Mémoire. Apprentissage en cabinet d architecture navale. INSA Strasbourg 24 boulevard de la Victoire 67084 Strasbourg cedex



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INSA Strasbourg 24 boulevard de la Victoire 67084 Strasbourg cedex Mémoire Apprentissage en cabinet d architecture navale Guillaume BASTIDE GM5 ISP Septembre 2012 Architecte Naval encadrant : François Lucas Professeur encadrant : Mr Joël Krier

Résumé Ce mémoire porte sur un PFE réalisé en apprentissage dans le cabinet d architecture navale de François Lucas qui travail en profession libérale depuis plus de 20 ans. Au cours de ces 20 semaines de travail dans ce cabinet ont pu être appréhendé une série d outils de l architecture navale et de l ingénieur. Il présente les principales étapes que traverse un projet de navire au travers des expériences de ce stage. Il dégage les outils utilisés pour la conception de bateaux de servitude et de plaisance, propulsé à la voile et au moteur, inscris dans des projets de petit et de grande ampleur. English translation : This memoir presents an apprenticeship End of Study Project done in the François Lucas naval architect office in Nantes where he worked for more than 20 years. During those 20 weeks working in this office, some tools used by both naval architects and engineers were learnt. The main steps crossed by a ship project are explained through the experiences of this apprenticeship. Some important tools used for ship design are highlighted with the design of some pleasure boats and service ships, propelled by motors or sails, part of large scaled project or smaller ones. 2

Remerciements Je remercie Joël Krier qui a été formidable tant par sa patience que par son enseignement en la matière de calcul par éléments finis sur PATRAN/NASTRAN, et pour le soutient dont il a fait preuve pendant ces 20 semaines. Je remercie mille fois François Lucas que je ne remercierai jamais assez, qui m a énormément appris sur le métier, sur le milieu et sur les bateaux. Qui m a fait confiance sur ses projets et pour la manière dont il a organisé ce PFE. Et parce que c est un fin régatier qui m a aussi appris sur les plans d eau, et que je me souhaite un jour d être capable de doubler au détour d une bouée en régate à la RDS CUP. Un merci aussi à sa famille qui m a accueilli : Corinne et Léo dont ses dessins ont meublés mon studio durant ces 20 semaines. Ainsi qu à tous ceux qui ont cru en moi lorsque je disais voulais devenir architecte naval, et qui m ont aidé à faire en sorte que petit à petit je puisse m approcher de cette profession. 3

Sommaire I. INTRODUCTION 6 1) Quelques notions et vocabulaire... 7 1. Catégories de navires... 7 2. Les acteurs du projet... 7 3. Lexique naval... 9 4. Quelques notions fondamentales... 11 2) L industrie Marine... 15 3) Le cabinet d architecture de François Lucas... 17 4) Brève description des navires ayant fait l objet d un travail durant le PFE.. 18 1. Mistral 950... 18 2. Open Océan 35... 19 3. Cargo à Voile Seafret, CVS 35... 19 4. Mini CP Kiteschooner... 20 5. Sillinger 680... 20 6. Congo... 21 II. LE PROJET "NAVIRE" AU TRAVERS LES TRAVAUX EFFECTUES 22 1) Naissance d un nouveau concept de navire... 22 2) Conception à proprement parlée... 29 1. La CAO en architecture navale, Rhinoceros 3D... 30 2. Système de ventilation du compartiment technique du CVS 35... 31 3. Le mouillage du CVS 35... 32 4. Le choix de grue du CVS 35... 33 5. Dimensionnement de la structure sous grue du CVS 35... 34 6. La sélection d un chantier naval pour le CVS 35... 40 7. Vérifications d éléments par rapport aux normes. Exemple du Sillinger 680.... 44 3) Constitution du dossier des plans finaux... 45 III. CONCLUSION... 48 4

Sommaire des figures Figure 1 : Logo du cabinet d architecture navale de François Lucas... 6 Figure 2 : Exemple type de couple... 10 Figure 3 : Exemple type de coque échantillonnée (partie extraite du CVS35)... 11 Figure 4 : Chiffre d affaires des entreprises françaises du secteur de la plaisance en 2009... 15 Figure 5 : Chiffre d affaires par type de voilier en 2009... 16 Figure 6 : Photo et rendu respectivement de l Hermine 51 et de l Aventurin 51... 17 Figure 7 : Photo du Mistral 950... 18 Figure 8 : Rendu de l Océan 35... 19 Figure 9 : Premier rendu du CVS 35... 19 Figure 10 : Modélisation du mini CP Kiteschooner... 20 Figure 11 : Sillinger 1200... 21 Figure 12 : Vue en plan et vue longitudinale de l Océan 35 avec pistes de réflexions dessinées... 23 Figure 13 : Esquisses d agencement du cockpit, des premiers essais au choix final (de gauche à droite)... 24 Figure 14 : Première version de l Open Océan 35 modélisée en 3D, pavois dépliés... 24 Figure 15 : schéma de principe dessiné par l armateur lors de la seconde discussion... 25 Figure 16 : Esquisse d insertion des moteurs Perkins sur le Congo... 26 Figure 17 : Première modélisation de la carène et du pont du Congo sur Maxsurf... 27 Figure 18 : CAO de principe du Congo... 27 Figure 19 : Extrait du devis de poids du Congo... 28 Figure 20 : Emplacement de l extracteur et conduite de sortie... 32 Figure 21 : Maillage directe à gauche, et après découpage à droite... 35 Figure 22 : Intersection entre 3 maillages... 36 Figure 23 : Redécoupe d un élément litigieux... 37 Figure 24 : CAO exportée sous PATRAN pour le premier maillage suivie celle pour le second maillage... 38 Figure 25 : Les étapes du second maillage... 39 Figure 26 : Partie de la structure renforcée sous la grue... 40 Figure 27 : Extraits du dossier d explication visuelle d appel d offre... 41 Figure 28 : Dossier de plans pour l appel d offre... 43 Figure 29 : Extraits des plans de construction du Mini CP Kiteschooner... 46 Figure 30 : Extrait du plan de découpe du Mini CP Kiteschooner... 47 5

I. Introduction Le Projet de fin d étude est pour les étudiants aspirants au diplôme d ingénieur l occasion de découvrir un des nombreux métiers de l ingénierie. Il peut ainsi tester son premier choix par ce biais et pré-orienter sa carrière professionnelle. C est aussi l occasion pour le milieu professionnel que l étudiant souhaite intégrer de porter un jugement sur ses méthodes de travail et ses qualités personnelles, comme le rappel la définition du PFE donnée par l INSA. Ce mémoire porte donc sur le métier d architecte naval, branche très spécifique de l ingénierie et de l architecture. Plus précisément, il apporte un regard global sur le projet que représente la conception d un navire à travers les expériences de ce PFE réalisé du 12 Mars au 27 Juillet 2012 dans le cabinet d architecture navale de François Lucas à Nantes. Figure 1 : Logo du cabinet d architecture navale de François Lucas Le sujet de ce stage est le suivant : Apprentissage du métier d architecte navale. Ce rapport explique d abord de manière très large le contexte dans lequel cet apprentissage a été effectué. Puis il présente les différentes étapes du projet de création d un navire, le l idée au dossier de plan final, à travers les projets effectués tout au long de ces 20 semaines. 6

1) Quelques notions et vocabulaire Avant d aborder le thème de la conception de bateau, il est important de se familiariser avec différentes notions et le vocabulaire riche qui sont spécifiques à un milieu millénaire nourrit par l histoire et les usages locaux. 1. Catégories de navires Lorsque l on conçoit un navire, la première question à se poser est celle du type de navire auquel il faudra donner forme. Selon l usage et la catégorie du navire souhaité, un certain nombre de contraintes techniques et d autres dues à des normes spécifiques permettront d éliminer des pistes et ainsi d orienter la réflexion de l architecte. Les réglementations sont évidemment différentes selon si le navire est destiné à un usage privé, si c est un navire de travail etc On dénombre principalement 3 grandes catégories de navires : - Les navires militaires - Les navires de commerce et de services (servitude) - Les navires de plaisance Une autre méthode de distinction des navires entre eux est le mode de propulsion : moteur avec arbre d hélice, moteur et hydrojet, vélique etc Au sein de ces dernières sous catégories existent encore des sous catégories selon la puissance motrice, le type de gréement etc Les bateaux sont également différenciés par leur(s) zone(s) de navigation. Selon comment le navire st conçu, il sera certifié apte à naviguer dans les zones fluviales, côtières ou hauturières. Pour finir, les navires sont aussi classés de manière moins formelle par type de carène. Selon si elle est composée de plusieurs coques, si elle est conçue pour être "planante", "Archimédienne" (ou à déplacement) ou semi-planante. Ces dernières notions seront expliquées dans le paragraphe I.1)4. 2. Les acteurs du projet Il est peut être important de noter que selon la taille du navire et/ou sa catégorie, le projet sera traité par des acteurs différents et selon des méthodes différentes. Plus les dimensions du navire sont grandes et plus il est complexe à dimensionner. Cette complexité croissante vient entre autres du fait que les efforts mis en jeu croissent logiquement avec la taille du navire. Une autre raison vient des fonctions données aux navires de grande taille. La conception d un navire peut donc se faire principalement de 2 manières différentes. A savoir, soit il est le fruit d un groupe de travail au sein d une entreprise dont l architecte naval en serait le chef de projet (bateaux de grande taille ou à très haute performance), soit il est conçu par un architecte naval indépendant prenant en charge le projet dans son intégralité, jusqu à la production. Libre à lui de sous-traiter une ou plusieurs partie(s) de l étude. Dans tous les cas l architecte garde la responsabilité du bateau construit. 7

