IV. Systèmes nationaux de gouvernance et innovations en matière de mix énergétique



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Transcription:

1 Energies renouvelables : les Biomasses, l Eolien, le Solaire Stratégies nationales, structuration des réseaux et innovations en Grande Bretagne France Allemagne Pologne Résumé (F. Bafoil & G. Lepesant, dir.) Cette étude traite des processus de décision en matière d énergies renouvelables dans quatre pays que deux types de gouvernance distinguent : la Grande-Bretagne, la France et la Pologne sont des pays centralisés ; l Allemagne est un pays fédéral. Cette distinction des gouvernances au delà d une même dépendance partagée par tous (I) - permet d isoler les obstacles (II), les conflits (III), les processus de décision (IV) ainsi que les innovations en matière énergétique (V), enfin, les positionnements politiques (VI). I. Enjeux et dépendances énergétiques en matière extérieure : L Allemagne importe 97% de son pétrole, 89% de son gaz, 60% de son charbon ; la Pologne, 100% de son pétrole, et 40% de son gaz. La France, elle dépend à 100% de son pétrole et 60% de son gaz ; la Grande-Bretagne importe 15% de son gaz et la dépendance nette aux importations croît. En matière intérieure : Chaque pays est en devoir de procéder à un important renouvellement de son parc énergétique dans de brefs délais. La Grande Bretagne doit remplacer 1/5 ème de ses capacités de production électrique d ici 2020, ( ses centrales nucléaires doivent être fermées d ici 2023, à l exception d une seule). La France doit renouveler son stock de centrales d ici 2020 ou prolonger leur délai de vie mais à des coûts très élevés. En Pologne, l obsolescence des installations est alarmante : 44% des générateurs à turbine et 47% des chaudières ont plus de 30 ans. Les nouvelles centrales à gaz et à charbon actuellement en construction ne seront livrables qu en 2017-2019. Quant à la dépendance allemande, elle renvoie aux innovations technologiques qui doivent compenser la fermeture des derniers réacteurs nucléaires d ici à fin 2022. Elles concernent en particulier le stockage d énergie, la capture et le stockage de carbone. D où la dépendance à l égard des coûts et des investissements nécessaires à cette adaptation. La transformation du système énergétique britannique nécessite des investissements considérables dans les infrastructures (technologies renouvelables et réseaux) de l ordre de 110 mds à 200 mds d ici à 2020. En Allemagne, les investissements sont estimés à 119.5 mds d euros. Les investissements polonais nécessaires à la production et à l approvisionnement de l énergie (électrique, gazeuse, de vapeur et de l eau chaude) sont estimés aujourd hui à 4.3 mds d ici 2020 II. Les obstacles liés au type de gouvernance centralisée. Les obstacles tiennent ici à la place laissée aux citoyens dans le processus de décision, que la représentation véhiculée par les échelons centraux voudrait voir la plus réduite possible. Or, en matière d éolien, par exemple, pareil comportement administratif est inadapté. Les choix doivent être fondés sur une vaste consultation entre les différentes parties prenantes. Décentralisée. La très grande diversité territoriale propre au système fédéral se traduit par des profils économiques régionaux en conflit les unes avec les autres. Le Brandebourg situé à l Est est le Land qui produit le plus d électricité verte. A contrario la Rhénanie du Nord Westphalie à l Ouest est très dépendante économiquement de l exploitation du charbon et en retard pour le développement des énergies renouvelables. Il résulte de cet écart de production entre les Länder de l Est et ceux de l Ouest (29% et 20%) que les premiers produisent davantage qu ils ne consomment. Cette différenciation entre lieux de production et lieux de consommation soulève des problèmes de transport de l électricité d un bout à l autre de l Allemagne, d Est en Ouest et du Nord au Sud III. Les réseaux. En Grande Bretagne, en France et en Allemagne, nombreuses sont les craintes de black-out liés aux défaillances techniques sur le réseau.

