Modélisation du développement microbien dans un aliment et application à l'appréciation quantitative des risques



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Transcription:

Modélisation du développement microbien dans un aliment et application à l'appréciation quantitative des risques

Objectifs de la microbiologie prévisionnelle conditions de vie du produit micro-organisme pathogène ou d altération produit alimentaire croissance microbienne? décroissance microbienne? niveau microbien final? ML Delignette-Muller, ENVL 2

Historique Années 1920 modèles simples d inactivation thermique Années 1980 nombreux modèles de croissance et de décroissance (naissance de la Microbiologie Prévisionnelle ) Années 1990 utilisation de ces modèles en appréciation des risques ML Delignette-Muller, ENVL 3

Niveaux de modélisation Niveau primaire Evolution du nombre de micro-organismes en fonction du temps x = f (t, θ) + ε t Niveau secondaire Effet des facteurs environnementaux sur les paramètres des modèles primaires θ = g(t,ph, ) + ε Exemple Ln(x) Exemple µ max µ max temps T ML Delignette-Muller, ENVL 4

1. Modélisation primaire de la croissance x = f (t, θ) + ε t x : concentration en cellules t : temps θ : paramètres de croissance ML Delignette-Muller, ENVL 5

Exemple de cinétique ln(x) latence croissance exponentielle saturation de la croissance ln(x 0 ) 0 temps obtenue par dénombrement sur boîte de Petri ML Delignette-Muller, ENVL 6

Paramètres de croissance ln(x) µ max taux spécifique de croissance maximum ln(x 0 ) 0 λ temps de latence temps ML Delignette-Muller, ENVL 7

Hypothèses de la croissance exponentielle 2 1 cellule tg x 0 cellules 4 tg n * tg 2 n cellules x 0 * 2 n cellules ML Delignette-Muller, ENVL 8

Le modèle de croissance exponentielle après n * tg : x = x 0 * 2 n = x 0 * 2 ( (t-t0) / tg) ) = x 0 * exp( ln(2) * (t-t 0 ) / tg ) le modèle : x = x 0 exp[ µ max (t - t 0 ) ] avec µ max = ln(2)/tg formulation différentielle: dx xdt = µ max ML Delignette-Muller, ENVL 9

Hypothèses biologiques de la latence Equivalences mathématiques Baranyi 1994 McKellar 1997 biomasse chromosome Hills 1994 Baranyi 1998 ML Delignette-Muller, ENVL 10

Formulation unifiée de divers modèles dx xdt Modèle de Baranyi 1994 ( McKellar) ( ) ( t) f ( x) = µ max α avec x ( t = 0) = x0 α( t)= q t dq avec µ 1+q ( t) max q et q t = dt Modèle de Hills ( Baranyi 1998) = ( 0) = q 0 = 1 exp( µ λ) 1 max α( t)= µ max e µ maxλ 1 ( ) avec dm m x x Modèle Lag-exponentiel α ( t) = 0 1 ( t λ) ( t > λ) =µmaxm dt et m ( t = 0) = x0 ML Delignette-Muller, ENVL 11

log 10 (x[ufc/ml]) 10 Ajustement de 3 modèles 9 Gompertz (µ max =0.69, λ=3.8) modèle empirique classique Samonellae 8 Gibson 1988 7 6 5 4 Baranyi 1994 (µ max =0.56, λ=2.6) avec freinage logistique Lag-exponentiel (µ max =0.55, λ=3.0) avec freinage logistique 3 0 5 10 15 20 25 30 35 40 45 50 t (h)

Conclusions Divers modèles primaires de croissance empiriques ou basés sur des hypothèses biologiques diverses ajustant correctement les données permettant d estimer µ max et λ si les données sont suffisantes mais avec des différences entre modèles Perspectives Nouvelles méthodes de suivi de la croissance Que se passe-t-il au niveau de la cellule? ML Delignette-Muller, ENVL 13

2. Modélisation secondaire de la croissance θ = g(t,ph, ) + ε θ : paramètres de croissance µ max (ou tg), λ ML Delignette-Muller, ENVL 14

Deux types d approches Modélisation par ajustement de surfaces de réponse prise en compte simultanée des facteurs environnementaux d intérêt plan d expériences ajustement d un modèle polynomial Approche progressive ou modulaire prise en compte des facteurs un à un puis construction d un modèle global Exemple d approche progressive ML Delignette-Muller, ENVL 15

