C.M.R. et Produits de substitution



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Transcription:

Journées Nationales de Santé au Travail dans le BTP, Annales 28:105-109 C.M.R. et Produits de substitution Jean-Pierre Baud, D Payen, FX Thomas Résumé Le premier des principes généraux de prévention édictés par la Loi du 31 Décembre 1991 consiste à éviter le risque. De même, ce texte, ainsi que le décret du 1er Février 2001 (article R 231-56-2) précisent que «l employeur est tenu de réduire l utilisation d un agent C.M.R. en le supprimant ou en le remplaçant, dans la mesure où cela est techniquement possible, par une substance, une préparation ou un procédé qui n est pas dangereux ou est moins dangereux pour la santé ou la sécurité des travailleurs». Cette étude a pour but de montrer l application de ces dispositions à travers dix exemples concrets rencontrés dans le B.T.P. Le remplacement des agents C.M.R. doit constituer un axe prioritaire en matière de prévention des risques professionnels. Grâce aux progrès industriels, des produits C.M.R. avérés ont pu être avantageusement remplacés, sur le plan technique, par des procédés, des substances ou des préparations moins dangereux pour la santé et la sécurité des travailleurs. Malgré tout, il importe de rester vigilant car ces nouveaux matériaux de substitution ne sont pas toujours dénués de toxicité et certaines études épidémiologiques en cours ne disposent pas encore de recul suffisant pour affirmer leur innocuité. En milieu professionnel, le préalable à toute action de prévention consiste à repérer et évaluer les risques pour la santé et la sécurité des travailleurs. En matière d exposition à des produits cancérogènes, mutagènes ou toxiques pour la reproduction (C.M.R.), ce principe n échappe pas à la règle. I. Comment détecter les produits C.M.R.? 1. Les dispositions du Décret du 1er février 2001 L application de ce texte concerne toute substance ou préparation dont l étiquette comporte : * le pictogramme "toxique". * des phrases explicitant le caractère : cancérogène :. R 45/ peut causer le cancer.. R 49/ peut causer le cancer par inhalation. mutagène :. R 46/ peut causer des altérations génétiques héréditaires. toxique pour la reproduction :. R 60/ peut altérer la fertilité.. R 61/ risques pendant la grossesse d effets néfastes pour l enfant. Ces produits sont classés en catégorie 1 et 2 de la réglementation de l Union Européenne. Cependant des agents C.M.R. peuvent être présents en faible quantité dans des préparations sans pour autant que l étiquetage final le mentionne : ces préparations ne sont, alors, pas concernées par le Décret du 1er Février 2001. Exemple : une préparation contenant au moins 0,5% d éthylglycol comporte le pictogramme "toxique" et les phrases de risques : R 60 et R 61, ce qui ne sera pas le cas d une préparation contenant moins de 0,5% d éthylglycol. 2. L Arrêté du 18 Septembre 2000 complétant l Arrêté du 5 Janvier 1993 Cet arrêté liste certaines substances, préparations et procédés cancérogènes, dont certains concernent le B.T.P. comme les travaux exposant aux hydrocarbures aromatiques polycycliques : suies, goudrons, fumées et ceux exposant aux poussières de bois inhalables. 3. Les cancérogènes non classés par l Union Européenne Il s agit du cas, par exemple, de la silice cristalline classée comme cancérogène du groupe 1 par le Centre International de Recherche sur le Cancer (C.I.R.C.) depuis le 1er Janvier 1997. Adresse de correspondance et demande de tirés-à-part Dr. Jean-Pierre Baud Médecin Conseil O.P.P.B.T.P. CR Centre-Est 2, place Gailleton 69002 Lyon Tel : 04.78.37.36.02 / Fax :04.78.37.69.23 E.mail <baud@apasmtbtp.fr>

