Résistance active dans la vallée de la Thur et maquis des Vosges

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Transcription:

P8c Résistance active dans la vallée de la Thur et maquis des Vosges C. La famille Sac (Photo du bulletin de la Haute-Moselle, sept/nov. 1944, N 14, page de garde) Georges Sac, né le 22 octobre 1898 au Thillot (Vosges), instituteur, fusillé le 24.09.1944 au Steingraben. Germaine Sac, née Luttringer, le 18 mai 1898 à Ranspach (Alsace), institutrice, déportée au camp de sûreté de Schirmeck- La Broque, après l assaut de la ferme-auberge du Drumont, le 21 septembre 1944. Décédée en 1987. Jean-Paul Sac, né le 14 décembre1927 à Mulhouse, décédé le 28 novembre 1944. Grièvement atteint aux jambes par l ennemi, il succomba à ses blessures, alors qu il guidait un groupe du Corps Franc Pommiès, au lieu-dit Plain du Repos.

Photos des parents Photo de Mme Sac à l entrée de l école élémentaire de Fellering. Quelques indications sur les parents : Georges Sac - né en 1898 au Thillot- fut mobilisé en 1917 et fut décoré de la Croix de guerre en 1918. Mobilisé à nouveau en 1939, il a été fait prisonnier en 1940. Libéré en 1941 pour raison de santé, il quitta l Alsace avec son épouse et son fils pour rejoindre le Thillot et y travailler en tant qu instituteur. Très vite les trois entrèrent dans la Résistance en adhérant au maquis de Bussang dirigé par Emile Lutenbacher. Après l assaut de la ferme-auberge du Drumont le 21 septembre, le père fut arrêté par la Gestapo et fait prisonnier à Bussang, puis fusillé au Steingraben, le 24 septembre 1944. Germaine Sac : Elle débuta sa carrière d institutrice à l école primaire de Munwiller près de Colmar en 1919, puis à Illzach jusqu en 1940. En 1940, elle quitta l Alsace occupée et enseigna avec son mari au Thillot (Vosges). Arrêtée le 21 septembre 1944, alors qu elle se trouvait avec son mari et son fils à

la ferme-auberge du Drumont, Germaine Sac, tout comme les autres femmes présentes, fut enfermée à la prison de Mulhouse, puis déportée au camp de sûreté de Schirmeck, mais libérée le 23 novembre 1944. De retour de Schirmeck, elle apprit que son mari Georges avait été fusillé au Steingraben, le 24 septembre 1944, mais que son fils de 16 ans avait réussi à s échapper et qu il était caché quelque part dans les Vosges. Mais le 28 novembre, son fils allait mourir en jeune héros. Malgré tous les malheurs qui s abattirent sur cette femme, qui aura perdu mari et enfant, elle trouva la force de continuer à vivre, et reprit sa carrière d institutrice à Fellering le 28/04/1945 jusqu'à octobre 1957, date de sa retraite. Chaque jeudi jour sans école à l époque - elle allait se recueillir devant la stèle érigée en l honneur de son mari et des 11 autres fusillés au Steingraben, de même que devant celle de son fils au lieu-dit Plain du Repos, sur la route vers le Drumont. C est en sa mémoire que le Souvenir Français et la commune de Fellering ont baptisé une place «Germaine SAC, Institutrice - Résistante Déportée, 1898 1987». La place fut inaugurée le 5 décembre 2004.

Lors de l inauguration, Mme Annick Lutenbacher, maire de Fellering et conseillère départementale, de même que M. Roger Bringard, président du Souvenir Français de la vallée de la Thur, retracèrent en des termes très chaleureux les événements marquants de la vie de cette femme résistante et déportée, affligée par la perte de son époux et de son fils. Ils dressèrent le portrait d une personne simple, discrète et serviable, toujours vêtue de noir. En tant qu enseignante, elle était très consciencieuse et soucieuse de la réussite scolaire des enfants dont elle avait la charge. Malgré un destin difficile, marqué par la souffrance et hors du commun, Germaine Sac a su trouver la force intérieure qui lui a permis de continuer à vivre, de se vouer à son travail d enseignante avec foi, courage et dignité. Le portrait de Mme Sac, offert par M. Roger Bringard au nom du Souvenir Français, se trouve accroché à l entrée de l école élémentaire du village. Ecole élémentaire Georges Sac à Illzach (Mulhouse), 7 rue de Modenheim. Photo, site internet.

