Evolution des âges de départ des fonctionnaires hospitaliers et territoriaux en catégorie active



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Transcription:

Evolution des âges de départ des fonctionnaires hospitaliers et territoriaux en catégorie active Laurent Soulat # Version provisoire Résumé : Cette étude a pour but d étudier l évolution des âges de départ par génération des fonctionnaires territoriaux et hospitaliers affiliés à la CNRACL pouvant bénéficier d un départ dès 55 ans au motif de la catégorie active. Elle porte sur 137 967 individus nés entre 1943 et 1951 dont 97 % sont retraités au 31 décembre 2012. Afin d étudier l évolution des âges de départ de ces fonctionnaires en catégorie active, nous recourons aux modèles de durée afin de décrire l évolution des probabilités de départ en retraite. Les générations prises en compte ne sont pas directement concernées par la réforme de 2003 ; toutefois, cette réforme, ou l anticipation de mesures visant à durcir le dispositif de départ précoce, a conduit les personnes nées en 1947 et 1948 ayant rempli les conditions de 15 années de service dans un emploi en catégorie active à accélérer leur départ par rapport aux générations précédentes. L âge de départ a de nouveau légèrement augmenté pour les générations plus récentes retenues dans l étude pour atteindre, en moyenne, celui des générations nées entre 1943 et 1945. Une première approche de l évolution des âges de départ des fonctionnaires territoriaux et hospitaliers en catégorie activé repose sur des estimations de courbes de survie par génération, fonction publique te genre. Sur cette base des taux de survie, les âges de départs calculés pour l ensemble des générations nées entre 1943 et 1951 montrent que l âge moyen de départ est compris entre 56 et 57 ans et s élève à 56,4 ans pour la génération 1951. L âge moyen de départ apparaît relativement plus élevé dans la Fonction publique territoriale que dans la Fonction publique hospitalière, avec respectivement 58,1 ans et 55,9 ans pour la génération 1951. L approche par les courbes de survie est complétée par des estimations de plusieurs spécifications de modèles de durée paramétriques afin de mieux saisir ces évolutions par année de naissance. En effet, les modèles semi paramétriques nécessitant un risque proportionnel, ils apparaissent peu adaptés à l étude des évolutions des âges de départ par génération. Globalement, toutes choses égales d ailleurs, la probabilité des départs en retraite dès 55 ans augmente pour les générations 1947 et 1948 par rapport aux générations précédentes, puis se réduit par la suite. Mots clés : Fonctionnaires, collectivités locales, fonction publique hospitalière, fonction publique territoriale, CNRACL, départ en retraite, réforme des retraites, modèles de durée. # Laurent Soulat, Direction des retraites et de la solidarité de la Caisse des Dépôts, 12 avenue Pierre Mendès France 75914 Paris Cedex 13, laurent.soulat@caissedesdepots.fr. 1

1. Introduction La catégorie active est une spécificité de la Fonction publique. Elle concerne des emplois jugés pénibles et donne le droit aux personnes qui ont servi une durée minimale, généralement de 15 ans 1, de pouvoir bénéficier d une ouverture des droits à pension à un âge plus précoce que l âge légal, en général à partir de 55 ans 2. Dans la fonction publique hospitalière (FPH), cette catégorie concerne les personnels paramédicaux dont l emploi comporte un contact direct et permanent avec des malades. Il s agit plus particulièrement des métiers des filières de soins et médico techniques. Ainsi, les corps concernés sont les infirmiers de soins généraux et de spécialités n ayant pas opté pour le nouveau statut suite à la réforme LMD 3, les sages femmes, les manipulateurs électroradiologie médicale, les masseurs kinésithérapeutes, les aides soignants, les auxiliaires de puériculture et les agents des services hospitaliers. Dans la fonction publique territoriale (FPT), la catégorie active porte sur les emplois des filières d incendie et secours, de police municipale, de santé 4 et technique 5. Les métiers concernés sont les différents grades des sapeurs pompiers professionnels officiers et non officiers, les médecins, pharmaciens, infirmiers de sapeurs pompiers professionnels, les différents grades de la police municipale, ainsi que les égoutiers. Toutefois, tous les fonctionnaires pouvant bénéficier d un départ dans le dispositif de catégorie active ne choisissent pas d exercer leur droit d option et partent dans un autre dispositif, y compris en départ normal après 60 ans, alors que d autre vont exercer leur droit et partir entre 55 et 60 ans. Ainsi, un peu moins de deux fonctionnaires territoriaux ou hospitaliers sur trois pouvant bénéficier d un départ dans ce dispositif, exercent effectivement leur droit en partent avant 60 ans 6. L objectif de ce travail est donc d étudier les départs en retraite des fonctionnaires territoriaux et hospitaliers affiliés à la Caisse nationale de retraite des agents des collectivités locales (CNRACL) pouvant bénéficier d un départ en retraite dans le dispositif de catégorie active. Il est centré sur 1 La durée de service actif exigée pour bénéficier d un départ anticipé au titre de la catégorie active peut varier pour certains emplois ou corps, mais est généralement de 15 ans. Cette durée minimale augmente progressivement pour atteindre 17 ans pour les fonctionnaires à compter du 01/01/2015. 2 L âge d ouverture des droits d un fonctionnaire bénéficiant d un départ en catégorie active peut varier selon les emplois et corps. Pour plus de détails, voir l article L24 du Code des pensions civiles et militaires pour les fonctionnaires d Etat et l article 25 3 du décret n 2003 1306 du 26 décembre 2003 relatif à la CNRACL pour les fonctionnaires hospitaliers et territoriaux. Ainsi, les agents des réseaux souterrains des égouts peuvent bénéficier d un départ au motif «insalubre» et sont le plus souvent comptés dans les emplois en catégorie active ; ces agents bénéficient d une ouverture des droits à partir de 50 ans. L âge d ouverture des droits est relevé progressivement. Pour un âge d ouverture des droits fixé initialement à 55 ans, celui ci augmente progressivement à 57 ans pour les générations nées à compter du 01/01/1960. 3 Réforme de l enseignement supérieur licence master doctorat conduisant au protocole d accord du 2 février 2010. 4 Sous réserve que le fonctionnaire exerce ses fonctions dans un service de santé. 5 Sous réserve que le fonctionnaire exerce des fonctions listées dans l arrêté interministériel de classement du 12/11/1969. 6 L année d ouverture des droits retenue est l année à laquelle le fonctionnaire aurait pu partir, par exemple l année de ses 55 ans, même s il prend sa retraite au delà, par exemple à 62 ans. La pension de ce fonctionnaire est alors calculée en retenant la durée nécessaire pour avoir le taux plein sur la base de la durée requise pour la génération qui atteint 60 ans l année où le fonctionnaire aurait pu partir. Ce mécanisme permet généralement aux retraités qui auraient pu partir dans le dispositif de catégorie active de bénéficier d une pension plus élevée. Il convient de noter que lorsqu un fonctionnaire territorial ou hospitalier peut bénéficier de différents dispositifs au moment de son départ en retrait, le dispositif lui permettant de percevoir la pension la plus favorable sera retenu. Ainsi, un départ après l âge légal de 60 ans d un individu éligible au dispositif de catégorie active sera en général enregistré comme un départ en catégorie active plutôt qu un départ normal. 2

