en passe de connaître une véritable avancée avec l arrivée du test immunologique



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PAGES SPÉCIALES N 9421 JEUDI 18 JUIN 2015 mise au point Retrouvez en ligne sur www.lequotidiendumedecin.fr Dépistage du CCR : Place au test immunologique CAS CLINIQUES INTERACTIFS 1 2 3 CCR, 2 e cause de mortalité par cancer Page 2 Les atouts du test immunologique Page 3 Le rôle central du médecin traitant Page 4 Conduite à tenir en fonction des résultats du test de dépistage Pages 5-6 La coloscopie, l exploration rectocolique de référence Page 7 Intuitif, simple et rapide Anne, 56 ans, patiente à risque élevé de cancer colorectal Claire, 54 ans, sujet à risque moyen de cancer colorectal Xavier, 62 ans, à risque augmenté de cancer colorectal vous consulte pour bénéficier du test de dépistage TESTEZ VOS CONNAISSANCES DÉPISTAGE DU CANCER COLORECTAL PLACE AU TEST IMMUNOLOGIQUE Le dépistage du cancer colorectal est en passe de connaître une véritable avancée avec l arrivée du test immunologique suite à un appel d offres européen. Cette décision s appuie sur un avis de la Haute Autorité de santé (1,2) et un rapport de l INCa (3), confirmant les performances du test immunologique et sa mise en place dans le programme national du dépistage organisé du cancer colorectal. Le test immunologique étant un test quantitatif d hémoglobine humaine, un seuil de positivité lui a été défini. Il est de 150 nghb/ml de tampon et devrait permettre d obtenir un taux de positivité de l ordre de 4 %. Deux fois plus sensible quant à la détection des cancers, mais aussi 2,5 fois plus sensible quant à la détection des adénomes avancés, le test immunologique laisse espérer non seulement une réduction significative de la mortalité globale par cancer colorectal au niveau de la population cible, mais aussi une diminution de son incidence dans la population générale. Deux enjeux majeurs du dépistage organisé du cancer colorectal. Pour les médecins, ce nouveau test de dépistage du cancer colorectal est un levier intéressant pour faciliter une meilleure adhésion de leurs patients compte-tenu de sa meilleure performance, sa praticité et de sa simplicité. Pour les hommes et les femmes de la population cible du dépistage organisé du cancer colorectal, c est un atout et une chance grâce à sa fiabilité et son efficacité. Pr JEAN-FRANCOIS BRETAGNE, service des maladies de l appareil digestif, CHU Rennes ; vice-président de l Association pour le dépistage des cancers en Ille-et-Vilaine (ADEC135). Dr JULIEN LE BRETON, maître de conférence des Universités au département de médecine générale de l Université Paris Est -Créteil, membre du CNGE (Collège National des Généralistes Enseignants), vice-président de la SFMG (Société Française de Médecine Générale). PAGES SPÉCIALES DE FMC DU «QUOTIDIEN DU MÉDECIN», RÉALISÉES AVEC LE SOUTIEN DE L INCa

CANCER COLORECTAL : DEUXIÈME CAUSE DE MORTALITÉ PAR CANCER En France, les données récentes rapportent 42 152 nouveaux cas de cancer colorectal et 17 722 décès par an imputables à ce cancer, soit la deuxième cause de décès par cancer après le cancer du poumon (4-6). Le cancer colorectal est de bon pronostic lorsqu il est détecté à un stade précoce (stade I et II de la classification TNM). Le taux de survie relative à 5 ans est estimé à 90 % pour les cancers colorectaux diagnostiqués au stade I et II ; à 70 % au stade III ; et à 13 % au stade IV (7). Une tumeur très souvent bénigne au départ Le cancer colorectal survient rarement avant l âge de 50 ans. Il est diagnostiqué dans la majorité des cas (95 %) après 50 ans : 55,1% des hommes et 44,9% des femmes (8). L âge moyen au moment du diagnostic est de 69,5 ans chez l homme et de 72,8 ans chez la femme (7). Ce cancer se développe dans 60 à 80 % des cas au niveau des cellules épithéliales de la muqueuse intestinale à partir d un polype adénomateux ou adénome (tumeur bénigne). Plusieurs types de polypes bénins sont décrits : adénomateux, festonnés (groupe auquel appartiennent les hyperplasiques), inflammatoires ou lymphoïdes. Les polypes hyperplasiques sont les plus fréquents des polypes non cancéreux. Le polype adénomateux