Par ailleurs, la dernière modification du tableau n 25 des maladies professionnelles du régime général, le 28 Mars 2003, reconnaît le cancer broncho-pulmonaire primitif comme manifestation pathologique associée à des signes radiologiques ou des lésions de nature silicotique. II. Principes généraux de prévention Le premier des principes généraux de prévention édictés par la Loi du 31 Décembre 1991 consiste à éviter le risque. De même, ce texte, ainsi que les décrets du 1er Février 2001 (article R 231-56- 2) et du 23 Décembre 2003 sur la prévention du risque chimique (article R 231-54-6) précisent que "l employeur est tenu de réduire l utilisation d un agent C.M.R. (ou d un agent chimique dangereux) en le supprimant ou en le remplaçant, dans la mesure où cela est techniquement possible, par une substance, une préparation ou un procédé qui n est pas dangereux ou est moins dangereux pour la santé ou la sécurité des travailleurs ". Donc, face à des produits C.M.R., deux questions à se poser : - sont-ils indispensables, c'est-à-dire existe t il une alternative technologique? - sont-ils substituables? III. Substition des agents C.M.R. 1. L amiante Le décret du 24 Décembre 1996 a fixé l interdiction totale de l importation et de la mise sur le marché français de tout produit contenant de l amiante depuis le 1er Janvier 1997. Ces dispositions ont été étendues au niveau européen depuis le 1er Janvier 2005 ( à l exception des membranes d électrolyse), par la directive du 26 Juillet 1999. 1.1. Les technologies alternatives a) Remplacement de l amiante-ciment par : - des canalisations en fonte ou en P.V.C. - des tuiles ou des tôles ondulées galvanisées en couverture. - des plaques en aluminium peintes. b) Remplacement des dalles en vinyle-amiante par : - du carrelage. - des revêtements de sol. 1.2. Les matériaux de substitution a) Matériaux non fibreux : - enduits, coquilles en plâtre chargé de vermiculite, mica. - panneaux, coquilles de silicates divers. - charges silico-calcaires, argiles. b) Matériaux fibreux : - fibres végétales : cellulose - fibres artificielles organiques en mélange avec le ciment : polypropylène, alcool polyvinylique, aramides - fibres minérales artificielles : laine de verre, de roche ; fibres céramiques réfractaires pour l isolation thermique industrielle à des températures dépassant 1200 C. 2. Les fibres céramiques réfractaires Elles sont commercialisées depuis les années 1950. Ce sont des fibres de silicate d aluminium utilisées dans l isolation thermique industrielle pour des applications pouvant atteindre 1450 C. Elles sont classées par la directive européenne 97/69/CE du 5 Décembre 1997 cancérogènes de catégorie 2, c'est-à-dire «substances devant être assimilées à des substances cancérogènes pour l homme». Cette directive a été transposée en droit français par l arrêté du 28 Août 1998. L étiquetage des fibres céramiques réfractaires et des préparations en contenant plus de 0,1% en poids comporte le pictogramme «toxique» et la phrase de risque R 49 : «peut causer le cancer par inhalation». Il existe actuellement sur le marché des fibres de verre pour isolation haute température pouvant résister à des températures de l ordre de 1050 C voire 1250 C. Ces fibres, dites fibres de verre aux oxydes contiennent une proportion plus importante d oxydes alcalins et alcalinoterreux (Na20, K2O, CaO, MgO, Ba0 ) leur conférant une solubilité plus importante, donc une faible biopersistance dans les milieux biologiques, notamment dans le poumon. Elle sont néanmoins classées cancérogènes de catégorie 3 : "substances préoccupantes pour l homme en raison d effets cancérogènes possibles ". Selon les professionnels, elles présentent l inconvénient de se sublimer à l eau. 3. Les peintures Ce sont des mélanges complexes comportant dix à quinze constituants, dont chacun à une fonction, une originalité et des risques propres. 3.1. Les pigments Ils donnent aux peintures leur teinte. a) Les peintures industrielles (structures métalliques, tuyauteries ) : les pigments jaune, orangé, rouge et vert peuvent contenir du chromate de plomb, toxique pour la reproduction de catégorie 1.

