Bonne visite. Avec l aimable contribution de ITER organization



Documents pareils
A) Les réactions de fusion nucléaire dans les étoiles comme le Soleil.

La Fusion Nucléaire (Tokamak) Nicolas Carrard Jonathan Carrier Guillomet 12 novembre 2009

FUSION PAR CONFINEMENT MAGNÉTIQUE

Energie nucléaire. Quelques éléments de physique

I. Introduction: L énergie consommée par les appareils de nos foyers est sous forme d énergie électrique, facilement transportable.

Groupe professionnel énergie de Centrale Nantes Intergroupe des centraliens de l énergie

C3. Produire de l électricité

ITER et la fusion. R. A. Pitts. ITER Organization, Plasma Operation Directorate, Cadarache, France

5 >L énergie nucléaire: fusion et fission

8/10/10. Les réactions nucléaires

par Alain Bonnier, D.Sc.

Renouvellement à 50000MW étalé sur 20 ans ( ) rythme de construction nucléaire: 2500MW/an

A retenir : A Z m n. m noyau MASSE ET ÉNERGIE RÉACTIONS NUCLÉAIRES I) EQUIVALENCE MASSE-ÉNERGIE

Chapitre n 6 MASSE ET ÉNERGIE DES NOYAUX

Lycée Galilée Gennevilliers. chap. 6. JALLU Laurent. I. Introduction... 2 La source d énergie nucléaire... 2

Chapitre 5 : Noyaux, masse et énergie

Chapitre 10 : Radioactivité et réactions nucléaires (chapitre 11 du livre)

Lycée français La Pérouse TS. L énergie nucléaire CH P6. Exos BAC

INTRODUCTION A LA FUSION THERMONUCLEAIRE

EXERCICES SUPPLÉMENTAIRES

POLY-PREPAS Centre de Préparation aux Concours Paramédicaux. - Section Orthoptiste / stage i-prépa intensif -

Introduction à la physique nucléaire et aux réacteurs nucléaires

DM 10 : La fusion nucléaire, l énergie de l avenir? CORRECTION

À propos d ITER. 1- Principe de la fusion thermonucléaire

La physique nucléaire et ses applications

Energie Nucléaire. Principes, Applications & Enjeux. 6 ème /2015

Compétence 3-1 S EXPRIMER A L ECRIT Fiche professeur

La fusion nucléaire. Le confinement magnétique GYMNASE AUGUSTE PICCARD. Baillod Antoine 3M7 29/10/2012. Sous la direction de Laurent Locatelli

Principe et fonctionnement des bombes atomiques

La vie des étoiles. La vie des étoiles. Mardi 7 août

L ÉNERGIE C EST QUOI?

Chapitre 9 : fusion nucléaire dans les étoiles et fusion nucléaire contrôlée

Chapitre 11: Réactions nucléaires, radioactivité et fission

TS1 TS2 02/02/2010 Enseignement obligatoire. DST N 4 - Durée 3h30 - Calculatrice autorisée

La recherche sur l énergie nucléaire: relever le défi de la durabilité

Chapitre 6 : les groupements d'étoiles et l'espace interstellaire

A. Énergie nucléaire 1. Fission nucléaire 2. Fusion nucléaire 3. La centrale nucléaire

* 01 - Plasma et Fusion (p.2) Le principe de la réaction de fusion nucléaire Les avantages de la fusion nucléaire * 02 Historique (p.

Chapitre 6. Réactions nucléaires. 6.1 Généralités Définitions Lois de conservation

Chap 2 : Noyaux, masse, énergie.

U-31 CHIMIE-PHYSIQUE INDUSTRIELLES

L énergie sous toutes ses formes : définitions

SOLUTIONS TECHNOLOGIQUES D AVENIR

Panorama de l astronomie

Atelier : L énergie nucléaire en Astrophysique

Parcours de visite, lycée Exposition: LA RADIOACTIVITÉ De Homer à oppenheimer

ÉNERGIE : DÉFINITIONS ET PRINCIPES

CENTRE NUCLÉAIRE D ÉLÉCTRICITÉ. EDF Nogent-sur-Seine

SCIENCES TECHNOLOGIES

Chapitre 02. La lumière des étoiles. Exercices :

NOTIONS FONDAMENTALES SUR LES ENERGIES

Comprendre l Univers grâce aux messages de la lumière

La fusion : rêve de physicien, bluff de technocrate

L ENERGIE CORRECTION

DIFFRACTion des ondes

L ÉLECTRICITÉ C EST QUOI?

Pour réaliser la fusion thermonucléaire contrôlée (voir

Stage : "Développer les compétences de la 5ème à la Terminale"

Avis et communications

L ÉLECTRICITÉ, C EST QUOI?

Production mondiale d énergie

Transformations nucléaires

Vie et mort des étoiles. Céline Reylé Observatoire de Besançon

L'ÉNERGIE ET LA MATIÈRE PETITE EXPLORATION DU MONDE DE LA PHYSIQUE

Origine du courant électrique Constitution d un atome

DYNAMIQUE DE FORMATION DES ÉTOILES

ITER et les recherches sur la fusion

FORMATION ET FONCTIONNEMENT D'UNE ETOILE

AIDE-MÉMOIRE LA THERMOCHIMIE TABLE DES MATIERES

2 e partie de la composante majeure (8 points) Les questions prennent appui sur six documents A, B, C, D, E, F (voir pages suivantes).

Mémoire DE FIN d ETUDES (LMD)

Assemblée générale. Nations Unies A/AC.105/C.1/L.320

Dossier «L énergie nucléaire»

P17- REACTIONS NUCLEAIRES

LAMPES FLUORESCENTES BASSE CONSOMMATION A CATHODE FROIDE CCFL

LA FUSION THERMONUCLÉAIRE : PROBLÉMATIQUE DE L URGENCE

LE VIDE ABSOLU EXISTE-T-IL?

Interactions des rayonnements avec la matière

Équivalence masse-énergie

Présentation générale des principales sources d énergies fossiles.

Comment réduire les émissions de CO 2? Les réponses de l'ifp

Module 3 : L électricité

Quelques liens entre. l'infiniment petit et l'infiniment grand

Résonance Magnétique Nucléaire : RMN

PHYSIQUE Discipline fondamentale

C4: Réactions nucléaires, radioactivité et fission

L ENERGIE NUCLEAIRE A T ELLE UN AVENIR? Une réponse dans l espace?

c) Défaut de masse et énergie de liaison

Chap 1: Toujours plus vite... Introduction: Comment déterminer la vitesse d une voiture?

Transformations nucléaires

TPE : La voiture solaire. Présentation de Matthys Frédéric, Soraya Himour et Sandra Thorez.

Eau chaude sanitaire FICHE TECHNIQUE

Bioénergie. L énergie au naturel

Que sont les sources d énergie renouvelable?

Champ électromagnétique?

Quel avenir pour l énergie énergie nucléaire?

