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Transcription:

COUR DE CASSATION SOC. PRUD'HOMMES Audience publique du 3 novembre 2010 Mme PERONY, conseiller le plus ancien faisant fonction de président Arrêt no 2037 F-D Pourvoi no Y 09-67.493 Aide juridictionnelle totale en défense au profit de M. Frédéric Boisgard et de Mme Pascale Sacquepey. Admission du bureau d'aide juridictionnelle près la Cour de cassation en date du 26 janvier 2010. Aide juridictionnelle partielle en défense au profit de Mme Christelle Marsault. Admission du bureau d'aide juridictionnelle près la Cour de cassation en date du 26 janvier 2010. Rejet R E P U B L I Q U E F R A N C A I S E AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant : Statuant sur le pourvoi formé par la société SFR service client, dont le siège est Tour Séquia, 1 place Carpeaux, 92915 Paris-La Défense, contre l'arrêt rendu le 23 juin 2009 par la cour d'appel de Poitiers (Chambre Sociale), dans le litige l'opposant : 1o/ à M. F 2o/ à M. F 3o/ à Mme D 4o/ à M. O 5o/ à Mme M 6o/ à M. G 7o/ à Mme C 8o/ à,m. M 9o/ à Mme L 10o/ à Mme P 11o/ à Mme M 12o/ à Mme P 13o/ à la société Aquitel, dont le siège est Téléport II, 4 boulevard Nicéphore Niepce, 86360 Chasseneuil-du-Poitou, défendeurs à la cassation ; La société Aquitel a formé un pourvoi provoqué contre le même arrêt ; La demanderesse au pourvoi principal invoque, à l'appui de son recours, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt ;

La demanderesse au pourvoi provoqué invoque, à l appui de son recours, les deux moyens de cassation annexés au présent arrêt ; Vu la communication faite au procureur général ; LA COUR, en l'audience publique du 28 septembre 2010, où étaient présents : Mme Perony, conseiller le plus ancien faisant fonction de président, M. Moignard, conseiller rapporteur, M. Taillefer, conseiller, Mme Laoufi, greffier de chambre ; Sur le rapport de M. Moignard, conseiller, les observations de la SCP Gatineau et Fattaccini, avocat de la société SFR service client, de la SCP Masse-Dessen et Thouvenin, avocat de MM. Boisgard et Coquillaud, de Mme Hattat, de M. Hérault, de Mme Hussein, de M. Lambert, de Mme Marsault, de M. Moreau, de Mmes Pelletier-Laitang, Sacquepey, Torices et Trouve, de la SCP Célice, Blancpain et Soltner, avocat de la société Aquitel, l avis de M. Allix, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ; Donne acte à la société Aquitel de son désistement sur le premier moyen de son pourvoi ; Attendu, selon l arrêt attaqué (Poitiers, 23 juin 2009), que la société SFR service client a cédé à compter du 1er août 2007 une partie de son activité à la société Aquitel, que des salariés concernés ont saisi la juridiction prud homale de demandes de dommagesintérêts au titre d une fraude aux dispositions concernant les licenciements économiques ; qu à leur demande, le bureau de conciliation a ordonné communication du protocole d accord ou de tout acte juridique tendant à la cession des éléments matériels et humains de l établissement ; Sur les pourvois réunis : Attendu que les deux sociétés font grief à l arrêt de rejeter l appel nullité de la société SFR service client, alors, selon le moyen : 1o/ que le bureau de conciliation ne peut en aucun cas suppléer la carence probatoire d une partie ; que commet donc un excès de pouvoir le bureau de conciliation qui ordonne une mesure d instruction au profit d une partie qui est en mesure de se procurer les éléments de fait de nature à étayer ses prétentions ; qu en l espèce, saisi par des salariés qui contestaient la validité du transfert d un établissement de la société SFR service client au profit de la société Aquitel, le bureau de conciliation du conseil de prud hommes de Poitiers avait ordonné à la société SFR service client, par ordonnance du 24 mars 2009, de communiquer à chacun des demandeurs le protocole d accord ou tout acte juridique intervenu entre SFR client et Aquitel tendant à la cession des éléments matériels et humains de Chasseneuil du Poitouî et les statuts de la SAS Aquitelî ; qu à l appui de son appel-nullité formé contre cette décision, la société SFR service client faisait valoir que l ensemble des informations nécessaires à la compréhension du projet de transfert avait été communiqué aux représentants du personnel (soit dans le cadre d une «data room» soit par la remise de documents) de sorte que les salariés pouvaient se procurer les éléments pertinents pour étayer leurs prétentions ; qu elle en concluait qu en lui ordonnant de communiquer à ces salariés le protocole d accord ou tout acte juridique intervenu entre SFR client et Aquitelî, le bureau de conciliation avait suppléé la carence probatoire des demandeurs et excédé ses pouvoirs ; qu en se bornant à retenir que la communication aux salariés de toutes pièces qu il estimait utiles à la solution du litige entrait dans les pouvoirs du bureau de conciliation, sans vérifier s il n avait pas suppléé la carence des parties dans l administration de la preuve qui leur incombait en ordonnant à

