SUIVI DES ZONES DE FRAYERES A TRUITES SUR LES COURS D EAU DU FURON ET DU GARON DECEMBRE 2009 ET JANVIER 2010 Rapport réalisé par : - Jean-Charles JULLIN, Garde-Pêche Fédéral - Jean-Pierre FAURE, Chargé de mission. SOMMAIRE PREAMBULE... 1 METHODOLOGIE... 2 RESULTATS - INTERPRETATION... 3 CONCLUSION... 6 PREAMBULE La Société de Distribution d Eau Intercommunale a mandaté la Fédération de Pêche du Rhône afin qu une étude piscicole soit réalisée dans le cadre du suivi de la pollution par rejet d eaux usées de juin 2009 dans les eaux du Garon et du Furon. Un recensement des frayères d'une espèce, la truite fario, a été réalisé durant la période de reproduction des salmonidés dans le secteur touché par la pollution. Rappel : reproduction de la truite La maturation des œufs chez les femelles commence dès le mois d avril et va aller en s accroissant jusqu à l automne. Un peu avant le début du frai, les truites vont migrer vers des zones propices à l établissement de leurs frayères à la recherche de plages de graviers propres et d une granulométrie régulière (1-10cm), et généralement recouverte d une faible profondeur d eau (15-30cm). De fin novembre à début janvier, l activité de cette espèce va être à son apogée. Le frai pourra être plus précoce ou bien, au contraire, plus tardif suivant les conditions rencontrées. La femelle, qui sera rapidement rejointe par le mâle va creuser une sorte de cuvette en s aidant de sa nageoire caudale. Une fois le nid réalisé, elle va se placer au centre. Les œufs et la laitance sont évacués au dessus de la cuvette en une brève opération qui ne dure que quelques minutes. Une truite Fario pond environ 2000 œufs par kilo de son poids, d un diamètre de 4 à 6 millimètres. Le brassage de l eau va permettre la fécondation des œufs. Ces derniers seront recouverts de graviers par la truite afin de les protéger. L'ensemble est étalé sur environ 0.1m² pour des adultes de 25cm, cette taille augmente avec celle des géniteurs. Ce sont ces placettes qui ont fait l'objet d'un recensement dans le cadre du présent travail. Les œufs fécondés vont se développer lentement. La durée de l incubation est variable en fonction de la température de l eau. Elle est de 410 degré/jour chez la truite (pour une température d eau de 10 c, il faudra 41 jours d incubation par exemple). Il faudra donc un peu plus de 2 mois pour voir éclore les alevins, qui possèdent à leur naissance une sorte de poche appelée «vésicule vitelline», qui va leur servir à se nourrir. Progressivement, le jeune salmonidé va sortir des graviers pour rester quelques temps sur le fond du nid jusqu à résorption totale de sa vésicule. C est à partir de ce moment qu il va quitter la frayère, après 730 degré/jour. 1
METHODOLOGIE Le but est de remonter à pied, de l'aval vers l'amont, les linéaires concernés par cette étude afin de comptabiliser et cartographier les nids découverts durant les semaines de prospection. Seules les placettes clairement identifiées comme zones de ponte sont comptabilisées, les déplacements de sédiments peu distincts ne sont pas répertoriés. La prospection des frayères à truites s'est déroulée entre le 02/12/09 et le 12/01/10, sur sept journées prévues à cet effet dont cinq au mois de décembre et deux au mois de janvier (Cf. tableau 2). Les prospections ont eu lieu une fois par semaine pour chaque tronçon de cours d'eau. - linéaires prospectés (cf. carte 1) Pour le GARON : Le linéaire majoritairement prospecté retrace en partie le chemin parcouru par la pollution de juin 2009 jusqu à Brignais. La limite aval se situe au niveau du collège de Brignais, la limite amont étant la confluence avec le Furon. Nous appellerons ainsi ce parcours GARON 1. L autre partie du parcours prospecté est un linéaire non touché par la pollution de juin 2009, mais affecté par la pollution de mars 2008. La limite aval se situe à la