Conférences sur canapé Manuel Fadat, Gaspard Bébié-Valérian, William Gosselin



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Transcription:

Conférences sur canapé Manuel Fadat, Gaspard Bébié-Valérian, William Gosselin Aucune technologie n est aussi nouvelle que lorsqu elle est utilisée, spontanément, de manière indéterministe, sur scène, en scène. Descriptif détaillé p. 2-6 Annexes - le sac des lygnes - récit d expérience - cvs - regard extérieur sur le projet - infos pratiques p. 7 p. 8 p. 9 p. 10 p. 12

2 Répondant au geste de Figarella cité dans : L histoire de l art est elle finie? par Hans Belting, nous savons désormais que l histoire de l art n est pas finie... Alors nous proposons un cycle de conférences performatives sur canapé au sein desquelles les grandes problématiques de l époque actuelle sont abordées. Seulement ces conférences n adoptent pas un format habituel, classique, conventionnel. Il s agit de performances, oui, mais incluant de la vidéo, de la création électroacoustique, de la poésie, des bruits, des objets en tous genres. En somme, un agencement d éléments complexes, hétéroclites contribuant à l émergence d une situation artistique inédite. Une première situation a été ménagée le vendredi 18 mars 2011, dans le cadre d une résidence sur Montpellier au Living-Room. La production qui en est ressortie s intitule : Conférence sur canapé #1. Un rapide descriptif suivra dans les pages suivantes. Il est à noter qu il s agit d une première conférence, laquelle a posé de façon pertinente un ensemble d enjeux. Néanmoins, les conférences sur canapé sont un projet évolutif et activé suivant les contextes et lieux d accueil dans lesquels il est amené à se développer. Selon ces modalités de visibilité, le projet s adapte et dégage de nouveaux enjeux. Ces variations peuvent alors directement impacter sur les vocabulaires sonores employés, leur mise en production, la relation à la voix, le dispositif vidéo ou même la nature fondamentale du propos développé par le conférencier. En somme, cette première conférence intervient comme une introduction mais de nombreux enjeux de création sont à envisager et donc, l ensemble de l équipe constituée autour du projet est à la recherche d opportunités et résidences de création. Conférence sur canapé #1 Le Living-Room est un espace constitué de plusieurs petites pièces et dont les séparations sont assurées par des cloisons vitrées. Ainsi, une distinction est permise tout en assurant une circulation visuelle et sonore globale. Le temps de résidence sur le Living- Room a permis de prendre en compte cette spécificité et réfléchir non seulement aux conférences sur canapé, sur ses intentions et son fond, mais également à sa présentation publique. Cela nous a amené à concevoir un dispositif créant plusieurs couches de lecture, différentes temporalités tant dans l écoute que la visualisation de la conférence.

Concrètement, le dispositif s est construit sur 3 étapes, impliquant des modalités de lecture et d appréciation différentes. 1) Une vidéoprojection dans une pièce vide, habitée seulement d un canapé. Cette vidéo dure 43 minutes, le temps d une conférence. Lorsque le public entr au sein du Living-Room, aucune lumière n est allumée et seule la luminosité provenant du videoprojecteur permet de se repérer dans l espace. La vidéo ne défile pas. Elle représente un homme - cadre serré - face à la caméra, habillé d une cravate et d une chemise blanche. Cet homme ne bouge pas. Lorsque le public est installé, l homme s anime et s adresse à eux, du moins, s adresse à un auditoire et adopte la gestuelle d un conférencier.