Professeur Eva PEBAY-PEYROULA

Principe de fonctionnement de la façade active Lucido. K:\15.Lucido \Dossier d'envoi\annexe\2011_12_explicatif du principe de la façade Lucido.

Le défi énergétique. Exercices. Correction. 1. Le charbon est une ressource renouvelable. Il s puise. 2. L énergie s exprime en Watt (W).

Transcription:

Ce dossier pédagogique est réalisé dans le cadre de l Expo Fusion conçue par la Commission européenne à l attention du grand public et des jeunes en particulier et présente à Liège, à l Institut de Zoologie, du 19 septembre au 5 octobre 2012. Cette exposition didactique est accueillie et soutenue par l Université de Liège à l occasion de la venue à Liège de la plus grande conférence internationale consacrée à la Fusion, du 24 au 28 septembre 2012. Cette conférence, appelée SOFT (Symposium on Fusion Technology) rassemble près de 1.000 scientifiques et industriels actifs dans cette technologie. Pour le développement futur de la Fusion, les entreprises et les laboratoires de recherche espèrent susciter, par cette exposition, des vocations professionnelles nombreuses car le principal défi de la recherche sur l énergie du soleil n est pas seulement financier mais est aussi humain. Bonne visite Vincent Massaut Président de SOFT 2012 Prof. Jacqueline Lecomte-Beckers Université de Liège Avec l aimable contribution de ITER organization 2

Table des matières Quelques définitions pour mieux comprendre... 4 Qu est-ce que la fusion?... 6 Comment la fusion produit-elle de l énergie?... 6 La fusion sur la planète Terre... 7 Les combustibles de la réaction de fusion... 8 Modules tritigènes expérimentaux... 9 Des besoins en combustibles réduits... 9 Atteindre les 150 000 000 C... 10 Le confinement du plasma... 11 Les progrès de la fusion... 12 La fusion au XXe siècle... 12 FUSION EXPO Liège... 14 Informations pratiques EXPO FUSION... 38 Dossier compilé par Guillaume Léonard, Eventis scrl 3

Quelques définitions pour mieux comprendre 1 AIEA : Agence internationale de l'énergie atomique, basée à Vienne, en Autriche. Aimant supraconducteur : (Superconducting magnets) Bobine d'excitation supraconductrice qui circonscrit le tore pour confiner le plasma à l'intérieur de celui-ci sans qu'il entre en contact avec sa surface interne. Atomes : Toute matière se compose de quelque cent sortes d'atomes différents, appelés éléments chimiques. Ces éléments sont classés dans le tableau de Mendeleïev. Chaque atome comprend un noyau autour duquel gravitent des électrons. Le noyau, aussi appelé 'nucléus', est composé de protons et de neutrons. Le nombre de protons (et d'électrons autour du noyau est égal au nombre de protons) détermine les caractéristiques chimiques des divers éléments; donc ce que constitue un atome de cuivre et non un atome de carbone. «breakeven» : Le «breakeven», ou point d'équilibre énergétique du plasma, correspond au moment où, dans une installation de fusion, un plasma libère au moins autant d'énergie qu'il a fallu en apporter pour le produire. La performance de fusion est exprimée par le paramètre Q. Le «breakeven» (Q=1) n'a jamais été atteint à ce jour. Le record actuel est détenu par le JET, qui est parvenu à restituer sous forme d'énergie 70 % de la puissance qui lui avait été apportée. ITER a été conçu pour générer plus d'énergie qu'il n'en reçoit : la machine produira 500 MW d'énergie pour 50 MW consommés (Q=10). Confinement magnétique : (Magnetic confinement) Maintien d'un plasma par des champs magnétiques de configuration spécifique pendant des expériences de fusion. On parle aussi de «bouteille magnétique». Couvertures tritigène : (Breeding blanket) La présence de lithium dans les modules de couverture déclenche la réaction suivante: le neutron incident est absorbé par l'atome de lithium, lequel se recombine alors en un atome de tritium et un atome d'hélium. On peut extraire le tritium de la couverture puis le recycler dans le plasma et le rendre à sa fonction de combustible. On appelle donc «couvertures tritigènes» les couvertures qui contiennent du lithium. La réaction de fusion permet ainsi de produire du tritium de manière continue. Cryostat : Enceinte sous vide construite autour d'un tokamak supraconducteur dans laquelle on peut faire le vide à température ambiante. Le cryostat assure l'isolation thermique requise pour maintenir les aimants à basse température. DEMO : Réacteur de fusion de démonstration. Dispositif expérimental qui succédera à ITER et aboutira au premier réacteur de fusion capable de produire de l'énergie à des fins commerciales. DEMO produira quelques centaines de mégawatts d'électricité et utilisera toutes les technologies requises pour une installation commerciale. Deutérium : Isotope de l'hydrogène dont le noyau renferme un neutron et un proton. Fission nucléaire : Phénomène par lequel un neutron entre en collision avec un noyau et le scinde en plusieurs fragments. La fission nucléaire est accompagnée d'une émission de neutrons très rapides, d'un dégagement de chaleur et de rayonnement. 1 Source : http://www.iter.org/fr/glossary N hésitez pas à consulter le site internet de l ITER pour plus d informations et/ou définitions 4

Fusion nucléaire : Réaction consistant à combiner deux noyaux atomiques légers pour donner naissance à un noyau plus lourd, dont la masse est inférieure la somme de celle des deux atomes de départ, en dégageant une grande quantité d'énergie. Ignition : Le point à partir duquel une réaction de fusion s'auto-entretient. Au point d'ignition, l'autochauffage suffit à compenser toutes les pertes d'énergie, si bien qu'il n'est plus nécessaire de mobiliser des sources de chauffage externes pour entretenir la réaction. Ion : Atome qui perdu un ou plusieurs électrons et qui, de ce fait, est devenu porteur d'une charge électrique. Un atome totalement ionisé a perdu l'ensemble de ses électrons. Ionisation : Phénomène par lequel un atome neutre gagne ou perd un électron, devenant ainsi un ion. Isotopes : Chacune des formes d'un même élément dont le noyau renferme un nombre de protons identiques mais un nombre de neutrons différents. ITER : (originellement en anglais : International Thermonuclear Experimental Reactor ou en français : «réacteur thermonucléaire expérimental international») est un projet de machine expérimentale de type tokamak visant à montrer la faisabilité d'un réacteur générateur d'électricité utilisant le principe de la fusion. Plasma : Quatrième état de la matière. A très haute température, les électrons sont dissociés des noyaux et le gaz se transforme en plasma, un gaz chaud électriquement chargé. Dans les étoiles, comme dans les machines de fusion, les plasmas constituent un environnement dans lequel les éléments légers peuvent fusionner et produire de l'énergie. 99 % environ de l'univers connu se trouve à l'état de plasma. Le soleil, les ampoules fluorescentes et les tubes à décharge gazeuse sont des exemples de plasmas. Radioactivité : Si un certain isotope d'un élément comporte trop ou trop peu de neutrons, cela le rend instable: plutôt que d'avoir une vie à l'infini, il se décomposera après un certain temps pour ainsi redevenir stable. On dit le noyau 'décroît' et qu'il est 'radioactif'. Un tel isotope instable est appelé un 'radio-isotope' ou 'radionucléide'. Lors de ce processus de désintégration, le noyau émettra un rayonnement 'ionisant'. Il existe diverses sortes de rayonnement telles que: le rayonnement alpha, le rayonnement bêta, le rayonnement gamma. Tokamak : Machine de fusion conçue pour confiner un plasma à l'intérieur d'une chambre en forme d'anneau (tore) au moyen de deux champs magnétiques. Le premier champ est créé autour du tore par des bobines électriques alors que le deuxième est généré par un courant électrique de forte intensité circulant à l'intérieur même du plasma. Le concept de tokamak a été développé dans les années cinquante par les physiciens soviétiques Igor Yevgenyevich Tamm et Andrei Sakharov. Le terme «tokamak» est une translittération d'une expression russe (toroidalnaya kamera + magnitnaya katushka) signifiant «chambre toroïdale avec bobines magnétiques». Tritium : Troisième isotope de l'hydrogène, dont le noyau contient un proton et deux neutrons. 5