confluence avec le Furon, celle de la limite amont au pont reliant Soucieux à Chaponost sous le lieu dit «Le Corrandin». Nous appellerons ainsi ce parcours GARON 2. Le Garon présente un parcours intéressant pour la reproduction de la truite jusqu au pont de la Levée malgré l ensablement important du lit du cours d eau, aggravé localement par la présence d'un seuil. Ce dernier est recalibré à l aval et semble moins favorable aux zones de frai des salmonidés. Pour le FURON : Le départ de la pollution de juin 2009 se situe au niveau du pont de la départementale 25 reliant la commune de Soucieux-en-Jarez à celle de Brignais. Ce pont est pris en repère pour la limite amont du secteur pollué à prospecter. La limite aval se situe à la confluence avec le Garon. Nous appellerons ainsi ce parcours FURON 1. Le parcours dit «témoin» se situe en amont du rejet polluant jusqu au pont de la départementale 30 reliant Soucieux-en-Jarrest à Saint-Laurent-d Agny. Nous appellerons ainsi ce parcours FURON 2. Le Furon est un cours d eau de petit gabarit qui abrite chaque année de nombreux alevins issus de la reproduction naturelle de la truite. Le résultat de la pêche électrique de juin 2009 en atteste, avec le sauvetage d une centaine d alevins et accompagnés de géniteurs lors de l'épisode de pollution. Il est classé en tant que réservoir biologique identifié par le SDAGE Rhône Méditerranée et Corse : c'est un secteur prioritaire dans le cadre de l'atteinte des objectifs de bon état écologique de la DCE sur le bassin du Garon. Cours d eau Limite aval Limite amont Linéaire en mètres Observation Garon 1 Pont collège Confluence Pollution juin 3500 Brignais Furon 2009 Garon 2 Confluence Furon Pont Corrandin 1350 Pollution mars 2008 Furon 1 Confluence Furon Pont D 25 2730 Pollution juin 2009 Furon 2 Pont D25 Pont D30 930 Zone témoin Tableau 1 : caractéristiques des tronçons prospectés 2
GARON 2 GARON 1 FURON 1 FURON 2 500m Carte 1 : Localisation des tronçons prospectés RESULTATS - INTERPRETATION Description générale : Le tableau récapitulatif des sorties effectuées et le nombre de nids comptabilisés sur les secteurs prospectés est présenté ci-dessous. Date Garon 1 Garon 2 Furon 1 Furon 2 02/12/2009 0 0 0 2 09/12/2009 2 0 0 4 15/12/2009 33 0 17/12/2009 0 6 22/12/2009 24 0 0 2 29/12/2009 1 0 0 0 06/01/2010 4 0 0 0 12/01/2010 0 0 0 0 TOTAL 64 0 0 14 Tableau 2 : Nombre de frayères comptabilisées sur les tronçons prospectés 3
Pourcentage cumulé de frayères observées sur les tronçons de cours d'eau étudiés décembre 2009-janvier 2010 % cumulé de frayères par tronçon 120 100 80 60 40 20 0 Garon 1 Garon 2 Furon 1 Furon 2 02/12/2009 04/12/2009 06/12/2009 08/12/2009 10/12/2009 12/12/2009 14/12/2009 16/12/2009 18/12/2009 20/12/2009 22/12/2009 24/12/2009 26/12/2009 28/12/2009 30/12/2009 01/01/2010 03/01/2010 05/01/2010 07/01/2010 09/01/2010 11/01/2010 Graphe 1 : Evolution du nombre de frayères observé (pourcentage cumulé) sur les différents tronçons Comme le montrent le tableau 2 et le graphe 1 ci-dessus, la reproduction semble avoir débuté dès le début des prospections, avec un pic d'activité enregistré entre les sorties du 09 au 22 décembre. La fraie semble plus précoce sur le Furon, elle a probablement démarré fin novembre pour se terminer autour du 22/12. Sur le Garon, elle ne démarre véritablement qu'à partir du 9/12 et s'achève la première semaine de janvier. Evolution des températures d'air, des débits et du pourcentage cumulé de frayères en place sur la période de suivi 1,6 1,4 Débit T air 13 1,2 1 Frayères Garon 8 Q (m3/s) 0,8 0,6 3 T ( C) 0,4 Frayères Furon -2 0,2 0 21/11/09 23/11/09 25/11/09 27/11/09 29/11/09 01/12/09 03/12/09 05/12/09 07/12/09 09/12/09 11/12/09 13/12/09 15/12/09 17/12/09 19/12/09 21/12/09 23/12/09 25/12/09 27/12/09 29/12/09 31/12/09 02/01/10 04/01/10 06/01/10 08/01/10 10/01/10 12/01/10 14/01/10 16/01/10 18/01/10 20/01/10-7 Graphe 2 : Evolution du nombre de frayères observé (pourcentage cumulé) sur le Garon et le Furon, comparé à l'évolution des débits (station de Craponne, BV Yzeron, source Banque Hydro) et des températures d'air (Station Lyon St-Exupéry, source Météo France) sur la période décembre 2009 - janvier 2010 4