Voici une liste des principaux acteurs de la production d un navire : Architecte Naval : La profession n étant pas réglementée en France, en voici une définition générale extraite du livre Architecture navales : Connaissance et pratique sur lequel s appui d autres définitions de ce mémoire : "Ingénieur en construction navale, chargé de la conception d un navire". Il peut exercer en profession libérale ou étant le gérant d'une E.U.R.L. ou d'une S.A.R.L. Il peut aussi exercer en salarié ou en administrateur d'une société. Il est souvent le maître d œuvre du projet. Armateur : L'armateur est une personne physique ou morale qui est propriétaire de navires ou a passé commande de la construction à un chantier naval ou, encore, a passé commande d'un projet ou d'une étude à un architecte naval. Il assure l armement (action de munir un bâtiment de tout ce qui est nécessaire à sa navigation) du navire et donc de son exploitation dans le cas d un navire de commerce. Maître D'œuvre : Le maître d'œuvre est la personne physique ou morale qui est responsable devant le maître d'ouvrage de la bonne exécution de la construction d'un navire depuis les études jusqu'aux essais de recette. Maître D'ouvrage : Le maître d'ouvrage est la personne physique ou morale donneuse d'ordre dans le cadre de la construction d'un navire ; ce peut être un armateur ou un chantier naval. Bureau d étude : Entreprise sous-traitante de parties de l étude très techniques et nécessitant des moyens particulier comme les calculs hydrodynamiques, les essais en bassin, les études de structures etc Equipementiers : Fabricant d équipement que ne peut fabriquer le chantier naval comme les accastillages, les moteurs, les batteries etc Comprend notamment les voileries. Sociétés de classification : Organismes privés chargés de fournir des renseignements sur la sécurité des navires. On peut citer entre-autres le Lloyd s Register of Shipping, le Bureau Veritas (BV), RINA (Registro Italiano Navale à ne pas confondre avec The Royal Institute of Naval Architects). Ils définissent également des normes auxquelles un armateur ou une législation peut exiger de faire mettre un navire afin d en garantir la sécurité. Ces acteurs ont tous pour point commun d être des interlocuteurs direct de l architecte naval en charge de concevoir le navire. Cette liste n est évidemment pas exhaustive et d autres corps de métiers peuvent venir apporter un complément de compétences à l architecte lors de l élaboration du projet, selon son ampleur et les moyens mis à disposition. Citons entre autres, les ingénieurs plasturgistes dans le cas des bateaux composites de série, les skippers et leurs équipes de préparateurs pour des navires de course au large, les architectes d intérieur etc 8

3. Lexique naval Lorsque l on parle de projet de bateau, un certain nombre de termes consacrés sont évoqués. Dans ce paragraphe seront consignés tous les mots de jargon technique utilisés dans ce mémoire, en commençant par ceux relevant du projet en lui-même puis en terminant par les noms des différents éléments du navire, des plus généraux aux plus petits et secondaire. Avant-Projet Sommaire ou Esquisse : l'architecte navale établit un plan d'ensemble accompagné d'une notice succincte résumant les caractéristiques principales du navire. (Définition fournie par l IFAN) Avant-Projet Détaillé ou Avant-Projet : A partir d'un avant-projet sommaire accepté par le maître d'ouvrage, l architecte navale établit un dossier permettant la consultation de chantiers navals ; ce dossier comporte, en plus du plan d ensemble : un plan de formes succinct, une ou plusieurs coupes d'échantillonnage, un devis de masse prévisionnel et une spécification générale du navire. (Définition fournie par l IFAN) Projet : Cette mission comprend l'élaboration de tous les plans et documents permettant à un chantier naval de construire le navire répondant aux caractéristiques de l'avant-projet détaillé tel qu'il a été défini en accord avec le maître d'ouvrage. (Définition fournie par l IFAN) IFAN : Institut Français des Architectes navals. Plan de formes : Représentation graphique de l enveloppe extérieure du flotteur considéré en tant que tel, c est-à-dire tout ce qui constitue la coque d étanchéité du navire (y compris les œuvres mortes comme le pont et les superstructures) Figure 2 : Exemple de plan de formes Plan de construction : Décrit la façon dont est réalisée la coque d étanchéité, en précise la structure, les matériaux, les épaisseurs, les assemblages, les échantillonnages, les renforts, les cloisonnements etc Plan d ensemble : Représente l organisation de l espace intérieur et extérieur d un navire. Plan de voilure et plan de pont : Représente tous les éléments permettant de gérer le système propulsif. Ceci comprend l organisation du pont, l accastillage, le gréement, la forme et la taille des voiles etc Le plan de voilure doit permettre à une voilerie d assurer la bonne découpe. 9

Plan de découpe : Lorsque le choix a été fait d utiliser la découpe numérique (pour de l aluminium, du contreplaqué ou de l acier par exemple), ce sont les plans servant à cette découpe. Coupe au maître : Coupe transversale de la coque représentant dans sa globalité la structure de la coque et du pont. Maître-couple : C est le plan (transversal) de la plus grande section transversale immergée. Comme son nom l indique, c est donc le lieu où le couple de rappel est le plus important. Devis de poids : Document permettant de lister la totalité des éléments composant le navire, de la structure à l armement type. S il est estimatif au début du projet, il est perpétuellement mis à jour lors de sa conception et ensuite de sa fabrication afin de contrôler l emplacement du centre de gravité et de vérifier que le navire naviguera bien dans ses lignes. Les éléments généraux du bateau : Carène : Partie immergée de la coque. Roof : superstructure de faible hauteur (au dessus du pont). Bau maximum : Largeur maximale de la coque Dérive : Œuvre vive évitant un voilier de dériver à certaines allures (l allure étant l angle que fait le navire avec le lit du vent) Gréement : Ensemble des éléments servant à maintenir en position la mâture et de régler la voilure Accastillage : ensemble des accessoires de pont (tels que les manilles, mousquetons, palans, winchs etc.) qui servent aux manœuvres des voiles. Cockpit : zone extérieure généralement à l arrière du navire et en dessous du niveau du pont, depuis lequel on pilote. Carré : compartiment du navire immédiatement après la descente. Autrefois appelé salon. Couple : Structure longitudinale composé d un barrot, d une membrure et d une varangue (cf. figure ci-dessous) Figure 3 : Exemple type de couple Pont : Partie du flotteur qui le ferme par le dessus. Etrave : Partie avant du navire dans le prolongement de la quille. Tirant d eau : Hauteur entre la flottaison et la plus basse œuvre vive. 10

Bordé : Partie de la peau extérieure de la coque (généralement des tôles ou des lames de bois). Echantillonnage : Structure permettant de rigidifier la coque d un navire. Afin de ne pas surcharger cette partie, les définitions concernant l échantillonnage d un navire sera résumée par les schémas suivant. Structure de coque Structure de pont Figure 4 : Exemple type de coque échantillonnée (partie extraite du CVS35) 4. Quelques notions fondamentales Pour comprendre comment concevoir une carène, élément central du bateau, il est important de bien intégré la notion de résistance à l avancement. Le but étant dans la plupart des cas de la réduire au maximum. Résistance à l avancement : elle est composée de la résistance aérodynamique, de la résistance hydrodynamique (résistance de frottement fluide augmentée de la résistance de remous le cas échéant), et de la résistance de vague (voir figure suivante). 11

