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5S 2007-311 Arrêt du 13 novembre 2009 COUR DES ASSURANCES SOCIALES COMPOSITION Président suppléant : Johannes Frölicher Assesseurs : Bruno Kaufmann, Bruno Boschung Greffière-rapporteure : Maude Favarger PARTIES X., recourante, représentée par Intégration handicap Fédération suisse pour l'intégration des handicapés, place Grand-Saint-Jean 1, 1003 Lausanne, contre OFFICE DE L'ASSURANCE-INVALIDITE DU CANTON DE FRIBOURG, rte du Mont-Carmel 5, case postale, 1762 Givisiez, autorité intimée, OBJET Assurance-invalidité Recours du 16 août 2007 contre la décision du 11 juin 2007

- 2 - c o n s i d é r a n t e n f a i t A. X., née en 1973, ressortissante suisse d'origine congolaise, mariée, mère d'un enfant, est domiciliée à Y. Le 3 avril 2002, elle a été engagée en tant qu'aide-soignante auprès du home Z. Deux jours plus tard, elle a été victime d'un accident de la circulation. Quittant son travail vers 20h30, elle circulait de en direction de à environ 60 km/h quand, suite à une inattention, elle perdit la maîtrise de son véhicule, franchit la ligne de sécurité, se déporta sur l'autre voie de circulation et entra en collision frontale avec le véhicule arrivant en sens inverse. Elle était seule à bord de son véhicule et a été grièvement blessée : fracas facial, fracture ouverte du tibia péroné, luxation du poignet gauche, côtes fêlées, cheville cassée. Elle et l'autre automobiliste également grièvement blessé ont été acheminés à l'hôpital de. Elle fut par la suite transférée à l'hôpital cantonal de Fribourg. La Caisse nationale suisse d'assurance en cas d'accidents (ci-après: la CNA) a pris le cas en charge. Le 1 er avril 2003, elle a déposé une demande de prestations AI pour adultes auprès de l'office de l'assurance-invalidité du canton de Fribourg (ci-après: l'oai), à Givisiez. Par décision du 11 juin 2007, l'oai lui a accordé une rente entière d'invalidité pour la période du 1 er avril 2003 au 31 janvier 2006, celle-ci étant toutefois réduite de 20% étant donné que l'atteinte à la santé dont elle souffre découle d'un comportement délictueux. De plus, dès le 1 er février 2006, son degré d'invalidité est de 16%, ce qui ne lui donne plus droit à une rente d'invalidité. B. Contre cette décision, X., représentée par Intégration handicap Fédération suisse pour l'intégration des handicapés, interjette un recours de droit administratif auprès de l'ancien Tribunal administratif en date du 16 août 2007. Elle conclut, pour la période du 1 er avril 2003 au 31 janvier 2006, à ce que la décision querellée soit reformée en ce sens que la réduction prononcée sur la base de l'art. 21 de la loi fédérale du 6 octobre 2000 sur la partie générale du droit des assurances sociales (LPGA; RS 830.1) n'est pas justifiée et qu'elle a donc droit à une rente d'invalidité non réduite et, pour la période à partir du 1 er février 2006, à ce que la décision querellée soit annulée et la cause renvoyée à l'oai pour instruction complémentaire. A l'appui de ses conclusions, elle fait valoir que l'art. 21 LPGA exclut de manière générale une réduction des prestations à raison d'une faute grave non intentionnelle et que c'est donc à tort que l'oai a prononcé la réduction de sa rente d'invalidité. S'agissant de la période postérieure au 31 janvier 2006, elle reproche à l'oai d'avoir rendu sa décision sans faire procéder à une expertise médicale ou à un stage d'observation professionnelle pour pouvoir établir sa capacité résiduelle de travail et de