Biochimie Cours 05 12/02/07 J-P FEUGEAS PEPTIDES I. Définition : Un peptide est un enchaînement d aa, en nombre restreint : 20 ou 30, au maximum 50 formant en général une structure linéaire. II. La Liaison Peptidique : Liaison peptidique : est une liaison amide, constituée par déshydratation entre 2 aa transportés par les ARNt. Elle est composée de 4 atomes : C, O, N et H. Il y a 6 atomes dans le même plan : les 4 constituant la liaison peptidique, plus les 2 carbones α de chacun des deux aa liés. Des études en cristallographie on montré que la distance entre C et N est plus courte qu une liaison simple typique. Il s agit donc d une double liaison partielle ; il y a résonance entre deux formes de liaison : Ceci explique aussi le fait que les 4 atomes C, O, N et H de la liaison restent toujours dans le même plan. Il n y a aucune possibilité de mobilité des 4 atomes de cette liaison. Si les carbones asymétriques α de deux aa successifs sont bien dans le même plan que celui de leur liaison peptidique, les molécules liées ont une possibilité de rotation par rapport à ce plan. Si la liaison proprement dite ne contient pas de carbone α, d un point de vue stérique, les carbones α font en fait charnière entre les aa successifs. Biochimie 05 1 / 7
Pour un carbone α donné, on désigne par ϕ l angle de rotation formé entre le plan de la liaison peptidique avec l aa précédent (ou tout simplement l atome d azote en direction du Nterm) et par ψ l angle formé par ce même carbone α, mais considérant son appartenance au plan de liaison peptidique précédent, et le carbone de la liaison peptidique suivante (en direction du Cterm). Les angles ϕ et ψ déterminent la conformation des hélices α. Dans certains cas, par exemple avec la proline, il y a un changement de direction dans la chaîne peptidique, car l angle ϕ est bloqué par l appartenance de l atome d azote à un cycle rigide. III. Propriétés Physico-chimiques Générales : Le poids moléculaire d un protide constitué de n aa est d environ n x 110 Da (compte-tenu du poids moyen des aa, de 110 Da). L absorbance en lumière UV : la lecture à λ = 280 nm permet de mettre en évidence la présence d aa aromatiques, ce qui est vraisemblable pour une chaîne assez longue ; par contre, la longueur d onde de 210 nm, qui est le pic d absorbance de liaison peptidique, n est pas spécifique des peptides, car de nombreuses molécules ont la même caractéristique. Stabilité, très bonne in vitro, en raison de la solidité de la liaison peptidique, mais pas in vivo : en raison de leur dégradation rapide par des protéases dans le sang circulant, leur durée de vie n y est que de quelques minutes. Solubilité : assez variable : dépend du ph du milieu. On arrive à les isoler en les faisant précipiter dans des solutions de C saline variable. Paradoxalement, la solubilité est minimale au phi, en raison de liaisons ioniques intramoléculaires qui mobilisent les charges positives et négatives qui s équilibrent. Conductivité : au ph isoélectrique : elle dépend des chaînes latérales des aa, et de la présence ou non d aa acides ou basiques. La détermination du phi d un peptide s effectue de façon comparable à celle d un aa, dans les cas simples en tout cas, comme dans cet exemple : Biochimie 05 2 / 7
Ici, les chaînes latérales R 2 et R 3 ne se dissocient pas. il y a donc un caractère acide marqué, avec pkr 1 = 4 et pka = 2. Le phi est alors obtenu en faisant la moyenne des deux : phi= pkr2 + Pka 2 = 4 + 2 2 = 3 IV. Importance Biologique des Peptides : Elle sera illustrée par quelques exemples : 1. Le Gluthation : Le glutathion est un tripeptide qui existe sous deux formes, dont les séquences sont les suivantes : - sous sa forme réduite, notée GSH : - sous sa forme oxydée GSSG : - cycle du gluthation : La toxicité du paracétamol provient du fait qu il consomme tout le glutathion réduit (GSH), ce qui induit une nécrose hépatique. Biochimie 05 3 / 7
2. Hormones Peptidiques : - vasopressine : stimule la réabsorption d eau par le rein, produisant une urine plus concentrée et contribuant à augmenter la pression sanguine. - ocytocine : provoque la contraction des muscles lisses de l'utérus et accélère le travail. Ces deux hormones ont une grande similitude de séquences : elles ont toutes deux 9 aa dont les deux cystéines 1 et 5 forment un pont disulfure ; mais leurs fonctions sont très différentes. - insuline : c est un cas particulier de peptide à deux chaînes : la pré-proinsuline porte une séquence-signal en Nterm, dont la libération produit la proinsuline, qui subit ensuite un clivage protéolytique du peptide C, et la constitution d un pont disulfure, c est l insuline. Elle est constituée de la chaîne A, faite de 21 aa et de la chaîne B, faite de 30 aa. Le dosage du peptide C, non fonctionnel, permet néanmoins de savoir s il y a sécrétion résiduelle endogène chez les diabétiques de type I. - BNP ou Brain Natriuretic Peptide : son nom est dû au fait qu il a été