leur profit la communication litigieuse, la cour d appel a privé sa décision de base légale au regard des articles R. 1454-14 et R. 1454-16 du code du travail, des articles 143 et suivants du code de procédure civile et des principes régissant l excès de pouvoir ; 2o/ que commet un excès de pouvoir le bureau de conciliation qui ordonne à l employeur de communiquer à ses salariés un contrat commercial dans des conditions impropres à préserver la légitime protection des données confidentielles qui figurent dans cet acte ; qu en l espèce, la société SFR service client faisait valoir que l ordonnance qui lui avait ordonné de remettre le contrat de cession directement à chacun des salariés demandeurs était entachée d excès de pouvoir, une telle modalité de communication l exposant au risque d une divulgation publique de l acte et réduisant à néant la confidentialité de ses données commerciales comme celles de la société Aquitel ; qu en se bornant à affirmer qu' il ne peut être invoqué un prétendu secret des affaires pour exercer une voie de recours non prévue par la loi, lorsque les conditions dans lesquelles est ordonnée la communication d une pièce caractérisent un excès de pouvoir si elle portent une atteinte irrémédiable à la légitime préservation de données confidentielles, la cour d appel a violé les articles R. 1454-14 et R. 1454-16 du code du travail, les articles 143 et suivants du code de procédure civile et les principes régissant l excès de pouvoir ; 3o/ que les juges du fond doivent répondre aux moyens des parties ; qu en l espèce, la société SFR service client faisait valoir que les salariés demandeurs s étaient bornés à demander devant le bureau de non-conciliation la communication du contrat litigieux au conseil de prud hommes et leur avocat ; qu elle en déduisait qu en ordonnant la communication de cette pièce à l ensemble des salariés pris individuellement, le bureau de non-conciliation avait méconnu les limites de l objet du litige qui s imposaient à lui et entaché sa décision de nullité ; qu en se bornant à écarter les moyens pris de l absence de double degré de juridiction et du secret professionnel, sans à aucun moment examiner le moyen pris d une méconnaissance patente de l objet du litige par l ordonnance qui lui était déférée, la cour d appel a manqué aux exigences de l article 455 du code de procédure civile ; 4o/ que les exigences combinées du droit à un procès équitable et à un recours effectif, résultant des articles 6 1 et 13 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l homme, imposent au juge d appel d examiner le recours immédiat formé contre l ordonnance du bureau de conciliation prise sur le fondement de l article R. 1454-14 du code du travail, lorsque la mesure ordonnée, eu égard à sa nature et au caractère exécutoire par provision de la décision, porte une atteinte irrémédiable aux intérêts de la seule partie condamnée ; que l employeur doit donc être déclaré recevable, nonobstant les dispositions de l article R. 1454-16, à former appel immédiat contre les dispositions de l ordonnance du bureau de conciliation lui enjoignant de communiquer une pièce confidentielle à son adversaire, l atteinte portée par une telle décision exécutoire à la préservation légitime de ses données confidentielles ne pouvant être réparée par une éventuelle réformation dans le cadre de l appel ultérieur sur le fond du litige ; qu en se bornant à relever que l article R. 1454-16 du code du travail excluait la voie de l appel contre une telle ordonnance, la Cour d appel a violé les articles 6 1 et 13 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l homme ; 5o/ qu il n entre pas dans les prérogatives du bureau de conciliation d ordonner la production de pièces qui concernent le fond du litige, le bureau de jugement ayant seul compétence à cet égard ; qu en confirmant néanmoins la décision ordonnant la communication aux salariés demandeurs d un protocole de cession entre la société SFR service client et la société Aquitel ainsi que les statuts de la société Aquitel, pièces