l évolution des âges de départ de ces fonctionnaires éligibles à la catégorie active pour les générations nées entre 1943 et 1951. L appartenance à la catégorie active est établie ici par le fait d avoir validé au moins 15 années en catégorie active ou d être affecté, en fin de carrière, dans un cadre d emplois ou corps de catégorie active. Cet article vient compléter l étude sur l évolution des âges de départ des fonctionnaires territoriaux et hospitaliers en catégorie sédentaire (Cambier, Poujardieu et Soulat, 2014). La réforme des retraites de 2003 a introduit de nombreuses modifications en termes de calcul de pension et d acquisition de droits. Si cette réforme a pour objectif de repousser l âge de liquidation en rendant plus contraignantes la durée de cotisation, elle permet également une augmentation des départs anticipés. Toutefois, ces modifications réglementaires ont une incidence qui s applique avec un décalage de temps sur les personnes éligibles à la catégorie active par rapport aux personnes en catégorie sédentaire. En effet, pour les salariés du secteur privé, la réforme de 1993 a enclenché cette augmentation de la durée d assurance, celle ci passant progressivement de 150 à 160 trimestres. La réforme de 2003 a étendu cette mesure aux fonctionnaires et a prolongé cette progression pour l ensemble des régimes. Dans un premier temps, le rattrapage de la durée d assurance des fonctionnaires sur celle des salariés du secteur privé s effectue progressivement au rythme de deux trimestres par année de naissance, de 150 trimestres pour la génération 1943 à 160 trimestres pour la génération 1948. Dans un second temps, l augmentation suit un rythme identique pour l ensemble des régimes de retraite, initialement d un trimestre par an, puis d un trimestre tous les deux ans et enfin d un tous les trois ans afin de répartir les gains d espérance de vie entre allongement de la durée d activité et vie à la retraite. En plus de l allongement de la durée requise, la réforme de 2003 a introduit une surcote et une décote également étendue à la fonction publique. La réforme de 2003 instaure aussi un dispositif de départ anticipé pour carrière longue permettant aux personnes qui ont commencé à travailler à un âge précoce de partir avant l âge légal. Cependant, pour les générations nées entre 1943 et 1951 relevant de la catégorie active, la réforme de 2003 n introduit une augmentation du nombre de trimestres requis pour bénéficier d une retraite à taux plein qu à partir de la génération née en 1949. En effet, pour les fonctionnaires relevant de la catégorie active, la durée d assurance requise est celle en vigueur pour les fonctionnaires qui atteignent 60 ans l année de leur ouverture du droit. En d autres termes, pour un fonctionnaire relevant de la catégorie active né, par exemple, en 1946 et qui atteint l âge d ouverture de ses droits en 2001, la législation qui s applique à lui est celle d un fonctionnaire sédentaire né en 1941, à savoir une durée d assurance nécessaire pour bénéficier d une retraite à taux plein de 150 trimestres, et non de 156 trimestres correspondant à la durée associée à la génération 1946. Pour un fonctionnaire relevant de la catégorie active, cette durée requise pour le taux plein reste de 150 trimestres jusqu à la génération née en 1948 avec une ouverture des droits à partir de 2003 (correspondant à la législation de génération 1943 de la catégorie sédentaire), puis augmente de deux trimestres par année de naissance pour atteindre 156 trimestres pour la génération née en 1951, avec une ouverture des droits à partir de 2006 (législation s appliquant à la génération 1946 de la catégorie sédentaire). Par conséquent, la durée requise pour bénéficier d une retraite à taux plein atteint 40 annuités pour la génération relevant de la catégorie active née en 1953, soit au delà des 3

générations que nous prenons en compte ici. Le tableau 1 reprend les durées requises pour le taux plein par année de naissance. Tableau 1 Durée requise pour le taux plein et génération de référence pour les fonctionnaires en catégorie active Génération Année des 55 ans (année d'ouverture des droits) Génération de référence pour le taux plein (celle qui atteint 60 ans) Durée d assurance nécessaire pour le taux plein 1943 1998 1938 150 1944 1999 1939 150 1945 2000 1940 150 1946 2001 1941 150 1947 2002 1942 150 1948 2003 1943 150 1949 2004 1944 152 1950 2005 1945 154 1951 2006 1946 156 1952 2007 1947 158 1953 2008 1948 160 1954 2009 1949 161 1955 2010 1950 162 1956 2011 1951 163 Par conséquent, d un côté, on peut s attendre à ce que l âge de départ des fonctionnaires territoriaux et hospitaliers relevant de la catégorie active tende à légèrement augmenter à partir de la génération née en 1949 par rapport aux générations précédentes sous l effet de la hausse de la durée d assurance requise pour bénéficier d une retraire à taux plein (au moins pour les individus dont la durée de cotisation serait inférieure à la durée taux plein à l âge d ouverture des droits). D un autre côté, on peut imaginer que les fonctionnaires relevant de la catégorie active ont pu anticiper une réforme de 2003 qui serait venue durcir leurs conditions de départ, conduisant ceux qui peuvent liquider à le faire le plus tôt possible (dès 55 ans). Ce second effet, d anticipation de réforme, entrainerait une réduction de l âge de départ pour les fonctionnaires des générations atteignant l âge d ouverture des droits en 2002 et 2003, soit les générations nées en 1947 et 1948. Ces deux effets pourraient donc conduire dans un premier temps à une baisse de l âge moyen de départ pour les générations 1947 et 1948 par rapport aux précédentes, puis, dans un second temps, pour les générations suivante, à une hausse légère de l âge moyen de départ. Le travail présenté ici vise donc à proposer des mesures de l impact de ces différents effets sur l évolution des âges de départ en retraite des fonctionnaires territoriaux et hospitaliers relevant de la catégorie active nés entre 1943 et 1951. Trois champs de recherche présents dans la littérature économique peuvent permettre de dresser un premier bilan de l évolution des âges de départ des fonctionnaires territoriaux et hospitaliers en catégorie active, et donc de l impact de ces deux effets sur ces âges de départ. Le premier repose sur la 4

