Sommaire Depuis 2005, les phénomènes météorologiques et climatologiques extrêmes représentent de 85 % à 90 % des catastrophes naturelles à l origine des demandes d indemnité pour dommages matériels ou corporels (Munich Re (2012)). Motivé par des données qui prouvent que ces phénomènes et les tendances climatiques à long terme sont la cause de la récente hausse des dommages, le présent rapport fait une synthèse des dernières données recueillies par les chercheurs sur les changements climatiques. Cet effort a pour but d informer aussi bien le milieu des actuaires, des chefs d entreprises que le grand public de l importance des preuves scientifiques concernant le climat terrestre et les changements qu il subit. Des chercheurs étudient le système climatique terrestre, lequel englobe la totalité de l atmosphère, la surface terrestre et les océans, et ils ont acquis des connaissances sophistiquées leur permettant de comprendre le fonctionnement de ce système et ses variations au cours de diverses périodes. Au cours des dernières décennies, de 97 % à 98 % de ces chercheurs 1 ont constaté l existence d autres changements, tant à l échelle régionale que mondiale, qui dépassent ce à quoi l on s attendait sur la base de la seule variabilité climatique naturelle. Dans le cas de la température de l air en surface, ce phénomène est désormais connu sous le nom de réchauffement climatique, mais des changements directionnels similaires ont été mesurés dans le cas de nombreuses autres variables climatiques, dont la température des océans, le niveau des mers, les précipitations, l étendue et l épaisseur de la banquise et l humidité des sols. Les principaux changements qui suivent sont une synthèse d un grand corpus de données à long terme qui ont été extraites de publications scientifiques évaluées par un comité de lecture : Les températures moyennes mondiales à la surface ont augmenté de trois quarts de degré Celsius (1,3 o F) au cours des 100 dernières années (1906-2005). De plus, le rythme du réchauffement au cours des 50 dernières années est presque le double de celui enregistré au cours des 100 dernières années. Les 16 années les plus chaudes jamais enregistrées ont eu lieu au cours de la période de 17 ans comprise entre 1995 et 2011. Les régions terrestres se réchauffent à un rythme plus rapide que celui des océans, ce qui est compatible avec le plus faible taux d absorption de la chaleur par les océans. 1 Anderegg et coll. (2010) ont étudié une base de données de 1 372 scientifiques du climat. Cet examen a révélé que i) 97 % à 98 % des chercheurs étaient d accord avec la constatation figurant dans le quatrième Rapport d évaluation du Groupe d experts intergouvernemental sur l évolution du climat (GIEC) à l effet que la majeure partie du réchauffement observé pendant la dernière partie du 20 e siècle était attribuable aux activités humaines; ii) les chercheurs en désaccord avec cette notion affichaient une expertise et une importance considérablement moindres comme en font foi le nombre total de leurs publications sur le climat et les fois où ces publications ont été citées par d autres chercheurs.
Les températures arctiques moyennes ont augmenté selon un taux qui est presque le double du taux moyen mondial au cours des 100 dernières années. L épaisseur et l étendue de la couverture neigeuse de l hémisphère Nord et de la banquise arctique ont diminué de façon constante au cours des 30 dernières années, en raison de ce réchauffement polaire. La dernière décennie (2002 2011) a vu l étendue minimale annuelle de la banquise arctique atteindre ses neuf valeurs les plus basses jamais enregistrées, et l année 2012 enregistre à ce jour des niveaux sans précédent. La superficie des glaciers diminue mondialement depuis 1960, de même que l épaisseur de la vaste calotte glaciaire du Groenland et de l Antarctique pendant ces deux dernières décennies. Le niveau moyen mondial de la mer a augmenté à un taux d environ 3 mm (1/8 de pouce) par an au cours des deux dernières décennies. Près de la moitié de cette hausse s explique par l expansion du volume de l eau sous l effet du réchauffement, tandis que l autre moitié est le fait de la fonte des glaces terrestres. À l échelle régionale, l évolution des variables climatiques peut être très supérieure ou très inférieure à la moyenne mondiale. En voici deux exemples qui concernent l élévation du niveau de la mer : 1) dans le sud-ouest de l océan Pacifique, où habitent de nombreuses communautés insulaires, le rythme de l élévation du niveau de la mer atteint presque quatre fois la valeur moyenne mondiale; 2) les élévations du niveau de la mer enregistrées par les deux tiers des stations de mesure situées le long des côtes des États-Unis ont doublé le risque annuel d une inondation que l on considérait comme