Modèle «racine carrée» Ratkowsky et al., 1982 augmentation linéaire de µ max avec la température µ max = b * (T T min ) T min : température minimale de croissance ML Delignette-Muller, ENVL 16

Modèle «racine carrée» valable à basses températures µ max, h -1 2.5 2 Escherichia coli (Barber, 1908) 1.5 1 0.5 0 5 10 15 20 25 30 T, C

Tendance sur une gamme de température plus étendue 2.5 µ max, h -1 2 µ opt Escherichia coli (Barber, 1908) 1.5 1 T min T opt T max 0.5 0 0 10 20 30 40 50 60 T, C

Modèle CTMI (Rosso et al., 1993) pour T min < T <T max, µ max (T) = µ opt γ (T) γ (T) = (T-T max )(T-T min ) 2 (T opt -T min ) [(T opt -T min )(T-T opt ) - (T opt -T max )(T opt +T min -2T)] bon ajustement aux données pour différentes espèces seulement 4 paramètres, chacun ayant une signification biologique corrélation biologique entre les températures cardinales T max = 1.1 T opt + 3 + ε (r 2 = 97%) et T min = T opt - 33 + ε (r 2 = 89%) ML Delignette-Muller, ENVL 19

Ajustement du modèle CTMI 2.5 Escherichia coli (Barber, 1908) µ max, h -1 2 1.5 1 0.5 0 5 10 15 20 25 30 35 40 45 50 T, C

Effet du ph µ max h -1 1 0.9 0.8 0.7 µ opt Listeria monocytogenes (Petran & Zottola, 1989) 0.6 0.5 ph min ph opt ph max 0.4 0.3 0.2 0.1 0 4 5 6 7 8 9 10 ph

Modèle CTPM (Rosso et al., 1995) Modèle ph pour ph min < ph < ph max µ max (ph) = µ opt γ(ph) avec γ(ph) = (ph-ph min )(ph-ph max ) (ph-ph min )(ph-ph max )-(ph-ph opt ) 2 Modèle global utilisant le gamma concept (Zwietering et al., 1992) µ max (T,pH) = µ opt γ(t) γ(ph) bon ajustement aux données avec un modèle à 7 paramètres ML Delignette-Muller, ENVL 22

Visualisation du modèle global µ max, h -1 1 0.8 0.6 0.4 0.2 10 0 8 ph 6 4 0 10 20 30 T, C 40 50

Prise en compte d autres facteurs? Modèle a w µ max (a w ) = µ opt γ(a w ) avec γ(a w ) = (a w -a wmin )/(1-a wmin ) Modèle global µ max (T,pH,a w ) = µ opt γ(t) γ(ph) γ(a w ) mais prise en compte d interactions entre facteurs parfois nécessaire Augustin et Carlier, 2000; Le Marc et al., 2002 ML Delignette-Muller, ENVL 24

Et le temps de latence? Paramètre difficile à modéliser effet sur λ du passé des cellules bactériennes (notamment de la température de préincubation dans les expériences de laboratoire) ML Delignette-Muller, ENVL 25

2 approches classiques Modélisation indépendante de µ max et λ malheureusement souvent en partant de conditions de préculture suboptimales pour modéliser λ conditions irréalistes pouvant conduire à surestimer λ Modélisation de λ en fonction de µ max en supposant µ max λ constant pour un état physiologique initial donné µ max λ : «work to be done» pendant la latence ML Delignette-Muller, ENVL 26

µ max λ est-il constant? Uniquement en 1 ère approximation dans les travaux publiés Travaux publiés biaisés conditions de préculture constantes et souvent suboptimales Comparaison des 2 approches de modélisation de λ aucune des 2 approches ne convient mieux à tous les jeux de données nécessité de développer une approche intermédiaire ML Delignette-Muller, ENVL 27

Exemple d effet d un changement de température sur µ max λ Listeria monocytogenes (Delignette-Muller et al., 2004)

Conclusions Modèles disponibles et validés en prévision sur l aliment pour µ max Prévision de λ beaucoup plus difficile peu de données réalistes modèles inadaptés encore de nombreux travaux à réaliser! ML Delignette-Muller, ENVL 29

