Possibilités d élimination des phosphates et de l azote à partir des eaux usées domestiques en utilisant un filtre planté de papyrus N. Seghairi 1, L. Mimeche 1, M. Debabeche 1 et S. Khider 2 1 Laboratoire de Recherche en Génie Civil, Hydraulique, Développement, Durable et Environnement, Université de Biskra, Algérie 2 Master en hydraulique, Université de Biskra, Algérie Résumé. Le développement des végétaux dans les cours d eau, les lacs ou les étangs est un phénomène normal, puisque c est de la production de matière organique par la photosynthèse, mais lorsque ce développement est excessif, proliférant et déséquilibré (c est l eutrophisation) entraîne une dégradation des milieux aquatiques et une réduction de la biodiversité. Les plantes aquatiques comme les plantes terrestres ont besoin pour croître de sels nutritifs, azote et phosphore. Ces nutriments proviennent du lessivage des sols ou sont amenés avec les rejets d eaux usées urbaines. Les rapports d azote et de phosphore sont très variable suivants les différents secteurs du réseau hydrographique. L objectif de cette étude est de mettre en évidence les potentialités du papyrus à épurer les eaux usées domestiques de la zone de Biskra et de tester le pouvoir épuratoire de cette plante à éliminer l azote et les phosphates présents dans ces eaux en concentrations importantes. Globalement, que ce soit les paramètres physico-chimiques des eaux usées à l entrée et la sortie des filtres. Une élimination importante est observée à la sortie du filtre de papyrus. Cette élimination peut atteindre 97,2% pour la DCO et 96,73% pour la DBO 5, l azote 92,76% et les phosphates 7,65%. Mots clés : Phytoépuration ; Papyrus ; phosphates ; azote ; eaux usées 1 Introduction Dans les pays à climat aride et semi-aride, tels que l Algérie, le Maroc, et beaucoup de pays sudméditerranées, les eaux usées peuvent constituer un apport en eau non négligeable pour palier le déficit hydrique croissant et récurrent [1, 2, 3]. Néanmoins, la réutilisation des eaux usées et ou leur déversement dans la nature, à l état brut, peut d accompagner de risques sanitaires et environnementaux. L'azote et le phosphore sont deux éléments importants des cycles biogéochimiques. Leur rôle privilégié dans le métabolisme des cellules vivantes explique le fait qu'ils constituent les éléments principaux des engrais utilisés depuis longtemps pour accroître les productions végétales [4,5]. On les retrouve ainsi sous des formes solides et dissoutes dans les eaux usées et, finalement, en partie tout au moins dans les milieux aquatiques, en particulier les eaux de surface [6]. Le phosphore n'est pas toxique intrinsèquement pour la faune et la flore terrestres 46 et aquatiques. Par contre, l'«eutrophisation», conséquence directe majeure d'un excès de phosphore dans le milieu, a des effets très préoccupants à de nombreux niveaux. Les eaux usées municipales contiennent environ 25mg/L de phosphate, orthophosphates, polyphosphates et phosphates insoluble) [7]. Les systèmes de traitement intensifs ne peuvent être employés systématiquement pour des raisons de coût et de complexité de mise en œuvre, surtout si les quantités à traiter sont importantes : c'est le cas des effluents urbains. L'élimination du phosphore, ou «déphosphatation», peut être réalisée par des voies physico-chimiques ou biologiques. La nitrification suivie par la dénitrification est vraisemblablement la technique la plus efficace d'élimination de l'azote dans les eaux usées [6]. Les filtres plantés de macrophytes, largement utilisés pour le traitement des eaux usées, deviennent aujourd hui une alternative intéressante
pour le traitement des eaux usées vues les grands avantages qu ils présentent Ils sont moins couteux à réaliser et à exploiter; sont construits directement sur le site de rejet des eaux usées, nécessitent peu d équipements mécanisées et finalement sont moins sensibles aux variations des charges polluantes [8]. Plusieurs travaux ont prouvés leur aptitude à exploiter efficacement les eaux usées municipaux [9, 1, 11] et effluents industriels [12, 13]. L objectif de ce mémoire est de mettre en évidence les potentialités du papyrus à épurer les eaux usées domestiques de la zone de Biskra particulièrement celles provenant du rejet Chaabet Roba et de tester le pouvoir épuratoire de cette plante à éliminer l azote et les phosphates présents dans ces eaux en concentrations importantes. Cette performance peut être évaluée après comparaison entre la qualité des eaux usées à l'entré et à la sortie du système, après temps de séjours imposé. 