non prévu par le fournisseur Bien vider et bien rincer (au moins 3 fois) les bidons. Ne jamais vider un bidon dans un égout. Exécution du traitement : Le traitement phytosanitaire ne doit pas avoir lieu par fortes chaleurs ou avec un vent d'intensité supérieure à 3 sur l'échelle de Beaufort (Arrêté du 12 septembre 2006) Il est même fortement conseillé d'effectuer l'activité de traitement phytosanitaire le matin jusqu à 10h ou le soir après 16h. Une durée maximale de traitement de 4h par jour et par agent est recommandée. Au-delà de cette limite, il faut veiller à la mise en place de rotations diminuant ainsi la fatigue des agents et leur durée d'exposition aux produits chimiques. Les principales règles d'hygiène : - Porter les EPI - Ne pas boire, ni fumer, ni manger pendant le traitement - Ne pas déboucher les buses à la bouche - Disposer d'une réserve d'eau à proximité de l'agent. Lors de la floraison, veiller à ce que les produits utilisés disposent de la mention "Emploi autorisé lors de la floraison". 6
Après le traitement : Nettoyer et rincer soigneusement les matériels utilisés. Les ranger convenablement Nettoyer et ranger convenablement les Equipements de Protection Individuelle Se laver soigneusement. Il est même vivement conseillé que les agents puissent prendre une douche en fin de traitement. Changer de vêtements avant toute autre activité. Stocker les bidons vides dans un endroit à l'abri en attendant leur élimination par une entreprise spécialisée. Pulvériser les eaux de rinçage sur les endroits traités La démarche de prévention : Les produits Lister les noms et N homologation des produits Veiller à la présence d'une autorisation de mise sur le marché (AMM) Démarche de prévention incluant les fournisseurs, pour limiter l'utilisation des produits les plus dangereux lors du choix de ceux-ci. Eliminer les produits non utilisés et prévoir des collectes pour les emballages vides. L'utilisation Respecter les prescriptions de stockage Veiller au port des EPI et au respect des consignes d'utilisation Formation des agents aux mesures de prévention lors de l'utilisation des produits phytosanitaires ainsi qu'à l'utilisation des protections individuelles. La signalisation et l'interdiction d'accès aux zones traitées peuvent maintenant être rendues nécessaires avec l'instauration d'un délai de rentrée. 7
5.QUELQUES NOTIONS IMPORTANTES L'activité de traitement phytosanitaire engendrant des risques tellement importants pour l'environnement, de récents textes réglementaires sont venus apporter de nouvelles obligations, applicables en partie aux collectivités territoriales, et permettant d'encadrer l'utilisation de ces produits. L'agrément d'applicateur La loi du 17 juin 1992 a institué un agrément délivré par le Ministère de l'agriculture, de la Pêche et de l'alimentation pour l'application, en tant que prestataire de service, de tous les produits antiparasitaires : sont concernées toutes les personnes ou entreprises qui facturent leurs travaux. L'entraide bénévole, en revanche, ne nécessite pas d'agrément. Qu'est ce qu'un agrément : Pour obtenir l'agrément, l'organisme demandeur doit remplir deux conditions: Posséder une police d'assurance couvrant sa responsabilité civile professionnelle, Disposer, dans chacun de ses établissements, d'au moins un employé permanent titulaire d'un certificat de qualification professionnelle pour dix salariés au plus intervenant dans le domaine de la distribution ou de l'application des produits phytosanitaires. Certificat de qualification professionnelle : Il est délivré pour une durée de cinq ans, renouvelable, par la Direction Régionale de l'agriculture et de la Forêt (DRAF) correspondant au lieu de domicile, si le candidat répond à l'une des conditions suivantes: Etre titulaire d'un diplôme ou d'un titre homologué sur une liste fixée par arrêté ; Avoir une expérience professionnelle de cinq ans, continue ou non, dans les fonctions de la distribution ou de l'application des produits antiparasitaires; Avoir réussi aux épreuves d'un examen faisant suite à une formation professionnelle spécifique (organisme : CFPPA) Obligation pour les collectivités : Cet agrément est obligatoire d'après la législation pour tout prestataire qui réalise cette mission en tant que prestataire de service. L'agrément n'est donc pas nécessaire pour une collectivité, excepté si elle réalise ce type de prestation pour le compte d'une autre collectivité. Par ailleurs, la collectivité a l obligation de contrôler l'existence et la pertinence de l'agrément en cas d'intervention d'une entreprise extérieure pour réaliser cette activité. 8
Le délai de rentrée Depuis le 12 septembre 2006, un nouvel arrêté constitue la base réglementaire de l'utilisation des produits phytopharmaceutiques en France. Il a ainsi introduit l'interdiction de traiter avec un vent supérieur à une intensité de 3 sur l'échelle de Beaufort mais également une nouvelle notion qui est le délai de rentrée. Définition : "Un délai de rentrée, est une durée pendant laquelle il est interdit de pénétrer sur ou dans des lieux où a été appliqué un produit." Ce délai ne s'applique qu'aux produits appliqués en pulvérisation ou en poudrage sur une végétation en place et ne s'applique pas aux produits bénéficiant de la mention "Emploi autorisé dans les jardins". Durée du délai de rentrée : 6 heures pour les espaces non couverts 8 heures pour les traitements dans les espaces clos 24 heures en cas d'application de produits comportant une phrase de risques R36 (irritant pour les yeux), R38 (irritant pour la peau), R41 (risques de lésions oculaires graves). 48 heures en cas d'application de produits comportant une phrase de risque R42 (peut entraîner une sensibilisation par inhalation) ou R43 (peut entraîner une sensibilisation par contact avec la peau). Une obligation pour les collectivités? Cette disposition concerne bien entendu les exploitations agricoles, mais elle doit également s'appliquer sur tous les espaces disposant de végétations. Dès lors, les collectivités sont clairement touchées par ce délai de rentrée et doivent le prévoir lors de la planification des opérations de traitement de végétation en place, excepté si elles utilisent les produits avec la mention "Emploi autorisé dans les jardins" ou si le produit dispose d'une dérogation. Cela impose désormais aux collectivités de limiter l'accès aux endroits, après le traitement phytosanitaire en mettant en place une signalisation spécifique et adaptée. Des dérogations pourront être autorisées, sous réserve qu'elles soient clairement explicitées dans la décision d'autorisation de mise sur le marché des produits concernés. Elles pourront ainsi prévoir une diminution de l'application de ce texte pour le produit concerné. Néanmoins, en l'absence de dérogations explicites sur les autorisations de mise sur le marché des produits utilisés, cette disposition réglementaire s'impose sans dérogation aux collectivités lors de leurs activités de traitement phytosanitaire sur de la végétation en place. Bibliographie Code du travail, arrêté interministériel du 12 Septembre 2006 Brochure INRS ED 867 : "L'applicateur de produits Phytosanitaires" Brochure Groupama : "Guide conseil d'utilisation des produits phytosanitaires". 9