modélisation des comportements de départ. Ces travaux trouvent leur origine dans le modèle de choix d options développé par Stock et Wise (1990). Les individus arbitrent entre le revenu futur attendu sur le reste de leur vie d un départ immédiat et le revenu espéré de la continuation d activité, soit entre durée de vie et niveau de vie, étant donné leur niveau d information sur la distribution des évolutions de salaires futurs, leurs préférences et leur espérance de vie. De nombreux développements empiriques basés sur ce modèle ont été réalisés 7. Toutefois, si ce type de modèles permet d étudier les arbitrages individuels du départ en retraite, il présente quelques limites. D abord le paramétrage des préférences individuelles peut s avérer difficile (Albert, Grave et Oliveau, 2008). Ensuite, les résultats qu il propose semblent dans certains cas surréagir aux modifications de comportement, n intégrant pas de possibles montées en charge des réformes ou des modifications progressives des comportements (Bachelet, Beffy et Blanchet, 2011). Enfin, ces modèles nécessitent de disposer d un ensemble large de données sur les niveaux de revenus et de patrimoine de l individu et du ménage, ainsi que sur les possibles évolutions de carrière et de rémunération en cas de continuation. Le deuxième champ de recherche repose sur des méthodologies empiriques visant à mesurer l impact de l augmentation de la durée de cotisation requise pour le taux plein sur l âge de liquidation. Dans ce sens, Bozio (2006, 2007, 2008, 2011) propose une estimation de l âge de liquidation en fonction des variations de durée d assurance entre générations 8. Cette méthodologie offre l avantage d estimer des élasticités moyennes de l augmentation de la durée d assurance requise sur l âge de liquidation. Toutefois, au delà des hypothèses implicites à la démarche, elle présente plusieurs limites dans une première approche de l impact des premières hausses de durée requise induites par la réforme de 2003 sur l évolution de l âge de départ des fonctionnaires territoriaux et hospitaliers relevant de la catégorie active. Premièrement, elle nécessite que l ensemble des générations étudiées ait liquidé, ce qui conduit à étudier l impact des réformes avec un décalage de temps important, même si ce décalage est moindre pour les fonctionnaires relevant de la catégorie active par rapport à la catégorie sédentaire. Deuxièmement, les mesures du nombre de trimestres validés peuvent être délicates, notamment pour les nombreux poly pensionnés (Bridenne, 2013). Troisièmement, cette approche restreint l étude aux personnes en activité à l âge d ouverture des droits de 55 ans, ce qui exclut la prise en compte des départs pour parents de 3 enfants et 15 ans de service dans les mesures de l évolution des âges de départ. Quatrièmement, la population étudiée est réduite à un sous ensemble de la population ayant validé une durée minimum de trimestres lorsqu elle atteint l âge d ouverture des droits. Benallah (2010) reprend cette méthodologie appliqué à l effet de la surcote sur l âge de départ en retraite. A ce deuxième champ, on peut ajouter les travaux économétriques cherchant à estimer la probabilité de départ par âge en tenant compte des durées validées. Aubert (2009) ou Soulat et Vauday (2012) 7 Voir par exemple Stock et Wise (1990) ou Samwick (1998) sur des données américaines, Börsch Supan (1998 et 1999), Börsch Supan, Schnabel, Kohnz et Mastrobuoni (2004) pour l Allemagne ou Blanchet et Mahieu (2001), Albert, Grave et Oliveau (2008) ou Bachelet, Beffy et Blanchet (2011) pour la France. 8 Bozio (2006, 2007, 2008, 2011) compare l impact de l augmentation de la durée d assurance sur l âge de liquidation entre deux sous échantillons : un groupe de référence non contraint par la durée d assurance requise à l âge légal et un groupe de traitement contraint par cette variation de durée requise. Appliqué à l impact de la réforme de 1993 sur l évolution de l âge de liquidation des salariés du secteur privé, en utilisant des données de l échantillon inter régimes de retraités (EIR) appariées aux DADS et au fichier de l Unedic, Bozio (2011) trouve que, pour les personnes en emploi avant 60 ans, toute augmentation de durée d assurance d une année tend à un report de 9 mois pour les hommes et de 5 mois pour les femmes. A partir des données de l EIR et de l échantillon inter régimes de cotisants (EIC), Aubert (2009) trouve des écarts entre hommes et femmes plus proches avec des reports de 8 mois et demi pour les hommes et de 7 mois pour les femmes. 5

estiment ainsi des probabilités de rester en emploi ou de sortir d activité à chaque âge par génération. Concernant l impact de la réforme de 2003 dans le secteur public, une première évaluation des modifications de comportements de départ en retraite dans la fonction publique d Etat est proposée par Walraet (2009) sur la base des flux de départs depuis 2003. Baraton, Beffy et Fougère (2011) évaluent l incidence de l augmentation de la durée d assurance requise sur la probabilité de départ à partir de 60 ans pour les enseignants du second degré. A ce champ d étude, on peut ajouter les travaux empiriques cherchant à identifier les déterminants du départ en retraite et leurs évolutions, notamment sur données d enquêtes 9. Cette littérature s est abondamment développée ces dernières années, afin de mettre en évidence quelques aspects des déterminants individuels expliquant les comportements de départs et, plus largement, les évolutions des préférences des individus. Elle dépasse les stricts aspects d arbitrages financiers présents dans les modèles d option en intégrant les impacts du genre, de la situation familiale (présence d un conjoint, état de santé du conjoint, conjoint en activité ou à la retraite, enfants dans le foyer ou à charge ), de la satisfaction au travail, de l état de santé ou des perspectives de son évolution de carrière (Siegrist, 1996, Blanchet et Debrand, 2007, Albert, Grave et Oliveau, 2008 ; Aubert, 2009 ; Aubert, Duc et Ducoudré, 2010 ; Debrand et Sirven, 2009 ; Benallah, 2010). Des travaux intègrent les caractéristiques du système de protection social ou du régime de retraite dans les déterminants du départ (Börsch Supan, 2000) ou les différences entre plusieurs systèmes de protection social en Europe (Debrand et Sirven, 2009). D autres travaux sont davantage centrés sur les anticipations des individus de leur situation future (Manski, 2004) en termes de santé et d espérance de vie (Hurd et McGarry, 1995 et 2002 ; Börsch Supan, 2007), de revenu à la retraite (Guiso, Jappelli et Padula, 2011), d évolution du système de retraite (Arrondel, Masson et Soulat, 2013) ou du niveau d information dont disposent les individus sur le système de retraite (Aubert, Barthélemy et Benallah, 2012 ; Arrondel, Masson et Soulat, 2013). Le troisième champ de recherche repose sur la méthodologie des modèles de durée 10. Elle permet d estimer des taux de risque de survenance du départ cumulés et des probabilités d être encore en activité à chaque âge pour des générations différentes, les générations successives étant soumises à des durées de cotisation différentes et pouvant présenter des réactions aux modifications réglementaires distinctes. Les courbes de risque cumulé peuvent par conséquent être comparées entre populations distinctes. En d autres termes, cette méthode permet de vérifier si les réformes modifient significativement les probabilités de départ (approche non paramétrique en strates). Cette approche permet également de tenir compte d effets propres à l individu ou à des groupes d individus en intégrant des variables explicatives (approche semi paramétrique et paramétriques), tels que la génération. Toutefois, les modélisations semi paramétriques supposent un risque de base proportionnel entre chaque génération, ce qui n est pas le cas. Ainsi, des modélisations plus 9 On peut notamment citer les enquêtes HRS (Health and Retirement Study), SHARE (Survey of Health, Ageing and Retirement in Europe), «Risque pension» en Italie (Guiso, Jappelli et Padula, 2011), ou en France, l enquête «motivations de départ» (Cnav COR Dares DG Trésor Drees DSS), le baromètre DREES, ou l enquête «Attentes et perceptions des Français à l égard de la retraite» (Caisse des Dépôts). 10 Voir par exemple Aranki et Macchiarelli (2013) pour une application à des mesures de différences de durée d activité entre pays européens, Magnac, Rapoport et Roger (2006) sur l incidence d aléas de fin de carrière, tels que le chômage ou la préretraite sur le choix de la date de liquidation, Ben Halima, Hyafil Solelhac, Koubi et Regaert (2014) sur l effet des indemnisations des arrêts de travail sur la durée de ces arrêts de travail en France sur des données de conventions collectives et d indemnités journalières (base Hygie), ou Cambier, Poujardieu et Soulat (2014) sur les évolutions des âges de départ des fonctionnaires territoriaux et hospitaliers sédentaires. 6

