La démonstration. Le sophiste se présente comme celui qui peut tout démontrer. Son outil est le langage. Son objectif est la persuasion.

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Transcription:

La démonstration! PLAN 1 Démonstration et argumentation A) Les usages de la démonstration On appelle sophistes des individus qui, en Grèce antique, faisaient commerce de leur capacité rhétorique lors des procès ou lors de prises de parole publique. Le sophiste se présente comme celui qui peut tout démontrer. Son outil est le langage. Son objectif est la persuasion. C est contre la sophistique que la philosophie se construit dans un premier temps. Car une science, quelle qu elle soit, doit d abord être démonstrative : pour Aristote ce qui ne relève pas de la démonstration appartient au domaine de l opinion. B) Argumenter mathématiquement Une démonstration philosophique est une déduction qui vise à prouver le caractère vrai d une conclusion. Elle s appuie sur des prémisses reconnues ou considérées comme vraies. C est la raison pour laquelle elle emprunte à l arithmétique et à la géométrie sa forme et sa méthode. Descartes considère en effet que l esprit est en mesure de percevoir dans l arithmétique et la géométrie les critères qui permettent à l esprit d accéder au vrai. 2 Démonstration et rationalité A) Les principes de la démonstration Aristote, dans la Métaphysique, distingue trois grands prérequis pour qu une pensée soit rationnelle : 1. Ne pas se contredire : principe de non-contradiction. 2. Ne pas nier l existence d une chose qui est : principe d identité.

3. Il n y a pas de milieu entre le vrai et le faux : principe du tiers-exclu. La démonstration montre donc la raison en acte. Elle vise l adhésion rationnelle de l interlocuteur et non sa simple persuasion. B) La rationalité dans la démonstration Il faut toutefois distinguer la rationalité du raisonnable. En effet, une démonstration peut-être raisonnable sans être rationnelle. C est ce que nous montre l étude du syllogisme. Un syllogisme peut avoir une forme raisonnable, tout en étant absurde du point de vue logique : 1. Tout ce qui est rare est cher. 2. Un cheval bon marché est rare. 3. Donc un cheval bon marché est cher. Pour qu un syllogisme soit vrai ou «scientifique», il faut donc que la conclusion soit contenue dans la première proposition (la majeure) et que la seconde proposition (la mineure) mette en avant la conclusion. Ex. : 1. Tous les hommes sont mortels. 2. Socrate est un homme. 3. Donc Socrate est mortel. Ce qui est raisonnable est donc ce qui ne contredit ni la logique ni les indices concordants dont nous disposons dans notre raisonnement. Il faut ainsi tenir pour raisonnable ce qui, dans le domaine de la connaissance, ne contredit ni la logique ni les indices concordants qui nous apparaissent valider le contenu et la forme de notre raisonnement. 3 Démonstration et méthode A) Comment produire une démonstration qui mène au vrai? Produire une démonstration qui mène au vrai suppose déjà de partir de bases fermes. Pour cela, on assigne au doute une place prépondérante. Sextus Empiricus examine la question de la garantie d une démonstration, le fameux «prouve ta preuve!» vient ainsi montrer l absurdité qu il y aurait à vouloir tout démontrer. Comme le souligne Wittgenstein, toute démonstration, à l image d une porte, a

besoin de gonds pour être ouverte. Il faut en effet s appuyer sur des principes indubitables ou que l on considère n avoir pas de raison de mettre en doute, au vu des éléments dont nous disposons par l expérience et l observation. B) Les règles de la méthode Il faut alors établir des règles certaines d une recherche et d une exposition de la vérité. Descartes en énonce quatre dans le Discours de la méthode : 1. Ne jamais recevoir aucune chose pour vraie sans la connaître être telle. 2. Diviser chacune des difficultés que l on examine en différentes étapes. 3. Conduire par ordre ses pensées, en commençant par les objets les plus simples jusqu à la connaissance des plus composés. 4. Faire en toute chose des dénombrements entiers, et des revues générales, pour ne rien laisser de côté.

