In Focus Les jeunes et les MST/VIH/SIDA Deuxième section : programmes pour traiter le problème* Décembre 1997 Les programmes en vue de prévenir la transmission des maladies sexuellement transmissibles (MST) et du virus de l'immunodéficence humaine (VIH) parmi les adolescents et les jeunes adultes sont relativement nouveaux. Au vu des taux élevés de MST parmi ce groupe d'âge et du fait que les jeunes représentent plus de la moitié de toute les nouvelles infections par le VIH, il devient de plus en plus urgent de trouver et d'évaluer des modèles de programmes efficaces. Certaines MST peuvent être guéries mais d'autres dont le VIH sont incurables. C'est la raison pour laquelle un grand nombre des nouveaux projets à l'intention des jeunes insistent sur l'éducation et la prévention plutôt que sur le traitement. Toutefois, la seule connaissance ne suffira pas pour atteindre les buts de la prévention. Il faut également aider les jeunes à adopter des attitudes positives vis-à-vis d'eux mêmes, à acquérir les aptitudes nécessaires et leur fournir un accès aux services, surtout pour obtenir des condoms. Quels sont les types de programmes de prévention des MST/VIH qui ont été réalisés pour les jeunes? Est-ce que de tels programmes ont eu des résultats positifs? Les projets conçus pour prévenir les MST et le VIH chez les jeunes sont généralement axés sur des activités d'éducation, de communication et de conseils. Ils tendent à être réalisés à partir des écoles, des établissements de santé, des centres de traitement ou par le biais d'activités d'éducation communautaires dans des endroits où les jeunes ont l'habitude de se rencontrer. Seul un nombre limité de ces projets ont été évalués jusqu'à présent, mais des réussites déjà se dégagent : Les écoles sont un endroit essentiel pour les activités de prévention du VIH car on peut y atteindre un nombre important de jeunes. Plusieurs évaluations de programmes de prévention réalisées dans des lycées américains constate un accroissement modeste des connaissances et des comportements de réduction des risques chez les élèves (notamment le fait d'avoir moins de partenaires sexuels et d'utiliser davantage les condoms). Parallèlement, les chercheurs ont conclu qu'il fallait bien plus que 5 à 15 heures d'instruction si l'on voulait avoir un véritable impact. 8,9,18. Les projets à base communautaire utilisent diverses formules et essayent d'atteindre les jeunes dans les endroits où ils travaillent et se rencontrent. L'étude faite par l'international Center for Research on Women d'un projet en Thaïlande destiné à des jeunes ouvrières travaillant dans des usines indique que les jeunes femmes avaient renforcé leurs connaissances et compétences (par exemple le fait de prendre la responsabilité d'utiliser la Page 1 of 5
contraception). Les jeunes femmes qui avaient participé à des séances animées par des camarades avaient retiré le plus de gain comparé à celles qui avaient participé à des séances animées par des adultes ou à des activités d'auto-apprentissage. 3 Une évaluation au Nigéria et au Ghana où l'on avait insisté sur les activités d'éducation des camarades en milieu communautaire montre que le programme avait eu des effets nettement positifs sur les connaissances et les capacités des jeunes indiquant qu'ils étaient à présent plus susceptibles de prendre des mesures de protection contre les MST/VIH (abstinence, nombre limité de partenaires et utilisation de condoms). 10 Un projet d'éducation des camarades sur le VIH/syndrome d'immunodéficience acquise (SIDA) en Jamaïque a organisé des séances d'éducation dans des écoles, des endroits communautaires et à l'extérieur (sur les vérandas et sous les arbres) en milieu rural et urbain. Les éducateurs-camarades ont nettement renforcé leurs connaissances, ils disposent à présent des faits pour contrecarrer les mythes, savent où se rendre pour le traitement des MST et indiquent qu'ils ont l'intention de remettre à plus tard les rapports sexuels ou d'utiliser des condoms s'ils sont sexuellement actifs. 14 Un projet réalisé par CARE Kenya a utilisé une stratégie d'éducation camarade-à-camarade. Les jeunes qui ont participé au projet avaient de meilleures connaissances, des attitudes plus positives et des indications de changement de comportements positifs du point de vue prévention des MST/VIH (par exemple, limiter le nombre de partenaires) si on compare au groupe témoin. 