générales peuvent être mobilisées (risque proportionnel par morceau, modèles à fragilité ) mais nécessitent de définir a priori les distributions des temps de survie contrairement aux modèles nonparamétriques et semi paramétriques. Cette approche présente trois avantages. D abord, elle fournit une approche descriptive large de l évolution des probabilités de départ en retraite sans avoir à restreindre la population étudiée à certains âges. Dans ce cadre méthodologique, il est donc possible de tenir compte de départs avant 55 ans dans le dispositif parent de 3 enfants, comme après 60 ans en départ normal, pour des personnes qui étaient éligibles à un départ en catégorie active. Ensuite, la méthodologie est applicable à des générations qui n ont pas complètement liquidé leur pension, avec la prise en compte d une censure à droite, permettant de dresser les premiers constats d évolution des âges de départs. Enfin, elle peut être mobilisée sans avoir recours à l utilisation d une grande quantité de données individuelles (préférences individuelles, état de santé, situation familiale, niveaux de revenus et de patrimoine ). Dans ce travail, nous utilisons les données sur les affiliés de la CNRACL portant sur les générations nées entre 1943 et 1951. En complément du travail effectué sur l évolution des âges de départ des fonctionnaires territoriaux et hospitaliers sédentaires (Cambier, Poujardieu et Soulat, 2014), pour mettre en avant des effets claires des réformes et des modifications de comportements, nous restreignons la population étudiée aux seuls fonctionnaires relevant de la catégorie active. Cette étude porte sur presque 138 000 fonctionnaires hospitaliers et territoriaux. 97 % de cette population est composée des pensionnés vieillesse de droit direct de la CNRACL au 31 décembre 2012 ou d anciens pensionnés décédés ayant liquidé leur pension entre le 1 er janvier 2003 et le 31 décembre 2012. Les 3 % restants sont des affiliés encore en activité. La population est composée à 90 % de fonctionnaires relevant de la FPH, les emplois dans la FPH étant plus nombreux à en catégorie active. L étude présentée ici est, à notre connaissance, la première portant sur les âges de départs par génération des fonctionnaires relevant de la catégorie active. Elle permet d établir que l augmentation de la durée d assurance nécessaire pour bénéficier d une retraite à taux plein a plutôt conduit à une légère hausse de l âge de départ des fonctionnaires hospitaliers et territoriaux relevant de la catégorie active à partir de la génération née en 1949. De plus, l anticipation d une modification de la législation portant sur la retraite publique en 2003 semble avoir incité les générations nées en 1947 et 1948 à avancer leurs départs par rapport aux générations précédentes. Finalement, l âge moyen de départ a peu évolué sur l ensemble de la période, se situant autour de 56 ans. De plus, l âge moyen de départ est supérieur dans la FPT, à un peu plus de 57 ans, à ce qu il est dans la FPH autour de 56 ans. Dans la partie suivante, les données sont présentées. La troisième partie est consacrée à la présentation des modèles de durée utilisés : l approche non paramétrique et les approches paramétriques et semi paramétrique. Dans la quatrième partie, les résultats sont présentés et commentés. Les conclusions sont dressées dans la cinquième partie. 7

2. Description des données L étude des âges de départs en retraite des fonctionnaires territoriaux et hospitaliers relevant de la catégorie active s appuie sur les données des affiliés de droit propre à la CNRACL nés entre 1943 et 1951. Cette population est composée des pensionnés de droit propre percevant une pension au 31 décembre 2012, des personnes décédées ayant liquidé leur pension entre le 1 er janvier 2003 et le 31 décembre 2012 et des affiliés à la CNRACL encore en activité au 31 décembre 2012. Elle concerne 134 140 retraités et 3 827 actifs relevant de la catégorie active (soit 35 % de l ensemble des affiliées à la CNRACL des générations nées entre 1943 et 1951). L âge de départ en retraite est par conséquent non renseigné pour les affiliés encore en activité. En d autres termes, certains âges de départ en retraite ne sont pas observés. On parle alors de données censurées à droite lorsque la période d observation s interrompt. Deux cas de figure peuvent donc se présenter (graphique 1) : celui de l individu 1 de la génération j : il est déjà parti en retraite, son âge de départ et sa durée de vie en activité sont connus, l évènement étudié est observé ; celui de l individu 2 de la génération j : il est encore en activité, son départ en retraite interviendra au delà de la durée d observation, l évènement est donc inobservé. Graphique 1 représentation des durées observées et des événements observés et inobservés pour la génération j (censure à droite) De plus, selon la génération et le mois de naissance, les durées d observation sont variables. Le tableau 2 présente les âges limites observés, en mois, pour chaque génération. La méthodologie que proposent les modèles de durée est donc particulièrement appropriée à cette situation. Elle permet d estimer des probabilités d être encore en activité à un âge donné ou d estimer des risques de survenance du départ à cet âge étant donné que l individu est encore en activité lors de la période précédente et en intégrant les données censurées. Les comparaisons entre les générations permettent ainsi d éclairer l évolution des âges de départ en retraite par année de naissance. Les données utilisées dans ce travail sont de différents types : la date et l âge de départ mensuel, la génération, le genre, le motif de départ, les durées de service constituées et liquidées, le cadre 8

