DECISION DCC DU 23 OCTOBRE 2008

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DECISION DCC 08-144 DU 23 OCTOBRE 2008 Requérants : Maîtres Saïdou AGBANTOU et Faustin ATCHADE, Conseils de Madame Justine MEVO Contrôle de conformité Exception d inconstitutionnalité d un décret Irrecevabilité La Cour Constitutionnelle, Saisie d une lettre du 28 août 2008 enregistrée à son Secrétariat à la même date sous le numéro 1540/111/REC, par laquelle le Président de la Cour Suprême transmet à la Haute Juridiction, l exception d inconstitutionnalité soulevée contre le Décret n 2001-410 du 15 octobre 2001 portant modalités d application de la loi n 98-006 du 09 mars 2000 portant régime électoral communal et municipal en République du Bénin par Maîtres Saïdou AGBANTOU et Faustin ATCHADE, Conseils de Madame Justine MEVO dans le litige qui l oppose à Monsieur Mathias Isaac AHIVODJI, tous deux candidats aux élections municipales et communales ; VU la Constitution du 11 décembre 1990 ; VU la Loi n 91-009 du 04 mars 1991 portant loi organique sur la Cour Constitutionnelle modifiée par la Loi du 31 mai 2001 ; VU le Règlement Intérieur de la Cour Constitutionnelle ; Ensemble les pièces du dossier ; Ouï Monsieur Bernard D. DEGBOE en son rapport ; Après en avoir délibéré,

2 Considérant que les requérants exposent dans leur mémoire exceptionnel du 25 août 2008 enregistré au greffe de la Cour Suprême à la même date que : «par requêtes, l une portant en objet, recours en rectification de résultats et l autre portant contestation des résultats des élections municipales et communales du 12 ème arrondissement du Littoral en date toutes deux du 23 mai 2008, le sieur AHIVODJI Mathias Isaac, candidat FCBE dans le 12 ème arrondissement de Cotonou, a cru devoir saisir la Haute Juridiction de céans, aux fins de voir rectifier l attribution du siège faite par la CENA à dame MEVO Justine, lors de la proclamation des résultats des élections communales et municipales des 20 avril et 1 er mai 2008. Au soutien de son recours, le requérant prétend que la Renaissance du Bénin au titre desdits résultats, a obtenu 16.908 voix soit 62,54% des suffrages exprimés et la FCBE, 7.357 soit 27,21% des suffrages exprimés. Les différents résultats obtenus par ces deux partis devraient selon le requérant, aboutir à l attribution de 4 sièges à la RB et de 02 sièges à la FCBE au lieu de 5 sièges à la RB et 1siège à la FCBE comme proclamés par la CENA. Selon donc le requérant, l attribution des sièges devrait être faite de la façon suivante : - dans un premier temps la détermination des sièges selon la majorité absolue ; la RB ayant obtenu 62,54%, la moitié des sièges à pourvoir plus un (01) soit 4 sièges devraient en l espèce lui revenir. - dans un second temps, pour les sièges restants à pourvoir, il a fait le suffrage obtenu par la RB divisé par le nombre de sièges obtenus par la RB suivant l attribution majoritaire plus un (01), ce qui donne 3.382,6 voix. Pour l attribution du sixième siège suivant le même mode de calcul, la RB obtiendrait 2818 voix. Lorsque le même mode de calcul est appliqué au suffrage de la FCBE on obtient respectivement, 7.357 voix et 3.678,5 voix. Il conclut que les deux (02) derniers sièges de cette circonscription électorale devraient revenir à la FCBE et non un seul comme en a décidé la CENA» ; Considérant que les requérants poursuivent : «Il est clair et indiscutable que ce mode de calcul adopté par le requérant repose malheureusement sur le Décret n 2001-410 du 15 octobre 2001 portant modalités d application de la Loi 98-006 du 9 mars 2000 portant régime électoral communal et municipal en République du Bénin, dont certaines dispositions sont abrogées par la Loi 2007-28 du 23 novembre 2007 fixant les règles particulières applicables aux membres des conseils communaux ou municipaux et des membres des conseils de villages et quartiers de ville en