ou adénome résulte de la prolifération des cellules des glandes de Lieberkühn, avec trois types histologiques (tubuleux, tubulovilleux et À RETENIR On estime que seulement 5 % des adénomes évolueront vers un cancer. Inversement, c est la transformation maligne des adénomes qui explique la majorité des adénocarcinomes. LES FACTEURS DE RISQUE Age supérieur à 50 ans Obésité Sédentarité Tabagisme Diabète Consommation excessive de viandes rouges, charcuteries, Consommation d alcool Consommation déficitaire en calcium Alimentation trop calorique et/ou riche en graisses animales Acromégalie villeux). C est une tumeur épithéliale bénigne qui a le potentiel d évoluer en tumeur maligne, avec différents degrés de dysplasie (atypie ou perte de différenciation de cellules épithéliales). (7) Un adénocarcinome dans la majorité des cas Certains cancers colorectaux peuvent se développer de novo, et non à partir de polypes adénomateux détectables. De découverte récente, une autre voie de cancérogénèse colorectale passe par les polypes sessiles festonnés, qui constituent un sous-groupe parmi les polypes festonnés.qu il soit de novo, ou issu de la transformation maligne d un adénome ou de celle plus rare d un polype sessile festonné, le cancer colorectal est un adénocarcinome dans 95 % des cas. UNE SYMPTOMATOLOGIE PARFOIS ASPÉCIFIQUE Le cancer colorectal peut évoluer à bas bruit. Il peut aussi se manifester par des signes cliniques (anémie ferriprive sans autre cause, masse palpable abdominale). Il peut être accompagné de signes fonctionnels non spécifiques : rectorragies, melaena,douleurs abdominales inexpliquées, coliques violentes, syndrome rectal (faux besoins, ténesme, épreintes), troubles du transit intestinal, amaigrissement récent inexpliqué, occlusion intestinale. 80 % des CCR surviennent en dehors d un contexte de prédisposion. 80 % 1 % 2 à 3 % 15 à 20 % Polyposes Risque très élevé (prédisposition génétique polypose, syndrome de Lynch) Risque élevé (antécédents personnels ou familiaux de cancer colorectal, d adénome ou de maladie de Crohn) Risque moyen (sans antécédents personnels ou familiaux de cancer colorectal ou d adénome) Répartition de l incidence du cancer colorectal (CCR) par niveau de risque. 2 n LE QUOTIDIEN DU MÉDECIN PAGES SPÉCIALES N 9421 - JEUDI 18 JUIN 2015

Retrouvez les dossiers FMC sur Internet www.lequotidiendumedecin.fr LES ATOUTS DU TEST IMMUNOLOGIQUE, PLUS SENSIBLE ET PLUS SIMPLE Le test immunologique (9) intègre le programme national du dépistage organisé du cancer colorectal. Cette décision fait suite à un avis favorable de la Haute Autorité de la santé (HAS) (1, 2) et à un rapport de l INCa (3), en raison d une plus grande sensibilité et simplicité d utilisation. Il s agit d un test spécifique de l hémoglobine humaine dont la lecture n est pas manuelle mais automatisée, ce qui lui confère précision, fiabilité et reproductibilité. Cette nouvelle technologie facilite l interprétation des résultats, minimise l erreur humaine et permet de modifier le seuil de positivité de sorte à ajuster la performance du programme dans le temps, en fonction des résultats obtenus ou selon la population cible. Une meilleure sensibilité Un autre intérêt majeur du test est sa sensibilité (10) : le recours au test immunologique permet donc de détecter davantage d adénomes avancés (lésions précancéreuses) et des études ont montré une augmentation de la sensibilité pour la somme des cancers isolés (rapport de 2 selon le seuil retenu) et pour les adénomes avancés (rapport de 2,5 selon le seuil de positivité retenu) (3). Quant à la valeur prédictive positive (VPP) de cancer du test immunologique, «elle est comparable À RETENIR 7 À 8 CANCERS SUR 10 sont dépistés avec le test immunologique contre 4 sur 10 avec le test au gaïac LE TEST IMMUNOLOGIQUE augmente significativement la détection des polypes adénomateux à haut risque de transformation maligne permettant de les retirer avant même qu ils n évoluent en cancer à celle du test au gaïac (7 à 8 cancers détectés pour 100 tests positifs), rapporte le Pr Jean-François Bretagne, gastro-entérologue, CHU Rennes. On peut se demander pourquoi il y a un gain