Le graphe 2 ci-dessus montre que les pontes commencent derrière un petit pic de débit fin novembre, avec une baisse globale des températures d'air en dehors de l'épisode pluvieux, puis se multiplient après un second épisode hydrologique de faible ampleur. La majeur partie des frayères est creusée dans des conditions de baisse des débits (de 320l/s à 108l/s sur le bassin voisin de l'yzeron) et des températures d'air (de 11.3 à -6 C à Lyon st -Exupéry). Carte 2 : Localisation et densité des frayères observées par secteur les frayères très proches géographiquement sont regroupées en points, dont la taille est proportionnelle au nombre de frayères. Description par secteur (cf. carte 2) : LE GARON 1 : Cette partie du cours d eau (aval de la confluence avec le Furon) a été polluée en juin 2009. Cependant le nombre de nids comptabilisé (64 au total) atteste de la présence de géniteurs dans ce secteur. LE GARON 2 : Ce linéaire observé pendant sept semaines n a pas permis de constater la présence de frayères. La vingtaine de géniteurs pêchés lors du sauvetage de juillet 2009 avait pourtant été déversée sur ce parcours. Ils n'ont pas pu migrer vers l'amont en raison de l'existence de seuils infranchissables quelques centaines de mètres en amont de la confluence du Furon. Par conséquent, l'hypothèse d'une dévalaison liée à des conditions difficiles lors de l'été 2009 semble la plus probable, ce qui expliquerait en partie la densité de frayères observée en aval de ce secteur. Notons qu'en mars 2008, ce linéaire a été touché par la pollution accidentelle de la STEP de Messimy. LE FURON 1 : Parcours fortement pollué en juin 2009. Aucune frayère n'a pu être identifiée. Le poisson en tout état de cause n a pas recolonisé ce secteur propice à la reproduction de la truite Fario. LE FURON 2 : Ce parcours témoin a permis de comptabiliser 14 nids. La présence de géniteurs sur les frayères est constatée lors des observations. Les truites effectuant généralement une migration vers l'amont lors de la reproduction, il semble cohérant de ne retrouver que peu de frayères sur la partie aval de ce parcours situé directement en amont de la zone polluée. 5
CONCLUSION Les frayères semblent absentes dans la partie polluée du Furon. Les géniteurs n auraient donc pas recolonisé ce milieu favorable à leur reproduction. Par contre de nombreux nids sont comptabilisés le long du linéaire du Garon sur le parcours affecté par ce rejet d eaux usées de juin 2009. Il est probable que les individus sauvés en juillet 2009 aient contribué à ces observations par dévalaison depuis leur site de remise à l'eau, et reproduction sur le Garon aval. Une pêche électrique de sondage peut être réalisée au printemps prochain afin de pouvoir attester la présence d alevins de truites fario sur ces secteurs étudiés. L'ensablement du site rend très délicate la survie des œufs au sein des frayères, le frai effectué sur cette portion du Garon ne sera peut-être pas viable. D'autre part, le nombre de géniteurs du Furon a été sévèrement réduit en raison de la mortalité suite à la pollution de 2009. Ce fait, couplé à l'impossibilité pour les poissons de recoloniser les secteurs désertés du Furon depuis l'aval en raison d'obstacles infranchissables, engendrera une perte de la diversité génétique de l'espèce. Cette diversité est déjà contrainte par la faible capacité d'accueil du milieu en raison des pressions qui s'y exercent. Cela compromet d'autant plus la survie à long terme de la truite dans ce bassin versant. Fait à Ecully, Le : 22/02/10 6