3. Applications des modèles ML Delignette-Muller, ENVL 30

Une aide pour estimer les DLC ou DLUO développer de nouveaux produits microbiologiquement stables évaluer les implications d un incident survenu au cours du procédé mettre en place une démarche HACCP évaluer l exposition dans le cadre de l évaluation des risques ML Delignette-Muller, ENVL 31

Outils dérivés Logiciels de simulation Systèmes experts Indicateurs temps température physiques ou chimiques électroniques Biologiques Outils à utiliser prudemment! Averti notamment de l incertitude des prévisions ML Delignette-Muller, ENVL 32

Un exemple d application inspiré de «Application of predictive microbiology to estimate the number of Bacillus cereus in pasteurised milk at the point of consumption» Zwietering et al., 1996 ML Delignette-Muller, ENVL 33

Choix des modèles et paramètres Modèle secondaire: racine carrée = b (T T min ) données de la littérature : T min = 0 C (psychrophiles) cinétique à 30 C dans du lait pasteurisé : 30 = 1.13 h -1 b = 30 / 30 = 0.0354 Modèle primaire: exponentiel (λ=0, pire cas) log 10 x = log 10 x 0 + /ln(10) * t Contamination initiale: 1 UFC/ml (pire cas) ML Delignette-Muller, ENVL 34

Une simulation Phase T C temps (jours) (h -1 ) log 10 x usine 4 2 0.0201 0.42 distributeur 7 2 0.0614 1.70 consommateur 8 5 0.0802 5.84 ML Delignette-Muller, ENVL 35

2 simulations à différentes T de conservation log 10 (x[ufc/ml]) 6 4 niveau critique 2 T ( C) 0 0 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 8 t (jours) 6 4 2 0 0 1 2 3 4 5 6 7 8 9 t (jours)

Effet de la température de conservation temps (jours) donnant un niveau 10 5 UFC/ml 8 7 6 5 4 3 2 1 0 6 C 7 C 8 C 9 C 10 C 11 C 12 C Température de conservation chez le consommateur ML Delignette-Muller, ENVL 37

4. Utilisation des modèles dans l appréciation quantitative des risques ML Delignette-Muller, ENVL 38

L appréciation quantitative des risques Identification des dangers Caractérisation des dangers (loi dose-réponse) Appréciation de l exposition microbiologie prévisionnelle Caractérisation des risques ML Delignette-Muller, ENVL 39

Quelques définitions Danger (hazard) : «agent biologique, chimique ou physique présent dans un aliment, ou état de cet aliment pouvant avoir un effet nocif.» Risque (risk) : «estimation de la probabilité que se produise un effet néfaste, pondéré en fonction de sa gravité, qui pourrait résulter de la présence d un danger dans un aliment.» ML Delignette-Muller, ENVL 40

Etude d un cas simplifié Bacillus cereus dans du lait pasteurisé (inspiré de Notermans et al., 1997) ML Delignette-Muller, ENVL 41

Identification des dangers Bacillus cereus : pathogène reconnu cause diagnostiquée de nombreuses infections d origine alimentaire Contaminant potentiel du lait capacité rapide de sporulation survie dans l environnement contamination par les fèces et le sol Développement possible au cours des procédés résistance des spores à la pasteurisation développement de certaines souches à basses températures ML Delignette-Muller, ENVL 42

Caractérisation des dangers Données épidémiologiques recueillies (concentrations en Bacillus cereus dans l aliment responsable de l infection) syndrome diarrhéique : 10 3 à 10 8 ufc ml -1 (médiane à 10 7 ) syndrome émétique : 10 4 à 10 10 ufc ml -1 (médiane à 10 7 ) Expériences réalisées sur des volontaires sains : non concluantes Seuil d acceptabilité en Europe : 10 4-10 5 ufc ml -1 Evaluation vraiment très grossière de la loi doseréponse ML Delignette-Muller, ENVL 43

Appréciation de l exposition Niveaux de contamination observés dans des briques de lait un jour après la pasteurisation (enquête hollandaise, Notermans et al., 1997) moyenne en log 10 ufc ml -1 : -1.04 écart type en log 10 ufc ml -1 : 0. 57 avec un effet saisonnier ML Delignette-Muller, ENVL 44

Températures de conservation du produit observées dans des réfrigérateurs domestiques (enquête hollandaise, de Lezenne et al., 1994)