en sensibilité si la valeur prédictive positive est la même? La réponse est liée au fait que le test immunologique est globalement deux fois plus souvent positif, ce qui amène à faire deux fois plus de coloscopies à bon escient». Une ergonomie simplifiée Côté pratique, le test immunologique ne nécessite qu un seul prélèvement de selles (au lieu des six prélèvements sur trois selles avec le test au gaïac). L ergonomie du test (tube plastique contenant un tampon liquide de transport avec un bouchon muni d une tige striée) facilite le recueil de selles ; il suffit de les gratter avec la tige puis de reboucher le tube. La mise à disposition de ce nouveau test immunologique permet d envisager une plus grande participation de la population cible au dépistage du cancer colorectal, facteur clé d une plus grande efficacité du programme de dépistage. UN TEST IMMUNOLOGIQUE EN 3 ÉTAPES JEUDI 18 JUIN 2015 - N 9421 PAGES SPÉCIALES LE QUOTIDIEN DU MÉDECIN n 3

LE RÔLE CENTRAL ET DÉTERMINANT DU MÉDECIN TRAITANT, INTERLOCUTEUR PRIVILÉGIÉ DU DÉPISTAGE Le dépistage organisé du cancer colorectal repose sur un test de recherche de sang occulte dans les selles, suivi d une coloscopie en cas de positivité du test. Il est proposé aux hommes et femmes de 50 à 74 ans à risque moyen de cancer colorectal (7). La structure en charge du dépistage des cancers leur adresse tous les 2 ans un courrier les invitant à aborder le dépistage avec leur médecin traitant. Ce dernier joue un rôle central (7) : évaluer le niveau de risque, proposer à ses patients une démarche de dépistage ou un suivi adapté et expliquer l intérêt du dépistage afin d en favoriser l adhésion. LES STRUCTURES DE GESTION Les structures de gestion du programme national de dépistage du cancer qu elles soient départementales, interdépartementales ou régionales, ont pour missions : la coordination des campagnes de dépistage, la gestion des invitations des bénéficiaires, le suivi des résultats des dépistages, les relations avec les professionnels de santé, la communication locale, les relations avec les centres de liaison hospitaliers. Le MG en première ligne du dépistage Le médecin explique et remet le test si son patient appartient à la population cible (risque moyen) ou l oriente vers la stratégie la plus adaptée en fonction de ses antécédents personnels ou familiaux, de la présence de symptômes d alerte et d éventuelles explorations coliques déjà réalisées (cf. pages 5-6). Lors de la remise du kit de dépistage, le médecin l informe des modalités de réalisation du test à domicile, sur les bénéfices et les limites du dépistage. Sensibiliser les patients et identifier les freins au dépistage La relation de confiance entre le médecin et son patient lui donne une force de conviction unique pour présenter l intérêt du dépistage, ses modalités de réalisation pratique mais aussi pour identifier les À RETENIR KIT DE DÉPISTAGE Près de 9 personnes sur 10 déclarent avoir effectué le test de dépistage lorsqu il a été expliqué et remis par le médecin traitant au cours de la consultation. (12) Retrouvez des outils d aide à la pratique dans le module efmc «Dépistage du CCR», rubrique «Infos Plus» Le médecin explique et remet le test gratuitement si son patient appartient à la population cible. freins au dépistage présents chez un certain nombre de personnes. Trois principaux freins au dépistage du CCR ont été identifiés : la méconnaissance du cancer colorectal et de son dépistage ; la gêne éprouvée à l égard de ce cancer, des modalités de ce dépistage, de la sphère digestive en général mais aussi le sentiment de ne pas être concerné par ce dépistage et/ou la volonté de ne pas se sentir concernés. «Le médecin doit insister sur l intérêt du test immunologique pour une meilleure acceptabilité de la réalisation pratique du dépistage, observe le Dr Le Breton, il est important que le médecin comprenne le ressenti, les réticences du patient par rapport à ce dépistage, qu il recherche les causes éventuelles pour lesquelles le patient refuse le dépistage afin de pouvoir être en mesure de dépasser les obstacles identifiés. Les efforts du médecin doivent aussi porter sur les patients