Progressivement, le cadrage s élargit et apparaissent aux côtés du conférencier deux autres personnes. Chacun d entre eux est élégant également. Ils restent calmes, absorbés, concentrés comme plongés dans l écoute de la conférence. Progressivement, la cadrage s étend encore. Tandis que la conférence garde son sérieux, un instant va faire basculer le cours de la conférence. L un des deux hommes va tomber dans un fou rire, entraînant l autre. Ils se détendent, se mettent à se parler l un à l autre, s avachissent sur le canapé, boivent des bières. Le conférencier tâche de tenir son propos mais se détend également au fur et à mesure. A son tour, il fume, boit et tandis que le cadrage révèle plus l étendue de la scène, ce qui paraissait des plus sérieux devient cocasse, voire grotesque. Le trio est en chaussettes et la vidéo joue de la perception habituelle, standardisée que chacun garde d une conférence. Plus la vidéo avance, plus elle révèle le décalage entre le sérieux d une conférence et ce qui la constitue réellement. Ce qui est à l acte et qui se joue dans un détachement véritable. Quelle parole est communiquée, quelle en est sa valeur au regard de la posture de son maître? 4

2) Car ce que l on voit ne correspond pas à ce que l on entend. Pourrait-on croire qu il ne s agit que d une vidéo jouant d une temporalité et de nos perceptions et prenant un ton potache? Sûrement pas, car en même temps, dans une autre pièce à l arrière se trouvent Manuel Fadat, gaspard Bébié-Valérian et William Gosselin. Ils conçoivent en temps réel une conférence, se concentrant sur le son uniquement, intervenant à rebours de la vidéo projettée, joignant à la création électroacoustique la parole théorique, à l hybridation de la voix l improvisation bruitiste. Cet espace n est pas directement accessible, il est calfeutré par des tissus noirs. On en devine à travers la présence des performers. Le public peut regarder et observer ce qui se passe dans cet espace mais ne peut directement interagir. Espace arrière, dans lequel se placent les performers. D ici, ils jouent de leurs instruments, manipulent tous types d objets sonores (ventilateurs, robots de découpes, vibreurs, violons, microphones...) pilotent la vidéo, lisent les textes et transforment les sons pour les envoyer dans l autre pièce où se passe la videoprojection. Des tapis sont disposés partout au sol. Les deux entrées sont bloquées par des tissus noirs tendus.

3) Enfin, dans l entrée du Living-Room, une petite télévision est posée au sol de façon anodine. Si le public n y fait pas attention, il passe à côté. Ce petit écran a son importance car il s agit du judas de ce qui se passe à l intérieur de l espace inaccessible. C est un regard offert sur le caché, il permet de passer outre la fascination de l image et entreapercevoir la mécanique générale du dispositif.

Annexes 7 LE SAC DES LYGNES Confrontation avec les notions de mesure, d harmonie, de modes, de rythmes, et de connections. Positionnement D un point de vue média-tactique, il est question d apparition, de transformation, de performation, de prise de position. D un point de vue poétique, il est question de faire bégayer la technique et d interrompre la charge qu impose le terme de nouveauté, sans pour autant s inscrire dans une veine antimoderniste (ou post ; ultra ; hyper). D un point de vue plastique il est question de confronter simplement, les corps, les voix, les gestes, les moyens d amplification, les procédés numériques. D un point de vue politique, il est question d être là, en interrogation, en rupture, de créer les conditions de possibilité d une fonction critique de l art, tout en admettant qu il n y a pas d effectivité directe entre ce qui a lieu et l engagement du spectateur. D un point de vue artistique, il sera question d indéterminisme et de liaisons : continuum plus que téléologie.

