TROISIÈME SECTION DÉCISION SUR LA RECEVABILITÉ CONSEIL DE L EUROPE COUNCIL OF EUROPE

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Transcription:

CONSEIL DE L EUROPE COUNCIL OF EUROPE COUR EUROPÉENNE DES DROITS DE L HOMME EUROPEAN COURT OF HUMAN RIGHTS TROISIÈME SECTION DÉCISION SUR LA RECEVABILITÉ de la requête n 34989/97 présentée par Dirk GOEDHART contre la Belgique La Cour européenne des Droits de l Homme (troisième section), siégeant en chambre le 31 août 1999 en présence de Commented [Note1]: Ne mettre que les initiales si non public ; prénom et, en majuscules, le nom de famille ; nom corporatif en majuscules ; pas de traduction des noms collectifs. Commented [Note2]: Première lettre du pays en majuscule. Mettre l article selon l usage normal de la langue. Sir Nicolas Bratza, président, M. J.-P. Costa, M. L. Loucaides, M. P. Kūris, M me F. Tulkens, M. K. Jungwiert, M me H.S. Greve, juges, et de M me S. Dollé, greffière de section ; Vu l article 34 de la Convention de sauvegarde des Droits de l Homme et des Libertés fondamentales ; Vu la requête introduite le 4 février 1997 par Dirk Goedhart contre la Belgique et enregistrée le 19 février 1997 sous le n de dossier 34989/97 ; Vu le rapport prévu à l article 49 du règlement de la Cour ; Vu les observations présentées par le gouvernement défendeur le 5 octobre 1998 et les observations en réponse présentées par le requérant le 15 janvier 1999 ; Après en avoir délibéré ; Rend la décision suivante :

34989/97-2 - EN FAIT Le requérant est un ressortissant néerlandais, né en 1942 et résidant à Hilversum (Pays-Bas). Il est représenté devant la Cour par M e G.J.J. Knoops, avocat au barreau d Amsterdam. Les faits de la cause, tels qu ils ont été exposés par les parties, peuvent se résumer comme suit. A. Circonstances particulières de l affaire Le requérant ainsi que vingt-cinq autres individus furent poursuivis pour divers faits d importation de stupéfiants, portant au total sur des quantités supérieures à quarante tonnes de cannabis. Le 6 février 1995, le tribunal correctionnel de Bruges, statuant par défaut à l égard du requérant qui n avait pas comparu malgré la citation qui lui avait été régulièrement signifiée, le condamna à une peine d emprisonnement de sept ans et à une amende de 1 500 000 francs belges. Le tribunal ordonna en outre l arrestation immédiate du requérant, estimant qu il était justifié de croire qu il tente de se soustraire à l exécution de sa peine. Le requérant fit opposition le 11 juillet 1995. Le 2 août 1995, le tribunal correctionnel de Bruges déclara l opposition nulle et non avenue, conformément à l article 188 du code d instruction criminelle, au motif que l opposant n avait pas comparu à l audience et n était pas régulièrement représenté. A cette audience, le conseil du requérant se présenta mais, conformément à l article 185 du code d instruction criminelle, il ne fut pas admis à la défense de son client. Le requérant fit appel le même jour. Bien que la citation à comparaître lui ait été régulièrement signifiée, le requérant ne comparut pas à l audience d appel du 19 mars 1996. Deux avocats se présentèrent toutefois afin d assurer sa défense et de le représenter. Ils furent entendus et déposèrent leurs conclusions ainsi que des conclusions additionnelles concernant leur demande de représentation. Le 19 mars 1996, la cour d appel de Gand, statuant par un arrêt interlocutoire, estima que des personnes qui, comme le requérant, refusent délibérément de comparaître, sans en être empêchées par la maladie ou une détention à l étranger, ne sont pas fondées à demander l autorisation de se faire représenter par avocat. Elle refusa donc la représentation du requérant. Le requérant fit opposition à l arrêt interlocutoire. Par arrêt du 30 avril 1996, la cour d appel de Gand déclara l opposition non recevable. Rappelant qu il n existait aucune possibilité de faire opposition contre une décision rendue contradictoirement, la cour releva que l arrêt du 19 mars 1996 avait été rendu contradictoirement en présence des avocats du requérant, qui avaient été entendus sur la question de la représentation, et en tenant compte des conclusions déposées par les avocats quant à cette question. Elle ajouta que cette décision avait été prise abstraction faite du fond de l affaire.