ne pouvant survenir qu une fois ou moins tous les cent ans. Des preuves formelles confirment les effets du grand réchauffement régional sur les écosystèmes, comme en font foi, par exemple, la précocité du mûrissement des fruits et de la feuillaison et le fait que les oiseaux et insectes migrent vers les pôles. Au cours des cinq dernières décennies, le nombre de nuits anormalement chaudes a augmenté et le nombre de nuits froides a baissé dans la plupart des endroits terrestres. De plus, la fraction de la surface terrestre mondiale qui enregistre des températures estivales extrêmement chaudes a presque décuplé au cours de la même période. On a observé une hausse significative de la fréquence des fortes précipitations dans la majorité des endroits où des données sont recueillies, et plus particulièrement dans la moitié est de l Amérique du Nord et de l Europe du Nord, où l on enregistre des données depuis fort longtemps. Les experts du climat expliquent le phénomène du réchauffement climatique en s appuyant sur des principes scientifiques liés à l équilibre thermique de la Terre et aux quantités connues de gaz à effet de serre dans l atmosphère, ce qui leur a permis d effectuer des simulations indépendantes de ces caractéristiques au moyen de modèles informatiques complexes du système climatique et à partir des émissions de gaz industrielles observées. Ces modèles ont pu reproduire les caractéristiques observées du changement climatique historique dont il est question plus haut. Cette réussite a motivé l étude des états possibles du système climatique à l aide des mêmes modèles qui s appuyaient sur les divers
scénarios d émissions industrielles et sur des hypothèses socioéconomiques telles que la population, les politiques économiques et les progrès technologiques. D une façon générale, les modèles climatiques mondiaux prévoient la continuation des tendances historiques susmentionnées des variables climatiques, dont les suivantes : Une hausse des températures à la surface terrestre supérieure à celle à la surface des océans, de même que dans les régions polaires par comparaison avec les basses latitudes. La continuation ou l accélération de la fonte des glaces et de la couverture neigeuse au-dessus des océans et des terres. Une intensification générale du cycle hydrologique qui donnera lieu à une hausse des précipitations aux latitudes moyennes et hautes, et à une baisse aux basses latitudes. Une augmentation du nombre de journées extrêmement chaudes aux quatre coins du globe, ainsi que de la fréquence des sécheresses dans les régions normalement sèches et de la fréquence de la pluviosité ou inondations extrêmes dans les régions normalement humides. Une légère diminution de la fréquence des cyclones tropicaux, mais une augmentation de leur intensité moyenne et de leur potentiel destructeur. Les répercussions de ces changements climatiques rapides et divers sur les populations humaines, sur leurs structures économiques et sociétales et sur les écosystèmes dont elles dépendent suscitent des craintes, et plusieurs exemples de ces conséquences sont explicités en détail dans le rapport. Par ailleurs, on perçoit la nécessité de quantifier le risque que posent les changements climatiques pour la santé humaine et le capital, qui est le domaine de prédilection des assureurs et des actuaires. Il est possible de formuler des représentations simplifiées de l évolution de nombreuses variables climatiques en s appuyant sur les données observées au cours du dernier siècle. C est ce que l on appelle les indices climatiques. Le rapport donne de nombreux exemples de ces indices, et il en tire les principales conclusions suivantes : Il est possible de construire plusieurs indices à l aide des données observées ou des projections des modèles, qui tiennent dûment compte des changements de la variable ou des variables climatiques s y rapportant. Il est possible de formuler un indice composite à partir de données sur de nombreuses variables climatiques individuelles et normalisées, qui répondrait à la fois aux besoins des actuaires et à ceux du grand public. Cet indice a été désigné sous le nom d Indice actuariel des changements climatiques MC (IACC MC ). Cet indice pourrait être porteur d information sur l occurrence de phénomènes climatiques extrêmes, ainsi que sur les variations progressives des quantités moyennes. On pourrait calculer l indice pour des régions particulières d intérêt, à condition que des données de qualité soient disponibles en nombre suffisant.
Enfin, en intégrant des données socioéconomiques, l IACC pourrait servir de base à un indice plus ciblé qui tiendrait compte des risques que posent les changements climatiques pour les populations et le capital (désigné sous le nom d Indice actuariel des risques climatiques MC (IARC MC ).