à risque aggravé (le risque élevé et très élevé) chez qui la coloscopie est directement proposée, car c est tout particulièrement au sein de cette population de patients que la coloscopie va mettre en évidence la présence d un cancer». Le dépistage du cancer colorectal met en lumière l évolution du rôle du médecin traitant qui inscrit sa pratique dans une démarche de prévention vs une démarche de soins. En ce sens où l accent mis sur la prévention s ajoute aux soins qui lui sont depuis longtemps dévolus. Cette démarche de prévention (11) nécessite d impliquer le patient (patient non demandeur) ou de l accompagner et le motiver (patient demandeur). 4 n LE QUOTIDIEN DU MÉDECIN PAGES SPÉCIALES N 9421 - JEUDI 18 JUIN 2015

Retrouvez les dossiers FMC sur Internet www.lequotidiendumedecin.fr CONDUITE À TENIR EN FONCTION DES NIVEAUX DE RISQUE Le médecin traitant évalue le niveau de risque de chaque personne pour lui proposer la stratégie de dépistage qui lui est adaptée. Le dépistage organisé du cancer colorectal s adresse à la population à risque moyen, asymptomatique et sans antécédents personnels ou familiaux de maladies touchant le colon ou le rectum. Pour cette population, le test immunologique est indiqué. Il sera remis par le médecin traitant à l occasion d une consultation. Si le test est négatif, le médecin traitant invite alors le patient à renouveler le test deux ans plus tard, sachant que la répétition régulière des tests est le gage de l efficacité du dépistage du cancer colorectal. Le médecin est également amené à inciter le patient à consulter si des signes d alerte surviennent dans l intervalle (présence de sang dans les selles, troubles du transit d apparition récente, douleurs abdominales d apparition récente, persistante et inexpliquée, amaigrissement inexpliqué). À RETENIR La répétition régulière des tests est le gage de l efficacité du dépistage du cancer colorectal. PERSONNE À RISQUE MOYEN CHEZ QUI LE TEST N EST PAS INDIQUÉ Examens : - coloscopie totale (< 5 ans) complétée ou non par un lavement baryté (< 5 ans) et/ou un coloscanner (< 2 ans), - coloscanner seul (< 2 ans), - recherche de sans dans les selles (< 2 ans). Maladies intercurrentes (autres cancers, maladies, personnes dépressives, etc.) événements de vie, accidents récents Refus (lever les freins, cf. page 4) Un résultat positif doit toujours être confirmé par une coloscopie. Le médecin adressera le patient à un gastroentérologue pour la réalisation d une coloscopie, qui permettra, le cas échéant, de retirer d éventuels polypes et de confirmer ou Le dépistage organisé du cancer colorectal (CCR) en pratique chez les personnes âgées de 50 à 74 ans (risque moyen) sans symptôme ni antécédents particuliers de maladie affectant le côlon ou le rectum (13) ÉTAPE 1 ÉTAPE 2 ÉTAPE 3 ÉTAPE 4 ÉTAPE 5 Votre patient(e) reçoit tous les deux ans, de la structure de gestion du dépistage des cancers, un courrier personnalisé l invitant à réaliser un dépistage du cancer colorectal. Ce courrier lui suggère d aborder ce sujet avec vous à l occasion d une prochaine consultation. Lors de cette consultation, vous évaluez son niveau de risque de cancer colorectal en fonction de ses symptômes, de ses antécédents médicaux et de ceux de sa famille Si votre patien(e) ne présente pas de risque particulier, vous l informez de l intérêt et des limites du dépistage, vous examinez avec lui ses éventuelles réticences. Vous lui proposez le test de recherche de sang dans les selles, lui expliquez comment l utiliser*, et lui remettez la fiche d identification à compléter. Votre patient(e) réalise le test à son domicile et l adresse au centre de lecture agréé dans le cadre du dépistage organisé, à l aide d une enveloppe T. Sous une quinzaine de jours, votre patient(e) et vous-même recevez le résultat du test de dépistage ÉTAPE 6 Si le résultat du test est négatif (96 %) Votre patient(e) sera invité(e) 2 ans plus tard à renouveler son test de dépistage. Il lui sera conseillé de vous consulter dans l intervalle en cas de symptôme évocateur. Si le résultat du test est positif (4 %) Vous adressez votre patient(e) à un gastroentérologue pour la réalisation d une coloscopie. * Disponible en vidéo sur http://www.e-cancer.fr/tutoriel-test-depistage-cancer-colorectal. JEUDI 18 JUIN 2015 - N 9421 PAGES SPÉCIALES LE QUOTIDIEN DU MÉDECIN n 5