Figure 5 : Réactions des fluides sur un bateau Les résistances aérodynamique et hydrodynamique sont des réactions de frottement visqueux classique s opposant au déplacement du navire et dont la description peut être trouvée dans n importe quel cours de mécanique des fluides. La résistance de vague est plus spécifique à l interface entre l eau et l air. De manière générale, elle est la conséquence de la déformation de la surface libre d un fluide : déformation alors appelée houle. A noter que l énergie nécessaire à la création d une houle est (entre-autres) proportionnelle à la longueur d onde de cette houle qui elle-même est proportionnelle à la vitesse de la houle. La plupart de l énergie de propulsion dissipée l est par le frottement visqueux de l eau et de l énergie absorbée par la vague que créé le navire en déformant la surface libre de l eau, dans des proportions dépendantes de la vitesse et de la forme de la carène. La quantité d énergie qui doit être dépensée pour générer une houle ayant pour amplitude H et pour longueur d onde Λ est exprimée de la façon suivante (avec ρ masse volumique du milieu de l onde qu est la houle, et g l accélération de pesanteur) : Nombre de Reech-Froude : En effet le navire entraîne à la même vitesse que lui un système de vagues dites d accompagnement qui se forment autour de sa flottaison. Ces vagues sont la manifestation de l énergie dissipée par la déformation de la surface libre de l eau. La vitesse d une houle s écrit de la forme suivante : Qui peut se mettre sous la forme du rapport suivant (2) : Avec c : célérité de houle, g : constante pesanteur = 9,81m/s², Λ la lon ueur d onde de la houle. Comme la vague avance à la même vitesse v que le navire, on peut écrire un nombre sans dimension appelé nombre de Reech-Froude (ou nombre de Froude) qui caractérise la vitesse du navire par rapport à sa longueur L : à comparer avec 12

Ce nombre caractérisant la vitesse du navire par rapport à sa longueur permet de différencier de manière numérique 4 comportements différents que peuvent adopter les carènes. Figure 6 : Les différents cas d avancement d un navire - A faible vitesse, les vagues d accompagnement ont une longueur d onde inférieure à la longueur du navire. Dans ce cas de figure où le nombre de Froude est petit (F n <0,4), la résistance de vague est faible par rapport à la résistance de frottement qui représente alors 60% à 90% de la résistance à l avancement selon la forme du flotteur. La résistance de vague augmente avec la vitesse. - Avec la vitesse, la longueur d onde jusqu à arriver au cas où le nombre de Froude est proche de 0,4. Ce qui correspond à l égalité entre longueur d onde des vagues et longueur du navire. Le bateau est alors en porte-à-faux sur 2 vagues. Si le bateau est Archimédien, la vitesse à laquelle correspond ce nombre de Froude est appelée vitesse limite théorique de la carène. - En augmentant encore la vitesse, la longueur d onde du système de vague augmente logiquement encore et la bateau ne se retrouve plus porté par les vagues suivant celle de l étrave et se cabre. Cet angle a de manière évidente un impact très négatif sur la résistance à l avancement et sur l orientation de la force de propulsion. La résistance de vague dans cette configuration domine largement, de l ordre de 70% à 85%. Ce cas de figure correspond à un nombre de Froude compris entre environ 0,4 et 0,7. - Si on dépasse un nombre de Froude de O,7 (Λ > 3L), le bateau "franchi" sa vague d étrave pour être porté par cette dernière dans une position proche de l horizontale. C est cette situation qui est appelée hydroplanage ou planning. Bien que la situation peut aussi être assimilée à du planning, elle est plus une zone de transition. Equilibre des forces d un voilier : Le cas du voilier est particulièrement intéressant pour un mécanicien étant donné qu il est le siège d un système complexe de forces statiques et dynamiques que l architecte se doit de maitriser. Les forces mises en jeu sont de 3 types 13

(nous prenons le cas où le voilier remonte au près, i.e. qu il fait un angle de 40 environs avec le lit du vent apparent) : - Les forces aérodynamiques propulsives : les voiles se comportent comme l aile d un avion et il y a donc au centre de voilure du navire une force F perpendiculaire à l orientation des voiles. Elle est la résultante des forces de portance et de trainée de la voile. La force F peut aussi être décomposée en une force parallèle au sens de la route qui permet au navire d avancer et une perpendiculaire à la route et au mât qui incline le navire sur le côté, voire même le fait dériver. - Les forces hydrodynamiques : Leur résultante est égale et opposée aux forces aérodynamiques. Une partie provient de la résistance à l avancement (elles sont comme il a été décrit précédemment parallèle au sens de la route et opposées au mouvement), tandis que l autre partie est générée par la réaction de la dérive (c est la composante dîtes d antidérive, perpendiculaire à au plan de dérive et à la résistance à l avancement). - Les forces hydrostatiques : composées du poids et de la poussée d Archimède, appliqués respectivement au centre de masse du navire et au centre de carène. La poussée d Archimède constitue la réponse aux moments qu imposent les systèmes de forces précédemment sités. Figure 7 : Equilibre du voilier 14

2) L industrie Marine Parler du marché de l industrie marine avant de détailler les différentes étapes de la conception d un navire est important afin de mieux cerner les enjeux financiers et humains qu un tel projet comporte. Un produit est indissociable de son marché, c est pourquoi il est intéressant d avoir une vue globale du marché dans lequel intervient le produit. Par ailleurs cela peut avoir pour bénéfice une prise de recul sur les compétences développées par une expérience comme ce PFE et d avoir une vue d ensemble sur les portes qu ouvrent ces compétences. C est pourquoi dans ce paragraphe il sera d abord présenté les chiffres globaux générés par la production navale en France, puis sera évoqué une vision plus qualitative de ce marché tirée de l expérience des acteurs rencontrés (chantiers navals, architectes, bureaux d études etc ). Extrait du site de l INSEE, les chiffres présentés ci-après sont ceux de l année 2009. Le marché de la construction navale en France représentait alors un chiffre d affaires de plus de 5 milliards d euros (source Ensane) en marché intérieur et exportation. Ce chiffre d affaires est partagé entre 2 secteurs : les bateaux de plaisance (cf. figure ci-dessous) et les navires de servitudes représentant les 4/5 ème du chiffre d affaire de cette industrie. Les navires armés ne sont pas pris en compte dans ce chiffre. Les bateaux de servitude étant essentiellement à moteur de nos jours, nous nous intéresserons un peu plus au marché des bateaux de plaisance. Toujours selon les chiffres de 2009 de l INSEE, les entreprises françaises de ce secteur ont répartis leur chiffre d affaire de la manière suivante : Autres (sport, hors-bord etc) 10% Bateaux à moteur 25% Voilier habitable 65% CA Hors Taxes total = 1,04 Milliard Figure 8 : Chiffre d affaires des entreprises françaises du secteur de la plaisance en 2009 En France et dans le secteur de la plaisance, la vente de voilier habitable est la principale source de chiffre d affaire (interne et d exportation). Il représente près des deux tiers du chiffre d affaire des navires de plaisance en 2009. La catégorie voilier habitable étant vague, précisons encore ce chiffre avec la figure suivante : 15

Facturation* = 650 millions d Unités vendues : 2091 Unités vendues : 1458 * : facturation correspond aux ventes de produits réalisées par les entreprises Figure 9 : Chiffre d affaires par type de voilier en 2009 De cette dernière figure, plusieurs conclusions sont possibles. Tout d abord comme ces chiffres présentent le nombre d unités vendues et non conçus il est évident que le nombre de navires conçus par an est bien moins élevé (bateaux de série, sisterships : plans déjà existant vendus contre des royalties etc ). Donc, peu de plans génèrent un chiffre d affaire conséquent (dans la plaisance). En moyenne, la production d un navire habitable de plus de 12m génère un CA d environs 250 000 tandis qu un navire de moins de 12m en génère 100 000. Un architecte naval facture les plans d un navire environs à hauteur de 10% du prix du bateau finit (ce chiffre varie évidemment selon la taille du projet). Il faut ajouter à ça qu en France, peu d architectes se partagent ce marché (entre 100 et 200 environs). Ceci donne une idée du manque de place sur le marché actuel pour un architecte naval voulant démarrer en France dans la plaisance. On peut rajouter que concrètement, après avoir récolté des informations de manière moins formelle auprès des professionnels du milieu, il s avère que le marché est même de plus en plus fermé à l architecture navale indépendante (bien que l année 2012 a vu une légère amélioration). D une part l essor des techniques permettant une production en série peu couteuse laisse peu de place à la vente de plan unitaire à la faveur des grandes industries et donc des architectes navals. Bien que ces dernières fassent appel à des architectes navals en profession libéral pour la conception de leur navire, elles ont de manière plutôt officieuse leurs architectes navals principaux auxquels elles commandent la plupart de leurs plans. Il devient aussi évident pour les acteurs du milieu marin que les problèmes à venir annoncent une conjoncture très difficile pour le marché de la plaisance en France. Outre le fait que la durée de vie 16