gain. Dans ses observations du 23 octobre 2007, l'oai propose le rejet du recours. Il estime qu'il ressort manifestement des faits décrits au travers du rapport de police que la recourante a aggravé le risque assuré en décidant de manière délibérée et consciente de prendre le volant de son véhicule sans être accompagnée, alors qu'elle n'était pas titulaire du permis de conduire. Ce comportement a alors engendré une succession de négligences graves aux règles de la circulation routière. Dès lors qu'elle a aggravé le risque assuré en commettant intentionnellement un délit au sens de l'art. 90 al. 2 de la loi fédérale du 19 décembre 1958 sur la circulation routière (LCR; RS 741.01) et que ce

- 3 - comportement se trouve en lien de causalité avec l'atteinte à la santé qu'elle a subie, il est juste qu'il ait procédé à une réduction de sa rente d'invalidité de 20%. Quant à son taux d'invalidité depuis le 1 er février 2006, il ressort du dossier médical que, si suite aux multiples atteintes à la santé qu'elle a subies à l'occasion de l'accident de la circulation dont elle a été victime, elle n'est plus en mesure d'exercer son activité antérieure d'aidesoignante, elle peut en revanche exercer une activité adaptée, exercée principalement en position assise, permettant les changements de position, sans ports de charges lourdes et sans diminution de rendement et ainsi réaliser un revenu excluant le droit à une rente d'invalidité. Dans un second échange d'écritures, les parties maintiennent leur position et n'invoquent pas de nouveaux arguments déterminants. Il sera fait état des arguments, développés par elles à l'appui de leurs conclusions, dans les considérants en droit du présent arrêt, pour autant que cela soit utile à la solution du litige. e n d r o i t 1. a) Interjeté en temps utile et dans les formes légales auprès de l'ancienne autorité judiciaire compétente par une assurée directement touchée par la décision attaquée et dûment représentée, le recours est recevable. b) Le droit applicable est déterminée par les règles en vigueur au moment où les faits juridiquement déterminants se sont produits, étant précisé que le juge n'a pas à prendre en considération les modifications du droit ou l'état de faits postérieurs à la date de la décision litigieuse (ATF 130 V 446, consid. 1.2.1). Par conséquent, les nouvelles dispositions légales prévoyant notamment la suppression de la gratuité de la procédure, dispositions introduites dans le cadre de la première partie de la cinquième révision de l'ai et entrées en vigueur le 1 er juillet 2006, sont ici applicables. Par contre, celle de la deuxième partie de la cinquième révision de l'ai, entrées en vigueur le 1 er janvier 2008, ne le sont pas. c) Depuis le 1 er janvier 2008, le Tribunal cantonal est l'autorité supérieure en matière civile, pénale et administrative (art. 1 al. 1, 26 et 27 de la loi cantonale du 14 novembre 2007 d'organisation du Tribunal cantonal [LOTC; RSF 131.1.1]). 2. a) Selon l art. 4 al. 1 de la loi fédérale du 19 juin 1959 sur l assurance-invalidité (LAI; RS 831.20), l invalidité peut résulter d une infirmité congénitale, d une maladie ou d un accident. Aux termes de l art. 8 LPGA, applicable par le biais de l art. 1 al. 1 LAI, est réputée invalidité l incapacité de gain totale ou partielle qui est présumée permanente ou de longue durée. Selon l art. 28 LAI dans sa version en vigueur jusqu au 31 décembre 2007, l assuré a droit à une rente s il est invalide à 40% au moins. La rente est échelonnée comme suit : un taux d invalidité de 40% au moins donne droit à un quart de rente; lorsque l invalidité atteint 50% au moins, l assuré a droit à une demi-rente, lorsqu elle atteint 60% au

