10 - LES BOMBARDEMENTS D AOÛT 1944 ET LE SIÈGE DE KÖNIGSBERG

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Transcription:

10 - LES BOMBARDEMENTS D AOÛT 1944 ET LE SIÈGE DE KÖNIGSBERG LES BOMBARDEMENTS D AOÛT 1944: A KÖNIGSBERG ont vécu plus de 9 000 français : P.G., P.G. transformés, S.T.O., déportés du travail, travailleurs et travailleuses «libres». La cité comptait plus de 420 000 habitants lorsque les hostilités devinrent plus sérieuses et que nos alliés commencèrent à bombarder les villes principales du territoire occidental, c'est-à-dire celui situé à l Ouest du fameux couloir de DANTZIG. Ces bombardements motivèrent en effet le transfert de plusieurs administrations et de services publics dont la Radio Nationale Allemande qui émettait de KÖNIGSBERG même, ainsi que certains hôpitaux et surtout des maternités qui s établiront principalement dans les stations estivales situées sur la côte de la mer baltique : KRANZ, RAUSCHEN, etc., ces régions semblant provisoirement quelque peu épargnées par les raids aériens étant donné leur éloignement et jusqu à ce que l U.R.S.S. ait redressé sa propre situation. Les progrès techniques en matière d aviation furent spectaculaires bien que nous n en étions pas encore à la mise en service des avions à réaction, mais nos alliés avaient pris une certaine avance technique quant au rayon d action de leurs appareils. Ce qui permit aux anglais de venir bombarder et détruire aux trois quarts de la ville de KÖNIGSBERG dans les nuits du 26 au 27 et du 28 au 29 août 1944 en l espace de 2 raids de 20 minutes chacun. Jugez du résultat de cette attaque surprise et surtout de notre inquiétude sur le sort de nos camarades. LE SIÈGE DE KÖNIGSBERG : Avant d en arriver au siège proprement dit, il est intéressant de rappeler qu à la date du 20 janvier 1945, notre communauté s élevait à 9 000 personnes dont voici le détail : - hommes : 6 909 comprenant les P.G. transformés ou non, les S.T.O. et les autres travailleurs déportés - femmes : 63 - enfants : 9, car il y eut des petits français!!! Chiffres auxquels il faut ajouter environ 2 000 autres compatriotes ayant fui devant les combats dus à l avance de l Armée rouge, le fameux rouleau compresseur! A cette époque nous avions des malades et des blessés dans tous les hôpitaux de la ville et dont je possède encore la liste. Nous fûmes contraints, ou d adopter une ultime fuite vers l Ouest, ou de rester sur place et d attendre une libération par l Armée russe. C est cette dernière solution que nous recommandâmes à tous nos compatriotes, en raison des risques que présentait la traversé du Frisches Haff sur la glace. Mais certains s y risquèrent et beaucoup y restèrent. Cette situation dura jusqu au jour où l Armée rouge encercla totalement la ville après de très durs combats contre la WEHRMACHT refoulée de «son front de l Est». Les combats durèrent trois mois et furent d une extrême violence, Grâce à notre Comité d'entraide dont j avais assumé la responsabilité depuis novembre 1943, et avec l aide constante et efficace des délégués de ce Comité dans chaque kommando, nous avions pu conserver un contact permanent avec tous nos camarades. Grâce également à ceux qui travaillaient dans les hôpitaux de la ville, nous pouvions savoir si des blessés ou des malades y avaient été dirigés sans que nous en soyons informés. Ce ne fut plus le cas lors de l attaque pour la prise de la 1

ville et de son encerclement total, l état de siège étant déclaré avec toutes les mesures de police applicables en ce genre de circonstance : couvre-feu, interdiction de circuler, etc. A partir du 25 janvier 1945, KÖNIGSBERG se trouve donc sous le feu de l artillerie. Grosse panique dans la population civile qui tente son exode en la seule direction possible, à savoir le FRISCHES HAFF qu il faut traverser sur la glace (notons que la température moyenne est descendue à -30 depuis décembre) ce qui représentait une belle cible pour l aviation russe. Et le 28 janvier l état de siège était déclaré et nous restions dans l incertitude et l attente d ordres qui n arrivèrent pas, ni de la part des autorités militaires, ni de celle des autorités civiles, et notre pauvre Délégué Régional, l aspirant Michel BIHR, ne pouvait que nous prodiguer ses propres conseils de prudence. C est alors qu avec l aspirant BORIE nous proposâmes à Michel BIHR de nous mettre à sa disposition au nom du Comité d'entraide afin de lui apporter une aide qui permettrait de rester en contact avec tous les kommandos. Mais il nous fallait alors des laissez-passer spéciaux nous permettant de circuler en ville. Après de nombreuses difficultés nous réussîmes à les obtenir auprès d un certain RADTKE précédemment «kreisobmann» (médiateur!) devenu de sa propre initiative le chef suprême de l organisation civile (étant vraisemblablement issu de la fameuse N.S.D.A.P.) jusqu au jour où l Armée prit toutes les choses en mains. Le fameux RADTKE en profita pour nous retirer les laissez-passer qu il nous avait accordés quelques jours auparavant Après beaucoup d insistance auprès du seul représentant de la D.A.F. (Deutsch Arbeit Front), ce dernier nous conseilla de nous adresser aux militaires chargés des étrangers, dont le responsable était le général VON HINDENBURG, le fils du célèbre Maréchal, auquel l autorité militaire avait confié un poste secondaire. Ceci nous permit de faire sa connaissance et surtout de reprendre le contact avec tous nos camarades, de nous occuper des sépultures dans les différents cimetières, dont je possède toujours les plans, ou de noter les sépultures provisoires pour les cas isolés. Ce siège qui dura 70 jours jusqu à la reddition du Général LASCH, le 8 avril, coûta la vie de 163 de nos camarades, dont 51 les 3 derniers jours. Nous avons en outre, dénombré 102 morts à PILLAU (aujourd hui BALTIJSKA) et 73 à HEILIGENBEL (devenu MAMOUNOVO). J ai en ma possession, sous la forme d un journal qui fut tenu au jour le jour, le rapport de ces évènements et des conditions de vie des français pendant le «Festung», ainsi que l action que nous avons développée au cours de cette période, mais il ne comprend pas moins de 44 pages. Le 8 avril, les combats duraient encore, et pour ce qui concerne ma petite équipe, ce sont 2 femmes soldats qui sont venues, mitraillette au poing, nous sortir de notre garage. On pourrait dire libérer Extrait du compte-rendu de la réunion du 20 mai 1945 du Comité d'entraide : «Nous avions prévu, après la prise de la ville, de s adresser à l Etat-Major des nouvelles troupes occupantes pour lui signaler la présence des 7000 français de la ville, d une part, et, d autre part pour lui demander l autorisation de rester quelque temps afin de s occuper des blessés, des malades et aussi de nos morts et de nos cimetières que nous aurions voulu laisser dans le meilleur état possible. Malheureusement les évènements furent tout autres et l accueil différent de celui espéré. Il nous a donc fallu quitter la ville, laissant à l abandon tous ceux envers lesquels nous comptions diriger toute notre activité et remplir nos derniers devoirs.» 2

Puis en colonne, plus ou moins élastique comprenant français, françaises, poupons (il y en avait 9), polonais, ukrainiens, escortés par des «posten» russes on nous fit prendre la direction de GUMBINNEN. Là, j ai encore pu recenser, sur témoignages, près de 440 autres victimes tuées au cours de ces terribles combats engagés au cours de l avance russe en PRUSSE ORIENTALE. Les routes des bombardiers 3

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