d un navire convenablement entretenu peut s étendre sur plusieurs générations et que le marché est saturé par la vente de navires d occasion performants et en très bon état, les ports sont pour la plupart saturés. La difficulté de stocker un navire pendant les périodes où il n est pas utilisé devient le problème majeur de la plaisance Française. C est pourquoi de plus en plus de professionnels se tournent vers le marché de l export que les chiffres précédent ne permettent pas d analyser. Notamment le marché Brésilien et Asiatique qui sont des marchés plus ouvert aux navires à moteur qu à voile ayant des tradition moins marquée par la voile qui garde toujours une image plus technique et compliquée (réservée donc aux initiés ). On note cependant que le marché de la servitude reste plutôt porteur. 3) Le cabinet d architecture de François Lucas De la grande croisière à la course au large en passant par les bateaux de servitude, les bateaux à moteur ou la restauration (ou encore refit), François Lucas a, depuis 23 ans, une large expérience en matière de conception de navires de toutes sortes. Il possède de plus une expérience affinée sur l eau comme régatier et coureur au large, en Mini 650 ou en Class 40. Auteur des Hermine et des Aventurin, ces bateaux prouvent sont aptitudes à la création de navires de voyage qu ils soient quillard, dériveur ou biquille (2 quilles excentrées), en aluminium ou en contre-plaqué. Grâce à des compétences larges, il obtient des bateaux toujours rapides. Figure 10 : Photo et rendu respectivement de l Hermine 51 et de l Aventurin 51 Autre domaine dans lequel il s illustre : les bateaux de régate. Il propose des Minis 650, un Class 950, un Class 40 (bateaux répondant à des "jauges" permettant de participer à certaines régates). Il est le premier architecte à mettre en œuvre le bouchain évolutif sur son Mini en 1998. Il est l inventeur d une quille 3D (mobile dans les 3 dimensions afin de tirer un maximum profit de l effet d aile d avion de la voile de quille) et dote son MiniCP de "strakes" (élément dépassant faiblement du bordé assurant un décollement plus rapide du bateau au planning) dès 2005 à l instar des 60 pieds de dernière génération. De nombreux chantiers font appel à ses services pour ses bateaux à moteur : Black-Pepper pour sa gamme des TenderFish, Guy Bonnet pour sa gamme de vedettes fishing etc... Plus récemment, 17

Sillinger entame la refonte de sa gamme de semi-rigides en adoptant l étrave en pointe de diamant, très efficace par mer formée, spécialité de François Lucas. Les navires de servitudes constituent aussi un domaine d activité pour ce cabinet. Des navettes électriques à passagers, un dry-dock flottant ou même un hydroglisseur sont la preuve de l éclectisme de sa culture marine. Une autre œuvre marquante de sa carrière a été la rénovation des emménagements du Bel-Espoir et du Rara-Avis, les deux trois-mâts de l association AJD créée par le Père Jaouen, grands voiliers qu il connaît bien pour avoir passé un an à bord en tant que membre d équipage. Comme pour la plupart des architectes navals, la conquête des premiers clients s est faite grâce à la reconnaissance obtenue après des concours de plans. Ainsi François Lucas a remporté le concours d architecture navale de la revue américaine Cruising World en 1988 avec un voilier transocéanique. En 1992, il remporte de nouveau le concours de la revue française Bateaux avec un dériveur collectif de randonnée. En 1996 la revue française Chasse-Marée lui décerne le 4ème prix pour un voilier de randonnée côtière. Enfin, en 1999, il reçoit une mention lors du concours du salon d Ancona (Italie) pour un voilier polyvalent. 4) Brève description des navires ayant fait l objet d un travail durant le PFE Pour la bonne compréhension de ce qui suit, voici une description résumée (par ordre chronologique d apparition durant le stage) des projets sur lesquels est appuyé ce mémoire. 1. Mistral 950 Le mistral 950 est un navire de régate qui a été conçu pour répondre à la jauge 950 tout en restant tout public. Le matériau de construction ainsi que le procédé ont été choisis pour qu il soit léger mais aussi constructible par un amateur éclairé se faisant livré le navire en kit. Figure 11 : Photo du Mistral 950 18

Lors de ce PFE, un exemplaire des plans avait été commandé par un client Russe souhaitant justement en faire une construction amateur. De légers remaniements du plan de pont (au niveau du cockpit et des hiloires) ainsi que des aménagements avaient été également suggérés par le client. 2. Open Océan 35 L océan 35 est un navire dont la construction a été lancée sur l initiative du chantier Océan Attitude et sur des idées de Ronan Guérin, responsable de ce chantier naval. Lors d une visite effectuée sur le chantier de ce navire, R.Guérin a proposé un nouveau concept de navire à partir du moule de ce premier navire. Ci-dessous les dimensions générales de l Océan 35 et donc de sa version Open (comme le moule est le même et que le gréement l est aussi). Figure 12 : Rendu de l Océan 35 3. Cargo à Voile Seafret, CVS 35 Le CVS 35 est un cargo à voile destiné au cabotage inter-îles dans les Antilles. Ce navire de servitude gréé en goélette (2 voiles de tailles proches) doit pouvoir servir au fret mais également à l extraction d épave. Dans son cahier des charges, il doit aussi pouvoir accueillir une équipe de scientifiques et être normes imposées par le Bureau Veritas. Sa propulsion principale est vélique (gréé en goélette) et il est équipé de panneaux solaires et de moteurs électriques. Figure 13 : Premier rendu du CVS 35 19

Le stage a été principalement axé autour du dimensionnement, de la modélisation en 3D et de la mise en plans de ce navire dont le dossier d appel d offre a été envoyé aux chantiers candidats en fin de stage. La partie électrique qui sera très importante sur ce bateau a été confiée à un bureau d étude (choisi par l armateur) spécialisé en propulsion électrique et en énergie renouvelable dans le domaine nautique. 4. Mini CP Kiteschooner Le Mini CP Kiteschooner est né sur la demande d un client qui souhaitait la même carène que le mini CP (autre navire créé par F.Lucas et répondant à la jauge des minis et dont la conception est très tournée vers la course) mais qui souhaitait également en changer le gréement. D un gréement de sloop (le plus courant de nos jours), il fallait revoir le plan de pont pour l adapter à un gréement de goélette (schooner en anglais) tracté par un cerf-volant auto-stable en cours de conception. De plus, dans sa requête était demandé de donner un aspect traditionnel à ce navire, d où la re-conception de son roof. Ce navire a été conçu et commandé pour participer à des régates (courses nautiques). Figure 14 : Modélisation du mini CP Kiteschooner 5. Sillinger 680 Navire de secours semi rigide commandé par la SNSM (Société Nationale des Sauvetage en Mer). Rapide, tenant bien la mer pour intervention rapide peu importe l état de la mer. Ci-dessous, le premier de la série des Sillinger conçu sur les mêmes principes : le Sillinger 1200. 20

Figure 15 : Sillinger 1200 6. Congo Dans le cahier des charges établit par l armateur, ce navire doit rentrer dans un espace de 2,5 m (équivalent d un container), être stable à des vitesses faibles, il doit pouvoir atteindre les 20 nœuds, être propulsé par 2 moteurs avec soit des lignes d arbres soit des hydrojets, et doit pouvoir abriter 3 travailleurs. C est un navire bathymétrique qui doit fonctionner 7 jours sur 7 et 16h par jours sur le fleuve Congo qui peut charrier des troncs d arbre (ou d autres objets flottants potentiellement dangereux) et donc le navire doit être résistant aux chocs et les moteurs apte à endurer ces longues sessions de mesure. Le tirant d eau doit être faible également à cause des bancs de sable qui se déplacent constamment. Un trou dans le fond de la coque au niveau de la quille doit être prévu pour les instruments de mesure bathymétrique. Le matériau retenu pas le chantier naval est l aluminium. 21