2 Matériels et méthodes 2.1 Étude géographique et climatique de la ville de Biskra La ville de Biskra se située au Sud-est de l'algérie, elle occupe une superficie de 21.671 Km 2, son altitude est de 128 mètre/au niveau de la mer. Elle est caractérisée par un climat froid en hiver, chaud et sec en été. La température moyenne maximale est de l ordre de 33,8 C alors que la température moyenne minimale est de 23 C. ouvrages techniques et aussi la station météorologique). Le dispositif expérimental est constitué de 5 bacs en plastique d'une capacité de 9L chacun, remplis avec une seule couche de gravier alluvionnaire de diamètre d < 5 mm, d'une épaisseur de 4 cm. 4 bacs sont plantés de jeune plantes de papyrus, alimentés respectivement d'eau usées domestiques. 2.4 La plante de papyrus Généralement le choix des végétaux à implanter s appui sur un certain nombre de critères importants : adaptation aux conditions climatiques locales, durée du cycle de végétation, vitesse de croissance, facilité d exportation de la biomasse, et l abondance sans aucun entretient particulier. Dans cette étude la plante qu on choisi pour l expérimentation c est la papyrus. Le papyrus du genre Cyperus est une plante qui pousse notamment sur les rives du Nil et de son delta. Elle pousse aussi en Europe, plus précisément en Italie. Il est constitué d'une tige ligneuse de section triangulaire supportant des feuilles disposées en étoile à son sommet. Cette plante peut atteindre plusieurs mètres de haut. Son feuillage est de couleur vert jade, longs, fins, persistants, avec des épillets bruns «figure 1». 2.2 Situation du rejet des eaux usées domestiques (Chaabet Roba) L agglomération de Biskra rejette actuellement plus de 3.m 3 /j d eau usée. (A.N.A.T, 23). Le rejet de Chetma, commune de Biskra est notre point de prélèvement des eaux usées pour les tests expérimentaux. Ce site se caractérise par la présence de conduites dont le diamètre est de 12mm, elle collecte les rejets domestiques de la zone Est de la ville de Biskra. 2.3 Mise en place des dispositifs expérimentaux Les essais expérimentaux ont été réalisés dans la station expérimentale à ciel ouvert relevant du département de l'hydraulique de l'université de Biskra, aménagée pour effectuer différents essais (la phytoépuration, les essais de similitudes des Fig. 1. La plante de papyrus après deux mois de plantation Après une période d adaptation d un mois une première série d analyse a été menée (âge des plantes trois mois). Les échantillons ont été prélevés une fois par semaine. 3 Résultats et discussions 3.1 Performances épuratoires des filtres plantés de papyrus 47
3.1.1 Variation des paramètres globaux de pollution a) La DCO La concentration en DCO totale pour les eaux brutes à l entrée des filtres plantés varie entre 172,68 à 245,36 mg/l avec une valeur moyenne de 268,49 mg/l. les teneurs de la DCO enregistrées à la sortie du filtre planté de papyrus varient de 3,65 à 36,85 mg/l avec une concentration moyenne de 19,33 mg/l. A la sortie du filtre nu (témoin), la concentration en DCO varie de 115 à 116,92 mg/l avec moyenne de 116,3 mg/l. «Tableau 1». Selon [14,15,16], les macrophytes ont l aptitude de transférer l oxygène du rhizome vers les racines à travers un système interne ce qui favorise la création d une zone aérobie autour des racines. Cette zone aérobie va permettre la prolifération des micro-organismes qui sont les principaux décomposeurs de la matière organique dans la zone racinaire. Tableau 1. Rendements d élimination de la DCO à l entrée et a la sortie du filtre planté et du filtre témoin Le filtre Le filtre Eau usée Paramètre planté de nu brute papyrus (témoin) DCO (mg/l) 268,49 19,33 85 Rendement (%) b) La DBO 5 2 15 1 5 19 DBO 5 mg/l 7,5 eau brute papyrus 92,8% 116,,3 témoin 56,68% 3.2 L abattement de l azote ammoniacal et les nitrates Le suivi de l évolution de l azote est basé sur une relation symbiotique plantes-bactéries, dans la quelle les bactéries utilisent l oxygène fourni au milieu par les plantes pendant la photosynthèse pour dégrader le carbone organique. L abattement de l azote et les nitrates à l entrée et la sortie du filtre et même pour le filtre témoin est présenté sur «la figure 3». Fig.3. L abattement de la l azote et les nitrates à l entrée et la sortie du filtre planté de papyrus et du témoin Nous observons une diminution très nette de l azote ammoniacal de 92,76% pour le papyrus et de 85,98% pour le filtre nu. La séquence nitrification-dénitrification est considérée comme le processus majeur d élimination de l azote [18]. En conditions anaérobies, les nitrates peuvent être éliminés par dénitrification microbienne. 