- 3-34989/97 Par arrêt du 11 juin 1996, la cour d appel de Gand, statuant par défaut à l égard du requérant, le déclara coupable des faits reprochés. Après avoir relevé qu il faisait partie du groupe de personnes qui dirigeaient et/ou finançaient l organisation criminelle, elle confirma la peine prononcée en première instance. La cour d appel ordonna en outre l arrestation immédiate du requérant. Ce dernier fit opposition à cet arrêt le 16 juillet 1996, par exploit d huissier avec audience introductive fixée au 6 août 1996. Le requérant ne comparut pas à l audience du 6 août 1996. Par un arrêt du même jour, la cour d appel de Gand s opposa à ce que son avocat assure sa défense en l absence d un document établissant que le requérant se trouvait dans l impossibilité de comparaître. Par un arrêt du 4 octobre 1996, la cour d appel déclara l opposition nulle et non avenue du fait du non-respect de l article 188 du code d instruction criminelle, qui pose le principe de la comparution en personne. Elle confirma son refus d autoriser la représentation et décida, en conséquence, que les conclusions déposées par l avocat quant au fond de l affaire devaient être écartées des débats. La cour d appel expliqua que cela ne portait aucunement atteinte à l article 6 1 et 3 de la Convention, dans la mesure où l opposition avait précisément offert au requérant une seconde possibilité de présenter sa défense. Le requérant se pourvut en cassation contre les arrêts des 19 mars, 30 avril, 11 juin et 6 août 1996. Il fit valoir que le refus de la cour d appel d autoriser sa représentation violait l article 6 1 et 3 de la Convention en l empêchant de présenter sa défense. Il se référa en particulier aux arrêts Lala et Pelladoah c. Pays-Bas (Cour eur. D.H., arrêts du 22 septembre 1994, série A n 297-A et 297-B). Par un arrêt du 10 décembre 1996, la Cour de cassation déclara le pourvoi irrecevable, sans avoir pris en compte les mémoires déposés au nom du requérant mais après avoir constaté que ceux-ci ne portaient pas sur la question de la recevabilité du pourvoi. Elle se prononça en ces termes : «Attendu qu en vertu des articles 421 du code d instruction criminelle et 2 de la loi du 10 février 1866, le pourvoi en cassation formé par un prévenu contre l arrêt le condamnant à une peine privative de liberté et ordonnant son arrestation immédiate n est recevable que si celui qui se pourvoit se trouve effectivement détenu ; Qu il n apparaît pas que [le demandeur], dont l arrestation immédiate a été ordonnée, [ait] satisfait à cette exigence et que [son] pourvoi [est] de ce fait irrecevable.» B. Le droit interne pertinent 1. Le code d instruction criminelle Article 185 «1. La partie civile et la partie civilement responsable comparaîtront en personne ou par un avocat. 2. Le prévenu comparaîtra en personne. Il pourra cependant se faire représenter par un avocat dans les affaires relatives à des délits qui n entraînent pas la peine d emprisonnement à titre principal ou dans les débats qui ne portent que sur une exception, sur un incident étranger au fond ou sur les intérêts civils. Le tribunal pourra toujours autoriser la représentation du prévenu qui justifie de l impossibilité de comparaître en personne.

34989/97-4 - 3. En tout état de cause, le tribunal pourra, sans que sa décision puisse être l objet d aucun recours, ordonner la comparution en personne. Le jugement ordonnant cette comparution sera signifié à la partie qu il concerne à la requête du ministère public, avec citation à comparaître à la date fixée par le tribunal. Si elle ne comparaît pas, il sera statué par défaut.» Article 186 «Si le prévenu ne comparaît pas, il sera jugé par défaut.» Article 187 «Le condamné par défaut pourra faire opposition au jugement dans les quinze jours qui suivent celui de la signification.» Article 188 «L opposition emportera de droit citation à la première audience après l expiration d un délai de quinze jours ou de trois jours si l opposant est détenu. Elle sera non avenue si l opposant n y comparaît pas et le jugement qui interviendra ne pourra être attaqué par la partie qui l aura formée, si ce n est par appel ainsi qu il sera dit ci-après. Le tribunal pourra, s il y échet, accorder une provision, et cette disposition sera exécutoire nonobstant l appel.» Article 208 «Les arrêts rendus par défaut sur l appel pourront être attaqués par la voie de l opposition dans la même forme et dans les mêmes délais que les jugements par défaut rendus par les tribunaux correctionnels. L opposition emportera de droit citation à la première audience après l expiration d un délai de quinze jours ou de trois jours si l opposant est détenu. Elle sera non avenue si l opposant n y comparaît pas et l arrêt qui interviendra sur l opposition ne pourra être attaqué par la partie qui l aura formée si ce n est devant la Cour de cassation.» Article 421 «Les condamnés, même en matière correctionnelle ou de police, à une peine emportant privation de la liberté, ne seront pas admis à se pourvoir en cassation, lorsqu ils ne seront pas actuellement en état, ou lorsqu ils n auront pas été mis en liberté sous caution.» Cette dernière disposition a été abrogée par l article 2 de la loi du 10 février 1866 sauf pour les condamnés qui, lors du jugement ou de l arrêt contre lequel le pourvoi est dirigé, sont en état de détention préventive. 2. La loi du 20 juillet 1990 relative à la détention préventive