Qu est-ce que la fusion? 2 La fusion est la réaction qui se produit au cœur du Soleil et des étoiles. Ce que nous percevons sous la forme de lumière et de chaleur est le résultat de cette réaction. Au cours de ce processus, des noyaux d'hydrogène entrent en collision et fusionnent pour donner naissance à des atomes d'hélium plus lourds, libérant de considérables d'énergie. ITER Organization La force gravitationnelle des étoiles crée les conditions nécessaires à la fusion. Il y a des milliards d'années, les nuages d'hydrogène de l'univers primitif se sont rassemblés sous l'effet de la gravité et ont donné naissance à des corps stellaires très massifs. Leur noyau extrêmement dense et chaud est le siège du processus de fusion. Comment la fusion produit-elle de l énergie? ITER Organization Les atomes sont animés d'un mouvement incessant. Plus ils sont chauds, plus ce mouvement est rapide. Au cœur du Soleil, où la température atteint 15 millions de degrés, les noyaux d'hydrogène entrent en collision à des vitesses très élevées. Ils peuvent ainsi franchir la barrière que les forces électrostatiques dressent entre les charges électriques positives dont ils sont porteurs. En fusionnant, les noyaux d'hydrogène donnent naissance à un noyau d'hélium. La masse de l'atome d'hélium ainsi obtenu ne correspond pas exactement, toutefois, à la somme des masses des deux atomes de départ. Un peu de la masse a disparu et une grande quantité d'énergie est apparue. Ce phénomène est exprimé par la célèbre formule d'einstein E=mc² : l'infime perte de masse (m) multipliée par le carré de la vitesse de la lumière (c²) produit un nombre très élevé (E) qui correspond à la quantité d'énergie créée par la réaction de fusion. Chaque seconde, le Soleil transforme 600 millions de tonnes d'hydrogène en hélium, libérant ainsi une gigantesque quantité d'énergie. Faute de pouvoir disposer, sur Terre, de l'intensité de la force gravitationnelle à l'œuvre au cœur des étoiles, une nouvelle approche a été développée pour réaliser des réactions de fusion. 2 Source : site internet de l ITER 6

La fusion sur la planète Terre Au XXe siècle, la science de la fusion a identifié la réaction de fusion la plus efficace réalisable en laboratoire: il s'agit de la réaction entre deux isotopes de l'hydrogène (H), le deutérium (D) et le tritium (T). La réaction de fusion D-T est celle qui permet d'obtenir le gain énergétique le plus élevé aux températures les plus «basses». Mais elle exige des températures de 150 millions de degrés, soit dix fois plus que la réaction H-H qui se produit au cœur du Soleil. Voici un plasma. L'intérieur du tokamak européen JET avant et pendant son fonctionnement. Photo: EFDA, JET. ITER Organization À ces températures extrêmes, les électrons sont séparés des noyaux et le gaz se transforme en plasma, un gaz chaud électriquement chargé. Dans les étoiles, comme dans les machines de fusion, les plasmas constituent un environnement dans lequel les éléments légers peuvent fusionner et produire de l'énergie. Dans le cas d'iter, la réaction de fusion se produira dans un tokamak, une machine qui utilise des champs magnétiques pour confiner et contrôler le plasma chaud. La fusion du deutérium et du tritium (D-T) produira un noyau d'hélium, un neutron et de l'énergie. ITER Organization Le noyau d'hélium est porteur d'une charge électrique. Il sera donc soumis aux champs magnétiques du tokamak et restera ainsi confiné dans le plasma. Toutefois, 80 % environ de l'énergie produite sera emportée hors du plasma par le neutron qui, n'étant pas chargé électriquement, demeurera insensible aux champs magnétiques. Les neutrons seront absorbés par les parois du tokamak, transférant leur énergie à ces dernières sous forme de chaleur. Dans l'installation ITER, cette chaleur sera évacuée par des tours de refroidissement. Dans le prototype de réacteur de fusion (DEMO), qui succédera à ITER, ainsi que dans les futures installations industrielles de fusion, la chaleur sera utilisée pour produire de la vapeur et, au moyen de turbines et d'alternateurs, de l'électricité. 7

Les combustibles de la réaction de fusion Diverses associations d'isotopes d'éléments légers sont susceptibles de produire une réaction de fusion. Toutefois, dans les machines de fusion, c'est la réaction deutérium-tritium (D-T) qui se révèle la plus efficace. ITER et la future centrale de démonstration DEMO utiliseront cette combinaison d'éléments pour réaliser la réaction de fusion. Pour obtenir du deutérium, il suffit de distiller de l'eau, qu'il s'agisse d'eau douce ou d'eau de mer. Cette ressource est largement disponible et quasiment inépuisable. Un litre d'eau de mer contient 33 milligrammes de deutérium que l'on extrait de manière routinière à des fins scientifiques et industrielles. Le tritium est l'isotope radioactif de l'hydrogène. Sa désintégration est rapide et il n'est présent dans la nature qu'à l'état de traces. Le tritium peut toutefois être produit par l'interaction d'un neutron et d'un atome de lithium. Dans ITER, ce mode de génération du lithium sera exploré de manière expérimentale. Il existe également un stock de tritium d'une vingtaine de kilos, issu du fonctionnement d'un certain type de réacteur de fission (CANDU) et réparti entre différentes installations nucléaires. C'est dans ce stock qu'iter puisera pendant de sa phase d'exploitation. Pour répondre aux besoins des futures centrales de fusion industrielles, il sera essentiel de pouvoir produire du tritium à partir de la réaction de fusion. Toujours plus lourd... Une molécule d'eau ordinaire est constituée de deux atomes d'hydrogène et d'un atome d'oxygène. Dans la deuxième fiole, l'hydrogène est remplacé par l'un de ses deux isotopes, le deutérium. Tous les atomes d'hydrogène ont été remplacés par des atomes de tritium dans le troisième flacon, qui est le plus lourd. En mai 1950, Life Magazine a utilisé cette photo pour faire comprendre la notion d'isotope «lourd» à ses lecteurs. ITER Organization 8