3 République du Bénin. En effet, d une part, les dispositions de l article 9 dudit décret qui renvoient à la simulation indiquée à l annexe II et qui ont servi de base de calcul au requérant, contrastent avec les dispositions de l article 6 du même Décret et celles de l article 12 notamment en ses alinéas 2 et 4 de la Loi 2007-28 du 23 novembre 2007 fixant les règles particulières applicables aux membres des Conseils communaux ou municipaux et des Conseils de villages et quartiers de ville en République du Bénin. Or, selon le principe sacro-saint de la hiérarchie des normes, un décret ne peut disposer contrairement à une loi. D autre part, l application de l article 9 de ce décret viole les articles 150 et 151 de la Constitution, en ce que cette disposition ne respecte pas les conditions de répartition des sièges prévues par l article 12 alinéa 4 de la Loi 2007-28 du 23 novembre 2007 fixant les règles particulières applicables aux membres des Conseils communaux ou municipaux et des membres des Conseils de villages et quartiers de ville en République du Bénin» ; Considérant que les requérants développent : «A la lecture de l article 12 de la Loi n 2007-28 du 23 novembre 2007 fixant les règles particulières applicables aux membres des Conseils communaux ou municipaux et des membres des Conseils de villages et quartiers de ville en République du Bénin c est le mode de scrutin pluri-nominal proportionnel avec prime majoritaire qui est appliqué pour l attribution des sièges aux élections des membres des Conseils communaux ou municipaux de 2008 au Bénin. On peut en déduire qu une prime est donnée au parti qui a obtenu le plus grand nombre de suffrages dès lors que celui-ci a obtenu la majorité absolue ou à défaut 40% au moins des suffrages exprimés en lui attribuant dans un premier temps un nombre de sièges égal à la majorité absolue des sièges à pourvoir ; dans un second temps, une partie des sièges restants dans une répartition à la représentation proportionnelle supérieure ou égale à la part de chacune des autres listes» ; qu ils soutiennent : «avec donc l adoption de la Loi 2007-28, la répartition des sièges dans les circonscriptions électorales se fait selon un mode de scrutin mixte introduisant un mécanisme de proportionnel dans un scrutin à dominance majoritaire La représentation proportionnelle signifie que chaque liste aura un certain nombre de représentants élus, en proportion avec le nombre des suffrages obtenus, ou, plus exactement, proportionnel au nombre de fois qu elle contient le quotient électoral Lesdits requérants et la Cour Suprême ainsi que la simulation visée par l article 9 du décret sus évoqué n ont pas procédé au calcul du quotient électoral comme il est exigé en matière de répartition suivant la représentation proportionnelle.

4 Mieux, ils sont passés directement à la plus forte moyenne en brûlant l étape du calcul du quotient électoral. Or, le calcul du quotient électoral est obligatoire en matière de représentation proportionnelle et doit tenir compte des sièges restants à pourvoir qui en l espèce sont 2. En omettant de calculer le quotient électoral, le Décret viole le principe de la représentation proportionnelle contenu dans l alinéa 4 de l article 12 de la Loi 2007-28 du 23 novembre 2007 fixant les règles particulières applicables aux membres des Conseils communaux ou municipaux et des membres des Conseils de villages et quartiers de ville en République du Bénin» ; Considérant qu aux termes de l article 122 de la Constitution : «Tout citoyen peut saisir la Cour Constitutionnelle sur la constitutionnalité des lois, soit directement, soit par la procédure de l exception d inconstitutionnalité invoquée dans une affaire qui le concerne devant une juridiction. Celle-ci doit surseoir jusqu à la décision de la Cour Constitutionnelle qui doit intervenir dans un délai de trente jours» ; Considérant que le présent recours porte sur un décret et non sur une loi ; que par conséquent, il échet pour la Cour de le déclarer irrecevable ; Considérant que par ailleurs l article 35 de la Constitution énonce : «Les citoyens chargés d une fonction publique ou élus à une fonction politique ont le devoir de l accomplir avec conscience, compétence, probité, dévouement et loyauté dans l intérêt et les respect du bien commun» ; que le fait pour un avocat, auxiliaire de justice participant au service public de la justice, d invoquer l exception d inconstitutionnalité en toutes circonstances alors que selon la Constitution, cette exception ne peut porter que sur une loi, dénote une volonté manifeste de faire du dilatoire et d empêcher le juge saisi du dossier de rendre sa décision dans un délai raisonnable ; qu en l espèce, en se comportant comme ils l ont fait, Maîtres Saïdou AGBANTOU et Faustin ATCHADE ont violé l article 35 de la Constitution ;

5 D E C I D E : Article 1 er.- : L exception d inconstitutionnalité soulevée contre le Décret n 2001-410 du 15 octobre 2001 portant modalités d application de la Loi n 98-006 du 09 mars 2000 portant régime électoral communal et municipal en République du Bénin est irrecevable. Article 2.- : Maîtres Saïdou AGBANTOU et Faustin ATCHADE ont violé l article 35 de la Constitution. Article 3.- : La présente décision sera notifiée aux Maîtres Saïdou AGBANTOU et Faustin ATCHADE, au Président de la Cour Suprême, au Bâtonnier de l Ordre des Avocats et publiée au Journal Officiel. Ont siégé à Cotonou, le vingt trois octobre deux mille huit, Messieurs Robert S. M. DOSSOU Président Bernard Dossou DEGBOE Membre Théodore HOLO Membre Zimé Yérima KORA-YAROU Membre Robert TAGNON Membre Madame Clémence YIMBERE DANSOU Membre Le Rapporteur, Le Président, Bernard D. DEGBOE.- Robert S. M. DOSSOU.-