2 En Allemagne l agence fédérale des réseaux a évalué le besoin en investissement à hauteur de 25 milliards La banque KfW estime quant à elle qu il pourrait atteindre jusqu à 75 milliards sur les 15 prochaines années. Il s agit prioritairement de raccorder les parcs éoliens en mer au continent, de relier le Nord excédentaire en capacités de production renouvelables vers les grands centres de consommation du Sud et de moderniser les réseaux de transport ainsi que les réseaux de distribution régionaux. IV. Systèmes nationaux de gouvernance et innovations en matière de mix énergétique L Allemagne. La sortie du nucléaire et la transition énergétique y font l objet d un large consensus social et politique. La sortie négociée et progressive du nucléaire décidée par le gouvernement Schröder a conduit à l instauration en 2000 d une loi sur les énergies renouvelables. Cette loi introduit des tarifs d achat garantis et généreux pour les énergies renouvelables qui bénéficient en outre d une priorité d accès au réseau. L accélération du processus décidée par Angela Merkel suite à la catastrophe de Fukushima en 2011 consolide cette trajectoire et impose une feuille de route précise. Ce modèle a fait le succès du développement des énergies renouvelables puisqu aujourd hui elles représentent près d un quart de la production d électricité. Les capacités sont distribuées sur le territoire dans la mesure où la moitié des capacités renouvelables est détenue par les citoyens. Mais aujourd hui ce système est victime de sa propre réussite. Financé par des taxes prélevées sur les factures des consommateurs, le déploiement des capacités renouvelables a conduit à augmenter le prix de l électricité. Les controverses soulignent non seulement la croissance constante depuis 2011 de la taxe qui permet de couvrir les tarifs d achat. Mais elles critiquent également l inégalité de répartition de la charge de ce financement aux dépens des consommateurs résidentiels et des PME. L inégale distribution territoriale des capacités renouvelables fait problème. La concentration des renouvelables dans l Est et le Nord requiert de nombreux Kms de nouvelles lignes électriques pour transporter l électricité vers le Sud où se concentrent les grands centres de consommation. Or la construction de ce réseau requiert un financement important et se heurte à de vives résistances locales. Cette situation a conduit la nouvelle coalition CDU-CSU-SPD à proposer un ralentissement du développement des énergies renouvelables, en particulier de l éolien terrestre. La France et la Pologne sont des pays qui demeurent centralisés et le secteur de l énergie demeure une prérogative quasiment exclusive de l Etat central. La prédominance de l énergie nucléaire en France (75% de l électricité) ou du charbon en Pologne (86%) anéantit toute notion de partage des décisions avec les régions, laisse peu de place aux énergies renouvelables dans le mix, et réduit à peu de choses les initiatives citoyennes. On ne trouve en Pologne que quelques 1500 citoyens producteurs. En France, le soutien public ne faiblit pas comme en a témoigné l organisation du Grenelle II à l automne 2012 mais les engagements pris en 2011 d une réduction rapide de la part du nucléaire a été repoussée à l horizon 2035 ; les décisions du Grenelle II, après les élections municipales du printemps 2014 et la taxe carbone rejetée dans un futur incertain. Les régions ne sont donc guère en mesure d opposer des stratégies particulières, n était le Nord Pas de Calais. En Pologne, la région de Silésie ne démontre aucune capacité d innovation susceptible de contrebalancer le très puissant lobby minier. La Grande Bretagne. La loi sur le changement climatique de 2008 représente la pierre angulaire de la trajectoire bas carbone de l économie et du système énergétique britannique. Afin de préserver la sécurité de son approvisionnement électrique, la stratégie repose sur le déploiement des énergies renouvelables, l efficacité énergétique et le développement de la technologie de capture et du stockage du carbone. Mais cette stratégie est marquée de nombreux aléas et incertitudes. Face au faible développement des capacités renouvelables sur la base du système des quotas, la Grande Bretagne a introduit en 2010 un modèle de tarifs d achat pour accélérer l implantation des énergies renouvelables. Afin de financer le coût des ENR, les taxes «vertes» prélevées sur les factures des consommateurs ont fortement augmenté. Or, dans un pays où la lutte contre la précarité énergétique est une priorité, la hausse de ces taxes fait débat. Cela a entrainté deux conséquences : la réduction du niveau des tarifs d achat et une politique moins favorable aux ENR. Parallèlement la Grande Bretagne a conservé un programme nucléaire qui profite d aides aux prix d achat de l électricité. Ce positionnement britannique fait débat et tend à brouiller les objectifs à long terme en matière d énergies renouvelables. Malgré un soutien de