Modules tritigènes expérimentaux La réaction de fusion deutérium-tritium (D-T) libère des neutrons à haute énergie ainsi que des atomes d'hélium. Tandis que le plasma demeure confiné par les champs magnétiques du tokamak, les neutrons, qui sont électriquement neutre, s'échappent et sont absorbées par les «modules de couverture» qui tapissent la paroi. La présence de lithium dans ces modules de couverture déclenche la réaction suivante: le neutron incident est absorbé par l'atome de lithium, lequel se recombine alors en un atome de tritium et un atome d'hélium. On peut ensuite extraire le tritium de la couverture, le recycler dans le plasma et le rendre à sa fonction de combustible. On appelle «couvertures tritigènes» les couvertures qui contiennent du lithium. La réaction de fusion permet ainsi de produire du tritium de manière continue. Une fois la réaction de fusion amorcée dans le tokamak ITER, il suffira pour l'entretenir de l'alimenter en deutérium et en lithium, deux éléments disponibles en abondance. ITER Organization Dans un tokamak, l'intérieur de la chambre est tapissé de modules de couverture directement positionnés face au plasma chaud. Dans le tokamak ITER, certains de ces modules seront conçus de manière à tester la production de tritium à partir des neutrons générés par la réaction de fusion. Photo: Le tokamak Tore Supra, CEA de Cadarache. L'approvisionnement en deutérium, en effet, peut être assuré par l'industrie et le lithium est présent en abondance dans la croûte terrestre. Si la fusion devait à elle seule assurer l'approvisionnement en électricité de l'ensemble de la planète, les réserves connues de lithium y pourvoiraient pendant au moins mille ans. Pour générer elles-mêmes la totalité du tritium dont elles auront besoin, les centrales de fusion de demain devront produire de grandes quantités d'énergie. ITER expérimentera ce concept fondamental d'autosuffisance en tritium. Des besoins en combustibles et des déchets réduits Certaines des caractéristiques propres à la fusion en font une solution particulièrement intéressante pour le bouquet énergétique de demain. En effet, les combustibles primaires de fusion sont disponibles en abondance et ne présentent aucun risque en soi. La réaction de fusion ne requiert que de très faibles quantités de deutérium et de tritium. Dans la mesure où la quantité de combustible présente dans le plasma ne dépasse jamais quelques grammes, le risque d emballement est inexistant et la quantité d énergie disponible en cas d accident est très limitée. La quantité d'énergie produite par la réaction de fusion par unité de masse est environ 4 millions de fois supérieure à celle que génèrent des réactions chimiques telles que la combustion du charbon, du pétrole ou du gaz naturel. Alors qu'une centrale au charbon de 1 000 MW brûle 2,7 millions de 9

tonnes de charbon par an, une centrale de fusion comme celles qui pourraient être opérationnelles dans la deuxième partie du XXIe ne nécessitera que 100 kg de deutérium, environ 150kg de tritium (produit à partir du lithium) et environ 300kg de lithium-6. Si l on fait l hypothèse (irréaliste) que la totalité de la production nucléaire mondiale est fournie par des réacteurs à fusion, alors les gisements miniers en lithium sont épuisés en 5000 ans. L utilisation de lithium dans l eau de mer repousse cette limite à plusieurs millions d années. La fusion n'émet pas de polluants ni de gaz à effet de serre. Son principal sous-produit est l'hélium, un gaz inerte et non toxique. Il n'existe en outre aucun risque «d'emballement» car les conditions requises pour obtenir la réaction de fusion sont extrêmement rigoureuses et toute modification de celles-ci entraînerait un refroidissement quasi instantané du plasma et un arrêt de la réaction. De plus la fusion ne produit que des déchets radioactifs de courte vie : seulement les matériaux exposés au flux de neutrons provenant du plasma ; en les choisissant judicieusement, on peut même encore en diminuer la quantité et la durée de vie. Les cendres de la réaction elle-même sont constituées d Hélium, un gaz inerte et inoffensif, que nous respirons tous les jours dans l air. La fusion est donc à même de produire de grandes quantités d'énergie en générant peu de déchets pour les générations futures. Atteindre les 150 000 000 C Pour obtenir des réactions de fusion, il faut porter les particules du plasma à très haute température. ITER mettra simultanément en œuvre plusieurs techniques de chauffage pour porter le plasma à 150 millions de degrés Celsius dans le cœur de la machine. Dans le tokamak, les variations des champs magnétiques utilisés pour contrôler le plasma génèrent un effet de chauffage. En effet, les phénomènes d'induction créent un courant électrique de forte intensité. Lorsque ce courant circule dans le plasma, les électrons et les ions sont excités et entrent en collision. Ces collisions créent une «résistance» qui produit à son tour de la chaleur mais, paradoxalement, quand la température du plasma augmente, cette résistance, et donc l'effet de chauffage qu'elle produit, diminuent. La chaleur transférée par ce courant de haute intensité le «chauffage ohmique» ne dépasse pas une certaine intensité. Pour obtenir des températures encore plus élevées et atteindre le seuil à partir duquel la fusion devient possible, il faut utiliser d'autres méthodes de chauffage depuis l'extérieur du tokamak. ITER Organization Injection d'un projectile de combustible dans un plasma du tokamak ASDEX Upgrade de Garching, en Allemagne, saisie par une caméra ultrarapide. Photo : EFDA. Pour porter le plasma d'iter à la température recherchée, deux grandes techniques de chauffage externes, l'injection de neutres et les ondes électromagnétiques à haute fréquence, interviendront en complément du chauffage ohmique. 10

