Les prévisions saisonnières pour le trimestre mars-avril-mai 2016 Qu'est-ce que la prévision saisonnière? La prévision saisonnière a pour objectif de déterminer le climat moyen sur les trois mois à venir, à l'échelle d'une région comme l Europe de l Ouest. Contrairement aux prévisions à échéance de quelques jours, l information n est pas détaillée ni chiffrée, mais présentée sous forme de prévisions qualitatives qui renseignent sur les grandes tendances (plus chaud ou plus froid, plus sec ou plus humide que la normale). Les climatologues analysent les résultats de modèles numériques comparables à ceux utilisés pour réaliser les prévisions à court terme, mais intégrant la modélisation des océans. Dans certains cas, aucun scénario dominant ne se dégage : faute d éléments probants susceptibles d'influencer le climat des prochains mois, il est impossible de privilégier une hypothèse. Les performances des prévisions saisonnières sont très variables. Elles sont meilleures pour la température que pour les précipitations, et, pour la température, meilleures en hiver qu'en été. La fiabilité de ces prévisions est bien meilleure outre-mer qu en métropole, en particulier pour les précipitations. En savoir plus : notre dossier «la prévision saisonnière» Situation générale début 2016 Le puissant phénomène El Niño est toujours d actualité dans le Pacifique équatorial et engendre de fortes anomalies de température de surface de l océan (Figure 1). Il a atteint son maximum à la fin de l année 2015 et entame maintenant une décroissance qui va durer plusieurs mois, et que l ensemble des modèles de prévisions saisonnières de part le monde anticipent de manière très cohérente (Figure 2). Son empreinte sur le système climatique planétaire, encore forte en ce début d année, va donc progressivement s atténuer au cours du printemps. Les impacts directs constatés dans la zone du Pacifique et sur l ensemble des régions tropicales du globe (modification du régime des vents et des précipitations, déplacement des régions de naissance des cyclones et de leur trajectoire) seront encore visibles au cours du trimestre prochain. Les départements et territoires d outre-mer français sont ainsi potentiellement concernés. 1
Anomalie liée à El Nino Figure 1 : Anomalies de température de surface de l'océan en janvier 2016, en C, par rapport à la normale 1992-2013 (source : Mercator Océan). Le phénomène El Niño est clairement visible dans l océan Pacifique au niveau de l Equateur (eaux plus chaudes que la normale du jaune au rouge). L océan Indien et l océan Atlantique tropical sont également entièrement plus chaud que la normale. Figure 2 : Anomalie moyenne de température de surface de l'océan Pacifique prévue par le modèle de Météo-France dans la zone "Nino3.4" qui sert à la surveillance du phénomène. En bleu : les observations des mois passés (source : Mercator Océan), en rouge les 51 simulations effectuées en 2
février avec en pointillés noirs la moyenne de cet ensemble. Le panache montre la baisse prévue de l anomalie dans les prochains mois. Pour le continent européen, à l écart de l influence du phénomène El Niño, les prévisions saisonnières issues des modèles des différents centres de production de part le monde présentent une dispersion assez marquée. Ce type de comportement n est pas rare au printemps, saison où la prévisibilité du climat européen est moins bonne. À très grande echelle, les modèles convergent en majorité vers une zone plus anticyclonique que la normale sur l Afrique du nord et la Méditerranée et une zone plus dépressionnaire que la normale au nord de l Europe. Prévisions pour le trimestre mars-avril-mai 2016 Pour les températures : Dans un contexte du réchauffement climatique global, la présence du phénomène El Niño et le fait que les océans tropicaux (océan Indien et océan Atlantique tropical) soient plus chauds que la normale renforcent la probabilité d'anomalies chaudes de l atmosphère sur la plus grande partie du globe (Figure 3). Figure 3 : Probabilité d anomalies de température prévues pour le trimestre prochain (mars-avril-mai) par la moyenne des modèles de l'ensemble EUROSIP (Météo-France, Centre Européen de Prévision Météorologique à Moyen Terme, Met Office, National Centers for Environmental Prediction). Du bleu clair au bleu foncé, les zones où les températures devraient être inférieures à la normale. Du jaune au rouge, celles où elles devraient être supérieures à la normale. En blanc, les zones où aucun scénario chaud ou froid ne prédomine (le scénario normal prédomine ou bien les 3 scénarios sont équiprobables). 3