Durées de conservation du produit avant consommation observées (enquête hollandaise, Notermans et al., 1997)

Modélisation de la croissance microbienne Développement de la population microbienne depuis la pasteurisation jusqu à la consommation modèle de Zwietering et al., 1996 (cf. exemple précédent) log 10 N = log 10 N 0 + /ln(10) * t avec = b 2 (T T min ) 2 = 0.0354 2 *T 2 (h -1 ) = 0.03*T 2 (jr -1 ) ML Delignette-Muller, ENVL 47

Caractérisation des risques Résumé des paramètres à prendre en compte : loi dose - réponse Niveau de B. cereus pathogène: N p (en ufc ml -1 ) exposition Niveau de B. cereus après pasteurisation: N 0 (en ufc ml -1 ) Température de conservation: T (en C) Durée de conservation: d (en jours) ML Delignette-Muller, ENVL 48

Méthode de calcul? Estimation du risque final = probabilité de développer un syndrome émétique ou diarrhéique lors d une consommation de lait pasteurisé Estimation dans le pire des cas en fixant les paramètres aux valeurs maximisant le risque Estimation dans le cas le plus probable en fixant les paramètres aux valeurs les plus probables ML Delignette-Muller, ENVL 49

Calcul dans le pire des cas Niveau de B. cereus pathogène: N p = 10 3 ufc ml -1 Niveau de B. cereus après pasteurisation: N 0 = 1 ufc ml -1 Température de conservation: T = 13 C Calcul de la durée de conservation nécessaire pour atteindre N p : d p = log 10 (N/N 0 )*ln(10) / µ = 1.36 jrs risque de 98% d après la distribution des durées de stockage observées (TRES SURESTIME!!) ML Delignette-Muller, ENVL 50

Calcul dans le cas le plus probable Niveau de B. cereus pathogène: N p = 10 7 ufc ml -1 Niveau de B. cereus après pasteurisation: N 0 = 0.1 ufc ml -1 Température de conservation: T = 6 C Calcul de la durée de conservation nécessaire pour atteindre N p : d p = log 10 (N/N 0 )*ln(10) / µ = 17.1 jrs risque nul (TRES CERTAINEMENT SOUS-ESTIME!) ML Delignette-Muller, ENVL 51

Cas le plus probable amélioré avec prise en compte des différentes températures de réfrigération observées dans la population: T ( C) fréquence associée d p (jrs) risque associé 4 0.296 38.4 0 risque global = 6 8 10 12 0.416 0.256 0.016 0.016 17.1 9.6 6.1 4.3 0 0.088 0.341 0.605 0.256*0.088 + 0.016*0.341 + 0.016*0.605 = 3.8% MAIS non prise en compte des variabilités sur N 0 et N p ML Delignette-Muller, ENVL 52

Critique de l approche il est difficile de prendre en compte toutes les sources d incertitude et de variabilité une estimation unique du risque est donnée sans indication de son imprécision interprétation délicate du résultat numérique il est difficile de mettre en évidence les facteurs les plus influants ML Delignette-Muller, ENVL 53

Utilisation du Monte Carlo Méthode de simulation par échantillonnage permettant la prise en compte de toutes les sources de variabilité et d incertitude l évaluation de l incertitude sur le risque estimé la génération d une analyse de sensibilité du risque final à chaque paramètre ML Delignette-Muller, ENVL 54

Schéma d un Monte Carlo 1 D distributions en fréquences des paramètres distribution en fréquences du risque de maladie N tirages aléatoires pour chaque paramètre (avec par ex. N = 10 000) ln (proba(maladie) )

Définition de la distribution pour un paramètre lorsque l on dispose de données observées Utilisation directe de la courbe des fréquences cumulées observées ou Ajustement d une loi théorique adaptée aux données observées

Définition de la distribution pour un paramètre lorsque l on ne dispose que d une opinion d expert lois simples mais de forme peu naturelle lois plus complexes mais de forme plus naturelle

Application à notre exemple simplifié Prise en compte des sources de variabilité choix d un modèle classique pour la loi dose réponse : modèle log-normal prenant en compte une variabilité sur N p (log 10 (N p ) ~ (µ=7; σ=1.5)) (valeurs fictives) choix des distributions sur les paramètres de l exposition: utilisation des distributions observées pour T et d et d une loi lognormale décrite à partir des données observées pour N 0 (N 0 ~ (µ=-1; σ=0.6)) ML Delignette-Muller, ENVL 58