L'injection de neutres consiste à «tirer» des particules à haute énergie dans le plasma. À l'extérieur du tokamak, des particules de deutérium chargées sont accélérées jusqu'au niveau d'énergie nécessaire. Ces ions accélérés traversent ensuite un «neutralisateur de faisceaux d'ions» qui élimine leur charge électrique. Les particules neutres peuvent alors pénétrer à grande vitesse au cœur même du plasma au sein duquel, par le biais de collisions rapides, elles transfèrent leur énergie aux particules déjà présentes dans le plasma. Cette technique permet de transférer au plasma des millions de watts de puissance calorifique et de porter ainsi sa température à un niveau plus proche de celui que requièrent les réactions de fusion. Une troisième source de chaleur, les ondes électromagnétiques à haute fréquence, sera intégrée à la conception du tokamak ITER pour faire monter la température jusqu'aux 150 millions de degrés Celsius requis. Comme les micro-ondes du four du même nom communiquent la chaleur aux aliments, l'énergie transportée par les ondes à haute fréquence qui pénètrent dans le plasma est transférée aux particules chargées. Elles accélèrent ainsi leurs mouvements chaotiques et augmentent leur température. Se fondant sur ce principe, ITER utilisera trois types d'ondes, correspondant chacune à une certaine fréquence des ions et des électrons du plasma, de manière à maximiser le transfert de chaleur. Les effets du chauffage ohmique, de l'injection de neutres et des ondes à haute fréquence se cumuleront dans le tokamak ITER pour porter le plasma à la température à laquelle les réactions de fusion deviennent possibles. À terme, les chercheurs espèrent obtenir un «plasma en combustion», dans lequel l'énergie des noyaux d'hélium produits par la réaction de fusion suffira à entretenir la réaction. Il deviendra alors possible de minimiser le recours aux méthodes de chauffage externes, voire de s'en passer totalement. L'obtention d'un plasma en combustion générant de lui-même au moins 50 % de l'énergie nécessaire à la réaction de fusion est une étape déterminante sur la voie de la production d'énergie de fusion. Le confinement du plasma Les physiciens étudient les propriétés des plasmas dans les tokamaks depuis les années soixante. La chambre en forme de «tore», ou d'anneau, des tokamaks constitua à l'époque une véritable percée dans la physique des plasmas. Cette configuration en effet, permettait d'obtenir des niveaux de température et des temps de confinement du plasma jamais atteints auparavant. La chambre du tokamak ITER sera deux fois plus grande que celle de la plus puissante des machines aujourd'hui en fonctionnement et le plasma qu'elle contiendra (830 mètres cubes) près de dix fois plus volumineux. Spontanément, le plasma occuperait la totalité du volume de la chambre mais aucun matériau ne pourrait supporter le contact avec une matière portée à température aussi extrême. En exploitant certaines propriétés physiques des plasmas, les scientifiques sont parvenus à les «confiner» pour les maintenir à distance des parois. ITER Organization Confinement magnétique d'un plasma dans le tokamak supraconducteur coréen KSTAR. Porté à une température extrême, le plasma rayonne sous la forme d'un spectre invisible à l'œil nu. Nous voyons sur cette photo les zones périphériques du plasma, qui sont plus froides. Photo : KSTAR. Les plasmas sont constitués de particules chargées (des noyaux positifs et des électrons négatifs). Un plasma peut donc être confiné, et modelé, par des forces magnétiques. Comme le fait la limaille de 11

fer en présence d'un aimant, les particules contenues dans le plasma suivent les lignes du champ magnétique. Celui-ci forme alors une enceinte immatérielle, qui, à la différence d'un récipient solide, est insensible à la chaleur. ITER combinera délicatement différents champs magnétiques afin de conférer au plasma la forme d'un anneau, et d'isoler celui-ci des parois relativement froides de la chambre. Ainsi, le plasma conservera son énergie le plus longtemps possible. En confinant le plasma, la chambre à vide constitue la première barrière de sûreté de l'installation. Les progrès de la fusion Avec la fusion, la Nature réalise l'un de ses accomplissements les plus spectaculaires. Comme le Soleil, des milliards et des milliards de chaudières de fusion illuminent l'univers, nous dispensant lumière et énergie. Il y a 70 ans environ, les scientifiques ont compris la nature des phénomènes physiques qui régissent ce prodige: le Soleil et les étoiles transmutent la matière, transformant patiemment et infatigablement les noyaux d'hydrogène en atomes d'hélium en libérant au cours de ce processus des quantités d'énergie considérables. ITER Organization Après ITER viendra DEMO : le réacteur de démonstration qui démontrera la viabilité de la production industrielle d'électricité à partir de l'énergie de fusion. L'ambition s'est alors fait jour de reproduire sur Terre la réaction physique qui donne vie aux innombrables étoiles de l'univers. La tâche toutefois, allait se révéler formidablement difficile, beaucoup plus complexe et ardue qu'on ne l'aurait imaginé. La fusion au XXe siècle À la suite des premières expériences de fusion réalisées dans les années trente, la plupart des nations industrialisées s'étaient dotées de laboratoires consacrés à la physique de la fusion. Dès le milieu des années cinquante, des «machines de fusion» étaient exploitées en Union Soviétique, au Royaume-Uni, aux États-Unis, en France, en Allemagne et au Japon. Pas à pas, la compréhension du processus de fusion s'affina. Une percée majeure fut réalisée en 1968 en Union soviétique. Des chercheurs parvinrent à atteindre des niveaux de température et des temps de confinement du plasma deux des paramètres essentiels de la fusion jamais obtenus par le passé. La machine soviétique consistait en un dispositif de confinement magnétique en forme d'anneau baptisé tokamak. ITER Organization Le tout premier tokamak au monde : la machine russe T1 de l'institut Kurchatov de Moscou. Elle fut la première à utiliser un revêtement en inox dans une chambre à vide en cuivre. 12

Le tokamak s'imposa dès lors comme le concept dominant parmi les chercheurs qui travaillaient sur la fusion, et les machines se multiplièrent dans la plupart des pays développés. Il devint rapidement évident que, pour produire de l'énergie de fusion, la communauté internationale devrait mettre en commun ses forces créatives, ses compétences technologiques et ses ressources financières. Le Joint European Torus (JET) de Culham, au Royaume-Uni, mis en service en 1983, constitua le premier pas dans cette direction. Le JET est utilisé collectivement par les associations EURATOM (Communauté européenne de l'énergie atomique) de plus de 20 pays d'europe. En 1991, le tokamak JET a réalisé une première mondiale en produisant de l'énergie de fusion de manière contrôlée. Depuis, dans le monde entier, les installations de fusion n'ont cessé de progresser. Le tokamak Tore Supra du centre de recherche nucléaire de Cadarache détient le record de durée d'un plasma (6 minutes et 30 secondes). Quant au JT-60 japonais, il a atteint la valeur du triple produit de fusion (densité, température, temps de confinement) la plus élevée à ce jour. Aux Etats-Unis, des installations de fusion ont obtenu des températures de plusieurs centaines de millions de degrés Celsius. Toutes ces prouesses ont permis à la science de la fusion de se rapprocher du breakeven le point d'équilibre énergétique du plasma, qui correspond au moment où, dans une installation de fusion, un plasma libère au moins autant d'énergie qu'il en a reçu pour la produire. Le «breakeven» n'a jamais été atteint à ce jour. Le record actuel est détenu par JET, qui est parvenu à restituer sous forme d'énergie 70 % de la puissance qui lui avait été apportée. Les scientifiques ont aujourd'hui conçu une machine de nouvelle génération qui générera plus d'énergie qu'elle n'en recevra: ITER produira 500 MW d'énergie pour 50 MW consommés. ITER Organization Les travaux de recherche et développement du programme ITER ont montré que le charbon issu des coques de noix de coco constituait un matériau de revêtement particulièrement efficace pour les panneaux cryogéniques qui assurent la propreté de la chambre à vide du tokamak ITER. L'institut de technologie de Karlsruhe, en Allemagne, stocke plusieurs tonnes de charbon de noix de coco indonésiennes de la récolte 2002 destiné aux pompes cryostatiques d'iter. Photo : Peter Ginter 13