RECIT D EXPERIENCE 8 «Je suis parti courir. C est toujours un moment extrêmement productif car il permet des enchainements et des pas inattendus. En fait, je me suis remémoré par hasard la notion de «recombinatoire» de Steve Kurtz - du Critical Art Ensemble - bouquiné il y a quelque temps. Bien entendu, je l ai associé à cette idée de résidence dont nous avions l envie mais dont nous n arrivions pas à cerner l approche exactement autrement que par l idée très nette qui nous taraudait : trouver un moyen d exaucer notre intérêt pour le «faire ensemble», pour le «faire apparaître», et pour l art de mixer la voix, les paroles, les sons, les bruits. J aime bien cette idée que tout est recombinaison, si tant est qu il y ait un «plus» qui peut être l énergie de l action, qui peut être tout ce qui compose la rencontre lors d un travail en duo, bref... Bien sûr, ça ne pouvait que me faire penser à la notion de complexité, puis finalement à toutes ces notions très Deleuzo-Guattariennes qui peuplent l esprit des créatifs à notre époque et sont utilisées à tour de bras pour justifier tout et n importe quoi. Un mal? Des réseaux, rhizomes, réticulations, des générations, des multiplications, des déterritorialisations, des devenirs, des métas, etc. Quoi qu il en soit, nous aimons jouer avec pour leur valeur, s il en est, universelle, et pour leur fonction à décrire ce que l on a l impression de ne pouvoir décrire et qui serait à l œuvre dans les processus créatifs, et qui nous permettraient aussi, par association et sans trop d entorses théoriques, de plonger jusqu à chez les grecs, grâce au pont Nietzschéen de la Naissance de la tragédie tout en invoquant, que cela nous torde les tripes ou non, quelques soupçons phénoménologiques, pour le dire mystérieusement. On pensera naturellement à la question des moyens et ce en quoi ils modifient la forme et le fond et on pensera encore à la question de l inventivité ou plus sommairement du nouveau. Je me disais également qu en termes de nouvelles technologies, aucune technologie n est aussi nouvelle que lorsqu elle est utilisée, spontanément, de manière indéterministe, sur scène, en scène. L action directe, improvisive, concentre le passé, le futur en devenir (utopie concrète selon Bloch), le présent continu et peut être considéré elle même comme technologie en évolution nouvelle. Associé au médium connectique des fils et des lignes, on est en pleine nouveauté. Et là, ce qui me parait intéressant, avec ces technologies «nouvelles» que nous employons et que l on nous invite grandement à employer (pour les administrer et les légitimer socialement ou bien pour que l expérience les éprouve et les questionne politiquement?), nous rejoignons le problème d envergure posé par le paradigme de la nouveauté, de la nouveauté toujours renouvelée, et ainsi des découpages historiques (épistémiques) entre modernité, postmodernité, hypermodernité, ultramodernité, et j en passe, au travers desquels on à du mal à se reconnaître et se (laisser) catégoriser. Une technologie nouvelle n est elle pas avant tout une technologie? Peu importe son statut du fait que, quoi qu il en soit, si elle augmente d une part, elle perd de l autre. Elle manque, elle oublie, elle rend lacunaire, nécessairement. En revanche, en faire usage au travers de nos corps (peut être le seul bastion politique lorsqu il ne reste plus rien), ou plus simplement le fait d en faire usage en un lieu consacré et circonscrit, la scène, rejoue des conditions de possibilités, un territoire d art (comme le disent Khalil Joreige et Joana Hadjithomas), pour qu art ait lieu. Pour qu il se (re) connecte avec l avant et le devenir, pour que se joue la fonction critique de l art, sa capacité à faire prendre distance et à emporter à la fois (tout aussi bien pour l acteur que pour le spectateur), et donc la mise en crise de la technique employée. Je crois qu on arriverait là à un rencontre intéressante si, en somme, nous continuions, nouveautés ou pas, de faire de la poésie, autrement dit si nous lui faisons jouer son rôle, celui de faire bégayer la technique. Bises.»