touchant au fond du litige que l employeur n est pas légalement tenu de communiquer, la cour d appel a excédé ses pouvoirs et violé les articles R. 1454-14 du code du travail et 133 du code de procédure civile ; 6o/ qu il en va d autant plus ainsi lorsque, comme en l espèce, la communication de pièces a seulement pour objet de suppléer la carence d une partie dans l administration de la preuve qui lui incombe ; qu en ordonnant la communication des pièces litigieuses sans faire ressortir que cette mesure était nécessaire à la solution du litige puisqu au stade où en était la procédure, les demandeurs n avaient pas encore fait connaître le fondement et les moyens l appui de leurs prétentions, la cour d appel a de plus fort excédé ses pouvoirs et a violé les articles 146 du code de procédure civile et R. 1454-14 du code du travail ; 7o/ que dans ses écritures d appel, la société Aquitel faisait valoir que le protocole de cession contenait des données couvertes par le secret des affaires, raison pour laquelle ce document avait été communiqué aux représentants du personnel dans le cadre d une «data room», sa diffusion à d anciens salariés non liés par quelque obligation de confidentialité que ce soit pouvant avoir des conséquences irréversibles ; qu en s abstenant de rechercher si ces circonstances n étaient pas de nature à justifier une communication encadrée des documents litigieux, de telle sorte que les impératifs légitimes de confidentialité de la société Aquitel soient préservés, et en se bornant à affirmer au contraire qu il «ne peut être invoqué un prétendu «secret des affaires» pour exercer une voie de recours non prévue par la loi», la cour d appel a excédé ses pouvoirs et a violé les articles 141 et 145 du code de procédure civile et R. 1454-14 du code du travail ; 8o/ que la société Aquitel insistait dans ses écritures d appel sur le fait que les salariés, eux-mêmes conscients du caractère confidentiel des documents en cause, avaient demandé à ce que les pièces ne leur soient pas directement remises, mais à leur conseil et à la juridiction prud homale ; qu en ordonnant néanmoins la communication des pièces directement entre les mains des salariés demandeurs, la cour d appel a, de nouveau, excédé ses pouvoirs et violé les articles 4 et 5 du code de procédure civile ; Mais attendu que l appel immédiat à l encontre de la décision du bureau de conciliation n est ouvert qu en cas d excès de pouvoir ; Et attendu que la cour d appel qui a relevé que le bureau de conciliation disposait, en application des paragraphes 3 et 4 de l article R. 1454-14 du code du travail, du pouvoir d ordonner toute mesure d instruction et toute mesure nécessaire à la conservation des preuves, a exactement décidé, après avoir apprécié l éventuelle atteinte au secret des affaires, que, saisi d un litige relatif à la cession d établissements de l entreprise et à la reprise des contrats de travail des salariés qui y étaient affectés, celui-ci n avait pas commis d excès de pouvoir en ordonnant la communication aux parties du protocole d accord ou de tout acte juridique relatif à cette opération, utile à la solution du litige et en rapport direct avec lui ; que le moyen n est pas fondé ;

PAR CES MOTIFS : Rejette les pourvois, tant principal que provoqué ; Condamne la société SFR service client aux dépens ; Vu l article 700 du code de procédure civile, la condamne à payer à MM. B C, Mme H, M. H, Mme H, M. L, Mme M, M. M et Mmes P, S, T et T la somme globale de 2 500 euros ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du trois novembre deux mille dix. MOYENS ANNEXES au présent arrêt Moyen produit par de la SCP Gatineau et Fattaccini, avocat aux Conseils, pour la société SFR service client, demanderesse au pourvoi principal Il est fait grief à l arrêt attaqué D AVOIR rejeté l appel-nullité formé par la société SFR SERVICE CLIENT contre l ordonnance du Conseil de prud hommes de POITIERS du 24 mars 2009 l ayant condamnée à communiquer à plusieurs salariés le protocole d accord ou tout acte juridique intervenu entre SFR SERVICE CLIENT et AQUITEL tendant à la cession des éléments