FUSION EXPO Liège Institut de Zoologie Les pages suivantes vous donnent une traduction en français des principaux panneaux de l Expo, ainsi que des Foires Aux Questions. N hésitez pas à vous adresser aussi aux guides présents à l Expo. *Les panneaux numérotés de 1 à 23 seront présents à l exposition de Liège. 14

1 L énergie de fusion, alimentant les étoiles depuis leur naissance et permettant la vie sur Terre. Dans la région la plus active de notre univers proche, Hodge 301, un nuage d étoiles brillantes et massives, se situe à l intérieur de la nébuleuse de la Tarentule dans notre voisinage galactique, le Grand Nuage de Magellan. 15

2 La réaction de fusion Représentation artistique de la réaction de fusion du deutérium-tritium Les noyaux atomiques légers peuvent fusionner, produisant ainsi des noyaux plus lourds et libérant de l énergie dans le processus. Parmi les noyaux des isotopes d hydrogène susceptibles de permettre le plus facilement la réaction de fusion, ceux du deutérium et du tritium, sont projetés les uns contre les autres à hautes températures, fusionnent et produisent de l hélium et un neutron. L énergie produite à partir de la même quantité de matière est de quelques 8 millions de fois celle produite par la combustion du pétrole. 1 combustion du charbon 29,3 milles J/g 2 combustion du pétrole 42,8 milles J/g 3 fission de l uranium 82,1 milliards de J/g 4 fusion (deutérium-tritium) 336 milliards de J/g 16

3 Conditions de la fusion Plasma dans l expérience START Les réactions de fusion se produisent seulement lorsque les noyaux atomiques interagissants ont une énergie suffisante pour vaincre leur répulsion électrique. Cela exige des températures de plusieurs millions de degrés. Dans ces conditions, les atomes perdent leurs électrons et la matière se transforme en un gaz de particules électriquement chargées connu sous le nom de plasma. Afin de pouvoir utiliser la fusion pour produire de l énergie, 3 différents paramètres touchant le plasma doivent atteindre des valeurs appropriées. La densité suffisante du plasma doit être maintenue à la température nécessaire avec un isolement suffisamment élevé. Dans une réaction de fusion deutérium-tritium, une production nette d énergie exige typiquement des températures autour de 100 millions de degrés et une densité égale à un millionième de celle de l air. 17

4 Sphère de plasma L électrode centrale est alimentée par un circuit oscillant produisant un champ électrique qui transforme le gaz à basse pression contenu dans la sphère en un plasma. Les molécules excitées du plasma produisent des décharges de foudre. Lorsque vous posez vos doigts sur la sphère, vous modifiez le champ électrique et des filaments lumineux se déplacent sous vos doigts. Essayez! 18

5 La fusion sur Terre L objectif de la recherche sur la fusion est de reproduire les processus de fusion sur Terre afin de produire de l électricité à l avenir. Deux lignes directrices de recherche sont en cours d exploration dans des laboratoires à travers le monde : le confinement magnétique et la fusion inertielle. L objectif est de comprendre les propriétés du plasma et de définir la technologie la plus efficace pour l énergie de fusion. Dans le confinement magnétique, le plasma est créé dans une enceinte sous vide, et maintenu loin des parois par des champs magnétiques puissants. Le plasma est formé de particules chargées qui suivent les lignes du champ magnétique en boucles fermées. Diagramme schématique du confinement magnétique du plasma. Le plasma est maintenu loin des matériaux environnants par des champs magnétiques puissants produits par des bobines externes. Une fois que le processus de fusion commence, une grande quantité de noyaux de deutérium et de tritium sont brûlés en hélium et en neutrons, produisant ainsi une grande quantité d énergie! Les neutrons transportent la majeure partie de cette énergie hors du plasma. Un chauffage externe, obtenu par des micro-ondes ou des faisceaux de particules, est nécessaire pour produire des réactions de fusion suffisantes. L hélium peut aussi chauffer le plasma, contribuant ainsi à entretenir la réaction. Vision d artiste des étapes d une réaction de fusion à confinement inertiel. 19

6 Deux catégories principales de machines expérimentales utilisent ce type de confinement : le tokamak et le stellarateur. D autres configurations magnétiques sont également en cours d investigation : la striction à champ inversé et le tokamak sphérique. Dans la fusion inertielle, une petite boulette (~1 mm de diamètre) de combustible de fusion gelé est comprimée par la force d inertie d un faisceau laser à haute puissance ou par des faisceaux de particules convergeant simultanément sur la cible. De cette manière, la température et la pression au coeur de la boulette augmentent jusqu au point où beaucoup plus d énergie est libérée par la fusion que celle fournie par les faisceaux. 20

7 Le tokamak Diagramme schématique du tokamak Il est fondé sur une conception russe connue sous le nom de tokamak qui signifie chambre toroïdale avec bobines magnétiques". Dans un tokamak, le plasma est produit dans une enceinte en forme d anneau (ou tore), et est maintenu loin des parois de l enceinte par les champs magnétiques appliqués. Le confinement tokamak est obtenu par une combinaison :- d un champ toroïdal produit par les bobines externes entourant l enceinte d un champ poloïdal induit, à la fois intérieurement par le courant parcourant le plasma, et extérieurement par des bobines disposées en périphérie de l enceinte. Les champs toroïdaux et poloïdaux s ajoutent mutuellement, et il en résulte une structure magnétique torsadée ou hélicoïdale. Le courant principal induit dans le plasma contribue aussi à son chauffage. Le plasma est produit typiquement par décharges. Jusqu à présent, le tokamak a obtenu les meilleurs résultats de tous les schémas de confinement magnétique. 21

8 Le stellarateur 1. Diagramme schématique du stellarateur 2. Bobines de la machine Wendelstein-7X, en construction à Greifswald, Allemagne Le stellarateur est également fondé sur le principe du confinement magnétique. Les champs toroïdaux et poloïdaux sont purement fournis par un système complexe de bobines externes. La combinaison de ces champs se traduit par un champ magnétique torsadé. Aucun courant intense ne traverse le plasma. Cela présente l avantage de garder le plasma dans un état calme pendant un long moment et de ne créer que peu d instabilités du plasma. 22

9 Le Joint European Torus (JET) Paramètres du JET Rayon externe du plasma 2,96 m Rayon interne du plasma 2,10 m (vertical) 1,25 m (horizontal) Durée de l impulsion 20 s Volume du plasma 80 100 m3 Température du plasma plus de 100 millions de C Champ magnétique toroïdal 3,45 T Courant de plasma 4,8 MA Puissance supplém. de chauffage 25 MW Le JET est l expérimentation de fusion la plus vaste au monde, capable d utiliser un mélange de combustible de deutérium et de tritium. Le projet a été lancé en 1973 dans le cadre d une collaboration européenne commune pour démontrer la faisabilité scientifique de la fusion. Il a commencé à fonctionner en 1983 et a été le premier site au monde à obtenir une production d énergie de fusion contrôlée (près de 2 MW) avec un mélange de deutérium-tritium expérimental en 1991. En 1997, lors d une campagne expérimentale réussie, le JET a produit 16 MW, ce qui constitue la puissance de fusion a plus importante enregistrée à ce jour. La puissance de fusion obtenue était de 65 pourcents de celle requise pour chauffer le plasma. Le JET a aussi joué un rôle prépondérant dans les progrès technologiques de la fusion. Des systèmes évolués comme la télé-manipulation, les composants en présence du plasma, la manipulation du tritium et des systèmes de diagnostiques ont été testés avec succès sur le JET. Les données obtenues à partir du projet JET ont constitué la base pour la mise au point de l étape suivante en direction de l énergie de fusion: le réacteur ITER. L intérieur du tokamak JET à Culham, Royaume-Uni. 23