- 5-34989/97 Article 27 2 «La mise en liberté provisoire peut aussi être demandée par celui qui est privé de sa liberté en vertu d un ordre d arrestation immédiate décerné après condamnation, à la condition que l appel, l opposition ou le pourvoi en cassation ait été formé contre la décision de condamnation elle-même. Elle peut dans les mêmes conditions être demandée par celui qui est privé de sa liberté sur le fondement de la condamnation par défaut, contre laquelle opposition est formée dans le délai extraordinaire.» Article 33 2 «Lorsqu ils condamnent le prévenu ou l accusé à un emprisonnement principal d un an ou à une peine plus grave, sans sursis, les cours et tribunaux peuvent ordonner son arrestation immédiate, sur réquisition du ministère public, s il y a lieu de craindre que le prévenu ou l accusé ne tente de se soustraire à l exécution de la peine. Cette décision doit préciser les circonstances de la cause motivant séparément cette crainte.» GRIEFS 1. Le requérant se plaint d avoir été privé de toute faculté de représentation dans le cadre de l examen des poursuites pénales dirigées contre lui qui ont abouti à sa condamnation. Il aurait ainsi été privé de toute possibilité de se voir adéquatement défendu, tant en première instance qu en appel. Il fait valoir qu il n a bénéficié ni d un procès équitable ni de l assistance d un défenseur de son choix, en violation de l article 6 1 et 3 c) de la Convention. 2. Le requérant soutient également qu il n a pas eu droit à un examen équitable de sa cause lors de la procédure en cassation, suite à l arrêt de la Cour de cassation de déclarer son pourvoi irrecevable en application de l article 421 du code d instruction criminelle. Il invoque également l article 6 1 et 3 c) de la Convention. PROCÉDURE La requête a été introduite le 4 février 1997 et enregistrée le 19 février 1997. Le 20 mai 1998, la Commission européenne des Droits de l Homme a décidé de porter la requête du requérant à la connaissance du gouvernement défendeur, en l invitant à présenter par écrit ses observations sur la recevabilité et le bien-fondé de la requête. A compter du 1 er novembre 1998, date d entrée en vigueur du Protocole n 11 à la Convention, et en vertu de l article 5 2 de celui-ci, la requête est examinée par la Cour conformément aux dispositions dudit Protocole. Le Gouvernement a présenté ses observations le 5 octobre 1998, après prorogation du délai imparti, et le requérant y a répondu le 15 janvier 1999, également après prorogation du délai imparti. EN DROIT 1. Le requérant se plaint d avoir été privé de la faculté d être représenté dans le cadre de l examen des poursuites pénales dirigées contre lui. Il aurait ainsi été privé de toute possibilité de se voir adéquatement défendu, tant en première instance qu en appel. En