infirmer un diagnostic de cancer (après biopsie). Dans l éventualité où le test précédent était positif et que le patient n a pas suivi, malgré vos conseils, votre recommandation de réaliser une c oloscopie, vous veillerez à le notifier dans le dossier. La prescription ou la remise d un nouveau test de sang occulte dans les selles pour confirmation, n est pas adaptée dans cette situation. Le dépistage du cancer colorectal pour les personnes à risque aggravé Le test n est pas indiqué pour les personnes présentant des antécédents personnel ou familiaux de maladies touchant le colon ou le rectum. Dans ces cas, le médecin traitant adresse la personne à un gastroentérologue qui mettra en place la stratégie de dépistage et de suivi adaptée. Dépistage du cancer du côlon : schéma simplifié des conduites à tenir en fonction du niveau de risque Patients à risque moyen Femmes et hommes De 50 à 74 ans Sans symptôme Et n étant pas à risque élevé ou très élevé Programme de dépistage organisé du cancer colorectal Patients à risque élevé ATCD personnel de cancer colorectal ou adénome. ATCD familial de cancer colorectal ou adénome (un parent 1 er degré < 65 ans ou deux parents 1 er degré quel que soit l âge). Maladie inflammatoire chronique (rectocolite hémorragique ou maladie de Crohn). Consultation chez un gastroentérologue Patients à risque potentiellement très élevé Polypose adénomateuse familiale. Cancer colorectal héréditaire non polyposique (HNPCC ou syndrome de Lynch). Consultation chez un gastroentérologue Consultation d oncogénétique* Test immunologique Coloscopie Chromoendoscopie** ** La chromoendoscopie est une endoscopie digestive utilisant l indigo carmin comme colorant de la muqueuse colique afin de repérer plus facilement les adénomes plans et de mieux préciser les limites d une lésion identifiée par coloscopie sans coloration. * INDICATIONS DES CONSULTATIONS D ONCOGÉNÉTIQUE ET DES TESTS GÉNÉTIQUES 1) CCR (cancer colorectal) diagnostiqué avant l âge de 50 ans. 2) Sujet avec un antécédent personnel de cancer du spectre Lynch (côlon, endomètre, grêle, voies urinaires excrétrices), CCR synchrone ou métachrone, ou cancer extra-colique du spectre Lynch quel que soit l âge au diagnostic. 3) CCR diagnostiqué avant 60 ans avec caractéristiques anatomo-pathologiques évocatrices d un syndrome de Lynch. 4) CCR avec au moins un apparenté au premier degré atteint d un cancer du spectre Lynch élargi (pancréas, voies biliaires, estomac, ovaires, glioblastomes, tumeurs cutanées), un des cancers diagnostiqué avant 50 ans. 5) CCR diagnostiqué chez un individu ayant au moins 2 apparentés au 1 er ou 2 e degré atteint d un cancer du spectre élargi HNPCC (Hereditary Non Polyposis Colorectal Cancer), quel que soit l âge au diagnostic. 6) Polypose adénomateuse familiale. 6 n LE QUOTIDIEN DU MÉDECIN PAGES SPÉCIALES N 9421 - JEUDI 18 JUIN 2015

Retrouvez les dossiers FMC sur Internet www.lequotidiendumedecin.fr LA COLOSCOPIE, L EXPLORATION RECTOCOLIQUE DE RÉFÉRENCE La coloscopie, réalisée le plus souvent sous anesthésie générale en hospitalisation courte ou en ambulatoire est la technique de référence pour la détection des lésions de la paroi colique. Elle permet dans le même temps la résection puis l analyse histologique de toute lésion retrouvée. Ses performances tant diagnostiques que thérapeutiques sont élevées. La coloscopie est proposée en 1 re intention chez les patients à risque élevé. En cas de risque moyen de CCR correspondant à la population asymptomatique de plus de 50 ans et sans facteur de risque, la coloscopie est indiquée si le test de dépistage est positif. Parmi les complications majeures, le risque de perforation est rare (1 à 2 cas/1 000 coloscopies), le risque hémorragique existe (1 à 2/1 000) et le risque de décès représente 1 cas/18 000 à 1 cas/1 000. Les facteurs de risque majorant le risque de complications d une coloscopie sont : l âge > 60 ans, une maladie chronique cardiaque ou respiratoire préexistante, l exérèse