10 Quelle est la différence entre la fusion et la fission nucléaire? Dans le processus de fission, un atome lourd comme l uranium se divise en plusieurs fragments plus légers. Une réaction de fission peut débuter lorsqu un atome lourd est frappé par un neutron, et le processus libère d autres neutrons et de l énergie. Dans le processus de fusion, deux noyaux d atomes légers fusionnent ensemble pour former un noyau plus lourd, en libérant de grandes quantités d énergie. La fusion est la source d énergie du soleil et des étoiles, et fournit la chaleur qui maintient la vie sur Terre. Tous les éléments existants ont été formés à l origine par le processus de fusion. Qu est-ce qu un plasma? Le plasma est le quatrième état de la matière. Dans un plasma, les atomes ou les molécules ont perdu une partie de leurs électrons, formant ainsi un gaz de particules chargées. Il existe différentes sortes de plasmas. Le soleil est un plasma et la plupart de l espace interstellaire et intergalactique est rempli de plasma très dilué. Les flammes très chaudes, les lampes d éclairage fluorescentes, les décharges de foudre et les plasmas de fusion sont d autres exemples. Par comparaison aux solides, aux liquides et aux gaz, les plasmas ont des propriétés particulières, car ils peuvent Pourquoi des températures aussi élevées sont-elles nécessaires pour la fusion? Les noyaux atomiques se repoussent mutuellement en raison de leur charge électrique positive. Pour qu ils puissent vaincre ces forces de répulsion et fusionner, ils doivent entrer en collision à très haute vitesse. C est la raison pour laquelle la fusion ne peut se produire qu à de très hautes températures. 24

11 Pourquoi la fusion contrôlée est-elle si difficile à obtenir? La température requise pour la fusion sur Terre est d environ 100 millions de degrés. A cette température, les particules de plasma tendent à s envoler à grandes vitesses et dans toutes les directions. Construire un dispositif capable de confiner le plasma chaud à la densité et au niveau d isolement requis constitue un énorme défi. De l énergie nette de fusion a-t-elle déjà été produite? Pas encore! Les réacteurs tokamak les plus grands actuellement en service ont produit de l énergie de fusion notable sous forme de décharges de quelques secondes, démontrant ainsi la faisabilité scientifique de l énergie de fusion. En revanche, c est encore trop peu. ITER, qui aura une taille double de celle des réacteurs de fusion actuels les plus grands, produira une énergie nette de fusion pour la première fois. Qu est-ce que le facteur Q? Un réacteur de fusion fonctionne comme un multiplicateur d énergie, produisant Q fois l énergie d entrée. Q = énergie de sortie/énergie d entrée. Les expériences actuelles peuvent fonctionner jusqu à Q = 1. ITER fonctionnera avec Q = 10. 25

12 Les progrès de la fusion contrôlée Température au coeur du plasma (en millions de C) Produit triple de fusion - densité (particules/m3) x temps de confinement (s) xtempérature (kev) ; Concept du tokamak développé durant les années 60 1ère génération ~1970 2ème génération ~1980 3ème génération ~1990-2000 Multiplication des hautes énergies et déclenchement d une réaction entretenue Les étapes vers l énergie par fusion sont marquées par la réunion de trois paramètres fondamentaux du plasma nécessaires à cette fusion : la température, la densité et le temps de confinement de l énergie. Ces 3 paramètres doivent atteindre une certaine valeur afin de pouvoir générer plus d énergie issue de la fusion que celle fournie au plasma (connue sous le nom de point d équilibre énergétique). Les progrès vers la fusion sont fondés sur l amélioration de la connaissance de la physique de base des plasmas et sur le développement des technologies industrielles adaptées. Les trois paramètres ont été multipliés par 1000 en vingt ans. L énergie par fusion obtenue jusqu à présent, dans les expériences en cours, est au seuil d équilibre énergétique. ITER, l expérience de recherche internationale sur la fusion, à présent prête pour sa construction, constituera l étape suivante vers la réaction entretenue (lorsque l énergie issue de la fusion seule sera suffisante pour conserver la température du plasma). 26

13 ITER la voie vers la fusion ITER est le plus vaste projet de recherche sur l énergie de fusion et constitue l étape suivante vers une stratégie mondiale et européenne pour le développement de l énergie de fusion. Il est défini pour démontrer la faisabilité scientifique et technique de la fourniture d énergie par fusion. Dans ITER, les scientifiques étudieront des plasmas brulant dans des conditions semblables à celles que nous espérons voir dans les centrales électriques à fusion thermonucléaire. Il sera la première expérience de fusion capable de produire une énergie nette pendant une période de temps étendue. La taille de l usine d ITER sera comparable à celle d une centrale électrique à fusion thermonucléaire. La plupart des technologies clés relevant de ces centrales seront développées et testées dans un système intégré. ITER sera construit en Europe, et est prêt à être construit à Cadarache, France. Les partenaires du projet ITER sont : l Union Européenne, le Japon, la République Populaire de Chine, l Inde, la République Corée, la Fédération de Russie et les Etats-Unis. Plus de la moitié de la population mondiale est représentée. La contribution de l UE à ITER est canalisée à travers une organisation appelée Fusion for Energy, basée à Barcelone, Espagne. L UE jouera un rôle de leader dans le projet ITER et contribuera approximativement à la moitié de son coût. 27

14 L avenir ITER : l étape suivante Energie de fusion : 500 MW Plasma brulant pendant une longue durée DEMO Energie de fusion : 2 GW Production nette d électricité Centrales électriques à fusion thermonucléaire Electricité de fusion fournie au réseau 28

15 Diagramme schématique d un réacteur Que se passe-t-il à l intérieur d une centrale électrique à fusion thermonucléaire? Le plasma se situe dans l enceinte toroïdale entourée d aimants puissants Les réactions de fusion fusionnent ensemble les isotopes d hydrogène, deutérium et tritium, produisant de l hélium et des neutrons. Les noyaux des atomes d hélium transfèrent leur énergie aux particules de plasma et maintiennent la température élevée de ce dernier. Ils sont alors retirés du plasma et stockés dans des réservoirs. La couverture se situe dans la paroi de l enceinte du plasma. Là, les neutrons réagissent avec le lithium et produisent du tritium et de l hélium. Ceux-ci sont extraits de la couverture et séparés. L hélium est stocké dans des réservoirs et le tritium est réinjecté dans le plasma comme combustible. L énergie des neutrons se déplaçant à grande vitesse est convertie en chaleur, transférée à un fluide de refroidissement. L électricité est alors produite à l aide d un générateur et d une turbine à vapeur traditionnels. 29

