Projet de règlement grand-ducal fixant les conditions et modalités de la mise en œuvre de l assistance juridique du fonctionnaire de l Etat
Texte du projet de règlement grand-ducal Nous Henri, Grand-Duc de Luxembourg, Duc de Nassau, Vu l article 32, paragraphes 4 et 7 de la loi modifiée du 16 avril 1979 fixant le statut général des fonctionnaires de l Etat ; Vu l avis de la Chambre des Fonctionnaires et Employés Publics ; Notre Conseil d Etat entendu ; Sur le rapport de Notre Ministre déléguée à la Fonction publique et à la Réforme administrative et après délibération du Gouvernement en conseil ; Arrêtons : Art. 1 er. Les dispositions du présent règlement grand-ducal s appliquent aux fonctionnaires, fonctionnaires stagiaires et employés de l Etat conformément à l article 1 er de la loi modifiée du 16 avril 1979 fixant le statut général des fonctionnaires de l Etat, dénommée ci-après «le statut général». Elles ont pour objet de fixer les conditions et les modalités de la mise en œuvre de l assistance de l agent prévue par l article 32, paragraphe 4 du statut général. Le personnel soumis aux dispositions du présent règlement grand-ducal est dénommé par la suite «agent». Art. 2. Dans les conditions définies à l article 32, paragraphe 4 du statut général, l Etat peut fournir une assistance à l agent qui peut notamment consister en la mise à la disposition de l agent d un avocat aux frais de l Etat. La prise en charge des frais d avocat peut être accordée à l agent en cas d atteinte dirigée contre celui-ci ou contre les membres de sa famille au sens de l article 32, paragraphe 4 du statut général ou en cas d action en justice. Par atteinte, il y a lieu d entendre tous les actes prévus à l article 32, paragraphe 4 du statut général tels que les outrage, attentat, menace, injure ou diffamation, harcèlement sexuel ou harcèlement moral à l occasion des relations de travail. Par action en justice, il y a lieu d entendre les actions en justice qui peuvent être intentées contre l agent au sens du même texte. 2
Art. 3. Sauf le cas de l urgence, à motiver par l agent, sa demande doit se faire avant toute consultation d un conseil juridique ainsi qu avant la mise en œuvre de toute autre démarche judiciaire. La condition de l urgence est considérée comme étant remplie dans les cas où la demande relative à la prise en charge des frais d avocat a trait à une instance ou instruction pénale dont la date a été fixée à brève échéance. Art. 4. Pour que l agent puisse bénéficier de l assistance juridique, l atteinte visée par l article 32, paragraphe 4 du statut général respectivement l action dirigée contre l agent dans le cadre de ce texte, doit viser celui-ci personnellement. Cette condition est également remplie lorsque l atteinte ou l action ne vise pas l agent en personne, mais lorsque l identité de celui-ci peut être déduite des éléments du dossier. L atteinte ou l action doit viser l agent ou les membres de sa famille en raison de la qualité ou des fonctions de l agent. Est présumée comme ayant été proférée en raison de la qualité ou des fonctions de l agent, l atteinte qui est survenue pendant les heures de travail et sur le lieu de travail momentané de l agent. Dans les autres cas, il appartient à l agent de prouver que l atteinte est survenue en raison de sa qualité ou de ses fonctions. Art. 5. En cas de constitution de partie civile, l agent doit démontrer que la mise à disposition d un avocat est absolument nécessaire, au vu notamment de la gravité des faits ou de la complexité de l affaire. Cette condition est considérée comme étant remplie dans les cas où l agent a été blessé dans l exercice de ses fonctions. Art. 6. L Etat est délié de son obligation d assistance en cas de faute personnelle de l agent. Si l Etat a déjà pris en charge des frais dans cette hypothèse, l agent peut être astreint au remboursement de ceux-ci. Art. 7. Les décisions relatives à l octroi de l assistance prévue par le présent règlement grand-ducal sont prises par le ministre du ressort sur avis conforme du ministre ayant la Fonction publique dans ses attributions. Cette décision peut être subordonnée à l obligation pour l agent de communiquer tous les actes de procédure. 3
Art. 8. Lorsque l assistance consiste en la prise en charge des frais d avocat à exposer ou exposés par l agent, la décision visée à l article 6 ci-dessus peut fixer la limite maximale de cette prise en charge. A ce titre, le ministre du ressort peut demander à l agent de fournir tout renseignement utile permettant la fixation d une telle limite. Lorsque la limite fixée à l alinéa qui précède risque d être dépassée, l agent doit formuler une nouvelle demande dans les conditions de l article 3 ci-dessus pour obtenir indemnisation des montants dépassant la limite initialement fixée. Art. 9. Les dispositions du présent règlement grand-ducal entrent en vigueur le 1 er janvier 2014. Art. 10. Notre Ministre déléguée à la Fonction publique et à la Réforme administrative est chargée de l exécution du présent règlement qui sera publié au Mémorial. 4