La démonstration! DÉFINITIONS Convaincre Convaincre, c est obtenir l assentiment de son interlocuteur par une démonstration rationnelle. Ce n est donc pas persuader, à savoir, séduire par un beau discours séduisant sans démonstration rationnelle et expérimentale suffisante. Déduction La déduction est une opération de l esprit par laquelle on passe avec rigueur d une proposition ou d un ensemble de prémisses à une proposition nécessaire. Elle ne découvre rien de nouveau et ne fait que montrer ce qui est impliqué par les prémisses. Démonstration Étymologiquement, un discours qui montre. Une démonstration est une déduction qui vise à prouver le caractère vrai d une conclusion. Elle s appuie sur des prémisses reconnues ou considérées comme vraies. Opinion Affirmation que l on pense vraie en admettant qu on ne peut pas toutefois en garantir le caractère véridique. Elle s oppose en cela au savoir et à la simple croyance. Persuader Persuader, c est obtenir l assentiment de son interlocuteur par des arguments irrationnels qui se fondent sur la crédulité, l imagination ou les émotions de ce dernier, en fonction de ses désirs propres et de ses illusions.

Preuve Fait, document ou démonstration qui enlève le doute au sujet d une affirmation ou qui permet de valider objectivement un jugement. Principe de non-contradiction Le principe de non-contradiction est une exigence logique selon laquelle je ne peux pas dire d une proposition qu elle est vraie et fausse à la fois, dans les mêmes conditions, sous le même rapport et en même temps : A est différent de B. Principe d identité Le principe d identité pour Aristote est le fait simple qu une réalité considérée sous un même aspect et en même temps est identique à elle-même : A = A. Principe du tiers-exclu Le principe du tiers-exclu met en évidence le fait qu une proposition est ou vraie ou fausse, et ne suppose donc pas de terme médian. Ce principe repose sur une logique comprenant deux valeurs. Sophiste Dans l Antiquité grecque, un sophiste est un individu qui manie le langage et la persuasion de manière délibérément biaisée pour démontrer ce qu il souhaite et non la vérité. C est en grande partie contre la sophistique que la philosophie de Platon et d Aristote vont se construire. Syllogisme Raisonnement formel établissant une conclusion nécessaire que l on déduit à partir des prémisses de ce raisonnement. Il est composé de trois propositions (la majeure, la mineure et la conclusion) et de trois termes.

Vérité/vrai La vérité est l adéquation d un discours au sujet d une réalité à cette réalité. Or nos discours n ont pas l assurance d épouser la réalité et le concept de réalité est équivoque. Est vrai ce qui a été prouvé rationnellement et n est plus, au vu de l état actuel de nos connaissances, l objet de doute ou de désaccord.

La démonstration! EXEMPLES Un exemple de syllogisme absurde, dans Rhinocéros de Ionesco : «Tous les chats sont mortels. Socrate est mortel. Donc Socrate est un chat». Pense au déroulement d une enquête policière : une démonstration se base sur des preuves, des indices, des déductions, et mène, le plus souvent, à la résolution d un problème et à l établissement de la vérité. Pense à t inspirer dans ta dissertation de tes connaissances en mathématiques : une démonstration de géométrie vue en cours peut ici te servir d exemple pertinent.