Pour les précipitations : La contribution du phénomène El Niño reste majeure dans la répartition des prévisions d'anomalies de précipitations sur le globe (Figure 4), avec une très forte probabilité d' excédent de précipitations sur le centre et l'est du Pacifique équatorial s'étendant au nord vers la Caraïbe et au sud vers l Argentine. À l inverse, des zones de déficit de précipitations sont probables sur le Pacifique Nord (du Sud-Est asiatique à Hawaï) et sur le Pacifique sud (de la Papouasie à la Polynésie, ainsi que sur le nord-est du Brésil). La probabilité d'anomalie sèche se maintient sur le sud de l'afrique, alors que des précipitations supérieures aux normales sont probables de la corne de l Afrique à l Australie. Figure 4: Probabilité d anomalies de précipitation prévues pour le trimestre prochain (mars-avril-mai) par la moyenne des modèles de l'ensemble EUROSIP (Météo-France, Centre Européen de Prévision Météorologique à Moyen Terme, Met Office, National Centers for Environmental Prediction). Du vert clair au vert foncé, les zones où les précipitations devraient être supérieures à la normale. Du marron au beige, celles où elles devraient être inférieures à la normale. En blanc, les zones où aucun scénario sec ou humide ne prédomine (le scénario normal prédomine ou bien les 3 scénarios sont équiprobables). Sur l Europe et la France métropolitaine : La majorité des modèles penchent, avec une probabilité toutefois modérée, en faveur d un printemps plus chaud que la normale sur l Europe continentale Ce signal est plus franc sur le pourtour méditerranéen où une anomalie chaude est très probable. 4
Figure 5 : Synthèse pour les températures des prévisions probabilistes issues des modèles de l ensemble EUROSIP. Pour chaque zone géographique délimitée par les pointillés : en bleu : la proportion de simulations correspondant à des températures inférieures à la normale ; en gris : celle des simulations correspondant à des températures proches de la normale ; en rouge : celle des simulations suggérant des températures supérieures à la normale. Concernant les précipitations, les simulations numériques suggèrent un dégradé nord-sud des anomalies, avec une probabilité légèrement renforcée d un printemps plus arrosé que la normale sur le nord de l Europe et un déficit de précipitations très probable sur l'afrique du Nord et la Méditerranée. La limite entre les deux zones est difficile à préciser car elle varie sensiblement entre les différents modèles, notamment sur la France. 5
Figure 6 : Synthèse pour les précipitations des prévisions probabilistes issues des modèles de l ensemble EUROSIP. Pour chaque zone géographique délimitée par les pointillés : en orange, la proportion de simulations correspondant à des précipitations inférieures à la normale ; en gris celle des simulations correspondant à a des précipitations proches de la normale ; en vert, celle des simulations suggérant des précipitations supérieures à la normale Outre-mer : Compte-tenu de l évènement El Niño dont les impacts vont perdurer pour les prochains mois, la prévisibilité est accrue dans les régions tropicales. La confiance est donc particulièrement bonne pour la plupart de ces régions. Océan Atlantique : - Antilles : Un trimestre chaud est très probable. Pour les précipitations le scénario est moins tranché : les Iles du Nord devraient connaître un scénario plutôt humide, mais au sud, sur la Martinique, le trimestre devrait être plutôt sec. - Guyane : Les modèles continuent de favoriser un scénario chaud et sec pour le trimestre prochain. - Saint-Pierre et Miquelon : Un trimestre plus doux que la normale est très probable. Aucun scénario ne se dégage pour les précipitations. 6
Océan Indien : La Réunion et Mayotte : Les modèles convergent vers un trimestre plus chaud que la normale, mais ils ne s'accordent pas concernant les précipitations pour lesquelles aucun scénario n est privilégié. Océan Pacifique : Nouvelle-Calédonie : Le scénario chaud et sec est très probable. Wallis et Futuna : Le scénario chaud et sec est probable. Polynésie : Les cyclones épargnent généralement la Polynésie. Mais, dans un contexte de fort El Niño, ils voient leurs zones de formation et leurs trajectoires modifiées et peuvent venir menacer cette région du globe jusqu au mois d avril. En cas de cyclone, les cumuls de précipitations peuvent alors être temporairement très importants, indépendamment du type de temps dominant le reste de la saison. Sur les territoires maritimes, les anomalies de précipitations et de températures sont intimement liées aux anomalies de température de l océan. Dans le contexte El Niño actuel, le trimestre à venir devrait ainsi être plus chaud et plus humide que la normale sur la partie nord de la Polynésie (les Marquises), et plus frais et sec que la normale dans la partie sud (l'archipel des Australes). Le prochain bulletin sera publié fin mars 2016. Les prévisions utilisées par Météo-France dans cette analyse sont issues des résultats des modèles de Météo-France (MF), du Centre Européen de Prévision Météorologique à Moyen Terme (CEP), du Met Office britannique (Met Office), du National Centers for Environmental Prediction américain (NCEP), de la Japan Meteorological Agency (JMA) et des résultats des programme multi-modèles Eurosip (composé des modèles de Météo-France, du CEP, du Met Office et du NCEP) et de l'expérience multi-modèles menée en Corée du Sud sous l égide de l OMM (LC-MME) 7