d un polype de gros diamètre (20 mm ou plus), la prise d anticoagulants ou d anti-inflammatoires non stéroïdiens, l inexpérience du médecin pratiquant la coloscopie. PLACE DU COLOSCANNER Selon la HAS (16, 17), le coloscanner ou coloscopie virtuelle (CV) ne constitue pas un examen de première ligne d exploration colique, mais une alternative à la vidéo-coloscopie dans des situations particulières. La CV peut être proposée lors de vidéo-coloscopie incomplète. Dans un contexte de diagnostic de symptômes évocateurs de tumeur colorectale ou de dépistage de patients à risque élevé de cancer colorectal, la CV peut être proposée en cas de refus de la vidéo-coloscopie (après information complète et loyale du patient) ou en raison de comorbidités compromettant la sécurité de cette vidéocoloscopie. Lors de dépistage de patients à risque moyen de cancer colorectal, la CV peut être proposée en cas de contreindication médicale à la vidéo-coloscopie chez un patient ayant un test positif de saignement occulte dans les selles. La CV ne constitue pas un examen de dépistage de patients à risque très élevé de cancer colorectal. Le coloscanner permettrait de détecter des polypes du colon avec une sensibilité d environ 80 % pour les polypes de plus de 5 mm (15, 16). En revanche, des lésions planes, même de grande taille, peuvent passer inaperçues. Des performances dépendantes de la qualité de la préparation colique La performance de la coloscopie est liée en premier lieu à la qualité de la préparation colique (14). Le caractère incomplet de la préparation colique a pour conséquence un examen intestinal incomplet. Il importe d inciter les personnes ayant à faire une coloscopie à bien respecter les conditions de la préparation colique. Le second élément qui optimise la qualité de l examen est lié à l expérience du médecin endoscopiste et au temps d examen, notamment au temps de retrait du coloscope (15). Le taux de faux négatifs (lésions «non vues») est inversement corrélé à la durée du retrait du coloscope. L augmentation du temps de retrait du coloscope (minimum 10 minutes) permet d améliorer la performance de l examen. L utilisation de colorant (indigo carmin) au cours de la coloscopie (chromo-endoscopie) est une aide au diagnostic et à la décision thérapeutique, en particulier en cas de suspicion de lésion «plane». Retrouvez l intégralité des références bibliographiques dans le module efmc «Dépistage du CCR», rubrique «Infos Plus» SESC, 1, rue Augustine-Variot - 92245 Malakoff Cedex. Tél. : 01.73.28.12.70. Fondateurs : Dr Marie-Claude TESSON-MILLET et Philippe TESSON Président et directeur de la publication : Dr Gérard Kouchner Directeur général : Julien Kouchner Imprimerie : Imprimerie Vincent (Tours) CPPAP 0417 T 81257 - N ISSN : 0399-2659 COMITÉ DE RÉDACTION Directeur médical : Dr Alain Marié Directeur scientifique : Dr Emmanuel de Viel Rédacteur en chef : Dr Sylvie Le Gac Rédaction : Dr Martine André Conception réalisation : Leslie Nadotti Secrétaire de rédaction : François Fonvieille COMITÉ SCIENTIFIQUE Pr Jean-François Bretagne, CHU Rennes Dr Julien Breton, Université Paris-Est Reproduction interdite de tous les articles, sauf accord de la direction. Les textes publiés sont sous la responsabilité des auteurs. JEUDI 18 JUIN 2015 - N 9421 PAGES SPÉCIALES LE QUOTIDIEN DU MÉDECIN n 7

DÉPISTAGE DU CANCER COLORECTAL NOUVEAU TEST POUR VOS PATIENTS PLUS PERFORMANT, PLUS FIABLE, PLUS SIMPLE Le test immunologique, en améliorant la détection des cancers, permet une prise en charge plus efficace de vos patients et augmente leurs chances de guérison. Grâce à sa sensibilité élevée, il détecte 2 fois plus de cancers et 2,5 fois plus d adénomes avancés que le précédent test de dépistage. Ce test à prélèvement unique est plus simple et plus rapide à réaliser. Crédit photo : studio Rauzier Rivière INCa SIREN : 187 512 777. Vous êtes médecin généraliste, commandez-le dès maintenant sur votre «Espace pro» d Ameli.fr. Si vous n avez pas d accès à «Espace pro», le test peut être commandé auprès de la structure de gestion en charge des dépistages dans votre département. Consultez le dossier d information et de formation sur