3 l opinion publique, la transition énergétique ne fait pas consensus au niveau politique. Ce contexte génère un climat d incertitude parmi les investisseurs. V. 4 types d initiatives régionales. Le cas du Bade Wurtemberg la région du Bade Wurtemberg a misé avant tout sur le développement de l éolien terrestre. Compenser la sortie du nucléaire et sécuriser son approvisionnement représentent les deux grands défis de cette région. La fermeture de deux de ses quatre réacteurs nucléaires - avant la fermeture définitive des deux derniers en 2023 - a pesé sur les décisions énergétiques de la nouvelle coalition régionale conduite par les Verts et les sociaux démocrates. La nouvelle coalition politique au pouvoir plus favorable aux énergies renouvelables et à l éolien que la précédente a accéléré le processus de transformation du mix énergétique régional. Sans viser l autarcie, le gouvernement régional a fixé des objectifs ambitieux : les énergies renouvelables doivent atteindre 38% du mix régional d ici à 2020 et 80% d ici à 2050. Pour atteindre ces objectifs, deux innovations juridiques clés ont été introduites. La première tient à la modification de la loi de planification pour faciliter et accélérer le développement de l éolien terrestre. La seconde a consisté en l introduction d une loi climatique qui fixe des objectifs contraignants de réduction d émissions de carbone. La mise en œuvre de cette stratégie régionale dépend de coopérations originales localement. La CDU domine les districts qui valident les projets ENR du point de vue environnemental et fait souvent obstacle au déploiement de l éolien. Pourtant plusieurs localités telles qu Ingersheim démontrent la capacité du parti conservateur à dépasser son attitude anti-éolienne classique pour soutenir le développement de projets éoliens locaux. Une majorité des projets s appuie également sur une coopération entre secteur privé, régies municipales, pouvoirs publics et citoyens. Le Bade Wurtemberg compte de nombreuses coopératives d énergies qui ont investi dans les ENR, telles qu EWS Schönau pionnière en la matière. Le Nord Pas de Calais Les premières initiatives ont été portée par le gouvernement régional dès les années 1990 avec la création d un département environnement, et l impulsion donnée aux turbines éoliennes, les premières en france (à St Malo les Bains). Le soutien à l énergie renouvelable s est traduit par le soutien aux politiques d équipement, en coopération avec l ADEME (régional) et le Fonds Régional d'aide à la Maîtrise de l'energie et de l'environnement FRAMEE) Un centre pour le développement des éco entrepries à vu le jour en 2002, sous l impulsion de la Region, l ADEME, l Etat et la Communauté Urbaine de Lille ainsi que la CommunAupole Lens- Liévin. Dans les années 2000, la lutte contre le changement climatique a été inscrite comme politique régionale. En 2008 avec l ADEME, un appel à propositions a été lancée pour les Plans Climat Territoire. Un premier Plan Climat régional a vu le jour, transformée en dynamique Climat, à l initiative du conseil régional, de la branche régionale de l ADEME, la direction Regionale de l Environment, la direction de l habitat (DREAL), et les deux departments du Nord et du Pas-de- Calais. C est ce plan qui gère les priorités des projets énergétiques au sein du Programme Opérationnel Régional, 2007-2013. En 2012, lui a été ajouté l Observatoire régional du Climat. Aujourd hui plus de 85% de la population regionale du Nord-Pas-de-Calais est couverte par les plans climat territoriaux. Deux communes ont été plus particulièrement distinguées Loos-en-Gohelle (avec la création d un laboratoire du dévelopement durable), et Lambres-Lez-Douai (ville qui ambitionne de correspondre au plus près aux exigences inscrites dans le Grenelle de l Environnement). En 2012, la région a adopté 2 stratégies concernant le développement des renouvelables : le Schéma Régional pour le Climat, l Air et l Energie (SRCAE) avec la DREAL et la Section Climat du Schéma Régional pour l Aménagement et le Dévelopement Durable du Territoire (SRADDT). Cette même année 2012, le conseil régional et la ville de Dunkerque ont lancé le Pôle d Excellence Régional, 'Energie 2020', en référence directe à l engagement des 3x20, et avec pour mission la promotion et le soutien à l éolien, la biomasse, l éolien offshore et l hydrogène mais aussi