- 4 - moins, l assuré a droit à un trois-quarts de rente et lorsque le taux d invalidité est de 70% au moins, il a droit à une rente entière. D après l art. 16 LPGA, pour évaluer le taux d invalidité, le revenu du travail que l assuré aurait pu obtenir s il n était pas invalide est comparé à celui qu il pourrait obtenir en exerçant l activité qui peut raisonnablement être exigée de lui après les traitements et les mesures de réadaptation, sur un marché du travail équilibré. Il découle de la notion d invalidité que ce n est pas l atteinte à la santé en soi qui est assurée; ce sont bien plutôt les conséquences économiques de celle-ci, c est-à-dire une incapacité de gain qui sera probablement permanente ou du moins de longue durée (ATF 127 V 294). Le taux d invalidité étant une notion juridique fondée sur des éléments d ordre essentiellement économique, et pas une notion médicale, il ne se confond donc pas forcément avec le taux d invalidité fonctionnelle qu il importe d évaluer (ATF 122 V 418). Toutefois, pour pouvoir calculer le degré d invalidité, l administration (ou le juge en cas de recours) a besoin d informations que seul le médecin est à même de lui fournir. La tâche de ce dernier consiste à porter un jugement sur l état de santé et à indiquer dans quelle mesure et pour quelles activités l assuré est capable ou incapable de travailler (ATF 105 V 158, 114 V 314; RCC 1982, p. 36). En ce qui concerne la valeur probante d'un rapport médical, est déterminant le fait que les points litigieux importants aient fait l'objet d'une étude fouillée, que le rapport se fonde sur des examens complets, qu'il prenne également en considération les plaintes exprimées, qu'il ait été établi en pleine connaissance du dossier (anamnèse), que l'exposition des relations médicales et l'analyse de la situation médicale soient claires et enfin que les conclusions de l'expert soient bien motivées (RAMA U 133 1991 p. 311; VSI 1997 p. 121). En principe, n'est donc décisif, pour la valeur probatoire, ni l'origine, ni la désignation d'un moyen de preuve, mais bien son contenu (ATF 122 V 157 et les références citées). S'agissant des rapports médicaux des médecins traitants, le juge peut et doit même tenir compte du fait que ceux-ci, dans le cadre d'une relation de confiance issue du mandat qui leur a été confié, s'expriment, dans les cas douteux, plutôt dans un sens favorable à leurs patients (ATF 125 V 351 consid. 3b/cc et les références). b) En l'espèce, est tout d'abord litigieuse la question de la réduction de la rente entière d'invalidité accordée pour la période du 1 er avril 2003 au 31 janvier 2006, réduction opérée par l'oai dans la décision querellée en se basant sur l'art. 21 al. 1 LPGA. Selon l'art. 21 al. 1 LPGA, si l'assuré a aggravé le risque assuré ou en a provoqué la réalisation intentionnellement ou en commettant un crime ou un délit, les prestations en espèce peuvent être temporairement ou définitivement réduites ou, dans les cas particulièrement graves, refusées. Dans son recours, X. allègue que c'est à tort que l'autorité intimée lui a réduit sa rente étant donné que l'art. 21 LPGA exclut de manière générale une réduction des prestations à raison d'une faute grave non intentionnelle. A l'appui de ses dires, elle cite un arrêt du Tribunal fédéral (K 158/03 du 21 septembre 2004).