9 CVsgaspard.bebie.valerian@gmail.com gaspard.bebie.valerian@gmail.com Manuel Fadat enseigne, recherche, écrit et publie dans le domaine de l art contemporain, notamment sur les dimensions sociales et politiques dans l art contemporain. Il est aussi commissaire d exposition et historien de l art du verre et des usages du verre dans l art (expositions, articles). Il codirige par ailleurs la revue Los flamencos no comen (Cévennes / Berlin), est rattaché au lieu d expérimentation artistique l ObO (Le Vigan), est actif au sein de l association Autonome Vivance (éditions,expositions, ressources art et politique) et participe à divers projets de création. Parmi ceux-ci, l émission d exploration radiophonique Sans titre et, depuis plusieurs années, sous des formes diverses les expérimentations textuelles, vocales et sonores au sein de BVN. Gaspard Bébié-Valérian est artiste et théoricien des nouveaux média. Suite à ses études d art, où il travaille en autodidacte sur des projets de netart et installations multimédia, il multiplie les pratiques et les identités artistiques. Dans le même temps, il produit plusieurs albums de musique électroacoustique dont la qualité est plébiscitée sur les réseaux spécialisés. Enfin, il fait partie d Art-Act, définie comme une entité binaire utilisant les moyens de l art pour une «invention du quotidien», pour une politique de la récupération et du retournement. Art-Act intervient dans l espace public, initie des projets alternatifs, détourne des jeux-vidéos et crée des installations vidéo et interactives parfois. Il co-fonda plus tard le projet Oudeis au Vigan, espace dédié aux arts numériques et formes de création actuelles. En 2010, il intègre Kawenga en charge du Pôle création, tout en poursuivant activement la direction au sein d Oudeis. William Gosselin est musicien et plasticien. Pianiste, électroacousticien, improvisateur. Sculpteur sonore. Installation, performance. Expérimentation sonore. Musique et bande son de court métrage et de film d animation. Improvisation avec danse. Projection. Travail en coopérative. Duo, Trio, Quartet. Mêle le concret et l électronique. Déformer, transformer, tailler, évider, mastiquer, coller, jongler, briser, faire.

10 Conférences sur canapé, ou comment mettre en œuvre des facteurs d indéterminisme dans un collectif artistique. Un texte de Sabrina-Ambre Biller / Rêvu / http://rev.u.free.fr/ C est au sein du Living-Room à Montpellier qu a eu lieu la rencontre de Manuel Fadat, Gaspard Bébié- Valérian et William Gosselin, (BVN + Ach_So_Ja) accueillis en résidence ce mois de mars afin de mettre en place et expérimenter le projet : «Conférences sur canapé». Peut-être devrions-nous commencer par évoquer ce que le non-verbal peut apporter au langage lui-même et par là même comprendre l enjeu d expérimentation mis en oeuvre par le collectif BVN + Ach_So_Ja dans les conférences sur canapé. En reprenant cette phrase-clef de Bernstein : «communicabilité des complexes intelligibles», celleci permet de saisir une partie de la démarche artistique mise en œuvre dans les conférences sur canapé. Comprendre les processus de l intelligibilité et de sa complexité pour qu un texte ou langage soit intelligible et les différents paramètres nécessaires afin que le lecteur/spectateur soit capable d en décoder le lexique. Les langages non-verbaux sont augmentés par l intervention de la musique qui réinterroge la complexité même du discours et de sa réception. Comment apporter et faire sortir sa compréhension du monde au sein d un collectif? Il s agit d un enrichissement où l on se nourrit et où l on rebondit face aux différents points de vue. Ce travail collectif ne peut effectivement pas prendre forme avec tous. Des pistes de réflexion et des démarches artistiques sont communes chez les différents protagonistes, et c est ainsi que ce croisement créatif peut prendre place. Chacun tient donc compte des interactions des uns et des autres. Déformer les propos du langage et trouver par là-même d autres aspects de langages, questionner la manière d apporter de la couleur et du relief à une conférence. Car la première conférence sur canapé, conçue au Living-Room, est une performance qui met en jeu des modalités de langage différents : ceux-ci étant pris dans une distorsion de facteurs indéterminés. Collectivement, chacun trouve sa place à l intérieur du projet. La dynamique croise les différentes phases de celui-ci. Nous sommes dans ce temps de construction, ce work in progress allant de la conceptualisation, à la théorisation et à la multiplicité des univers en mouvement. L improvisation a son importance car elle permet de faire onduler, rendre extensible, interroger, éprouver le fil conducteur mis en place, et c est à travers le mode performatif que cette temporalité existera. Ce temps de résidence pousse ainsi les différents membres du collectif à être en adéquation et en lien dans une direction commune. Chacun est dans ce monde imprégné par différents éléments, une alchimie s opère. «Même si cela paraît paradoxal» dit William Gosselin, «je n ai pas envie d avoir une partition où je suis l interprète». William Gosselin trouve ses modes d expressions dans la musique mais aussi dans la création de film et d animation. Un des points d union serait la musique, William Gosselin et Gaspard Bébié-Valérian ont tous les deux une pratique musicale. Mais, pour ce dernier, c est après plusieurs années de rupture avec la musique (au sens conventionnel) qu il approche le champ des arts sonores. Investi comme plasticien, membre actif du collectif Art-Act, il renoue avec le domaine de la création sonore, considérant la part musicale comme un terrain poétique, expérimental et prospectif.