3.3 Rendements d élimination des phosphates 3 25 2 15 1 5 23,9 3,68 4,41 1,19 3,35 1,73 eau brute NH₄+ (mg/l) papyr us témoi n NH₄+ (mg/l) 23,9 1,73 3,35 NO ₃ (mg/l) 1,19 3,68 4,41 La concentration de PO 4 dans les filtrats du filtre planté de papyrus est inférieuree à celle des filtrats du témoin. Elle augmente légèrement avec la croissance des plantes «figure 4». Fig. 2. Teneurs en DBO 5 avant et après filtration La figure 2 représente la quantité d oxygène nécessaire aux micros organismes pour oxyder et dégrader l ensemble de la matière organique d un échantillon d eau usées maintenu à 2C, à l obscurité pendant 5 jours. Cette dégradation peut se faire en présence ou en absence d oxygène. L élimination de la charge organique se fait par simple filtration en plus des processus biologiques dus à la flore bactérienne et aux plantes, [17, 12]. 48 2 phosphates 15,9 15 1 8,8 4,68 5 eau brute papyrus témoin Fig. 4. Teneures en phosphates avant et après filtration
Les rendements épuratoires correspondants sont plus élevés dans le filtre planté par rapport au témoin. Ou obtient en moyenne, une réduction de 7,65% et 49,18% respectivement pour le filtre de papyrus et le filtre nu. Selon [8] certaines plantes consomment une quantité appréciable de phosphore lors de leur croissance. Elles peuvent emmagasiner celui-ci dans les racines et rhizomes, les tiges et les feuilles. La concentration de PO 4 a diminuée dans le filtre planté cette diminution pourrait résulter d une assimilation bactérienne et ou végétale et par l absorption de PO 4 dans le filtre planté, [1, 19, 2]. Comparativement au témoin (49,18%), le filtre planté donne le meilleur rendement d enlèvement de PO 4 (7,56%). 4 Conclusion L épuration des eaux usées domestiques par des filtres plantés de papyrus est assurée par la prolifération des bactéries soient qui se trouvent au niveaux des eaux usées ou bien aux niveaux des racines des plantés. L objectif de cette étude est de mettre en évidence les potentialités du papyrus à épurer l effluent du rejet de Biskra. Globalement, que ce soit les paramètres physico-chimiques des eaux usées à l entrée et la sortie des filtres. Une élimination importante est observée dans le filtre de papyrus. Cette élimination peut atteindre 97,2% pour la DCO et 96,73% pour la DBO 5, l azote 92,76% et les phosphates 7,65%. Le filtre planté de papyrus à écoulement vertical est donc un filtre robuste d épuration des eaux usées urbaine. [9] Abissy et Mandi, (1999). Utilisation des plantes aquatiques enracinées pour le traitement des eaux usées urbaines: cas du Roseau. [1] Moll D. (25), Les normes de rejet des eaux et les paramètres d'analyses de la pollution (Grenoble eau pure rapport). [11] Mimeche. L, Mancerh, Debabeche M. Tunisian Journal of Medicinal Plants and Naturel Products, 4, (21). [12] Ben Ameur, N, Mémoire de Magister en biologie. Université M ed Khider Biskra. (21. [13] Seghairi N., Debabeche M., Communication orale, 3 ème Edition du Congrès International sur, Eau, Déchets et Environnement- Fès- Maroc. (211). [14] Brix H, Wat.Sci.Tech,19, Rio, p 71 78. (1987). [15] Biddelstone A.J et al, journal of biotechnology, 17, 29 22. (1991), [16] Biddlestone A.J et al,, Process Biochemistry, 26, p 265 268. (1991). [17] Abissy et Mandi,., revue des sciences de l eau, rev.sci.eau 12 (2), p 285 315. (1998). [18] Reddy, K.R et al, Journal of environmental quality 19: 261 267. (1989). [19] Brix H et al, In 7 th international conference on wet lands systems for water pollution control. Nov. 11-16-18. Florida (USA). (2) [2] kyambadde J. et al Constructed wetland for waste water treatement in a tropical country. Wat.res.38, 475-485., (24) Références [1] Benemann J.R., Weissmann J.C., Koopman Ben L and Oswald W. J., Nature. 268, (1977). [2] Rodier J., (1996). L'analyse de l'eau. DUNOD, Paris, 8 e édition. [3] Ouazzani N., Th. Doct. Univ. Cadi Ayyad, Maroc, 193 p. (1998). [4] Garric J., Rapport CEMAGREF Lyon, 7 p. (1987). [5] Capblancq J. et Dauta A.,. Adour-Garrone, 45, 2-23. (199). [6] Miquel G., Sénateur, Office Parlementaire d'évaluation des Choix Scientifiques et Technologiques,. Rapport sur «la qualité de l'eau et de l'assainissement en France» Tome II - Annexes. Paris, France, 293 p. (23) [7]Manahan S. E.,. Environmental Chemistry, 7 e edition, Boca Raton. CRC press LLC, USA, Lewis Publisher, 1492 p, (2), [8] Brix.H., WAT. Sci.Tech. vol.29,n.29, p 71 78. (1994). 49
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