La démonstration! SUJETS TYPES Comment reconnaître le faux? Analyse du sujet Ce sujet invite non pas à traiter du vrai et du faux, mais à mettre en évidence les caractères propres au faux. S il faut évoquer la question du vrai, ce n est pas le point central du sujet : attention donc à ne pas confondre ce sujet avec un sujet tel que «Comment distinguer le vrai du faux?». Pour définir le faux, tu peux penser à l opposition entre la réalité et le discours faux, à l opposition entre un discours vrai et un discours mensonger, etc. La question porte avant tout sur les méthodes qui permettent de reconnaître le faux. Tu dois travailler spécifiquement sur le terme «comment». Par là, on attend une interrogation sur les modes de reconnaissance du faux, sur ses apparences, sur les méthodes qui servent à dire qu une chose est fausse. Pistes de problématisation Tu dois dans un sujet comme celui-ci donner des exemples précis : on peut penser au faux en peinture (qu il s agisse d une contrefaçon ou bien d un trompe l oeil), mais surtout aux sophistes. En effet, un sophiste est celui qui emploie le discours pour induire en erreur. Pistes pour le plan Tu peux montrer d abord le caractère inadéquat du faux pour rendre compte du réel, puis évoquer les failles internes d un discours ou d une démonstration fausse : le faux ne fonctionne pas. Enfin, tu peux t interroger sur les usages du faux dans la tromperie et dans l erreur, en montrant par quels moyens l esprit peut s en prémunir (sur le modèle des longues chaînes de raison évoquées dans le cours à propos de Descartes). Qu est-ce qu une preuve? Analyse du sujet Le sujet porte sur la nature propre d une preuve. Le sujet invite donc à se demander comment la preuve peut comporter une valeur propre dans la recherche de la vérité. Il ne

faut donc pas confondre ce sujet avec des sujets voisins comme «Y a-t-il des preuves à la vérité?» ou «Peut-il y avoir une vérité sans preuves?». Pistes de problématisation La preuve, c est d abord un fait ou un raisonnement dont on se sert pour établir la vérité au sujet d une proposition. Il faudra donc s interroger à la fois sur les preuves matérielles (pense au rôle de la preuve dans les séries ou nouvelles policières) et sur les raisonnements qui ont valeur de preuve. Mais aussi sur les limites de la preuve : Sextus Empiricus montre le caractère indéfini de l activité qui consiste à prouver quelque chose («prouve ta preuve»). Pistes pour le plan On pourrait se demander d abord ce qui rend un fait ou une démonstration apte à recevoir le nom de preuve, puis dans quelle mesure l usage de la preuve s accorde nécessairement avec la vérité, avant de montrer le caractère limité de la preuve dans la recherche de la vérité (la preuve n est qu une étape, mais pas une conclusion).

La démonstration! EXTRAITS Texte 1. Aristote : la connaissance est connaissance de la cause «Nous estimons posséder la science d une chose de manière absolue, et non pas, à la façon des Sophistes, d une manière purement accidentelle, quand nous croyons que nous connaissons la cause par laquelle la chose est, que nous savons que cette cause est celle de la chose, et qu en outre il n est pas possible que la chose soit autre qu elle n est. Il est évident que telle est la nature de la connaissance scientifique ; ce qui le montre, c est l attitude aussi bien de ceux qui ne savent pas que de ceux qui savent : les premiers croient se comporter comme nous venons de l indiquer, et ceux qui savent se comportent aussi en réalité de cette même façon. Il en résulte que l objet de la science au sens propre est quelque chose qui ne peut pas être autre qu il n est.» Aristote, Seconds Analytiques, IV siècle avant J.-C. e Texte 2. Descartes : l arithmétique et la géométrie, modèles pour l esprit «On voit clairement pourquoi l'arithmétique et la géométrie sont beaucoup plus certaines que les autres sciences : c'est que seules elles traitent d'un objet assez pur et simple pour n'admettre absolument rien que l'expérience ait rendu incertain, et qu'elles consistent tout entières en une suite de conséquences déduites par raisonnement. Elles sont donc les plus faciles et les plus claires de toutes, et leur objet est tel que nous le désirons, puisque, sauf par inattention, il semble impossible à l'homme d'y commettre des erreurs.[...] De tout cela on doit conclure, non pas, en vérité, qu'il ne faut apprendre que l'arithmétique et la géométrie, mais seulement que ceux qui cherchent le droit chemin de la vérité ne doivent s'occuper d'aucun objet, dont ils ne puissent avoir une certitude égale à celle des démonstrations de l'arithmétique et de la géométrie.»