matériels et humains de CHASSENEUIL DU POITOU et les statuts de la SAS AQUITEL, cette communication devant intervenir dans un délai de 15 jours à compter de la notification de la décision sous astreinte de 50 euros par jour de retard AUX MOTIFS PROPRES QUE l article R 1454-14 du Code du travail dispose que le bureau de conciliation peut ordonner différentes mesures, notamment «toutes mesures d instruction» ; que l article R 1454-16 du même code précise que les ordonnances du bureau de conciliation prises en application du texte sus-visé ne sont susceptibles d appel qu en même temps que le jugement sur le fond, sous réserve de règles spécifiques à l expertise ; qu il est toutefois admis que la décision du bureau de conciliation peut être frappée d appel nullité si le bureau a commis un excès de pouvoir en statuant hors du cadre sus-visé ; qu en l espèce, saisi par les salariés de la société SFR CLIENT de demandes relatives à la régularité de leurs contrats de travail à la société AQUITEL, le bureau de conciliation a statué dans la limite de ses pouvoirs en ordonnant, selon les modalités qu il lui appartenait de définir, la communication aux salariés du contrat de cession du centre de CHASSENEUIL DU POITOU et des statuts du cessionnaire, toutes pièces qu il estimait utiles à la solution du litige et qui, de fait, sont en rapport direct avec celui-ci ; qu il n en résulte pas de violation du principe de double degré de juridiction si ce n est par application du texte sus-visé en excluant la voie de l appel contre les ordonnances de non-conciliation ; qu il n est pas dérogé au secret professionnel sur les procédés de fabrication et il ne peut être invoqué un prétendu «secret des affaires» pour exercer une voie de recours non prévue par la loi ; qu il y a lieu en conséquence de rejeter l appel nullité formé par la société SFR SERVICE CLIENT ; 1o) ALORS QUE le bureau de conciliation ne peut en aucun cas suppléer la carence probatoire d une partie ; que commet donc un excès de pouvoir le bureau de conciliation qui ordonne une mesure d instruction au profit d une partie qui est en mesure de se procurer les éléments de fait de nature à étayer ses prétentions ; qu en l espèce, saisi par des salariés qui contestaient la validité du transfert d un établissement de la société SFR SERVICE CLIENT au profit de la société AQUITEL, le bureau de conciliation du Conseil

de prud hommes de POITIERS avait ordonné à la société SFR SERVICE CLIENT, par ordonnance du 24 mars 2009, de communiquer à chacun des demandeurs «le protocole d accord ou tout acte juridique intervenu entre SFR CLIENT et AQUITEL tendant à la cession des éléments matériels et humains de Chasseneuil du Poitou»et «les statuts de la SAS AQUITEL» ; qu à l appui de son appel-nullité formé contre cette décision, la société SFR SERVICE CLIENT faisait valoir que l ensemble des informations nécessaires à la compréhension du projet de transfert avait été communiqué aux représentants du personnel (soit dans le cadre d une «data room», soit par la remise de documents ; cf.prod No 5) de sorte que les salariés pouvaient se procurer les éléments pertinents pour étayer leurs prétentions (conclusions p. 18) ; qu elle en concluait qu en lui ordonnant de communiquer à ces salariés «le protocole d accord ou tout acte juridique intervenu entre SFR CLIENT et AQUITEL», le bureau de conciliation avait suppléé la carence probatoire des demandeurs et excédé ses pouvoirs (conclusions p. 18) ; qu en se bornant à retenir que la communication aux salariés de «toutes pièces qu il estimait utiles à la solution du litige» entrait dans les pouvoirs du bureau de conciliation, sans vérifier s il n avait pas suppléé la carence des parties dans l administration de la preuve qui leur incombait en ordonnant à leur profit la communication litigieuse, la Cour d appel a privé sa décision de base légale au regard des articles R 1454-14 et R 1454-16 du Code du travail, des articles 143 et suivants du Code de procédure civile et des principes régissant l excès de pouvoir ; 2o) ALORS QUE commet un excès de pouvoir le bureau de conciliation qui ordonne à l employeur de communiquer à ses salariés un contrat commercial dans des conditions impropres à préserver la légitime protection des données confidentielles qui figurent dans cet acte ; qu en l espèce, la société SFR SERVICE CLIENT faisait valoir que l ordonnance qui lui avait