4 Il est important d'atteindre les enfants de la rue, ceux qui se sont enfuis de chez eux et les jeunes prostituées car ces groupes cibles courent un risque disproportionné de contracter des MST et le VIH. Voici des exemples de ces projets : Un projet modèle de prévention du VIH pour les enfants et les adolescents brésiliens qui vivent ou qui travaillent dans la rue. Le projet insiste sur une communication adaptée à la culture et sur les séances de formation interactive. Après une évaluation préliminaire des activités qui avaient duré moins d'une année, le projet enregistrait des niveaux élevés de participation assidue ainsi qu'une plus grande sensibilisation et de meilleures connaissances en matière de SIDA. 12,13 Un projet de prévention du VIH réalisé aux Etats-Unis s'attachait tout notamment à la formation professionnelle et à la prise en charge du point de vue comportement pour les jeunes qui se sont enfuis de chez eux et qui sont dans des centres d'accueil publics. L'évaluation note une utilisation accrue des condoms et des réductions des comportements sexuels à risque trois à six mois après l'intervention (par exemple, le fait d'avoir un grand nombre de partenaires sexuels ou un grand nombre de rencontres sexuelles). Ces progrès ont surtout été notés chez les jeunes qui avaient assisté au plus grand nombre de séances. 16 Les programmes de communication et de marketing social sont des interventions clés pour les jeunes car ils informent tous ceux proches de la culture populaire. Les évaluations faites de certains de ces programmes dégagent les faits suivants : Un projet en Ouganda utilise diverses formules médiatiques qui communiquent le message suivant : "Moins de risques ou SIDA : A toi de choisir". Une évaluation de la première étape de la campagne, faite après dix huit mois d'activité, indique un net accroissement dans le nombre de jeunes ougandais Page 2 of 5
qui se protègent actuellement contre l'infection par le VIH. 17 Un projet de mass médias au Zaïre utilisait la télévision, les annonces radiophoniques et les chansons créées pour traiter du problème du SIDA. Il se servait également des feuilletons radiophoniques et télévisés et du matériel imprimé (bloc-notes et calendriers) pour atteindre les jeunes. L'évaluation de l'impact réalisée six mois après la première phase du projet indique une bien meilleure connaissance des questions entourant le SIDA, une plus grande pratique de l'abstinence sexuelle et de fidélité mutuelle et une utilisation accrue des condoms. 5 Le Ministère de la Santé du Ghana a réalisé une campagne multimédiatique pour sensibiliser davantage au SIDA et promouvoir la prévention du SIDA au sein de sa population âgée de 15 à 30 ans. La campagne reposait sur des annonces télévisées et radiophoniques, des réunions communautaires, la diffusion de matériel promotionnel (par exemple, des affiches et des bandes dessinées) et des activités d'éducation dans les écoles. Une enquête de suivi réalisée 10 mois après l'enquête initiale indique une connaissance plus élevée du SIDA et des stratégies de prévention du VIH, une diminution du nombre de partenaires sexuels et une utilisation accrue des condoms au sein des divers sous-groupes. 11 Quelles sont les leçons apprises? En présentant diverses options de prévention, on laisse le choix aux jeunes et on permet aux adultes de rester neutre ou de soutenir telle ou telle activité. Par exemple, en Haïti, une étude sur la lutte et la prévention du SIDA (AIDSCAP) montre que les messages du projet de prévention du SIDA "Espoir" (abstinence, fidélité et monogamie ainsi que condoms) offre diverses options acceptables en fonction des besoins et des intérêts de la communauté. 