4 l efficacité énergétique (infrastructure et consommation). Enfin le 25 octobre 2013 a été lancé le programme intitulé la Troisième Révolution Industrielle, sous la direction de l économiste américain, Jeremy Rifkin. Il cherche à faire de la région Nord-Pas de Calais l un des pôles mondiaux de l efficacité énergétique. La région de Silésie La Silésie, deuxième région polonaise en terme de PIB, dispose d une très longue tradition industrielle et minière. Elle produit 20% de l électricité nationale et la plus grande partie de la production de l acier, du zinc, et autres métaux ferreux. 100 000 individus travaillent directement dans les mines qui relèvent de 3 companies et 300 000 autres indirectement. Cependant, les renouvelables ne représentent que 5% du mix et la seule stratégie de la Présidence du Conseil Régional concerne l épuration de l air. Les principes d une économie bas carbonne ne font pas partie du registre régional. La région n entend pas dévier de son profil industriel historique, quels que soient les fonds qu elle reçoit en quantité 1. de l UE pour 60 millions d (programme régional) 2. du fond de la protection de l environnement qui soutient les projets privés. Une forte polarisation des intérêts oppose : 1. le secteur minier traditionnel adossé au puissant lobby sectoriel, à la chambre de commerce et à l Eglise catholique qui contrôlent l ensemble des leviers politiques régionaux, 2. le groupe de ceux qui ententent soutenir les renouvelables sur la base de la mise sur pied d initiatives très localisées. On les trouve principalement à l université (de technologie de Katowice). Ces initiatives portent sur l intervention directe auprès des PME, la création de centre de management, type incubateurs et autres parcs technologiques. Un euro-centrum a été créé avec pour objectif la mise à disposition des équipements de recherche et l organisation de sessions de formation. La ville de Bielsko-Biala et de la commune de Gierałtowice ont créé un conseil régional pour l énergie dont l ambition est de disséminer les expériences tirées à l échelle européenne. L exemple de Liverpool City Region Ce cas illustre la manière dont les acteurs locaux peuvent se saisir des opportunités qu offre une stratégie bas carbone pour développer une politique énergétique et industrielle basée sur les renouvelables. La stratégie bas carbone de la région de Liverpool repose sur un acteur clé, le Liverpool Entreprise Partnership (LEP). Il s agit d un organisme financé par le secteur privé pour développer et mettre en place une stratégie de développement économique et industrielle bas carbone. Il base son approche de la relance de l économie locale marquée par une profonde désindustrialisation sur le déploiement des énergies renouvelables sur le territoire et la mise en place de filières industrielles. Ces objectifs reposent sur des coopérations publiques-privées locales. Le grand atout de la région réside dans la mise en place de partenariats stratégiques et financiers entre les pouvoirs publics et le secteur privé. Tous deux sont représentés dans le conseil d administration du LEP et détermine ensemble les priorités. Ils sont également associés dans tous les projets structurants de la région. L élaboration commune d un projet de développement de l éolien en mer a conduit la Liverpool City Region à obtenir le statut de Centre d ingéniérie de recherche de l éolien offshore (CORE). Devenir un CORE permet à la région de développer une stratégie industrielle sur toute la chaîne de valeur du secteur éolien, redynamisant ainsi les activités navales et portuaires pour la fabrication, l assemblage et le transport des pièces des turbines éoliennes. Afin d attirer les entreprises du secteur éolien, la Liverpool City Region doit également anticiper la demande de main d œuvre. Une coopération entre les grandes entreprises locales, les universités et les pouvoirs publics a résulté en la création d un centre de formation qui vise à répondre aux besoins en compétences du secteur éolien offshore entre autres. Toujours grâce à cette coopération entre le secteur public, privé et académique, la région de Liverpool accueille depuis peu un centre de recherche dédié aux énergies renouvelables. Malgré ces succès, la mise en œuvre de cette politique industrielle bas carbone se heurte à de nombreux obstacles. Les premiers relèvent des procédures de planification longues et complexes. Les seconds renvoient aux évolutions constantes des politiques nationales en matière de soutien aux ENR. Le cumul des deux fait dépendre la réussite de la stratégie de la région de Liverpool de décisions que les acteurs locaux ne maîtrisent pas.