Jean-Paul Sac : Il fut un très bon élève à l école du Thillot, de même qu au collège de Vesoul ; en effet, il était consciencieux, ouvert au monde et patriote au sens noble du terme, à l image de ses parents. Il rêvait de devenir officier dans la Marine française ; toutefois, les événements tragiques de 1944 allaient en décider autrement. Arrêté, de même que ses parents, à la ferme-auberge du Drumont le 21 septembre 1944 par la Gestapo, il fut emprisonné à l ancienne usine textile Fréchin à Bussang avec son père, avec Nicolas et Paul Lutenbacher et bien d autres résistants vosgiens. Lors de l exécution au Steingraben, le 24 septembre 1944, il réussit miraculeusement à s échapper malgré les tirs nourris des SS et à se réfugier dans la maison forestière de la Hutte près de Bussang, où habitait la famille Curien. «Epuisé, meurtri, ignorant le sort de sa mère et sachant son père mort, il s écria : «Je suis heureux d avoir donné à mon père sa dernière joie : il m a vu sauter, il a vu que les Allemands ne m ont pas eu!» (Extrait du témoignage de Simone Sarthe, voir sources). Il eut la vie sauve, mais pas pour longtemps! En effet, au moment où le Corps Franc Pommiès parvenait à atteindre la région de la Hutte près de Bussang, Jean-Paul Sac se proposa spontanément pour servir de guide au groupe, car il connaissait parfaitement bien la région. Voici le récit détaillé extrait du carnet de bord d un chasseur du Corps Franc Pommiès : «Jean-Paul Sac renseignait le maquis dans les bois du Drumont. Il n avait pas peur. Il accomplissait sa mission sans faiblir. C était pourtant périlleux. Il entraîne derrière lui, le groupe de commandos vers le Plain du Repos, où il prend position. L ennemi est aux alentours, les balles sifflent, les mines éclatent ( ) Au détour d un chemin, subitement, un fusil mitrailleur éclate. Le petit guide s est fait voir. Il a une balle dans la main. Il veut se mettre à l abri, se lève un peu trop une nouvelle rafale l atteint. 3 balles dans les reins. Jean-Paul Sac est tombé pas un cri

Deux hommes l emportent vers la petite cabane en bois. Il ne dit rien, ne se plaint pas. Puis tout d un coup : - Oh, ma main, ce n est rien, ce n est rien! - Ce sera grave, vous croyez, les autres balles? Le sergent infirmier s est penché. Il sait que le petit est gravement atteint. - Non, tout ira bien. Tu veux du chocolat? Du chewing-gum? - Du chocolat! Enfin Ne vous occupez pas de moi, les gars! Il y a d autres qui ont besoin de vous. Moi, ce n est rien. Ne vous en faites pas! ( )» L ambulance l amena à Bussang, il était dans une situation grave. Il prononcera ses dernières paroles en présence de l aumônier : «Je voulais tellement passer le premier la frontière alsacienne ( ) Cela ne fait rien ( ) et si c était à refaire, je recommencerais ( ). Dites à Maman qu elle ne pleure pas, puisque je suis mort pour la France!» A titre posthume, Jean-Paul Sac fut honoré de la Croix de Guerre, de la Médaille de la Résistance, de la Médaille Militaire, accompagnée d une citation, le 21 janvier 1945 : «Jeune homme du Thillot, réfugié dans la commune de Bussang, s est offert spontanément pour guider dans la montagne des éléments avancés du Corps Franc. Intrépide et courageux, heureux de servir la France, a rendu des services immenses grâce auxquels les unités du Corps Franc ont pu prendre leurs positions et attaquer l ennemi. A été grièvement blessé à la tête d un détachement qu il dirigeait dans les bois du massif du Drumont (Vosges)»

Stèle en l honneur de Jean-Paul Sac, au lieu-dit «Plain du Repos», sur la route du Drumont.

Salle culturelle 3, baptisée du nom de Jean-Paul Sac, Le Thillot (Vosges). Inauguration, le 23 novembre 2014, dans le cadre du 70 e anniversaire de la libération du Thillot. Photo, site internet. Sources : Documents prêtés par M. Jean-Jacques Lutenbacher : - Extrait d un article de presse intitulé «Père et fils, héros de la Résistance ou le jeune «Bara» de la Résistance vosgienne», témoignage de Simone Sarthe, janvier 1962, Journal L Echo de la Résistance, N 75. - Discours prononcé par Mme Annick Lutenbacher, maire de Fellering et conseillère départementale du Haut-Rhin, lors de l inauguration de la place Germaine Sac, le 5.12.2004. - Site Internet du Corps Franc Pommiès, cfp49.ri.free.fr/vosges_alsace.html - Article de M. Eric Le Normand, AERIA, Strasbourg, «La famille Lutenbacher». - Bulletin de la Haute-Moselle, sept/nov. 1944, N 14. Lycée Scheurer-Kestner de Thann, classe de T STMG1. 2015-2016. Allemand, Marguerite Kubler.