d emploi (ou corps) 11, la catégorie hiérarchique, la filière d emploi et la fonction publique. Leur liste ainsi que leur origine et leurs traitements sont fournis dans le tableau 1.1 de l annexe 1. Tableau 2 Ages limites observés par génération en âge mensuel et censure à droite année de naissance Ages limites observés 1943 1944 1945 1946 1947 1948 1949 1950 1951 Tous les départs observés 67 ans + 0 à 11 mois 66 ans + 0 à 11 mois 65 ans + 0 à 11 mois 64 ans + 0 à 11 mois 63 ans + 0 à 11 mois 62 ans + 0 à 11 mois 61 ans + 0 à 11 mois Précisons que les durées cotisées à la CNRACL, pour les personnes à la retraite, proviennent des informations traitées à la liquidation. Pour les personnes encore en activité, elles proviennent des comptes individuels retraite alimentés par les déclarations annuelles des employeurs publics dans le cadre des DADS, en tenant compte des durées constituées en catégorie active, insalubre ou sédentaire. Concernant les données sur les cadres d emplois et donc sur la catégorie hiérarchique et la filière qui lui sont associées, elles proviennent des informations traitées à la liquidation pour les retraités et des DADS pour les personnes encore en activité. Le cadre d emploi retenu est celui qui correspond au dernier emploi occupé au moment de la liquidation ou dans la dernière DADS. Les informations brutes sur les cadres d emplois, les filières et les catégories hiérarchiques ont été retraitées afin de les rendre cohérentes et homogènes entre les individus 12. Les individus retenus dans l étude sont ceux nés entre 1943 et 1951 dont l emploi est identifié comme donnant droit à des cotisations dans le dispositif de la catégorie active ou qui ont cotisé au moins 15 ans en catégorie active. Ainsi, l étude porte sur 137 967 individus nés entre 1943 et 1951 relevant de la catégorie active. 90 % de la population étudiée (soit 123 765 individus) est composée de fonctionnaires hospitaliers, les emplois dans les filières de soins, médicotechnique et de rééducation, avec un contact avec les patients, donnant généralement lieu au bénéfice de la catégorie active (voir tableaux 1.2 de l annexe 1). Seulement 3,7 % des fonctionnaires hospitaliers pris en compte dans l étude sont affectés à des emplois n appartenant pas à la catégorie active. Les 11 Les termes de cadre d emplois ou de corps de la fonction publique sont employés indifféremment et sans distinction, la première terminologie étant davantage utilisée dans la FPT, alors que la seconde l est plutôt dans la FPH et la Fonction publique d Etat (FPE). 12 Les dates de départ en retraite de la population étudiée s étalant sur une longue période, des individus peuvent être partis dans un corps placé depuis en extinction ou reclassé suite à des modifications statutaires. Par ailleurs, les déclarants ne remplissent pas nécessairement l information de manière identique pour un même emploi ou un même corps. Finalement, les nomenclatures des emplois hospitaliers (NEH) et territoriaux (NET) de fin 2012 ont été utilisées et les individus ont été classés selon ces nomenclatures. Toutefois, afin de ne pas avoir à reclasser certaines personnes dans des corps ou grades trop éloignés de leur situation de départ, nous n avons pas tenu compte de la réforme du statut des infirmières suite à la prise en compte de la réforme LMD : ainsi, les infirmiers des services de soins ont été laissés en catégorie B et les infirmiers de spécialité ont été conservés en catégorie A, hormis pour les infirmiers ayant opté pour le nouveau statut de catégorie A. De la même manière, le nouvel espace statutaire de la catégorie B (NES B) n a que partiellement été pris en compte pour éviter des reclassements excessifs. Toutefois, des regroupements ont été opérés afin de limiter le nombre total de corps différents dans l ensemble de l étude. Pour la réforme LMD portant sur le statut des infirmiers, voir le protocole d accord du 2 février 2010 relatif à «l intégration dans la catégorie A de la fonction publique hospitalière des infirmiers et professions paramédicales aux diplômes reconnus dans le LMD par les Universités, et à l intégration des corps de catégorie B de la fonction publique hospitalière dans le nouvel espace statutaire de la catégorie B». Pour plus de détails, voir URL http://www.sante.gouv.fr/img/pdf/protocole.pdf. 9

10 % restant (soit 14 202 individus) sont des fonctionnaires territoriaux très largement affectés dans les filières d incendie et de secours, et de police municipale (tableau 1.3 de l annexe 1). Seulement 6,9 % des fonctionnaires territoriaux éligibles au dispositif de la catégorie active sont dans des emplois ne relevant pas de la catégorie active. Moins de 3 % des affiliés des générations 1943 à 1951 éligibles à un départ en catégorie active n ont pas encore liquidé leur pension, signalant que les individus éligibles à un départ en catégorie active tendent à partir relativement plus tôt. Le tableau 1.4 de l annexe 1 présente le détail de la population des fonctionnaires territoriaux et hospitaliers relevant de la catégorie active par genre et année de naissance. Au sein de la FPH, 85 % des personnes relevant de la catégorie active sont des femmes, contre seulement 10 % au sein de la FPT (graphique 2). Par catégorie hiérarchique, les fonctionnaires relevant de la catégorie active sont majoritairement en catégorie C : ils sont 65 % à y être dans la FPT et 53 % dans la FPH (voir tableau 1.5 de l annexe 1). Graphique 2 Part des femmes en catégorie active selon la Fonction publique Champ : fonctionnaires territoriaux et hospitaliers relevant de la catégorie active et de la catégorie sédentaire affiliés à la CNRACL nés entre 1943 et 1951. Sources : données construites par les auteurs à partir des bases annuelles de la CNRACL et des comptes individuels retraite de la CNRACL pour l information sur les corps des affiliés qui n ont pas liquidé leur pension ; les informations sur la proportion des femmes en catégorie sédentaire sont tirées de Soulat et al. (2014). Par dispositif de départ en retraite, les motifs possibles de départs en retraite pour les fonctionnaires territoriaux et hospitaliers sont les départs dits «normaux» entre 60 et 65 ans, les départs en catégorie active entre 55 et 60 ans, les départs pour emploi insalubre, les départs parents de 3 enfants 13 et les départs anticipés pour carrière longue. Les départs au bénéfice de la catégorie insalubre étant peu nombreux, nous les comptabilisons avec les départs au bénéfice de la catégorie active. Le graphique 3 présente la proportion des départs par Fonction publique, genre et génération. Dans l ensemble, les départs à partir de 60 ans représentent 22 % des départs, avec une 13 Le départ pour parents de 3 enfants s effectue sans condition d âge, donc à des âges de départ très étalés, souvent bien inférieurs à l âge légal, puisque les personnes concernées peuvent demander leur retraite dès lors qu elles ont validé 15 ans de service. Ce motif est en extinction progressive depuis la réforme de 2010. 10