5 VI. Opinions publiques échiquiers politiques Il n existe aucune homogénéité entre les quatre pays en matière d appréciation des politiques. La Pologne et la France défendent d abord et avant tout leur propre ressource au motif qu elle s assimile à leur propre souveraineté nationale : charbon polonais et énergie nucléaire française. La Grande Bretagne fait valoir des arguments différents pour des positionnements à géométrie variable, mais qui au final cherchent toujours à privilégier les rapports marchands sans réduire pour autant le rôle du régulateur public. Seule l Allemagne s est engagée massivement dans sa transition énergétique mais sans que les conséquences soient pleinement assumées, notamment en matière de coût final. Le comportement de type «NIMBY» partout identifié témoigne de la profonde confusion aux dépens de l éolien à la fois valorisé énergétiquement mais dénoncé comme nuisible. C est en France où les conflits d usage sont les plus longs : 7 à 8 ans contre 2 à 3 ans dans les autres pays. En matière de positionnement partisan, on note que les partis de droite sont davantage attachés aux énergies fossiles (Grande Bretagne / France / Pologne) et que les partis de gauche et les Verts sont plutôt en faveur des renouvelables (Labour, le PS, le SPD). Conclusion. Trois constats. Incertitude. Coûts. Innovations citoyennes I. L incertitude des voies adoptées Ce qui ressort de l examen des nouvelles politiques de l énergie, c est davantage la poursuite d objectifs contradictoires où, à l engagement en faveur des renouvelables selon des degrés variables, viennent néanmoins s opposer 1. en France la poursuite du nucléaire 2. en Grande Bretagne, le lancement des forages pour les gaz de schiste et le soutien au nucléaire 3. en Allemagne l approfondissement de l exploitation du lignite. Seule la Pologne paraît assez cohérente dans son ferme refus de l abandon de l exploitation du charbon et sa forte réticence aux énergies renouvelables. A bien des égards, le développement des énergies renouvelables ne semble pas rimer avec la poursuite des objectifs climatiques II. Les pouvoirs publics se trouvent confrontés à des coûts croissants en matière énergétique. Jusqu à aujourd hui le prix des énergies traditionnelles est largement inférieur à celui des énergies renouvelables. Tant que les EnR ne sont pas matures et compétitives par rapport aux énergies fossiles ou autres, les prix doivent être soutenus par l intermédiaire des tarifs. Or ces tarifs, notamment en Grande Bretagne et en Allemagne, sont établis au dépens des consommateurs finals (ménages et entreprises) lorsque ces derniers n investissent pas eux-mêmes dans les EnR. Par ailleurs, plus une région développe les énergies renouvelables, plus s imposent les travaux sur les réseaux qui génèrent, à leur tour, des coûts croissants d accès au réseau, autant pour les entreprises que pour les ménages. Dans ces conditions, si l augmentation du montant des factures des consommateurs finals est nécessaire pour assurer la transition et les investissements nécessaires, elle fait toutefois craindre les impayés et la croissance de la précarité énergétique. A l opposé, diminuer le prix de l électricité et réduire la facture des ménages via la baisse des tarifs d achat découragerait l investissement, et risquerait de faire croître les émissions carbone. III. Innovations locales et citoyenneté Les innovations locales en matière d énergie renouvelables sont d autant plus importantes qu elles s inscrivent dans des gouvernances décentralisées. Aux 1,5 millions de citoyens allemands et aux 650 coopératives producteurs d énergie, s opposent quelques 1700 citoyens polonais et 50 coopératives britanniques. Les sources de financement sont ainsi démultipliées. Avec près de 100 milliards d euros investis, les citoyens allemands détiennent 47% de la capacité renouvelable installée, quand les énergéticiens, eux, n en disposent que de 12%. 42% des installations biomasse, 48% des installations photovoltaïques et 51% de l éolien terrestre sont aux mains de citoyens. On peut corréler ces données à celles qui traitent du soutien des populations aux politiques en faveur des énergies renouvelables : 82% des citoyens Allemands se déclarent en faveur de la transition énergétique, quand en Pologne, ce même montant de 80% de soutien populaire est identifiable, mais cette fois en faveur de la poursuite de l exploitation du charbon.