II. Le projet "navire" au travers les travaux effectués Un cabinet d architecture naval vit au fil des commandes de plans qui sont traitées par ordre d urgence. C est pourquoi plusieurs projets sont souvent traités en même temps, que certains sont mis en pause à la faveur d une mise à jour urgente réclamée par un chantier sur un autre plan etc Ceci fait qu un même projet de plans est souvent étalé dans le temps et entrecoupé avec d autres. Par conséquent, il n était pas possible dans le cadre de ce PFE de suivre un unique projet de bout en bout. D où la possibilité d écrire le chapitre qui suit, expliquant la manière dont est construit un projet de navire à travers plusieurs réalisations ayant eu lieu durant ce stage, et dont les degrés d avancement sont différent. Même si durant ce stage la plupart des étapes importantes du projet ont été intégrées, il y en a évidemment moins traitées que d autres. 1) Naissance d un nouveau concept de navire La naissance d un concept de bateau peut se faire soit sous l initiative d un tiers alors appelé armateur, soit sous l initiative de l architecte naval lui-même (pour diverses raisons). Selon le cas, la première étape de création du navire présentée ici est plus ou moins longue et relève beaucoup plus de l architecture et du design que de l ingénierie. Prenons pour exemple la naissance de l idée de l Open Océan 35, esquisse impulsée par le responsable d un chantier naval en charge de la construction d un Océan 35 pour un armateur particulier. Afin de tirer profit du moule de ce navire et de par sa connaissance du marché, R.Guérin a pris l initiative de commander une esquisse au cabinet de F.Lucas dont les contraintes sont d avoir la même coque et les mêmes formes de pont et de roof que l Océan 35 (pour des raisons de moule), mais dont l agencement permet de cibler une clientèle méditerranéenne très aisée souhaitant faire du cabotage sur un navire à l extérieur accueillant. Avec notamment un grand espace de cockpit et des liaisons pivot au niveau du pavois afin de l agrandir au mouillage. L accent doit donc être mis sur le design du cockpit du navire, qui en devient l espace de vie central en plus d en être le poste de pilotage. L une et l autre activité ne devant pas se faire obstacle. A partir de ce cahier des charges très sommaire, une série de dessin d architecture ont été produit. La méthode consiste à utiliser un calque des formes du navire (qui en l occurrence étaient déjà tracées et fixées) et de s en servir pour des esquisses d agencement. Ce qui explique que sur l esquisse présentée ci-après subsistent les traits de l ancien roof et de l ancien cockpit de l Océan 35. L aménagement intérieur a d abord été traité pour être réduit au maximum et dégager ainsi le plus d espace possible pour la partie extérieure : le cockpit que l on veut spacieux. 22

Figure 16 : Vue en plan et vue longitudinale de l Océan 35 avec pistes de réflexions dessinées L intérieur est donc uniquement prévu comme espace de repos et de détente (voir figure ci-dessus). Même la table à carte a été supprimée, les avancées technologiques (notamment avec l apparition de logiciels contenant des cartes informatiques couplées au GPS et aux données météorologiques) permettant de s en affranchir pour peu d y mettre les moyens financiers. Une fois l espace extérieure potentielle délimitée, d autres calques de vues en plan sont exploitées pour la création du cockpit. 23

Figure 17 : Esquisses d agencement du cockpit, des premiers essais au choix final (de gauche à droite) A partir de ces calques, il est possible d essayer plusieurs configuration possible comme mettre une barre à roue dans le plus grand espace à l avant tribord du cockpit afin d en dégager l arrière et de rester protégé du vent lors de la navigation. Au final, la solution retenue comporte une cuisine extérieure accolée à la console de barre, une table dépliante (et allongeable) ronde et des pavois rabattable sur les 2 tiers du cockpit (image la plus à droite de la figure ci-avant). On remarque aussi que pour des raisons esthétiques les lignes du pavois ont été "tendues" par rapport à l image précédente. Suite à ces expérimentations sur papier calque et quelques croquis en perspective, la dernière solution acceptée est modélisée en 3 dimensions sur Rhinoceros 3D (voir figure ci-après). Figure 18 : Première version de l Open Océan 35 modélisée en 3D, pavois dépliés 24

C est cette dernière image qui permet la validation du design auprès de l armateur et qui permettra la suite des discussions, négociations ou même de l écriture d un contrat. Dans notre cas présent, après avoir présenté ce premier résultat au commanditaire de l esquisse, la discussion a donné lieu à un schéma de sa part (voir figure ci-dessous) précisant plus son idée. Figure 19 : schéma de principe dessiné par l armateur lors de la seconde discussion En effet, cette première modélisation a permit de se rendre compte que la cuisine extérieure engendrée une contrainte d espace trop grande et ne permettait pas d avoir la sensation d un cockpit dégagé. Elle a donc été replacée à l intérieur du navire. A été aussi ajoutée une liaison pivot sous les assises principales afin de limiter l impact du roulis pour un confort accru à bord. Ses éléments sont pris en compte pour une seconde esquisse. La difficulté principale de ce type d exercice est la conciliation entre le design, le confort et la performance, mais aussi dans la compréhension du besoin exprimé, de manière formelle ou non, par l armateur ou par la clientèle cible selon le cas. Dans un autre contexte de création plus technique, le Congo aussi a fait l objet d une esquisse très discutée. Ce navire a été commandé par l armateur directement au chantier naval qui, ayant dans son bureau d étude un jeune architecte naval a pu établir un devis et un contrat. Seulement, le chantier naval a finalement pris la décision de sous-traiter la conception du Congo au cabinet de F.Lucas. Les premières esquisses établies par le bureau d étude ont été discutées entre chantier et cabinet et ensuite, une fois un terrain d entente trouvé, renégociées avec le client. Il a donc fallu traiter ce cas comme un tout nouveau projet. Au regard des contraintes qui concernent principalement la coque et la motorisation, les premières esquisses concernent la forme de la coque et l emplacement des moteurs. Les dimensions faibles du navire comparées à la puissance propulsive nécessaire (et donc aux dimensions des 2 moteurs demandés) pour atteindre les objectifs de vitesse paraissaient immédiatement difficiles à concilier. La première esquisse consistait à créer une forme sommaire et approximative de carène convenant à ce type d utilisation et de situer plusieurs types de système de propulsion afin de voir ce qui peut être installé dans le navire et à quelles conditions. Sur un calque a été tracée la carène en vue 25

longitudinale et en coupe transversale (le maître-couple correspondant dans ce cas particulier à toute la partie arrière du bateau prévu pour accueillir les moteurs) et sur d autres calques ont été dessinées les formes extérieures des systèmes propulsifs et le trait d axe des lignes d arbre s il en est besoin. Figure 20 : Esquisse d insertion des moteurs Perkins sur le Congo Ont donc été placés des moteurs reliés à un système hydrojet, un couple de moteurs Perkins inbord et un couple de moteurs Volvo Penta. Tous ayant la même puissance. Il s est avéré que le système à hydrojet qui présentait à priori plusieurs avantages n a pas été retenu, imposant alors un cockpit trop élevé. Ces essais graphiques ont donc permis la sélection d un couple de moteurs et de leurs lignes d arbre avec une inclination du bâti moteur de l ordre de 5 (sachant que l arbre d hélice fait déjà 8 avec l axe du moteur), les dimensions des 2 types de moteurs étant proches. En revanche, ces moteurs imposent un plancher de cockpit haut par rapport au niveau de l eau. Cet exercice a aussi permis de créer une première idée de carène acceptable qui peut être transposée sur support informatique. La forme imaginée sur papier étant à l échelle, il est possible d effectuer un relevé de points mesurés manuellement qui sont ensuite rentrés dans un logiciel de modélisation de carène (Maxsurf dans le cabinet de François Lucas, qui est d ailleurs le plus utilisé dans ce milieu) et de calculs hydrostatique sous forme de points de contrôle (voir figure ci-dessous). 26

Figure 21 : Première modélisation de la carène et du pont du Congo sur Maxsurf Ces points de contrôle sont les guides de la tôle de la coque dont les lignes sont ainsi lissées automatiquement. On peut donc rapidement créer une coque relativement satisfaisante et y appliquer des vérifications. La développabilité des bordés est ainsi contrôlée par un outil spécifique de ce logiciel de conception des carènes. Une fois cette coque "d esquisse" créée, on peut ensuite mesurer sa surface et son centre de gravité en rapportant cette coque sur un logiciel de CAO comme Rhinoceros 3D. Figure 22 : CAO de principe du Congo 27

