Page 1/5 il-lun iii Jydinr Tous en selle Tous les mercredis et samedis, l'association Loisirs populaires dolois propose des cours d'équitation à des prix modiques en forêt de Chaux, dans le Jura.
Page 2/5 AVIS AUX AMATEURS Dans le Jura, on pratique l'équitation sans œillères LS MONDE EAIS-NOUS REVER mix dans un univers équestre souvent considéré comme élitiste ADRIEN PÉCOUT Dole (Jura), envoyé spécial Plutôt que de la jalousie, leurs visages affichent comme une pointe d'admiration. Au cœur de la forêt de Chaux (Jura), seize enfants et adolescents ont pris place sur le banc d'une remorque qui fait office de tribune. Tous suivent des yeux leurs deux camarades qui, juchées sur des poneys, se livrent à un exercice de saut d'obstacles. «C'est chacun notre tour, dès que quelqu'un monte, on ne cherche pas à prendre sa place. Le monde du cheval est parfois hyper égoïste, hyper solitaire, mais pas ici», souligne la lycéenne Odessa, 17 ans. Amandine Noirot, la mère d'une plus jeune cavalière, apprécie aussi le changement : «Quand ma fille est arrivée ici, la première chose qui nous a étonnés, c'est que les enfants lui ont dit bonjour, alors que dans d'autres haras, c'est tout juste s'ils ne l'auraient pas écrasée avec le cheval!» Trop élitiste, l'équitation? Tous les mercredis et samedis, l'association Loisirs populaires dolois se démène pour rendre ce sport accessible à tous. Suivant les coefficients de la caisse d'allocations familiales, les parents peuvent y laisser leurs enfants pour à peine 50 centimes la journée. «Dans d'autres centres équestres, les prix montent à 13 euros de l'heure», souligne Amandine Noirot. «Depuis que je suis toute petite, ce sport est ma passion, et le cheval, mon animal préféré. Mais au début, ma mère ne voulait pas que j'en fasse, parce que c'était trop cher», se souvient Louna, une collégienne de nans résidant dans la commune de Dole, une dizaine de kilomètres plus loin. Créés en 1977 dans la sous-préfecture du Jura, les «Loisirs pop'» ont ajouté depuis 1997 ce sport au programme de leurs diverses activités culturelles (athlétisme, guitare, excursions, théâtre, sorties au mu- «Mes frères me disaient que ce n'était pas un sport pour moi, pas un sport pour des gens qui viennent, comme nous, des quartiers» NORA AISSANI cavalière séc). «Sans nous, ces jeunes n'auraient pas forcément les moyens financiers de découvrir d'eux-mêmes ce sport, raconte Bouziane Belghorzi, l'éducateur spécialisé chargé du projet, qui a grandi dans l'ancienne capitale de la Franche-Comté. Quand j'avais leur âge, moi, je ne pouvais pas faire de l'équitation ici. Je ne pouvais en faire qu'avec les chevaux de mon grand-père
Page 3/5 en Algérie, ou cetait gratuit et ou je navais pas la barriere de l'argent» Cet après-midi, le quadragénaire arbore un blouson blanc de l'équipe dè France d'athletisme Sacre champion du monde vétérans du 60 metres en mars 2014 a Budapest, le spnnteur s'épanouit tout autant lorsqu'il s'agit d'encadrer des séances d'equitation «Carde-le bien ' garde-le bien '», repete-t-il a une cavalière qui slalome avec son animal entre une serie de plots de signalisation routiere Bien en selle, Nera Aissam circule avec assurance au milieu des feuillus II lui aura fallu vaincre quèlques réticences «Alors que mon pere m'a poussée a me mettre a /'equitation, mes freres me disaient que ce n'était pas un sport pour moi, pas un sport pour des gens qui viennent, comme nous, des quartiers Ils pensaient qu'il fallait arrêter de rêver et que ce n'est pas grâce au cheval que je m'en sortirai dans la vie» A 22 ans, devenue comptable, Nera Aissani fait figure de doyenne parmi le groupe des cavaliers Chaque semaine se forme autour d'elle une assemblee variable et hétéroclite qui mêle a la fois écoliers, collégiens et lycéens «Grâce aux "Loisirs pop", fai rencontre des gens que je n'aurais pas forcement croises autrement, puisqu'on n'était pas dans les mêmes collèges ou dans les mêmes lycees», résume Renaud, 17 ans, l'un des rares garçons du groupe Cet apprenti dans un lycee agricole n'habite pas a Dole même, maîs a Eclans-Nenon, un village voisin «Dans les annees 2000, quand on a commence a vouloir faire venir les gamins qui habitaient en milieu rural, et plus seulement ceux des quartiers populaires de Dole, nous avons eu besoin d'un temps d'acchmatation, reconnaît Marcel Marion, le president des Loisirs populaires, par ailleurs beau-père de Bouziane Belghorzi Chacun avait ses préjuges Les gamins des villages ne voulaient pas être avec "les voyous de la ZUS" [zone urbaine sensible] et les gamins de la ZUS ne voulaient pas être avec "les bourges des villages"» «Finalement, juge son gendre, on se rend compte que les gamins des villages, eux non plus, n'avaient pas forcement les moyens financiers de se lancer dans {'equitation Maîs de toute façon, peu importe d'où viennent nos jeunes on veut que {'equitation devienne pour eux un outil de partage au lieu d'être un sport dont ils seraient de simples consommateurs» Matin et soir, un bus se charge des navettes entre les habitations des jeunes et le centre equestre, qui jouxte un ancien prieure transforme au début du XXI e siecle en lieu de vie pour les 700 usagers et 13 salaries des Loisirs populaires dolois «Ce qui nous rapproche, c'est qu'on doit tous s'occuper des chevaux, maîs aussi des installations extérieures, souligne Renaud Godillot au moment d'approvisionner en foin le box de l'un des vingt animaux. Que ce soit la peinture sur les portes et sur les murs, ou bien la pose des barneres et des poteaux c'est nous qui avons tout fait» rn Cette initiative concourt au prix «LeMonde» -Fais-nous rêver, qui vise a recompenser un projet d'éducation par le sport. Pour en savoir plus. Apels.org
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Page 5/5 Image non disponible. Restriction de l'éditeur Bouziane Belghorzi, éducateur spécialisé charge du projet, se démène pour rendre ^équitation accessible à tous dans la commune de Dole et les villages alentour. LIN DELPIERRE POUR «LE MONDE»