6 Pour Réservé Contre Le gouvern ement Tarif et augment ation de l électri cité Positionnements politiques en faveur ou opposés aux énergies renouvelables Grande Bretagne France Allemagne Pologne Le Labour, les libéraux démocrates, Les Verts, Partie du Les Verts, une partie du le Comité pour le Changement PS, opinion SPD, une partie de CDU Climatique ; le Comité pour publique (80%) l opinion publique l Energie et le Changement (82%) Climatique au sein du Parlement, les libéraux démocrates du ministère de l énergie et du changement climatique, l opinion publique (76%) Les conservateurs Le PS L aile de la CDU représentant l économie, une partie du SPD (soutien au charbon), les opérateurs de centrales conventionnelles L aile radicale des conservateurs, ceux du Ministère de l énergie et du changement climatique, le chancelier de l Echiquier, les lobbys énergéticiens Gouvernement Cameron, soutien aux renouvelables mais sans obligation de décarbonisation, 2012 en faveur du gaz de schiste. Accélération du progamme nucléaire en 2013 Le Comité du changement climatique estime que la facture d énergie augmentera de 100 par an pour financer la politique verte du gouvernement L UMP, Le PC, le lobby nucléaire Partie du PS, extrême droite Présidence Hollande, fossé entre déclaration vs action réservée Nucléaire 75% à 50% en 2025 33% dans les années a venir Le FDP, l industrie électro-intensive Gvt Merkel leader dans l UE, objectifs de 35% en 2020, 80% en 2050 Fin du nucléaire en 2022. La taxe sur le développement des ENR risque de dépasser les 7 cent/kwh si aucune initiative n est prise pour maintenir des prix abordables Le parti verts (mais pas représenté au parlement) Think tank (certaines enquêtes font état d un large soutien aux renouvelables) Partie minoritaire de la PO (gouvernemental) ainsi que du parti de la gauche démocratique et du parti paysan PSL, la population en faveur d une croissance des EnR mais attachée au charbon L échiquier politique en très grande majorité, la droite souverainiste le PIS, le lobby minier, 80% de la population Gvt Tusk, se limite aux engagements avec l UE, relance le charbon et le forage du gaz de schiste. Lancement de 2 centrales nucléaires en 2020 Si la Pologne s acquitte de ses quotas de CO2 le prix de l életricité devrait croître de 150% Energies renouvelables et Emplois Grande Bretagne Environ 110 000 emplois directs et 160 000 emplois indirects ont été créés dans le secteur des renouvelables, comprenant l électricité, la chaleur et le transport. Le secteur pourrait compter 400 000 emplois à l horizon de 2020. Selon l association qui représente les industriels de l énergie renouvelable, l énergie éolienne et les énergies marines comptabilisent déjà 18 465 emplois à plein temps direct et 15 908 emplois indirects. Allemagne On recense 377 800 emplois directs et indirects (381 600 en 2011) dont 117 900 dans le secteur de l éolien, 128 900 dans la biomasse et 100 500 dans le solaire qui a connu des suppressions d emplois drastiques, la branche solaire comptant 125 000 salariés en 2011. France. 125 000 emplois directs et indirects sont comptabilisés dans les secteurs de l énergie renouvelable et autant sont attendus si la part des ENR dans le mix s élevé 25% d ENR à l horizon 2020. L éolien qui comptait 10 000 emplois en 2012 (selon l Ademe) devrait en disposer de 57 000 en 2020. Si la part du nucléaire passe de 75% à 50%, cela entraînera la perte de 250 000 emplois, dont 45 000 directs, 100 000 indirects et induits, 100 000 potentiels liés à l export, selon une Etude de Pwc conduite en 2011 pour Areva. Pologne. 30 000 à 40 000 emplois supposés en 2020

7 Structure des sources d énergie dans la production d électricité Grande Bretagne dernier France Allemagne Pologne semestre 2012 Eolien 5.2% 13% 7.3% 1,3 Biomasse 1.09% 46% 5.8% 95,7% Solaire 0.3% 10% 4.6% - Autres* 4.71% 4.2% - Production EnR 11.3% 14% 21.9% 8% 2012** Charbon 39% - 19.1% pour la houille, 25.6% 92% pour le lignite Nucléaire 19% 75% 16% - (2020) Gaz 28% 21 11.3% Projection EnR en 2020 15% 23% 35% 15% * Autres : inclut les autres sources ENR (hydraulique, géothermie etc.) ; ** Les données EnR sont en grandeur relatives aux EnR ; Les données Charbon / nucléaire / gaz en grandeur relative au total de la production électricité.