ordonné de remettre le contrat de cession directement à chacun des salariés demandeurs était entachée d excès de pouvoir, une telle modalité de communication l exposant au risque d une divulgation publique de l acte et réduisant à néant la confidentialité de ses données commerciales comme celles de la société AQUITEL (conclusions p. 11 à17) ; qu en se bornant à affirmer qu il ne peut être invoqué un prétendu secret des affaires pour exercer une voie de recours non prévue par la loi, lorsque les conditions dans lesquelles est ordonnée la communication d une pièce caractérisent un excès de pouvoir si elle portent une atteinte irrémédiable àla légitime préservation de données confidentielles, la Cour d appel a violé les articles R 1454-14 et R 1454-16 du Code du travail, les articles 143 et suivants du Code de procédure civile et les principes régissant l excès de pouvoir ; 3o) ALORS en outre QUE les juges du fond doivent répondre aux moyens des parties ; qu en l espèce, la société SFR CLIENTS faisait valoir que les salariés demandeurs s étaient bornés à demander devant le bureau de non-conciliation la communication du contrat litigieux au Conseil de prud hommes et leur avocat ; qu elle en déduisait qu en ordonnant la communication de cette pièce à l ensemble des salariés pris individuellement, le bureau de non-conciliation avait méconnu les limites de l objet du litige qui s imposaient à lui et entaché sa décision de nullité ; qu en se bornant à écarter les moyens pris de l absence de double degré de juridiction et du secret professionnel, sans à aucun moment examiner le moyen pris d une méconnaissance patente de l objet du litige par l ordonnance qui lui était déférée, la Cour d appel a manqué aux exigences de l article 455 du Code de procédure civile 4o) ALORS en tout état de cause QUE les exigences combinées du droit à un procès équitable et à un recours effectif, résultant des articles 6 1 et 13 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l homme, imposent au juge d appel d examiner le recours immédiat formé contre l ordonnance du bureau de conciliation prise sur le

fondement de l article R 1454-14 du Code du travail, lorsque la mesure ordonnée, eu égard à sa nature et au caractère exécutoire par provision de la décision, porte une atteinte irrémédiable aux intérêts de la seule partie condamnée ; que l employeur doit donc être déclaré recevable, nonobstant les dispositions de l article R 1454-16, à former appel immédiat contre les dispositions de l ordonnance du bureau de conciliation lui enjoignant de communiquer une pièce confidentielle à son adversaire, l atteinte portée par une telle décision exécutoire à la préservation légitime de ses données confidentielles ne pouvant être réparée par une éventuelle réformation dans le cadre de l appel ultérieur sur le fond du litige ; qu en se bornant à relever que l article R 1454-16 du Code du travail excluait la voie de l appel contre une telle ordonnance, la Cour d appel a violé les articles 6 1 et 13 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l homme. Moyens produits par la SCP Célice, Blancpain et Soltner, avocat aux Conseils, pour la société Aquitel, demanderesse au pourvoi provoqué Il est fait grief à l arrêt attaqué d avoir déclaré irrecevable l intervention volontaire de la Société AQUITEL ; PREMIER MOYEN DE CASSATION Il est fait grief àl arrêt attaqué d avoir déclaré irrecevable l intervention volontaire de la Société AQUITEL ; SANS AUCUN MOTIF. ALORS QUE toute décision doit être motivée ; que la question de la recevabilité de l intervention de la Société AQUITEL était distincte du fond du litige et du bien fondé de l appel-nullité interjeté par la Société SFR SERVICE CLIENT, de sorte qu en déclarant irrecevable l intervention volontaire de la Société AQUITEL sans énoncer aucun motif propre à justifier ce chef de la décision, la cour d appel a violé l article 455 du Code de procédure civile. SECOND MOYEN DE CASSATION Il est fait grief à l arrêt attaqué d avoir rejeté l appel-nullité de la Société SFR SERVICE CLIENT et, en conséquence, d avoir ordonné sous astreinte la communication à plusieurs salariés du protocole d accord ou de tout acte juridique intervenu entre les sociétés SFR SERVICE CLIENT et AQUITEL tendant à la cession des éléments matériels et humains de CHASSENEUIL DU POITOU ainsi que les statuts de la Société AQUITEL ; AUX MOTIFS QUE «l article