proportion qui tend à diminuer progressivement de 26 % pour la génération née en 1943 à 20 % pour celle née en 1948 puis à se stabiliser entre 20 et 22 % pour les générations suivantes. La part des départs à partir de 60 ans est plus élevée dans la FPT (27 % sur l ensemble des générations) que dans la FPH (22 %) et parmi les hommes (25 % des départs sur l ensemble des générations) que parmi les femmes (21 %). 11 % des départs des fonctionnaires territoriaux et hospitaliers nés entre 1943 et 1951 relevant de la catégorie active surviennent avant 55 ans. Il s agit quasi exclusivement de femmes étant parties dans le dispositif de parents de 3 enfants. 67 % des départs des fonctionnaires territoriaux et hospitaliers nés entre 1943 et 1951 relevant de la catégorie active ont lieu entre 55 et 59 ans. Il s agit très largement de départs tirant bénéfice du dispositif de catégorie active : 63 % de l ensemble des départs sont dans ce motif et 3 % des départs sont des départs entre 55 et 59 ans au motif parents de 3 enfants. Les départs entre 55 et 59 ans concernent davantage les fonctionnaires territoriaux (70 % des départs de la FPT) que les fonctionnaires hospitaliers (66 % des départs de la FPH) et davantage les hommes (74 % des départs des hommes) que les femmes (65 % des départs des femmes). Les graphiques 3 illustrent l évolution de la proportion des départs par motif par versant de la Fonction publique et par genre. Ainsi, l âge moyen de départ de l ensemble des fonctionnaires territoriaux et hospitaliers de droit direct vieillesse relevant de la catégorie active a tendance à légèrement diminuer, passant de 56,8 ans pour la génération née en 1943 à 55,7 ans pour la génération née en 1951. Toutefois, 5 % de la génération née en 1950 et 9 % de celle née en 1951 n ont pas liquidé leur retraite, pouvant expliquer la continuité de la diminution de l âge moyen pour ces deux générations. L âge médian semble plus intéressant car il n est pas affecté par le fait que l intégralité des générations n a pas liquidé. Il diminue légèrement, passant de 56,4 ans pour la génération née en 1943 à 55,6 ans pour la génération née en 1948, pour de nouveau augmenter jusqu à 56 ans pour la génération née en 1951. Les âges moyens et médians sont plus faibles pour les femmes que pour les hommes : l âge médian atteint 55,9 ans pour les femmes nées en 1951 et 56,6 ans pour les hommes de cette génération. Ils sont également plus faibles dans la FPH (âge médian de 56 ans pour la génération née en 1951) que dans la FPT (âge médian de 56,4 ans pour la génération née en 1951). Les tableaux 1.6 et les graphiques 4 présentent les statistiques descriptives des âges de départ par versant de la Fonction publique, genre et année de naissance. 11

Graphiques 3 Répartition des départs à la retraite des fonctionnaires territoriaux et hospitaliers relevant de la catégorie active par tranche d âge FPH Femmes FPH Hommes FPT Femmes FPT Hommes Champ : fonctionnaires territoriaux et hospitaliers retraités de droit direct vieillesse relevant de la catégorie active affiliés à la CNRACL nés entre 1943 et 1951. Sources : données construites par les auteurs à partir des bases annuelles de la CNRACL. 12

Graphiques 4 Ages de départ en retraite (moyenne, médiane, 1 er et 9 e déciles) par génération, selon la fonction publique et le genre FPH Femmes FPH Hommes FPT Femmes FPT Hommes Champ : fonctionnaires territoriaux et hospitaliers retraités de droit direct vieillesse relevant de la catégorie active affiliés à la CNRACL nés entre 1943 et 1951. Sources : données construites par les auteurs à partir des bases annuelles de la CNRACL. 13

3. Méthodologie empirique Cette partie présente de façon détaillée les différentes approches méthodologiques complémentaires utilisées dans ce travail. Celles ci s appuient sur plusieurs approches des modèles de durée : l approche non paramétrique, l approche semi paramétrique et différentes spécifications de l approche paramétrique. Ainsi, dans un premier temps, des courbes de survie par génération sont estimées dans le cadre d un modèle non paramétrique. Ces courbes représentent les probabilités que les individus soient encore en activité à chaque âge (en mois) étant donné que ces individus étaient en activité au cours de la période précédente (du mois précédent). Ceci permet de voir comment évolue les âges de départ selon les générations en comparant les courbes de survie entre elles, c est à dire en vérifiant qu elles sont significativement différentes. Ce travail est effectué pour l ensemble de la population puis par sousgroupes, en distinguant par Fonction publique et par genre, afin de décrire les différences d évolution des âges de départ suivant ces segmentations. Cette première approche met en évidence l augmentation de la proportion des départs «le plus tôt possible» entre la génération née en 1943 et celles nées en 1947 et 1948 puis une baisse de cette proportion pour les générations suivantes correspondant à un report de l âge des départs. Des courbes de survie pour les mêmes segmentations de population sont également estimées en excluant les départs pour parents de trois enfants afin de vérifier que des évolutions de départs dans ce dispositif ne viennent pas influencer les résultats. Deux approches complémentaires sont mises en œuvre permettant d introduire des variables explicatives. Ces deux approches économétriques permettent d éviter la multiplication des segmentations des échantillons que nécessiterait la première approche. Elles visent à étudier plus attentivement l impact de l année de naissance sur la probabilité de rester en activité ou de partir en retraite à chaque âge en contrôlant par un ensemble de variables explicatives, c est à dire toutes choses égales par ailleurs, et ainsi d éviter les effets de structure. Ces approches permettent notamment de vérifier si la durée d activité s allonge significativement à partir de la génération 1949, allongement qui pourrait être induit par les modifications des règles de calcul des pensions et par l augmentation du nombre de trimestres requis pour le taux plein. Elles offrent également la possibilité de mesurer s il y a eu une augmentation du nombre de départs à un âge plus précoce pour les générations 1947 et 1948, sans doute comme conséquence de l anticipation d une réforme de la catégorie active. La première de ces deux approches complémentaires repose sur le recours aux modèles semi paramétriques de durée. Elle évite, dans un premier temps, d avoir à spécifier la distribution des fonctions de survie. Toutefois, une telle approche suppose que le risque de base soit proportionnel entre les différentes générations, ce qui semble a priori peu réaliste sur l évolution des âges de départ en retraite. La seconde recourt à différentes spécifications des modèles paramétriques, en retenant plusieurs distributions possibles des probabilités de départ. 3.1. L approche non paramétrique : les courbes de survie La première approche repose sur l utilisation d un modèle statistique de durée 14 appliqué à la probabilité de départ en retraite à chaque âge afin d étudier l évolution des âges de départ des 14 Pour plus de détails sur les modèles de survie, voir notamment Lancaster (1992), Cleves, Gutierrez, Gould et Marchenko (2010) ou Philippe Saint Pierre (2013), et pour l utilisation de SAS dans l analyse des modèles de survie Allison (1995), Cantor (2003) ou Colletaz (2012). Pour une application des modèles de durée à l âge de départ en retraite, voir également Magnac, Rapoport et Roger (2006). 14