2 Le soutien accordé par les adultes peut renforcer le niveau de participation des jeunes. Suite aux efforts faits pour obtenir le soutien communautaire dans une région du Kenya où les adultes généralement ne permettent que rarement aux filles de participer aux événements publics, un nombre important d'adolescentes ont pu participer à un projet de prévention du SIDA. 4 Une étude en vue d'évaluer des programmes d'éducation en santé reproductive dans des écoles américaines constate que ceux qui avaient réussi à diminuer le nombre de rapports sexuels non protégés (en recommandant soit de remettre à plus tard les relations sexuelles, d'utiliser davantage les condoms soit de diminuer le nombre de partenaires sexuelles) partageaient certains éléments communs : utilisation de la théorie d'apprentissage social pour l'élaboration de programmes ; priorité accordée à la réduction de comportements sexuels à risque ; utilisation de méthodes d'apprentissage qui font participer activement les jeunes ; activités qui traitent des influences sociales et/ou médiatiques et pressions exercées en vue d'avoir des relations sexuelles; importance de valeurs bien claires contre les rapports sexuels non protégés ainsi que modélisation et pratique de compétences de communication et de négociation. 9 L'adjonction d'activités de prévention des MST/VIH aux services existants de planification familiale est un type d'expansion de service logique et pratique permettant de couvrir des clients qui autrement ne viendraient probablement pas consulter ce type de services. Mais ces adjonctions de services doivent être accompagnées par des protocoles clairs, une formation suffisante et des locaux cliniques adéquats ainsi qu'un nombre suffisant, autant d'éléments que l'on peut observer dans cet établissement Page 3 of 5
sanitaire de l'afrique du Sud. 1 Souvent, les jeunes préfèrent se tourner vers leurs camarades pour obtenir des informations sur la santé reproductive. Une enquête constate que 99% des jeunes répondants trouvent que les éducateurscamarades représentent la meilleure manière d'apprendre à propos du VIH/SIDA et 81% indiquent que les éducateurs-camarades sont les meilleures sources d'information sur le VIH/SIDA. 7 Les jeunes ouvrières dans les usines, les jeunes kényans déscolarisés et les jeunes participant à un projet du YWCA au Ghana indiquent tous une préférence pour les éducateurs-camarades. 3,4,15 Malgré la rotation élevée des éducateurs-camarades que l'on constate souvent dans le cadre des projets d'éducation en santé reproductive et VIH, le solide impact positif du travail des éducateurs-camarades justifie leur utilisation. Une étude d'aidscap montre que 95% des éducateurs-camarades ont changé leur propre style de vie et comportement, 31% utilisaient des moyens de protection dont le condom et 20% avaient diminué leur nombre de partenaires sexuels. 7 La formation axée sur les compétences est recommandée pour les éducateurs qui interviennent dans le cadre des programmes de prévention du SIDA. Les compétences adéquates portent sur l'évaluation des risques, la négociation, les pratiques sexuelles sans risques, la violence et les abus et la consultation des services de santé. 6 Les éducateurs à leur tour doivent enseigner ces compétences importants à leur groupe cible. Un projet expérimental étudié par l'université du Zimbabwe constate qu'une activité participative axée sur les compétences est plus efficace qu'une intervention à base d'information pour changer les attitudes et les pratiques en matière de SIDA (connaissance accrue des condoms et leur utilisation correcte, plus grande auto-efficacité, nombre moindre de partenaires sexuels et moins de rapports sexuels sans condom). 19 La lutte contre les MST qui facilitent la transmission du VIH peut diminuer l'incidence du VIH. Dans le cadre d'une intervention sanitaire dans les zones rurales de la Tanzanie, un centre de traitement et de référence des MST a été ouvert, le personnel du nouveau a reçu une formation et une supervision ainsi qu'une éducation sanitaire ont été offertes. L'évaluation indique une réduction de 40% dans l'incidence du VIH sur les deux ans de l'étude. Les réductions proportionnées les plus importantes ont été notées chez les femmes âgées de 15 à 24 ans et les hommes âgés de 25 à 34 ans. 13 *Le présent numéro de In Focus traite des questions d'éducation et de prévention plutôt que de traitement des MST/VIH/SIDA. Pour plus d'informations, voir également In Focus: "Les jeunes et les MST/VIH/SIDA, section I : Dimensions du problème." Références 1 Abdool KQ, Abdool KS, Preston-White E. Teenagers Seeking Condoms at Family Planning Services. Part II. A Provider's Perspective. South African Medical Journal 82:360-3 (1992). 