- 5 - S'il est exact que l'art. 21 LPGA exclut la réduction des prestations à raison d'une faute non intentionnelle, il permet en revanche la réduction des prestations en cas de dol éventuel (U. KIESER, ATSG Kommentar, Berne 2009, 2 ème édition, ad art. 21 n 17 et les références citées, Circulaire sur l'invalidité et l'impotence dans l'assurance-invalidité, n 7004). En effet, mises à part les situations où l'auteur prévoit expressément les conséquences de son acte, il existe aussi des cas dans lesquels il ne les prévoit pas du tout (ou n'y pense pas) ou dans lesquels il les tient pour possibles. Il faut ainsi distinguer les cas où l'auteur cherche précisément à produire certaines conséquences, c'est-à-dire où il agit avec dessein (Absicht) des cas où il prévoit la possibilité de certaines conséquences, mais où il les "accepte" (ou s'en accommode) dans l'éventualité où elles se produiraient (dol éventuel, Eventualvorsatz) (M. KILLIAS, Précis de droit pénal général, Berne 2001, 2 ème édition, n 321 p. 44). Dans le cas particulier, il ressort du rapport de la police cantonale que les analyses de sang effectuées n'ont relevé aucune trace d'alcool. Par contre, les contrôles ont révélé que la conductrice X. n'était titulaire que d'un permis d'élève conductrice pour la catégorie B depuis le 7 mai 2001, valable jusqu'au 7 novembre 2002. Par conséquent, elle n'était pas autorisée à circuler non accompagnée. De plus, aucune immatriculation de son véhicule n'était enregistrée auprès de l'office de la circulation et de la navigation du canton de Fribourg (ci-après: l'ocn). Les plaques FR ont ainsi été apposées illicitement sur le véhicule. Il s'est également avéré que ce véhicule n'était plus couvert par une assurance RC depuis le 11 mars 2002 pour cause de défaut de paiement des primes d'assurance. Parmi les documents récupérés dans le véhicule, les policiers ont également trouvé un rapport d'expertise de l'ocn, lequel mentionnait la présence de défectuosités aux freins et aux amortisseurs, et l'indication selon laquelle ce véhicule avait déjà été présenté à deux reprises à l'ocn, soit le 15 mars 2002 et le 3 avril 2002. A cet égard, la recourante a expliqué à la police que, le 3 avril 2002, son garagiste avait lui-même amené le véhicule pour l'expertise mais qu'il n'avait pas eu le temps de faire établir un nouveau permis de circulation. Il avait délégué cette tâche à l'époux de la recourante mais comme celui-ci travaillait le 5 avril 2002, il comptait se rendre à l'ocn le 8 avril 2002 pour le faire établir. Selon le rapport d'expertise de l'ocn sollicité par le juge d'instruction suite à l'accident, il paraît peu probable qu'une défaillance technique du véhicule soit à l'origine de l'accident. De même, elle affirme ne pas être au courant de la cessation de l'assurance RC. Il ne ressort pas du dossier constitué par l'assurance-invalidité que la recourante a été condamnée en relation avec son accident pour un délit ou un crime qu'elle aurait commis intentionnellement. Pour pouvoir procéder à une réduction de la rente, seule la première hypothèse de l'art. 21 LPGA pourrait être applicable dans le cas d'espèce. Il faut ainsi se poser la question de savoir si la recourante a aggravé ou provoqué le cas d'assurance intentionnellement ou par dol éventuel. S'il est indéniable que le comportement de la recourante peut être qualifié de négligence et même de négligence grave, par contre, l'on ne saurait affirmer que, sans prenant le volant de la voiture sans être accompagnée, elle a accepté (ou s'est accommodée) les conséquences d'un éventuel accident dont la survenance possible devait en plus lui être consciente. De plus, le fait de circuler avec un véhicule qui n'est pas assuré n'a pas de lien avec le fait d'intentionnellement accepter la possibilité d'être blessé mais est uniquement en lien avec les conséquences financières des risques de la conduite. Enfin, il est peu vraisemblable qu'un problème technique ait provoqué l'accident et les explications de la recourante par rapport au défaut de permis de circulation du véhicule démontrent qu'elle n'avait manifestement pas l'impression que des risques techniques du véhicule allaient provoquer un accident, le tribunal de céans

- 6 - constate que les circonstances pour admettre que le risque assuré a été provoqué ou aggravé intentionnellement ou par dol éventuel ne sont pas remplies. Le recours doit donc être admis sur ce point et, partant, la rente entière d'invalidité, octroyée pour la période du 1 er avril 2003 au 31 janvier 2006, ne doit pas être réduite. 6.502.4.2.2; 6.502.4.3; 6.502.6