initialement isolé dans le cerveau ; il est impliqué dans l élimination urinaire du sodium. Son dosage permet d évaluer la fonction cardiaque : il est habituellement secrété par les ventricules cardiaques, et augmente la natriurèse ; en cas de défaillance cardiaque, il y a distension du ventricule, et sa C sanguine s élève = marqueur cardiaque. Il permet de différencier problème respiratoire, d un problème cardiaque. - hepcidine : pas encore utilisée habituellement, mais se développe dans le domaine expérimental : c est un peptide de 25 aa secrété normalement par le foie ; il inhibe l absorption intestinale du fer ; son inactivation entraîne une surcharge en fer, sa surexpression entraîne par une anémie (pâleur, et problèmes de développement, s agissant du sujet jeune). V. Composition en aa et Séquençage des Peptides : Il s agit de connaître la structure primaire d un peptide. 1. Purification : Le but est de pouvoir analyser isolément une seule chaîne peptidique, que l on aura ontenues, si le peptide issu d une protéine complexe, par dégradation. - Rupture des liaisons faibles (hydrogène) entre des chaînes différentes : Avec de l urée ou des détergents. Ex. : le SDS (Sodium Dodécyl Sulfate) est un sel détergent : CH 3 (CH 2 ) 10 CH 2 O SO 3 / Na +. Le sel se fixe sur les acides aminés constitutifs de chaque chaîne peptidique, à raison d un SDS sur deux acides aminés ; il confère ainsi une charge fortement négative à la macromolécule, approximativement proportionnelle à son poids moléculaire. Biochimie 05 4 / 7
- Rupture des ponts disulfure ; Il existe deux méthodes : o douce et réversible par réduction au β-mercapto-éthanol, => résidus thiols : Dans cette méthode, la réduction est réversible par retour dans un milieu oxydant. o agressive et irréversible par oxydation par l acide performique HCOOH + H 2 O 2, => des résidus SO 3 : 2. Vérification de la pureté du peptide : Par électrophorèse ou chromatographie. 3. Fragmentation de la chaîne peptidique (si aa > 60 aa) : Elle est nécessaire car l étude d un peptide > 60 aa est quasi-impossible actuellement, et peut être réalisée par deux types de méthodes : - soit avec une enzyme coupant à l intérieur de la séquence primaire = endopeptidase : Certaines enzymes sont spécifiques d un ou deux aa : la Trypsine = coupe côté Cterm après une Lysine ou une Arginine. D autres le sont d un type particulier d aa : la Chymotrypsine = coupe après les aa aromatiques, (de N vers C) Biochimie 05 5 / 7
- soit avec des moyens chimiques Par exemple avec le bromure de cyanogène : BrCN, qui coupe après la Méthionine (dans le sens conventionnel de N vers C). 4. Composition brute en aa : - Séparation en aa unitaires : Elle est réalisée par hydrolyse au HCl 6N (C = 6 mol.l -1 ) à 110 C, qui : o coupe toutes les liaisons peptidiques, o détruit tous les Tryptophanes, une partie de la Cystéine, o laisse intact l Acide Cystéique, o transforme l Asn (Asparagine) en Asp (Acide Aspartique), o et la Gln (Glutamine) en Glu (Acide Glutamique) - Identification et quantification des aa : Elle est réalisée par chromatographie d échange d ions (HPCL), méthode très précise. 5. Analyse des extrémités N et C terminales : - Après coupure avec des exopeptidases : Non spécifiques, mais inefficaces si Proline en Cterm ou en 2 ème position après le Nterm ; elles coupent la liaison peptidique de l extrémité : o Nterm = aminopeptidases, o Cterm = carboxypeptidases. - Analyse de l extrémité Cterm après hydrazinolyse, drastique, H 2 N-NH 2 à 100 C => formation de résidus transformés en aminoacyl-hydrazides (NH-NH 2 ), sauf l aa Cterm non modifié, ce qui le rend facilement identifiable Biochimie 05 6 / 7
- Analyse de l extrémité Nterm par la méthode de SANGER : o Le 2,4 dinitro-fluoro-benzène (DNFB) réagit avec le NH 2 en Nterm et produit un DNP peptide. o Ensuite on hydrolyse la séquence au HCl 6N pour isoler le DNP-aa en Nterm ; tous les autres aa sont libérés (non marqués par le DNP). o Le DNP-aa est finalement identifié par chromatographie de partage. N.B. : On utilise plutôt aujourd hui le chlorure de dansyle ou le chlorure de dabsyle, qui réagit de manière identique, mais sont plus facile à identifier. 6. Séquençage par la méthode d EDMAN Méthode actuellement supplantée en recherche par le séquençage de l ADN, qui permet d en déduire celle du peptide, mais encore très utilisée dans l industrie pharmaceutique, pour vérifier la qualité des produits. Le phénylisothiocyanate réagit avec le NH 2 en Nterm et induit une rupture la liaison peptidique en formant un phénylthiohydantoïne aa (PTH aa), que l on identifie par CLHP. Cette méthode est récurrente : elle laisse intacte la séquence peptidique restante, et l opération peut être recommencée autant de fois qu il y a d aa dans la séquence (n aa < 60). phénylisothiocyanate + peptide (n aa) cycle 1 => phénylisothiocyanate PTH aa1 + peptide (n-1 aa) cycle 2 => PTH aa2 + peptide (n-2 aa) Biochimie 05 7 / 7