Avant d effectuer ces mesures on peut se permettre d ajouter un premier pont et un roof pour plus de précision. Ce calcul permet de remplir un premier devis de poids prévisionnel et d approximer une première fois le poids total du navire et son centre de gravité grâce à des outils du logiciel de CAO. Le devis de poids se présente alors de cette façon : Figure 23 : Extrait du devis de poids du Congo Par expérience, on peut dors et déjà ajouter un certains nombre d éléments placés approximativement selon l axe longitudinal x. Ceci afin de placer le plus justement possible le futur centre de gravité du navire et de faire que la première itération de cette boucle du projet soit la plus précise possible, en espérant diminuer le nombre d itérations nécessaires par la suite. Dans le cas de ce navire bathymétrique, le devis de poids a été alimenté de manière très complète par celui d un navire que F.Lucas avait déjà conçu selon un cahier des charges suffisamment similaire à celui du Congo (un autre navire bathymétrique de dimensions analogues). Cette figure (voir ci-avant) montre donc un extrait de devis de poids déjà très complet. On y observe que chaque élément du navire est classé par catégorie, son poids et son centre de gravité placé sur les 3 axes. Ceci permet de faire des calculs d hydrostatique selon plusieurs cas de charge, que le navire soit dit lège (armé au minimum pour naviguer), en utilisation classique ou en charge maximale. Une fois ce premier devis de poids remplis, on entre sur le logiciel de calcul hydrostatique les coordonnées du centre de gravité ainsi que le poids qui s y applique et le premier calcul hydrostatique est lancé afin d observer la flottaison du futur navire. On contrôle ainsi si le navire prend de l assiette (centre de gravité mal placé sur l axe longitudinal), s il entre bien dans ses lignes d eau, c est-à-dire s il s enfonce correctement (ni trop ni de manière insuffisante) dans l eau pour cette forme de carène etc 28

Selon les défauts constatés, il est possible de modifier soit la forme de la carène pour en déplacer le centre de poussé ou pour en améliorer les performances hydrodynamique, soit le devis de poids en répartissant mieux les différents poids (ce qui nécessite une réflexion sur les aménagements et l armement du bateau). Ce fichier clef du projet qu est le devis de poids montre bien que tout changement dans ce qui est fait partie du navire ou qui est dans le navire aura un impact sur son centre de gravité qui a son tour peut avoir un impact sur sa flottaison et donc sa forme de carène. Il est donc mis à jour très régulièrement tout au long du projet, et ce jusqu à ce que le navire soit mis à l eau. Le chantier naval précise encore après que la conception du navire soit finie et pendant sa construction ce qu il met dans le bateau, combien cela pèse, et où il le met pour que l architecte mette à jour son devis de poids et continue ces contrôles. Cette première approche doit être assez brève car il n a pour sens que celui de fixer le cadre global de la conception du bateau et non d en figer la conception. Toutes ces étapes seront par la suite affinées lors de l étape de conception du projet à proprement parlé qui est cyclique. Les éléments étant tous interdépendants, il est fréquent que l ajout ou la modification d une cote engendre d autres modifications plus ou moins importantes. Cette étape permet surtout la vérification de la faisabilité du projet, et de pouvoir éliminer les pistes de réflexions conduisant à des impasses que ce soit relatif aux formes de carènes, à l armement du navire, à son aménagement etc Ainsi sur le Congo par exemple, la carène présentée sur la Figure 21 sera très certaines améliorée par la suite. Une fois le cadre de conception du projet ainsi posé et approuvé par l armateur, l architecte peut se lancer dans la conception approfondie du navire. 2) Conception à proprement parlée Les principaux outils de l architecture navale restent avant tout l expérience, le savoir empirique qui a permis au fil des années de voir les bateaux évoluer et qui donne aujourd hui des références et éléments de comparaison, et bien évidemment les outils informatiques (logiciel de CAO, de mise en plan, de calculs de structure, de calcul hydrostatique etc ). L essentiel du travail de l architecte naval se déroule de nos jours sur les outils informatiques. Bien que la plupart des éléments techniques et des aménagements soient assez bien situés sur les plans dessinés à la main, les formes complexes de la coque ne permettent pas de faire un travail d une grande précision. C est pourquoi assez vite les meubles et divers appareils du navire sont modélisés sur le logiciel de CAO, directement sur un échantillonnage sommaire afin de vérifier que ces esquisses soient réalisables. Certains éléments demandant d être dimensionné avant d être choisis (système de mouillage, ventilation, groupes électrogène etc ) voient leur encombrement estimé et modélisé. Selon l importance des aménagements dans le cahier des charges ce travail d architecture peut être fait dans l avant-projet. Toutes les étapes du projet se nourrissant les unes les autres, il est difficile de les délimiter et de leur donner un ordre chronologique clair (on revient souvent plusieurs fois sur les mêmes éléments). C est donc en dimensionnant certaines parties que 29

leur encombrement et emplacement peut être fixé. Cette partie du travail de dimensionnement, contrairement à la première relève plus de l ingénierie que de l architecture. Afin de mettre en exergue une partie des outils de l ingénierie nécessaires à cette étape du projet, intéressons-nous à ceux utilisés sur le CVS 35. 1. La CAO en architecture navale, Rhinoceros 3D L architecture navale est un domaine de l ingénierie et de l architecture où les formes complexes demandent à être modélisées en 3 dimensions de manière suffisamment précise. Beaucoup du temps consacré à un projet est occupé par l utilisation de logiciels de design et de modélisation 3D. Un logiciel couramment utilisé dans ce domaine est Rhinoceros 3D. Son utilisation est assez simple est instinctive. Il permet de générer des courbes et des plans, de les déplacer, les copier, les intersecter, les déplacer etc En comparaison au logiciel CAO CreO (ex Pro-E), alors que CreO se base sur des volumes, Rhinoceros 3D ne permet pas de génère de solides qui ne sont alors représentés que par leurs surfaces extérieures. Rhinoceros 3D ne permet pas d établir de relations, de créer une géométrie en faisant référence à une autre ou encore de placer des pièces les unes par rapport aux autres. Le système de squelette et d assemblage est remplacé par un système plus rudimentaire de calque analogue à ceux d Autocad. Toutes les surfaces et les courbes évoluent donc indépendamment les unes des autres. Ce qui fait que si une est modifiée, il faut vérifier tous les éléments adjacents ou susceptible d avoir dans la réalité un liens avec celle-ci, ce qui peut être laborieux. Par exemple sur le CVS 35, lors de la conception de la descente d accès au compartiment machine et de l arrivée d air de la ventilation, il a été relevé que le pavois (prolongement de la coque servant de garde corps) n atteignait pas les 1m de hauteur, ce qu exige la norme. Toutes les surfaces en contact avec cette partie du bordé ont du être mises à jour en même temps que le bordé a été allongé. Et ainsi se déclenche une réaction en chaîne. Ce que permet d éviter CreO grâce aux relations, au squelette, aux courbes et surfaces de références etc Alors que CreO cherche à être un outil de conception le plus complet (avec Mechanica etc ) et à optimiser le système itératif de la boucle de projet qui conduit à perpétuellement modifier ce qu on créer, Rhinoceros 3D choisit une orientation radicalement opposée. Il place au premier rang l ergonomie de travail, la facilité de prise en main et la possibilité de créer facilement et rapidement n importe qu elle courbe ou surface sortie de l esprit. Dans sa version la plus basique, il ne contient aucun utilitaire si ce n est celui permettant d améliorer le rendu du modèle. Bien qu instinctif, la manière de modéliser un système complexe peut être réfléchie un minimum. Dans les premières utilisations on est tenté de créer des surfaces que l on fait s intersecter, avant de supprimer le surplus de matière afin de s assurer de leur contact. Mais une façon plus judicieuse de modéliser sur Rhinoceros 3D est peut être de d abord créer des courbes et de s appuyer sur ces dernières ainsi que sur des plans repères pour créer les surfaces. En gardant ces courbes dans des calques spéciaux, on peut ainsi les cacher pour mieux les réutiliser en cas de nécessité si par exemple il faut régénérer une surface, ou la modifier. Il est aussi à noter que Rhinoceros 3D ne permet pas non plus la création de mises en plan comme CreO directement à partir de la CAO. Si ce n est en projetant les courbes sur un plan puis en 30