Exposé des motifs et commentaire des articles Le présent règlement grand-ducal a pour objectif de déterminer les conditions et les modalités de l assistance que l Etat peut être amené à fournir au fonctionnaire lorsque celui-ci fait l objet de l un des actes prévus par l article 32, paragraphe 4 de la loi modifiée du 16 avril 1979 fixant le statut général des fonctionnaires de l Etat. Relevons que ces conditions et modalités ont jusqu à maintenant été fixées, entre autres, par une ligne de conduite arrêtée par le Gouvernement en conseil en date du 15 janvier 1998. Cependant, elles résultent aussi de la pratique et elles sont parfois même basées sur la jurisprudence, encore que celle-ci soit rare en la matière. Le présent texte intervient donc pour donner une assise un peu plus ferme à ces quelques règles tout en laissant encore assez de latitude à l autorité compétente pour apprécier des situations très variées susceptibles de se présenter dans ce contexte. L article 1 er fixe tout d abord le champ d application du règlement grand-ducal qui est le même que celui qui est déterminé par le statut général puisque l article 1 er du statut général rend applicable l article 32, paragraphe 4 aussi bien aux fonctionnaires, qu aux fonctionnaires stagiaires et employés de l Etat. L article 2 apporte certaines précisions en relevant notamment que l assistance de l Etat peut se résumer en une prise en charge des frais d avocat exposés par l intéressé en cas d action en justice intentée dans le cadre de l article 32, paragraphe 4 du statut général. Il importe de relever que cette disposition n entend que consacrer la pratique en la matière, alors que dans presque tous les cas où l Etat a été confronté à une telle demande, celle-ci vise la prise en charge de frais d avocat exposés par l agent pour se défendre contre les actes prévus par l article 32, paragraphe 4 du statut général. Il n en demeure pas moins que si l Etat est d avis que l assistance peut être fournie par d autres moyens tels que par exemple, un communiqué de presse ou une action disciplinaire intentée contre les auteurs de tels actes, l Etat peut avoir recours à ces moyens pour protéger son fonctionnaire. L article 3 fixe le moment où l assistance doit être demandée, à savoir avant toute action en justice respectivement toute autre démarche occasionnant des frais. Cette condition semble logique afin de permettre à l autorité compétente de ne pas être mis devant le fait accompli et de pouvoir décider en connaissance de cause. Les auteurs du présent projet, et la pratique le montre, sont toutefois conscient du fait qu il importe parfois d agir rapidement. C est ainsi que cette nécessité existe parfois en droit pénal, par exemple lorsque le fonctionnaire fait l objet d une citation directe devant les juridictions répressives ou lorsqu il se porte partie civile à une instance pénale. Dans ce dernier cas, c est souvent la victime, en l occurrence l agent, qui est informée de la date du procès au dernier moment. Il convient donc de réagir à ces cas extrêmes en prévoyant dans ces hypothèses que la demande de prise en charge peut également être faite après les premières démarches judiciaires. L article 4 exige que l agent soit personnellement visé par l atteinte ou l action. Il s agit en fait ici d éviter ce qu on appelle en droit «l action populaire», c est-à-dire un agent est d avis que son service a été attaqué et il agit de ce fait en justice. Pour éviter des excès de zèle, il convient donc d exiger que l agent soit personnellement visé. La condition que l atteinte soit survenue en raison de la qualité du fonctionnaire ou de ses fonctions tient au fait que la protection visée à l article 4 est en réalité celle du service public. En effet, il ne s agit 5
pas de protéger l agent en tant que personne privée, mais de le protéger en tant que représentant de l autorité publique. Il existe cependant des situations où cette condition peut être supposée comme étant remplie, sauf preuve du contraire, par exemple lorsque l agent se trouve en service. D un autre côté, il se peut également que l agent ne soit pas en service mais qu il fasse néanmoins l objet d une atteinte en raison de sa qualité ou des ses fonctions. Si tel est le cas, il peut également bénéficier de la protection organisée par le présent règlement. L article 5 a trait à la constitution de partie civile. Etant donné que cette dernière ne requiert pas l assistance d un avocat mais peut, par exemple, se faire oralement devant le juge par l agent lui-même, l Etat exige, pour obtenir la prise en charge des frais d avocat, que l agent démontre la complexité de l affaire respectivement la gravité des faits à la base de l affaire. L article 6 prévoit que l Etat ne peut pas être obligé à une prise en charge en cas de faute personnelle du fonctionnaire, ce qui semble logique. Donc, à moins qu il ne s agit d une simple imprudence, si le fonctionnaire est lui-même à l origine du dommage ou de l atteinte, il ne bénéficiera pas de la prise en charge. Tel est aussi le cas si le fonctionnaire est effectivement condamné pénalement. L article 7 fixe la procédure à respecter en la matière qui consiste à adresser une demande au ministre du ressort qui saisira le ministre ayant la Fonction publique dans ses attributions pour avis conforme. Afin d éviter une application disparate des dispositions en la matière par les différents ministères, en donnant son avis conforme le ministre ayant la Fonction publique dans ses attributions veille à garder une ligne de conduite uniforme en la matière. L article 8 a pour objet d éviter que l Etat soit confronté à des notes d honoraires faramineuses. Dans cet ordre d idées, le ministre peut fixer une limite maximale à la prise en charge, limite qui peut cependant être étendue à la demande du fonctionnaire. Dans le même esprit, le fonctionnaire peut être obligé de demander une sorte de devis à son avocat pour que cette limite puisse être fixée par le ministre en connaissance de cause. A noter que la fixation de cette limite maximale vise surtout à éviter des notes d honoraires excessives et qu elle n est pas destinée à être appliquée de façon habituelle. Le présent règlement grand-ducal n est pas accompagné d une fiche financière, dans la mesure où les dispositions y inscrites ne génèrent pas de dépenses supplémentaires à charge du budget de l Etat. 6