16 Le tokamak ITER ITER est basé sur le concept du tokamak dans lequel un gaz chaud est confiné dans une enceinte en forme de tore à l aide d un champ magnétique. La grande enceinte à vide, où ont lieu les réactions de fusion, forme le coeur de la machine. Les aimants supraconducteurs d ITER confinent et contrôlent le plasma réagissant, et induisent un courant électrique en son sein. Les bobines supraconductrices fonctionnent à des températures extrêmement basses. Afin de maintenir les aimants à leurs températures de fonctionnement de -269 degrés Celsius (juste quelques degrés au-dessus du zéro absolu), un très grand réservoir, désigné sous le nom de cryostat, entoure les aimants. Les parois internes de l enceinte sont protégées par une couverture qui absorbe la chaleur et les neutrons émis par le plasma. Certains modules de la couverture contiendront du lithium qui réagira avec les neutrons de la réaction de fusion pour produire du tritium, réinjecté ensuite dans le plasma et utilisé comme combustible. En bas de l enceinte, un diverteur recueille les impuretés et les particules d hélium produites par la réaction de fusion. Dans l enceintes, plusieurs ouvertures donnent accès au plasma pour le chauffage, les diagnostiques, le test de la couverture du réacteur et pour la télé-maintenance. Des prévisions établies à partir des expériences actuelles montent que pour produire de l énergie à partir de la fusion thermonucléaire, une centrale devra disposer d une quantité minimale d énergie électrique de sortie de 500 MW. 30

17 Paramètres principaux du réacteur ITER Energie de fusion totale 500MW Amplification d énergie 10 Hauteur de la machine 26 m Diamètre de la machine 29 m Rayon extérieur du plasma 6,2 m Rayon intérieur du plasma 2,0 m Courant de plasma 15 MA Champ toroïdal dans l axe 5,3T Volume du plasma 837 m3 Chauffage auxiliaire installé 73 MW 31

18 ITER pour des études avancées sur la physique des plasmas Le but principal d ITER dans le secteur de la physique des plasmas est de clarifier les problèmes scientifiques en suspens concernant le fonctionnement optimal d une centrale électrique à fusion thermonucléaire. Parmi les problèmes les plus importants, on trouve la compréhension et la réduction des instabilités du plasma pouvant provoquer un transport d énergie et de particules indésirable. Un scientifique travaillant sur une expérience sur les plasmas ITER sera le premier réacteur à fusion fonctionnant avec un plasma combustible". Cet état est atteint lorsque les noyaux d hélium produits lors du processus de fusion et piégés par le champ magnétique, transfèrent leur énergie au plasma, contribuant ainsi à maintenir sa chaleur. Les centrales électriques à fusion thermonucléaire utiliseront des plasmas combustibles. De nouveaux phénomènes surviendront en conséquence de l utilisation des plasmas combustibles. ITER permettra d effectuer des études expérimentales détaillées des plasmas combustibles ainsi que des scénarios avancés pertinents pour les futures centrales électriques à fusion thermonucléaires. 32

19 ITER testera les technologies avancées propres à la fusion Module externe du solénoïde central, fabriqué par Toshiba (Japon), placé à l extérieur de l interne installé dans l enceinte à vide (Naka, Japon) Forgeage du boîtier interne des aimants supraconducteurs du champ toroïdal (Kind, Allemagne) Modèle d un secteur de l enceinte à vide (Japon) Test de débit à froid d intégration de la voie de diverteur intégrée (Etats-Unis) Télé-manipulation d un module de couverture Plate-forme de test du diverteur (ENEA, Italie) ITER testera la plupart des technologies clés essentielles à un réacteur. ITER rassemble plusieurs technologies de pointe : Aimants supraconducteurs puissants et de grandes dimensions Systèmes cryogéniques à grande échelle Composants capables de supporter des densités d énergie à flux élevé Systèmes de manipulation et surrégénération du tritium Systèmes de chauffage avancés du plasma Télé-manipulation avancée et robotique L échelle des composants d ITER, leurs tolérances serrées et les conditions d utilisations exigeantes appellent un contrôle qualité strict, une surveillance de fabrication précise et des tests de performances. La réalisation des composants critiques d ITER se fonde sur le développement de prototypes. La conception d ITER assurera un fonctionnement sûr pour le personnel et l environnement. 33

20 Optimisation IFMIF des matériaux pour les centrales électriques à fusion thermonucléaire Des matériaux durables à faible activation sont nécessaires pour les futures centrales électriques à fusion thermonucléaire. Le test et la qualification de tels matériaux exigent une irradiation prolongée dans les conditions propres à la fusion qui provoqueront un vieillissement réaliste de ces matériaux. Un établissement international d irradiation des matériaux de fusion (IFMIF) a été planifié pour mener à bien ces tests. L IFMIF a été étudié en coopération avec l Union Européenne, le Japon, la Russie et les Etats-Unis. Sa construction et son fonctionnement seront réalisés en parallèle avec ITER. Les résultats de l IFMIF seront aussi importants pour les hautes technologies dans de nombreux autres domaines. Vue de l International Fusion Materials Irradiation Facility 34

21 Qu est-ce qu ITER? ITER est le projet international de recherche et développement concernant les énergies le plus important au monde, destiné à démontrer la faisabilité scientifique et technique de la production d énergie par fusion thermonucléaire. Quelle quantité d énergie ITER produira-t-il? ITER produira une énergie par fusion thermonucléaire d environ 500 MW pendant quelques centaines de secondes. Qu utilisera-t-il? Environ 900 mètres cubes de gaz à très faible densité (moins d un gramme d isotopes d hydrogène) sont chauffés sous forme d un plasma à environ 100 millions de C. Les particules de plasma, confinées par un champ magnétique puissant, entrent en collision et fusionnent en libérant de l énergie. Qui construira ITER? Une organisation internationale de sept partenaires : l Union Européenne, la République Populaire de Chine, l Inde, le Japon, la Russie, la Corée du Sud et les Etats-Unis. Où ITER sera-t-il construit? L Europe sera l hôte et ITER sera construit à Cadarache dans le sud de la France. Quand ITER commencera-t-il à fonctionner? La construction d ITER a déjà commencé. La phase de construction durera environ 10 ans et sera suivie d une période de fonctionnement de 20 ans. ITER sera-t-il sûr? Dans le cas improbable d une panne de réacteur, - le processus de fusion s éteindra automatiquement de lui-même, - il n y aura aucun danger pour la population environnante et aucune évacuation ne sera nécessaire. Les matériaux à l intérieur d ITER seront radioactifs à faibles niveaux en raison des neutrons produits par la fusion. Cette radioactivité diminuera progressivement sur une période de quelques dizaines d années. 35