R.1454-14 du Code du travail dispose que le Bureau de conciliation peut ordonner différentes mesures, notamment toutes mesures d instruction ; que l article R.1454-16 du même Code précise que les ordonnances du Bureau de conciliation prises en application du texte susvisé ne sont susceptibles d appel qu en même temps que le jugement sur le fond, sous réserve de règles spécifiques à l expertise ; qu il est toutefois admis que la décision du Bureau de conciliation peut être frappée d appel nullité si le Bureau a commis un excès de pouvoir en statuant hors du cadre susvisé ; qu en l espèce, saisi par les salariés de la société SFR Service Client de demandes relatives à la régularité du transfert de leurs contrats de travail à la société AQUITEL, le Bureau de conciliation a statué dans la limite de ses pouvoirs en ordonnant, selon les modalité qu il lui appartenait de définir, la communication aux salariés du contrat de cession du centre de Chasseneuil du Poitou et des statuts du cessionnaire, toutes pièces qu il estimait utiles à la solution du litige et qui, de fait, sont en rapport direct avec

celui-ci ; qu il n en résulte pas de violation du principe de double degré de juridiction si ce n est par application du texte susvisé excluant la voie de l appel contre les ordonnances du Bureau de conciliation ; qu il n est pas dérogé au secret professionnel sur les procédés de fabrication et qu il ne peut être invoqué un prétendu secret des affaires pour exercer une voie de recours non prévue par la loi ; qu il y a lieu en conséquence de rejeter l appel nullité formé par la société SFR Service Client». ALORS, D UNE PART, QU il n entre pas dans les prérogatives du bureau de conciliation d ordonner la production de pièces qui concernent le fond du litige, le bureau de jugement ayant seul compétence à cet égard ; qu en confirmant néanmoins la décision ordonnant la communication aux salariés demandeurs d un protocole de cession entre la Société SFR SERVICE CLIENT et la Société AQUITEL ainsi que les statuts de la Société AQUITEL, pièces touchant au fond du litige que l employeur n est pas légalement tenu de communiquer, la cour d appel a excédé ses pouvoirs et violé les articles R.1454-14 du Code du travail et 133 du Code de procédure civile ; QU il en va d autant plus ainsi lorsque, comme en l espèce, la communication de pièces a seulement pour objet de suppléer la carence d une partie dans l administration de la preuve qui lui incombe ; qu en ordonnant la communication des pièces litigieuses sans faire ressortir que cette mesure était nécessaire à la solution du litige puisqu au stade où en était la procédure, les demandeurs n avaient pas encore fait connaître le fondement et les moyens à l appui de leurs prétentions, la cour d appel a de plus fort excédé ses pouvoirs et a violé les articles 146 du Code de procédure civile et R.1454-14 du Code du travail ; ALORS, DE TROISIEME PART, QUE dans ses écritures d appel, la Société AQUITEL faisait valoir que le protocole de cession contenait des données couvertes par le secret des affaires, raison pour laquelle ce document avait été communiqué aux représentants du personnel dans le cadre d une «data room», sa diffusion à d anciens salariés non liés par quelque obligation de confidentialité que ce soit pouvant avoir des conséquences irréversibles ; qu en s abstenant de rechercher si ces circonstances n étaient pas de nature à justifier une communication encadrée des documents litigieux, de telle sorte que les impératifs légitimes de confidentialité de la Société AQUITEL soient préservés, et en se bornant à affirmer au contraire qu il «ne peut être invoqué un prétendu «secret des affaires» pour exercer une voie de recours non prévue par la loi», la cour d appel a excédé ses pouvoirs et a violé les articles 141 et 145 du Code de procédure civile et R.1454-14 du Code du travail ; ALORS, DE QUATRIEME PART, QUE la Société AQUITEL insistait dans ses écritures d appel sur le fait que les salariés, eux-mêmes conscients du caractère confidentiel des documents en cause, avaient demandé à ce que les pièces ne leur soient pas directement remises, mais à leur conseil et à la juridiction prud homale ; qu en ordonnant néanmoins la communication des pièces directement entre les mains des salariés demandeurs, la cour d appel a, de nouveau, excédé ses pouvoirs et violé les articles 4 et 5 du Code de procédure civile.