Descartes, Règles pour la direction de l esprit, 1628 Texte 3. Wittgenstein : ce qu est la certitude «340. La certitude avec laquelle nous croyons n'importe quelle proposition mathématique est la même que celle que nous avons quand nous savons comment il faut prononcer les lettres A et B, comment s'appelle la couleur de notre sang et quand nous savons que les autres ont du sang qu'ils appellent "sang". 341. C'est-à-dire : les questions que nous posons et nos doutes reposent sur ceci : certaines propositions sont soustraites au doute, comme des gonds sur lesquels tournent ces questions et doutes. 342. C'est-à-dire : il est inhérent à la logique de nos investigations scientifiques qu'effectivement certaines choses ne soient pas mises en doute. 343. Mais ce n'est pas que nous ne puissions pas nous livrer à une investigation sur tout, bien forcés ainsi de nous contenter de présuppositions. Non. Si je veux que la porte tourne, il faut que les gonds soient fixes.» Wittgenstein, De la certitude, 1976 Texte 4. Sextus Empiricus : prouve ta preuve! «Les nouveaux sceptiques nous ont encore laissé cinq moyens de suspension du jugement : le premier est pris de la contrariété ; le second jette le dogmatique dans l'infini ; le troisième est tiré de la relation ; la quatrième, qu'on peut appeler hypothétique, est pris de quelque supposition ; le cinquième est le Diallèle, qui fait voir que le dogmatique prouve souvent deux choses également incertaines l'une par l'autre réciproquement.» Sextus Empiricus, Hypotyposes pyrrhoniennes, II siècle de notre ère e Texte 5. Descartes : les quatre préceptes de la méthode

«Le premier était de ne recevoir jamais aucune chose pour vraie, que je ne la connusse évidemment être telle [...]. Le second, de diviser chacune des difficultés que j'examinerais, en autant de parcelles qu'il se pourrait, et qu'il serait requis pour les mieux résoudre. Le troisième, de conduire par ordre mes pensées, en commençant par les objets les plus simples et les plus aisés à connaître, pour monter peu à peu, comme par degrés, jusques à la connaissance des plus composés ; [...] Et le dernier, de faire partout des dénombrements si entiers, et des revues si générales, que je fusse assuré de ne rien omettre. Ces longues chaînes de raisons, toutes simples et faciles, dont les géomètres ont coutume de se servir, [...], m'avaient donné occasion de m'imaginer que toutes les choses, qui peuvent tomber sous la connaissance des hommes, s'entresuivent en même façon [...]» Descartes, Discours de la méthode, 1637

La démonstration! AUTEURS Aristote (384 av. J.-C. - 322 av. J.-C. ) Philosophe grec, disciple de Platon. Adoptant un point de vue critique du platonisme, il fonde sa propre école, le Lycée. Il est le premier philosophe à essayer de produire une œuvre philosophique systémique. Œuvres Analytiques Sextus Empiricus (160-210) Philosophe et médecin grec. Il est le chef de file des philosophes dits «sceptiques». Pensée Sextus Empiricus considère que rien ne peut être considéré absolument comme certain : c'est le sens de l'expression «prouve ta preuve». Œuvres Hypotyposes pyrrhoniennes René Descartes (1596-1650) Philosophe et scientifique français, Descartes est l'un des fondateurs de la «philosophie du sujet», qui s appuie sur une réflexion méthodique, excluant du raisonnement tout élément douteux comme s il était entièrement faux. Il établit que la

connaissance la plus certaine est le «je pense» (cogito), et procède ensuite par chaînes de raisons en s assurant de la certitude de chaque étape. Pensée La démonstration est chez Descartes une notion centrale. La pensée doit épouser une démarche rationnelle et établir une liaison entre notre désir de vérité et notre devoir de clarté. Œuvres Discours de la méthode, Règles pour la direction de l esprit Ludwig Wittgenstein (1889-1951) Wittgenstein est un philosophe autrichien qui consacre ses recherches à la notion de vérité. Pensée Il interroge les limites de la connaissance et les modalités d accès langagier et logique à la vérité. Œuvres Tractatus logico-philosophicus