2 AIDSCAP. Descriptive Analysis of AIDSCAP/Haiti BCC Projects: Some Lessons From the Field. 1996. 3 Cash K, Anasuchatkul B. Experimental Educational Interventions for AIDS Prevention among Northern Thai Single Migratory Female Factory Workers. ICRW Report-in-Brief. Women and AIDS Research Program, ICRW. 1993. 4 Chege I, Avarand J, Ngay A. Final Evaluation Report of the Communication Resources for the Under 18's on STDs and HIV (CRUSH) Project. 1995. 5 Convisser J. The Zaire Mass Media Project: A Model AIDS Prevention Communications and Motivation Project. PSI Special Report #1. Population Services International. 1992. Page 4 of 5
6 Fee N, Youssef M. Young People, AIDS and STD Prevention: Experience of Peer Approaches in Developing Countries. (Draft). Global Programme on AIDS, WHO. 1993. 7 Flanagan D, Williams C, Mahler H. Peer Education in Projects Supported by AIDSCAP: A Study of 21 Projects in Africa, Asia and Latin America. AIDSCAP. 1996. 8 Jemmott JB, Jemmott LS, Fong GT. Reductions in HIV Risk-Associated Sexual Behaviors among Black Male Adolescents: Effects of an AIDS Prevention Intervention. American Journal of Public Health 82(3):372-377 (March 1992). 9 Kirby D, DiClemente RJ. School-Based Interventions to Prevent Unprotected Sex and HIV among Adolescents. In: DiClemente RJ, Peterson JL. Preventing AIDS: Theories and Methods of Behavioral Interventions. New York: Plenum Press, 1994:117-139. 10 Lane C. Peer Education: Hopes and Realities/The West African Youth Initiative. Presented at John Hopkins University/CEDPA Symposium, "The Young and the Restless," Washington, DC, April 1997. 11 McCombie S, Hornik R, Anarfi JK. Evaluation of a Mass Media Campaign to Prevent AIDS among Young People in Ghana 1991-1992. AIDS Technical Support. USAID. 1992. 12 Merritt AP, Raffaelli M. Creating a Model HIV Prevention Program for Youth. American Psychological Association: The Child, Youth, and Family Services Quarterly 16:2 (1993). 13 Merritt AP, Siquiera E. Vida de Rua: Educating Street Youth through Entertainment. Brazil Case Study. (Unpublished) 1995. 14 Randolph SM. Evaluation of the Jamaica Red Cross Society's "Together We Can" HIV/AIDS Peer Education Project. Submitted to the American Red Cross National Headquarters and Jamaica Red Cross Society. 1996. 15 Riley B. Report on Participatory Evaluation of Family Life Programme of Ghana YWCA. Prepared for the Centre for Development and Population Activities (CEDPA), Washington, D.C., 1995. 16 Rotheram-Borus MJ, Koopman C, Haignere C, et al. Reducing HIV Sexual Risk Behaviors among Runaway Adolescents. JAMA 266(9):1237-1241 (Sep. 1991). 17 Trangsrud R. Adolescent Sexual and Reproductive Health in Eastern and Southern Africa: Building Experience. Prepared for USAID/REDSO. Family Care International. May, 1997. 18 Walter HJ, Vaughan RD. AIDS Risk Reduction among a Multiethnic Sample of Urban High School Students. JAMA 270(6):725-730 (Aug. 1993). 19 Wilson D, Mparadzi A, Lavelle S. An Experimental Comparison of Two AIDS Prevention Interventions among Young Zimbabweans The Journal of Social Psychology 132(3):415-417 (1992). La série In FOCUS récapitule à l'intention de professionnels travaillant dans des pays en développement des activités de programme et certaines recherches disponibles sur les questions de santé reproductive des jeunes adultes. Ce numéro a été préparé par Judith Senderowitz avec des commentaires du groupe de la rédaction de FOCUS, d'experts de l'extérieur et du personnel du programme FOCUS. La série de publications In Focus est disponible sur le site Web de FOCUS : http://www.pathfind.org/focus.htm Prière d'envoyer les suggestions ou commentaires à l'adresse suivante : FOCUS on Young Adults, Attn: In Focus, 1201 Connecticut Avenue, NW, Suite 501, Washington, D.C., USA. 20036 ou par courrier électronique à Focus@pathfind.org Un programme de Pathfinder International en collaboration avec le Futures Group International et l'ecole de Santé publique et de Médecine tropicale de l'université de Tulane. Focus est financé par l'usaid aux termes du don CCP-3073-A-00-6002-00. Les opinions exprimées ici incombent aux auteurs et ne reflètent pas forcément les vues de l'agence des Etats-Unis pour le développement international. Page 5 of 5