11 Naturellement, les connexions humaines se font et c est autour du texte : «Liminaire» de Guillonne Ballaguer, texte cut-up et proposition d expérimentation, d appropriation sonore que Gaspard Bébié- Valérian collabore avec BVN (Beautiful Voice Noise) constitué de Manuel Fadat et William Gosselin. L écriture musicale permet la mise à distance entre le réel et la sensibilité. William Gosselin apporte au fur et à mesure cette part d instabilité permettant de créer l accident. Le travail plastique et sonore a trouvé son ancrage avec Gaspard Bébié-Valérian qui questionne ce va et vient entre ce que l on entend et la mise à distance du réel. Manuel Fadat, par l utilisation de l instrument vocal, permet à la parole théorique et politique de pouvoir être investie comme un geste artistique. Celui-ci est réactivé par des mises en espace, in situ. Le mode performatif, le live comme expérience engage un risque qui met ainsi ce fil conducteur de la performance à l épreuve. La création comme activité humaine est un élément important pour Manuel Fadat qui interroge différents modes d écriture, poétique avec un espace traversé par les mots et autres bruits, soupirs, grognements, et un travail théorique constitué d un espace argumentaire touchant les relations esthétiques et histoire de l art. La voix est un outil du sensible permettant de se placer comme lien entre les hommes. Prendre la parole est la conjonction de différents ensembles politiques et poétiques, son usage et sa représentation. Mettre en œuvre des territoires de rencontre par la lecture de textes où le principe de l indéterminisme crée un espace, où l articulation art et poétique peut opérer, permet à cette jonction l expérimentation et la mise à l épreuve. Manuel Fadat propose ainsi de porter en mots des textes écrits qui portent en eux un discours engagé véhiculant des contenus volontiers politiques sur les fondements du vivre ensemble, dans un geste de l ordre de la création. La mise en complexité du texte crée différents niveaux d appréciation, interrogeant la place de l artiste créateur du spectateur et de sa réception au travers d une démarche de brouillage. La conférence sur canapé - au-delà d être une conférence - par l acte et sa mise en espace, c est une proposition de faire image et d éprouver de manière sensible ce qui se joue dans l intelligible. Un jeu de construction où chacun apporte ses facteurs d indéterminisme.

12 Ecoutes des performances http://tinyurl.com/pertes-blanches http://tinyurl.com/liminaire-baloard La formation BVN+Ach_So_Ja Manuel Fadat : textes, voix, bruits, cris. Gaspard Bébié-Valérian : sons, musique, traitement temps réel, dispositif vidéo. William Gosselin : sons, musique, échantillonnage, mixage, samples, objets sonores. BVN Gaspard Bébié-Valérian William Gosselin www.myspace.com/beautifulvoicenoise/ www.myspace.com/achsoja/ www.myspace.com/williamgosselin/ Contact 0684860606 / gaspard.bebie.valerian@gmail.com Crédits photographiques Sandra Bébié-Valérian, Manuel Fadat et Living-Room / http://livingroomart.wordpress.com/