exportant et faisant le tri une fois les courbes importées sur Autocad ou un autre logiciel de dessin de plans. 2. Système de ventilation du compartiment technique du CVS 35 Lors du début du stage, après avoir traité pendant le premier mois un certain nombre de travaux urgents (dont il est question plus loin dans ce mémoire), le CVS 35 s est imposé comme le projet principal des 2 mois qui ont suivis. Une première maquette 3D avait été produite et des calculs par éléments finis effectués par Tensyl (bureau d étude sous-traitant spécialisé dans le calcul de structure) avaient été faits selon les normes Bureau Veritas en prévision d une demande de certification. La forme de la coque avait pu être figée et validée après calcul. L échantillonnage principal était aussi établi dans ses plus grandes lignes, calculé pour résister aux cas de charges à des conditions de hogging et sagging (cf. figure ci-contre) comme le demande la réglementation du Bureau Veritas. Ces calculs de structure peuvent être sous-traité ou fait directement par l architecte naval s il en possède les moyens en termes de temps et de compétences et s il a pu investir (et s il en a fait le choix) dans un logiciel de calcul de structure. Le projet se trouvait donc proche du centre de la spirale du projet. Ne manquait plus qu à préciser la manière dont serait aménagé le navire et de faire les calculs de dimensionnements relatifs aux organes secondaires du navire (c'est-à-dire ce qui n a pas attrait à la propulsion ni à la manœuvre du navire). Lors de cette étape sont nécessaires un certain nombre d outils de l ingénieur et d autre de l architecte. Lors de la conception du CVS 35, il a ainsi fallut dimensionner la pompe et la conduite de ventilation nécessaire au bon fonctionnement des moteurs et groupes électrogènes (entre-autres) du compartiment machine. Ce dimensionnement nécessitait d apporter un débit d air frai suffisant (l air extérieur étant estimé à 30 C en moyenne, la zone de navigation étant les Antilles) sans pour autant que la vitesse de vent ne soit trop élevée (elle est fixée à 8km/h) afin de ne pas faire siffler les vantelles. Au préalable, les documents techniques des machines de ce compartiment ont été parcourues afin d en extraire les débits d air consommé et les débits nécessaires au refroidissement des machines. Le débit total d entrée étant alors différent du débit total de sortie. Ensuite un premier tracé de conduite a été modélisé (de section arbitraire, seule la ligne moyenne étant intéressante, voir figure ci-après) afin d obtenir la longueur de tuyère, le nombre de coudes et de pouvoir ainsi construire la courbe caractéristique de la tuyère. 31

Figure 24 : Emplacement de l extracteur et conduite de sortie Le coefficient de perte de charge induit par les vantelles n étant pas donné, il a été estimé. C est ensuite à partir du débit nécessaire, de la vitesse de vent maximum et des courbes caractéristiques de la conduite et de celles des extracteurs qu a été choisi le couple d extracteur (un par bord) et la surface d entrée et de sortie d air. Dans ce cas présenté, la mécanique des fluides en écoulement intérieur était l outil de dimensionnement. Selon la taille du navire et l utilisation auquel il est voué, il peut être appliqué à la gestion d autres fluides et au choix d autres pompes nécessaires à la vie du bateau. 3. Le mouillage du CVS 35 Parmi les connaissances de l ingénieur, celles les plus utilisaient en architecture navale sont évidemment la mécanique générale comme on a déjà pu le voir au premier chapitre avec l équilibre des forces d un voilier, et la mécanique des solides déformables. Un bateau est un lieu de sollicitation intense des matériaux. En plus des contraintes induites par les gréements des navires à voile, les contraintes qu exerce la mer elle-même sur la coque ou par le biais des systèmes de mouillages peuvent être dangereuses pour la structure du navire. Sans compter les efforts ajoutés sur les bateaux de travail par les chaluts (filet de pêche), grues et autres outils. Après le compartiment machine, le système de mouillage a été mis en question, et la nécessité de ces outils s est fait alors encore une fois sentir. Dans les conditions particulières du CVS 35 dont les caractéristiques principales sont décrites en première partie, les efforts auxquels sont soumis les appareils de mouillage sont loin d être négligeables. De plus, des normes existent (toujours pour une certification par le Bureau Veritas) pour le choix des aussières (cordages servant à l amarrage du navire) et des ancres. Pour tout ce qui concerne le mouillage d un navire (au port ou à l ancre), les normes font références au nombre d armement dont la formule est donné par les normes : Avec : Δ déplacement du navire = 215t ; B la largeur du bateau hors membre = 9m ; h hauteur maximale du na vire = 5m ; A surface latérale = 129m² 32

Celui du CVS 35 est de 139. A partir de ce chiffre et de tableaux d abaques que l on trouve sur les dossiers de norme du Bureau Veritas, la taille des aussières, le nombre d ancres et leurs poids ont put être déterminés. Est également déduite la charge de dimensionnement du système de mouillage (la charge que devra pouvoir accepter une aussière et la structure l attachant au navire). De cette charge et d un calcul de mécanique simple partant de la force admissible par l aussière (appelée T dans la figure ci-dessous) pour déduire la force qu exerce le guindeau sur la cloison (F), a été déduite la contrainte de compression agissant sur la cloison sur laquelle repose le guindeau (chargé de remonter les ancres). T F A partir de cette contrainte, un calcul au flambement a été appliqué à cette cloison étanche (pour des raisons de sécurité) afin de déterminer le moment d inertie qu il convenait de lui donner. C est donc de ce calcul qu a été estimé avec une précision suffisante et des coefficients de sécurité judicieusement choisis que le nombre et les dimensions des lisses ont été choisis pour cette cloison fortement sollicitée (les moment d inertie s ajoutant à condition de leur appliquer le théorème de Huygens lorsque ceux-ci sont excentrés). En évitant son flambement, on évite également l effondrement de cette cloison. 4. Le choix de grue du CVS 35 Dans le même ordre d idée, le CVS 35 a dans son cahier des charges la mise en place d une grue sur le pont principal afin de faire de l extraction d épave. Encore une fois, l architecte naval doit faire la liaison entre le besoin de l armateur, les normes du Bureau Veritas, les propositions de l entreprise fournissant la gue et les conséquences que cet outil a sur le devis de poids du navire. Pour les grues à bord des navires, 2 certifications existent. La certification Offshore permet l utilisation de la grue en pleine mer, et harbour une utilisation à quai. La première certification demande un surdimensionnement de la grue et d accroitre les systèmes de sécurités. Ce qui peut pousser à prendre une grue plus performante que nécessaire en condition harbour, plus équipée, et donc plus lourde et plus couteuse. Il faut alors discuter de l utilisation exacte que souhaite en faire l armateur 33

et voir si pour des raisons de coût et de devis de poids (le poids des 2 grues en discussion sont de 3,5t et 2,5t pour des conditions offshore, avec un centre de gravité non centré sur l axe longitudinal et en hauteur sur le pont), on peut se contenter de restreindre plus encore l utilisation de la grue plutôt que de prendre une grue très performante et lourde. L explication détaillée des calculs et conclusions figure en annexe. Les calculs reposent encore une fois sur des textes des normes du Bureau Veritas qui fournit toutes les données nécessaires au calcul. Après relecture des conditions de certifications et vérifications des calculs, un compromis a donc été trouvé pour un premier choix sur la grue la plus petite mais des restrictions d utilisations plus fortes alors que le fournisseur préconisait une grue plus puissante. La démarche a été de calculer pour la PK 32002 le rapport qu il y a dans les mêmes conditions 5. Dimensionnement de la structure sous grue du CVS 35 Après avoir argumenté le choix de la grue par ces calculs, il a fallut attendre l aval de l armateur et du fournisseur de grue pour valider le choix. C est pourquoi le dimensionnement de sa structure s est fait par défaut sur la base de la grue la plus puissante et la plus lourde. En effet, lorsque Tensyl avait soumis la coque à des calculs par éléments finis, les cas de charges utilisés et prescris par les normes ne prennent en considération que les efforts induits par la mer et le gréement. C est pourquoi une étude par élément finit en 2 temps a été estimée juste. La démarche globale est donc la suivante. Il a été choisi d appliquer dans un premier temps un calcul par éléments finis afin de déterminer comment les efforts se répartissent dans la structure actuelle lorsque la grue est en fonctionnement. Puis une fois les résultats dépouillés appliqués judicieusement des renforts pour supprimer les concentrations de contraintes en réorientant certains flux de contraintes. Eventuellement, si le temps le permet, un dernier calcul par élément finis avec la structure mise à jour serait judicieux. Bien que le premier maillage créé n ait pas pu se conclure par une analyse sur NASTRAN, présentons brièvement la méthodologie utilisée afin d en voir les failles et de mieux comprendre son évolution qu est le second maillage. Le premier maillage a été effectué en une seule traite. Après avoir exporté le fichier de Rhinoceros 3D au format IGES et de nouveau importé ce fichier IGES sur PATRAN (en ayant pris soin de décocher "import to Parasolid" dans la fenêtre de sélection du fichier IGES à importer), le maillage a été entamé de manière classique sans prendre en compte que la géométrie de la coque est bien plus complexe que les pièces traitées auparavant. Cependant, quelques précautions avaient été prises avant d exporter le modèle CAO de la partie de coque concernée. La première a été d isoler 2 types d éléments : des éléments en 2 dimensions pour les grandes surfaces de coques et de couples, et des éléments à une dimension pour modéliser les épontilles et les lisses. Ceci permet de réduire le nombre de maillage à générer et de le rendre moins complexe. De plus un découpage des tôles a été préalablement effectué pour s assurer que les nœuds du maillage 2D tombent au même endroit que ceux des maillages 1D en jaune sur la figure ci-dessous. 34