Application à notre exemple simplifié Prise en compte de l incertitude liée à l utilisation d un modèle de croissance microbienne utilisation du modèle de Zwietering et al. (1996) avec prise en compte de l incertitude sur la prédiction : µ = µ prédit (1+ε) avec ε ~ (µ=-0.1;σ=0.25) d après données observées de validation des modèles en prédiction (Delignette-Muller et al., 1995) ML Delignette-Muller, ENVL 59

Graphe de la loi dose-réponse risque p de maladie niveau de B.cereus dans le produit consommé log 10 (N [ufcml])

Histogrammes des valeurs des paramètres échantillonnées (pour 10 000 tirages) effectifs log 10 (N 0 ) T d ε

effectifs Distribution en fréquences du risque d effet pathogène (p) Distribution du risque p s étalant de 10-10 à 1 avec un mode à 10-6 -10-5 Marge d incertitude sur le risque non calculable : incertitude et variabilité mêlées -10-8 -6-4 -2 0 log 10 (p)

Analyse de sensibilité du risque p aux différents paramètres: Tornado Chart Paramètres T d log 10 (N 0 ) ε 0 0.2 0.4 0.6 0.8 coefficients de corrélation de rang

Critique du cas étudié Loi dose-réponse sans réel fondement biologique Scénario thermique très simpliste, sans prise en compte des variations thermiques (ex. : ruptures de la chaîne du froid) Modèle de croissance microbienne simplifié Distributions grossièrement définies Eventuelles corrélations entre paramètres non prises en compte Analyse très grossière à affiner ML Delignette-Muller, ENVL 64

Résultats sur un cas plus réaliste «Quantitative risk assessment for Escherichia coli O157:H7 in ground beef hamburgers» (d après Cassin et al., 1998) ML Delignette-Muller, ENVL 65

Etude de quelques scénarios de prévention

Perspectives méthodologiques Critique du Monte carlo 1D Incertitude et Variabilité traitées sur le même plan dans les simulations Difficulté d appréciation de l incertitude sur le résultat final Solution: Modélisation à 2 niveaux (1/ variabilité, 2/ incertitude sur variabilité) Simulations par Monte Carlo à 2 dimensions (2D) ML Delignette-Muller, ENVL 69

Principe du Monte Carlo 2D Modélisation Simulation Variabilité sur le paramètre θ Loi de θ ex.: loi normale paramétrée par µ et σ θ ij Deuxième niveau de tirage aléatoire pour chaque µ i et σ i Incertitude sur la variabilité du paramètre θ Loi de µ Loi de σ µ i, σ i Premier niveau de tirage aléatoire pour i=1 à ni et j=1 à nv

Caractérisation de l incertitude Méthodes utilisées Approche fréquentiste bootstrap (méthode de rééchantillonnage sur les données) Approche bayésienne prise en compte simultanée d une information de type connaissance d experts et de données expérimentales ML Delignette-Muller, ENVL 71

Résultats des simulations ni distributions en fréquences du risque (ou niveau d exposition ) Pour consulter un exemple concrêt: Rapport AFSSA 2002: «Evaluation scientifique des risques associés à Cryptosporidium sp.» ML Delignette-Muller, ENVL 72

Avantages et inconvénients du Monte Carlo 2D Méthode plus lourde à mettre en œuvre Incertitude et variabilité parfois difficiles à séparer Résultats plus difficile à lire Démarche plus complète Réelle appréciation de l incertitude sur le risque final ML Delignette-Muller, ENVL 73

Conclusions L appréciation quantitative du risque en microbiologie alimentaire : discipline jeune utilisation de simulations de type Monte Carlo avec problématiques méthodologiques en développement quelques difficultés spécifiques liées à la nature microbiologique du danger devrait constituer un outil pertinent pour mieux comprendre l origine du risque microbiologique ML Delignette-Muller, ENVL 74

CONCLUSION L application de la microbiologie prévisionnelle à l appréciation quantitative des risques nécessite des calculs lourds Heureusement, les ordinateurs continuent à travailler de plus en plus vite! ML Delignette-Muller, ENVL 75