34989/97-6 - conséquence, il n aurait bénéficié ni d un procès équitable ni de l assistance d un défenseur de son choix, en violation de l article 6 1 et 3 c) de la Convention. L article 6 de la Convention dispose : «1. Toute personne a droit à ce que sa cause soit entendue équitablement ( ) par un tribunal ( ) qui décidera ( ) du bien-fondé de toute accusation en matière pénale dirigée contre elle ( ) 3. Tout accusé a droit notamment à : ( ) c. se défendre lui-même ou avoir l assistance d un défenseur de son choix ( )» Le Gouvernement est d avis qu en l espèce le refus de la cour d appel d autoriser la représentation du requérant ne constitue pas une violation de l article 6 1 et 3 c) de la Convention. D'après lui, les intérêts en présence ont été correctement évalués si l on met en balance d un côté, l intérêt public, la sécurité publique et la santé publique, l importance de la présence des prévenus à leur procès, la tâche du juge dans le cas de l absence d un prévenu ainsi que la possibilité de faire opposition à une décision rendue par défaut, et de l'autre côté, le refus de la cour d appel d autoriser les conseils des requérants à le représenter devant elle. Le dossier porterait sur un trafic de stupéfiants à très large échelle et démontrerait clairement que l absence du requérant au procès était uniquement motivée par sa volonté de se soustraire à l exécution des jugements et arrêts à intervenir contre lui. En conclusion, compte tenu des spécificités du droit belge, notamment de la possibilité de faire opposition à toute décision rendue par défaut et de la tâche du juge au procès pénal, le requérant aurait bénéficié d un procès équitable. Pour le requérant, les spécificités de la législation belge ne justifieraient pas le fait qu il ait été privé du droit à une défense adéquate dans le cadre des trois instances. Le droit à la défense devrait être considéré comme absolu et en tout état de cause le prévenu devrait avoir le droit absolu de se défendre au moins dans une instance. Son absence trouverait sa justification dans le droit de ne pas s auto-incriminer. En plus, ni la raison pour laquelle un individu ne comparaît pas devant une juridiction ni la sévérité de la peine encourue ne seraient pertinentes lorsque est en cause la question de savoir si le droit à un procès équitable a été violé. Sur la base des arrêts Lala et Pelladoah contre les Pays-Bas (arrêts des 22 septembre 1994, série A n 297-A et B) et Van Geyseghem contre la Belgique (arrêt du 21 janvier 1999), il faut conclure à la violation de l article 6 1 et 3 c) de la Convention. A la lumière d un examen préliminaire de l argumentation des parties et de sa jurisprudence (arrêt Poitrimol c. France du 23 novembre 1993, série A n 227-A, pp. 14-15, 34-35 ; arrêts précités Lala et Pelladoah, respectivement, pp. 13-14, 30-35 et pp. 34-35, 37-42, ainsi que Van Geyseghem, 33-36), la Cour considère que le grief soulevé par le requérant pose des problèmes suffisamment complexes et importants pour que leur solution doive relever d un examen au fond. Il ne saurait dès lors être déclaré manifestement mal fondé, au sens de l article 35 3 de la Convention. Par ailleurs, le grief ne se heurte à aucun autre motif d irrecevabilité. 2. Le requérant soutient également qu il n a pas eu droit à un examen équitable de sa cause lors de la procédure en cassation, suite à la décision de la Cour de cassation de déclarer son pourvoi irrecevable en application de l article 421 du code d instruction criminelle.

- 7-34989/97 Le Gouvernement admet que la condition de se trouver effectivement en détention avant de pouvoir déposer un pourvoi en cassation constitue une intervention dans le droit d accès au tribunal au détriment des personnes dont l arrestation immédiate est ordonnée. Toutefois, il estime que, dans les circonstances de l espèce et compte tenu de l attitude du requérant, l irrecevabilité de son pourvoi sur le fondement de l article 421 du code d instruction criminelle ne constitue pas une sanction disproportionnée. En particulier, le requérant, condamné pour l importation à très large échelle de stupéfiants, aurait refusé pendant toute la procédure de comparaître dans le seul but de pouvoir se soustraire en fin de compte à l exécution de sa condamnation. L obligation légale pesant sur le requérant, de nationalité néerlandaise, de se mettre en état pour se pourvoir en cassation aurait ainsi constitué la seule garantie à l exécution effective de la condamnation. Celle-ci pèserait en l occurrence plus lourd que la limitation du droit à l accès à la Cour de cassation. Le requérant rappelle que la Cour a déjà estimé que «l irrecevabilité [d un pourvoi], pour des raisons liées à la fuite du requérant, s analysait (...) en une sanction disproportionnée, eu égard à la place primordiale que les droits de la défense et le principe de la prééminence du droit occupent dans une société démocratique» (arrêt Poitrimol c. France, précité, p. 15, 38). Il invoque également l article 6 1 et 3 de la Convention. La Cour estime, à la lumière d un examen préliminaire de l argumentation des parties et de sa jurisprudence (arrêt Poitrimol précité et arrêts Omar et Guérin du 29 juillet 1998, Recueil des arrêts et décisions, 1998-V, pp. 1840-1842, 34-43 et pp. 1867-1869, 37-47) que le grief soulevé par le requérant pose des problèmes de fait et de droit suffisamment complexes pour que leur solution doive relever d un examen du bien-fondé et, partant, que le grief ne saurait être déclaré manifestement mal fondé, au sens de l article 35 3 de la Convention. Par ailleurs, le grief ne se heurte à aucun autre motif d irrecevabilité. Par ces motifs, la Cour, à l unanimité, DÉCLARE LA REQUÊTE RECEVABLE, tous moyens de fond réservés. S. Dollé N. Bratza Greffière Président