Figure 25 : Maillage directe à gauche, et après découpage à droite Une fois toutes les surfaces et les profilés maillés, il convient de lier ces différents éléments afin que les nœuds puissent être sur 2 surfaces en même temps et signaler la soudure des tôles (supposée parfaite) ou pour signifier la continuité de matière lorsque la séparation est artificielle (pour simplifier le maillage comme on l a vu juste avant) par le biais de l outil "equivalence" de PATRAN. Cet outil fait fusionner des nœuds appartenant à des maillages différents sous la condition que la distance qui les sépare soit inférieure à la tolérance entrée. Malgré cet outil, il reste énormément d imperfections, de mailles en trop sur certaines surfaces par rapport à ses voisines, des nœuds qui n ont pas de correspondantes, des fissures potentielles (lorsque qu un nœud arrive au milieu d un maillage) etc Un travail long et laborieux d inspection et de correction démarre alors afin de faire correspondre tous les maillages. Le maillage enfin terminé, à chaque élément modélisé ainsi réunifié par le maillage il faut associer les bonnes propriétés : le matériau qui est ici le même partout (de l aluminium 5086 H111, majoritairement utilisé dans ce domaine), les épaisseurs différentes, et les orientations par rapport à la charge également. L application des charges et des blocages viennent finir le travail avant l analyse. Le but n étant pas de simuler l ensemble du navire en charge mais bien la réaction de la structure de la grue à la réaction des efforts qu elle génère. C est pourquoi deux éléments 1D ont été ajoutés dans le prolongement de la coque afin de modéliser la liaison entre le reste du navire et le tronçon. Chaque nœud à la frontière de la partie entièrement modélisée est relié à l élément 1D lui faisant face. A ces 2 barres est appliquée l inertie équivalente des tronçons de navire qu elles remplacent. Ces inerties sont estimées quasi équivalentes aux inerties de tronçons arrière calculé par Tensyl (voir figure suivante : Figure 26 : Éléments linéiques équivalents aux sections avant et arrière du bateau, par Tensyl 35

Ce sont les extrémités de ces éléments 1D qui sont bloqués par des encastrements. Pour ce qui est de la modélisation des efforts, le poids de la grue et de sa charge maximale (SWL) sont appliquées en pression sur la zone rouge correspondant à l appuie de la grue (voir Figure 29). Un autre élément 1D est modélisé vertical au dessus de la zone de grue et est relié à tous les nœuds de la zone de grue. C est à cette barre que sont appliqués les moments transmis par la grue au pont. Cette barre est un élément alors complètement rigide. Bien que dans les cas plus simples cette méthode de maillage classique soit rapide et suffisamment efficace, elle comporte dans le cas d analyse de pièces plus complexes plusieurs défauts. Elle est comme signalé plus haut, très longue et laborieuse à mettre en place à cause du nombre très important de maille à refondre en plusieurs au niveau des intersections et du manque de visibilité. Comme dit précédemment, cette première méthode n a en plus pu se solder par une analyse car le maillage était au final trop complexe pour le logiciel de calcul NASTRAN. C est pourquoi un second maillage clarifié a été créé de manière plus rigoureuse. Le maillage d une surface sur PATRAN se fait de la manière suivante : un pas de maillage est choisis, que ce soit pour la création des nœuds présents sur les arrêtes de la surface (mesh seeds) ou en maillage directe (auto-mesh), mais ne peut être scrupuleusement respecté. C est un pas moyen autour duquel le logiciel va calculer largeur et longueur des mailles à appliquer en fonction de la largeur et la longueur de la surface à mailler. Ainsi selon comment sont divisibles les cotes de telle surface, les valeurs des pas de maillages réels seront un peu plus ou un peu moins élevés que la valeur de pas entrée. Ceci conduit à des situations où lorsque 2 surfaces (A et B) sont accolées à une 3 ème (la surface C), les maillages ne tombent pas juste et les nœuds des arrêtes adjacentes ne sont pas communs (cf. figure ci-après). Figure 27 : Intersection entre 3 maillages 36

Cette situation peut conduire à ce que le nombre de mailles ne soit pas le même à droite et à gauche de l arrête commune. Là encore l intervention humaine est nécessaire. Il faut donc supprimer un élément de la surface possédant le moins de mailles (qui sont souvent plus grandes par conséquent) pour en recréer 2, une trièdre et une quadrilatère, afin que chaque nœuds de ces nouvelles mailles correspondent à des nœuds d autres mailles (voir figure ci-dessous) Figure 28 : Redécoupe d un élément litigieux C est l un des facteurs qui ont rendu le maillage de ce bout de bateau compliqué et long. Une fois ce fonctionnement compris et assimilé, la CAO servant à exporter les géométries en IGES a été "prémaillée" par cette découpe (voir figure ci-dessous). 37

Figure 29 : CAO exportée sous PATRAN pour le premier maillage suivie celle pour le second maillage On remarquera notamment les changements radicaux des arbres des calques. En effet en plus de la redécoupe des surfaces et des éléments à 1 dimension (eux aussi redécoupés pour épouser la forme de chaque bout de surface), les formes géométriques en 1D et 2D ont été replacés dans des calques par types de propriété (seules les problèmes d orientation par rapport à l effort de sollicitation n ont pas été pris en compte). Se faisant lors de l exportation, les calques de Rhinoceros 3D sont automatiquement convertis en groupes sous PATRAN. Ce qui permet ensuite de gérer aisément la visibilité du model en faisant apparaitre un ou des groupes et pas les autres (outil "post" du menu "Group"). Grâce à ce pré-maillage géométrique, une fois la manœuvre d exportation et d importation faite, le maillage se fait directement en auto-mesh avec un pas imposé (pas de calcul automatique) par l utilisateur du logiciel et sans mesh-seed. Ce qui permet de mailler plus vite et mieux puisque la redécoupe a été faite de sorte à ce que les surfaces soient le plus carré possible (même si parfois des formes triangles peuvent simplifier le maillage). Sont ainsi maillés les surfaces par catégories. C est-àdire en commençant par exemple par mailler les plaques de 6mm. S assurer que toutes les équivalences ont fonctionnées entre-elles grâce à un outil découvert durant ce second maillage. Cet outil permet de ne faire apparaitre plus que les bordures des maillages. On voit ainsi en jaune (sur la Figure 30) lorsqu un maillage se termine où il commence et on met ainsi en valeur les maillages non joints. Puis le même procédé est appliqué aux plaques de 8mm. Une fois les 2 types de géométrie correctement maillées, ce sont les équivalences entre les plaques de 6mm et 8mm qui sont vérifiées et ainsi de suite jusqu à ce que toutes les géométries aient été maillées et vérifiées. Ce processus est résumé sur la Figure 30 : 38

Découpe du couple Auto-mesh effectué Vérification après équivalences Vérification directement après auto-mesh Figure 30 : Les étapes du second maillage Il est à noter que l outil d équivalence est lui aussi utilisé différemment. Alors que dans le premier maillage l équivalence était appliquée à tout le maillage d un coup, sur ce procédé il est appliqué arrête par arrête (en faisant glisser l option "object" de "all" à "list" de l outil d équivalence). Ce qui évite la fusion de nœuds qui n a pas lieu d être. C est ce dernier problème qui a certainement rendu impossible l analyse par NASTRAN. Le premier maillage était à la fois compliqué et pas assez maitrisé dans le sens où l utilisateur du logiciel était confrontait à des problèmes de visibilités de certaines zones. D où un manque de contrôle du maillage. Par conséquent il est possible qu en appliquant une équivalence à l ensemble de la structure avec une tolérance trop ample cela ai permis la fusion incohérente de petites mailles devenant ainsi impossible à analyser par éléments finis sous NASTRAN. L application des propriétés est ensuite largement facilitée pour la restructuration de l arbre des calques. Une fois une catégorie sélectionnée, il ne manque plus qu à faire la distinction entre l orientation des géométries. Il n est plus difficile d accéder à toutes les mailles d une surface d un coup sans en inclure d autres non concernées par la propriété à appliquer. Le reste du processus, de l application des contraintes jusqu à l analyse des résultats, se déroule strictement de la même manière que précédemment. 39