fonctionnaires territoriaux et hospitaliers relevant de la catégorie active. Le principal avantage du recours aux modèles de durée est de permettre de modéliser la longueur de temps passée dans un état donné (en emploi) avant de passer dans un autre état (en retraite). Comparé à d autres approches telles que celles qui se focalisent sur la probabilité non conditionnelle qu un évènement se produise (modèles probit ou logit), nous nous intéressons ici à la probabilité conditionnelle qu un statut prenne fin (l individu part en retraite) lors de la prochaine période, étant donné la durée passée jusqu à présent dans le statut (ici l âge de la personne en activité). Ainsi, nous considérons l âge de sortie d activité de chaque individu i, c est à dire la durée observée de sa vie en activité, comme étant une variable aléatoire T i définie sur un intervalle 0, de fonction de répartition F(t) et de fonction de densité f(t), où t est une réalisation de T i. La fonction de distribution cumulée de l individu i est donc donnée par : (1) La fonction de survie de l individu i, exprimant la probabilité qu il soit encore en activité à l âge T au moins égale à t, s écrit : 1, 0 (2) Si l on s intéresse au risque que survienne le départ en retraite au cours de l intervalle de temps dt, la probabilité que ce départ survienne durant la période d âge t+dt sachant que l individu i n est pas encore parti à l âge t permet d évaluer le risque de connaître l évènement du départ en retraite durant cet intervalle de temps. La quantité ainsi obtenue mesure le nombre moyen d évènements que connaîtrait l individu i au cours d une unité de temps choisi (l année par âge) si les conditions prévalant durant l intervalle de temps considéré (le mois dans notre étude) restaient inchangées tout au long de l unité de temps choisie et pas uniquement sur l intervalle. Pour un évènement qui ne se répète pas, comme le départ en retraite, il est intéressant de considérer l inverse du risque qui fournit une évaluation de la durée moyenne d attente de la réalisation de l évènement. La fonction de risque peut donc s écrire : (3) Ceci permet d en déduire la fonction de risque cumulé : (4) Ces fonctions sont liées entre elles : la spécification d une fonction de risque implique la forme de la distribution de la courbe de survie et inversement la forme de la courbe de survie permet de déterminer le risque de survie. Les modèles de survie peuvent être séparés entre différentes classes, les modèles non paramétriques, semi paramétriques et paramétriques, selon que la méthode de prédiction de la distribution de probabilité de la survenance d un évènement prenne en compte ou non un ensemble de variables explicatives additionnelles. L avantage du recours aux modèles non paramétriques, ainsi qu aux modèles semi paramétriques, réside dans le fait que l estimation de la fonction de survie ne nécessite 15

aucune hypothèse sur la nature de la distribution des temps de survie. En d autres termes, les modèles non paramétriques et les semi paramétriques du type modèles de Cox (Cox, 1972 et 1975) ne font aucune hypothèse sur la pente de la fonction de risque et sur la manière dont les variables explicatives peuvent affecter cette pente (Box Steffensmeier et Jones, 2004 ; Colletaz, 2012 ; Aranki et Macchiarelli, 2013), contrairement aux modèles paramétriques. Dans l approche non paramétrique, la distribution des temps de survie est donnée par l estimateur de Kaplan Meier (1958) et l estimation de la fonction de risque cumulé par l estimateur de Nelson Aalen (Nelson, 1972 ; Aalen, 1978). Ainsi, si l on considère les deux premières périodes, la fonction de survie en t 2, c est à dire de ne pas être parti en retraite après t 2, sachant qu il ne faut pas être parti en retraite pendant la période t 1, sera donnée par : 1 (5) où désigne le nombre d individus ayant connu l événement en t 2, c est à dire le nombre d individus étant parti en retraite au cours de la période t 2, et le nombre d individus qui auraient pu connaître l événement au cours de cette période, c est à dire le nombre initial d individus au début de la période t 2 qui ne sont pas encore partis en retraite à la fin de la période t 1. Il convient également de déduire les individus pour lesquels l évènement est inobservé au cours de la période 2,, dans le nombre d individus qui auraient pu connaître l événement. Ainsi. Si l on tient compte de la récurrence des périodes de temps, l estimateur de Kaplan Meier à la date t devient : avec 0 1 (i.e. personne n est encore parti en retraite en t=0). L estimateur de Nelson Aalen est donné par : 1 (6) (7) Une fois les courbes de survie estimées pour chaque génération successive, il est intéressant de les comparer afin de vérifier si les risques de survenant du départ en retraite sont différents entre deux générations successives, l ensemble des autres caractéristiques des individus composant les échantillons pouvant être considérés comme semblables. Nous recourons pour cela à deux statistiques de rang : la statistique du LogRank et le test de Wilcoxon Gehan. La statistique du LogRank, ou test de Cochran Mantel Haenzel (Mantel, 1966 ; Mantel et Haenzel, 1959 ; Peto et Peto, 1972) fournit une première méthode de comparaison des courbes de survie. Sous l hypothèse nulle 15, à une date t j, la proportion espérée de la réalisation de l évènement pour l ensemble des deux groupes est donnée par d j /n j, et le nombre espéré de réalisations de 15 L hypothèse nulle est celle de l égalité des courbes de survie. 16

l évènement pour chaque groupe a d individus, e aj, est obtenu en pondérant par l effectif observé du groupe : 1 2 (8) avec d aj désignant le nombre d individus du groupe a ayant connu l événement et d j de l ensemble des deux groupes ; n aj désignant le nombre les individus risqués du groupe a et n j de l ensemble ; et a désignant les groupes 1 et 2. De ces deux espérances à chaque période t j, on déduit 4 variables : : le nombre total d événements observés dans le premier groupe, : le nombre total d événements observés dans le second groupe, : le nombre total d événements espérés sous l hypothèse H0 pour le premier groupe, : le nombre total d événements espérés sous l hypothèse H0 pour le second groupe. La statistique du LogRank est alors : (9) où r est le nombre d événements observés sur les groupes 1 et 2. La distribution de cette statistique permettant de réaliser un test de significativité de la différence entre les courbes de survies des deux groupes distincts est celle de la variable suivante qui suit un Chi2 à un degré de liberté : (10) Ce test accorde un poids unitaire identique à chaque période à l écart entre la survenance de l évènement et la survenance espérée de cet évènement pour un groupe. Quant au test de Wilcoxon Gehan (Gehan, 1965 ; Breslow, 1970), il attribue comme pondération le nombre d individus à risque de l ensemble des deux groupes à chaque période : n i. (11) Par conséquent, la population à risque diminuant avec le temps (le nombre cumulé de départs en retraites des périodes précédentes augmentant), l estimateur de Wilcoxon Gehan accorde un poids supérieur aux évènements de plus courte durée, c est à dire aux départs en retraite précoces, par rapport à l estimateur du LogRank. 17

3.2. L approche semi paramétrique : la probabilité de départ avec prise en compte de caractéristiques individuelles Les spécificités liées aux caractéristiques individuelles et collectives 16 peuvent générer de l hétérogénéité dans les âges de départ entre les générations et à l intérieur d une même génération. La combinaison de l ensemble de ces caractéristiques dans le cadre de l approche non paramétrique des modèles de durée aurait conduit à un nombre de strates trop élevé pour permettre de dégager une analyse pertinente. En d autres termes, il est difficile de contrôler l ensemble des effets des caractéristiques individuelles et collectives dans le cadre de l approche non paramétrique des courbes de survie, même en segmentant très finement la population. Ainsi, dans cette approche, nous recourons aux modèles de Cox 17 (1972 et 1975) semiparamétriques. Ceux ci permettent d intégrer des variables explicatives propres à l individu ou à des groupes d individus dans l estimation du risque de départ par âge. Ces modèles décomposent le risque en produit de deux éléments : le premier est un risque de base et le second est fonction des seules variables explicatives. Ils s écrivent : (12) où x i est le vecteur des variables explicatives influençant le risque de départ pour l individu i, est le vecteur des coefficients des régresseurs, et est la fonction du risque de base, commune à tous les individus de la population étudiée. Ce modèle est à risque proportionnel car pour deux individus i et i quelconques dont les caractéristiques sont et, le rapport des fonctions de risque ne varie pas au cours du temps. Par conséquent, le risque de départ à la date t est lié aux caractéristiques individuelles et collectives par une constante proportionnelle qui ne dépend pas de t. Les coefficients des variables explicatives sont estimés en maximisant la vraisemblance partielle, en ne considérant que le second terme de (12). L avantage de cette méthodologie est qu elle ne nécessite pas de définir de distribution des temps de survie contrairement aux modèles paramétriques. Par rapport à l approche non paramétrique, une modélisation de Cox offre l avantage d être a priori plus robuste et de permettre de préciser l impact des variables explicatives que les seules estimations stratifiées ne peuvent identifier. Mais contrairement à l approche nonparamétrique qui modélise la fonction de survie, l approche semi paramétrique modélise la fonction de risque. Le passage de l un à l autre peut s avérer compliqué même s il est possible de s appuyer sur des estimations de la courbe de survie par une méthode du type produit limite ou de passer par l estimation du risque de base cumulé. De toute façon, nous nous intéressons plus particulièrement ici aux effets des variables explicatives sur le risque de départ en retraite par âge. Aussi, lorsque la fonction de risque est influencée positivement (respectivement négativement), la fonction de survie l est elle négativement, c est à dire que la probabilité d être parti en retraite à la date t augmente (respectivement baisse). 16 Notamment l année de naissance, le genre, la Fonction publique, la catégorie hiérarchique, la filière d emplois, le passage à temps partiel au cours de la carrière, la durée de cotisation, le départ avant l âge d ouverture des droits ou après l âge légal 17 Pour plus de détails sur la méthodologie le modèle de Cox, voir notamment Lancaster [1992], Allison [1995], Cantor [2003], Colletaz [2004], Cleves, Gutierrez, Gould et Marchenko [2010] ou Philippe Saint Pierre [2013]. 18

Le modèle de Cox initial suppose que la réalisation des évènements étudiés s effectue en temps continu, si bien que la probabilité que deux individus ou plus connaissent l évènement au même instant est nulle. Ceci n est bien évidemment pas le cas des départs à la retraite qui suivent des fréquences particulières avec des départs à des âges identiques, notamment le jour d obtention de l âge légal, et même en prenant des intervalles d observation journaliers, ceci n exclue pas la possibilité d avoir plusieurs départs au même âge. Dans le cas de la réalisation de plusieurs évènements à la même date, le nombre de calculs nécessaires à la maximisation de la vraisemblance partielle devient alors considérable. Nous avons donc opté dans ce papier pour une approximation de cette maximisation par la méthode du calcul de la moyenne. Celle ci fournit des résultats satisfaisants proches de la méthode exacte 18 avec des délais de réponse relativement plus réduits. Le ratio de risque, ou la contribution au risque de la variation d une unité de la j ième variable explicative x j est donné par : (13) et l influence de la j ième variable explicative sur la variation du risque s obtient par : 1 (14) Toutefois, les modèles semi paramétriques supposent que le risque de base soit proportionnel. Une représentation graphique des courbes de risques cumulés de départ par génération permet de vérifier si les courbes sont parallèles. Si les courbes se coupent, l hypothèse de proportionnalité n est pas satisfaite. Un test de résidus de martingales, de type Kolmogorov, permet également de vérifier si l hypothèse de risque proportionnel est violée (hypothèse H0) ou validée pour une variable explicative étant données les autres variables prises en compte dans le modèle. Ce type de test consiste à comparer à chaque date t, l impact du nombre de départs induits par les différentes valeurs de la variable explicative testée et les nombres espérés de départs tirés d une multitude de simulations. Dans un modèle semi paramétrique étudiant l évolution des âges de départs par génération, il est fort probable que l hypothèse de proportionnalité du risque ne soit pas respectée, surtout si, pour les générations 1947 et 1948, la proportion des départs dès 55 ans augmente par rapport aux générations précédentes, puis que pour les générations suivantes, la proportion des départs à des âges plus élevés augmente, pouvant conduire à ce que les courbes risques cumulés par génération se croisent. Si elles existent, chaque intersection entre ces courbes permet de définir des intervalles d âges de départ à l intérieur desquels le risque peut alors être supposé comme constant. Ces intervalles sont alors introduits comme variable de contrôle dans le modèle semi paramétrique, y intégrant par conséquent des variables dépendantes du temps. Toutefois, si cette dernière approche apporte une première information sur l impact de la génération sur la probabilité de départ à chaque âge, il est plus correct de la compléter par des estimations basées sur des modèles de durée plus généraux 19, même si la question de la spécification de la distribution des risques se pose. 18 Les résultats sont plus proches que ceux fournis par la méthode d approximation Breslow. 19 Une approche à la Jenkins (1995) aurait également pu être développée afin de mesurer l impact de la génération sur les probabilités de départ dans chaque tranche d âge. Un tel prolongement devra être intégré dans une prochaine version. 19

3.3. L approche paramétrique L objectif n est pas d identifier la forme de la distribution des temps de survie la plus appropriée mais plutôt de mesurer si l année de naissance a des effets significatifs sur l évolution des durées en activité, en contrôlant par un ensemble de variables, y compris par la prise en compte des intervalles d âges. Par conséquent, afin de ne pas être tenté de choisir de manière plutôt arbitraire la forme de la distribution des temps de survie, plusieurs modélisations alternatives sont proposées. Les modèles paramétriques estimés ici sont des modèles dits de temps de sortie accéléré (AFT) alors que le modèle semi paramétrique précédent était un modèle à risque proportionnel (PH). En d autres termes, dans les modèles AFT, ce sont les temps de survie qui sont estimés, ou plus exactement les logarithmes des temps de survie, alors que dans les modèles PH, l équation estimée porte sur la fonction de risque. La fonction de risque prendrait donc la forme suivante :. (15) Ainsi, dans un modèle AFT, les caractéristiques individuelles et collectives prises en compte viennent modifier la durée en dilatant le temps (modèle Weibull par exemple), le hasard de base (modèle loglogistique par exemple), ou les deux (modèle Gamma par exemple). Par ailleurs, il convient de noter même si l équation estimée porte sur le temps de survie et non le risque, les signes des coefficients estimés des variables explicatives ne sont nécessairement opposés. En effet, si a priori une variable explicative augmente la durée d activité, elle réduit le risque de survenance du départ, la relation entre risque et survie est complexe et les coefficients attachés à une même variable ne sont pas nécessairement de signe opposé. Toutefois, dans le cas d une distribution de Weibull, le passage entre risque et survie est clair et les coefficients sont proportionnels entre eux et de signe opposés. Le modèle de Weibull Lorsque les temps de survie suivent une loi de Weibull de paramètre d échelle, la fonction de densité s écrit : Ou, pour simplifier l écriture, en posant : La fonction de densité devient : La fonction de survie d écrit : La fonction de risque : et la fonction de risque cumulé : (16) (17) (18) (19) (20) 20