La substitution est possible, mais au cas par cas : - tons vifs (rouge, jaune orangé) : pigments organiques mais ceux-ci sont moins couvrants et jusqu à trois fois plus chers. - tons clairs (sable, brique ) : pigments minéraux non toxiques (dioxyde de titane, oxydes de fer ) mais également plus onéreux (+ 20%). b) Les peintures bâtiment (béton, pierre, bois ) : la substitution du chromate de plomb a déjà été effectuée par les principaux fabricants avec des pigments minéraux (dioxyde de titane, oxydes de fer, de zinc ou de chrome III) et des pigments organiques (dérivés de la phtalocyanine et du pérylène, noir de carbone ). Cependant, une attention particulière doit être portée vers les «petits» formulateurs qui peuvent fabriquer des pigments verts en mélangeant du jaune (chromate de plomb) et du bleu, alors que les teintes vertes peuvent être obtenues avec de l oxyde de chrome III. 3.2. Les composés anti-corrosion - Orangé de molybdène : toxique pour la reproduction (R 61). - Minium de plomb (ou tétra-oxyde de plomb) : également toxique pour la reproduction (R 61). Cet anti-corrosion est pratiquement abandonné depuis les années 70. Il a d'abord été remplacé par des produits contenant du chromate de zinc (mais classé comme cancérogène de catégorie 1) puis de strontium (cancérogène de catégorie 2). La substitution par du phosphate de zinc ou d aluminium est possible avec un coût supérieur de 10 à 20%. 3.3. Les solvants Les éthers de glycol sont utilisés comme cosolvants dans les peintures en phase aqueuse. Depuis 1993, on constate la suppression pratiquement totale des éthers de glycol visés par le décret du 1er Février 2001 : éthylglycol, méthylglycol et leurs acétates (toxiques pour la reproduction de catégorie 2). La substitution se fait habituellement par d autres dérivés de l éthylène glycol, chimiquement plus proches, comme le butyldiglycol et le butylglycol ou des dérivés du propylène glycol. Le coût est sensiblement identique. 4. Les dégraissants Le trichloréthylène est utilisé pour le dégraissage et le nettoyage des pièces métalliques. Il est classé depuis Juillet 2002 (directive européenne 2001/59/CE du 6 Août 2001 transposée en droit français) comme cancérogène de catégorie 2. Parmi les produits de remplacement, on peut citer : - les solvants pétroliers non inflammables (point d éclair > 55 C). - les mélanges d esters synthétiques et d agents tensio-actifs. - les solvants "verts " biodégradables. 5. Les produits de traitement réducteur des chaudières L hydrazine entre dans la composition de réactifs liquides destinés à la protection des chaudières et des réseaux de vapeurs contre la corrosion par réduction de l oxygène dissous dans les circuits et passivation des surfaces métalliques. Ces préparations sont étiquetées avec le pictogramme toxique et la phrase de risque R 45 (car l hydrazine est classée par l Union Européenne comme cancérogène de catégorie 2). Des études expérimentales menées chez la souris et le rat, par inhalation ou gavage d hydrazine, ont montré un accroissement significatif et dosedépendant de tumeurs pulmonaires et nasales. Les données humaines, quant à elles, ne permettent pas de se prononcer sur un éventuel effet cancérogène de l hydrazine. Cependant, l utilisation de produits de substitution à base d hydroxydes alcalins (hydroxyde de potassium notamment) a été adoptée sur de très nombreux sites. 6. Les produits de traitement des bois 6.1. Les lasures Elles sont employées pour protéger et teindre les bois. Elles contiennent parfois des produits visés par le décret du 1er Février 2001 (fongicides, bactéricides) mais toujours à des concentrations inférieures aux limites réglementaires d étiquetage. 6.2. Les fongicides Le C.C.A. est une association de sels hydrosolubles de chrome, de cuivre et d arsenic : anhydride chromique (cancérogène de catégorie 1), oxyde cuivreux et trioxyde ou pentoxyde d arsenic (cancérogènes de catégorie 1). Ce fongicide est destiné au traitement des bois extérieurs : poteaux, chalets, mobilier de jardin, bacs à sable, jeux d enfants Ils devrait être

prochainement interdit dans ces deux dernières applications. La substitution est possible avec des préparations associant des composés minéraux du cuivre (hydroxycarbonate cuivrique) et des ammoniums quaternaires (chlorure de benzalkonium), Il est à noter que l I.N.R.S. a montré que le risque cancérogène lié au chrome et à l arsenic était négligeable en cas d usinage des bois traités par le C.C.A. 6.3. La créosote Elle se présente sous la forme d un liquide brunnoir, huileux, obtenu par distillation fractionnée des goudrons de houille et est utilisée comme xylo-protecteur et imperméabilisant pour les traverses de rail et les poteaux électriques en bois. La créosote est un mélange complexe d hydrocarbures aromatiques polycycliques (H.A.P.) et de composés phénoliques. Elle est classée comme cancérogène de catégorie 2. Son emploi a été limité par l Union Européenne dans la directive 2001/90/CE du 26 Octobre 2001 transposée en France par l arrêté du 2 Juin 2003. Elle peut être utilisée dans les installations industrielles ou par des professionnels lors du traitement curatif in situ à condition que la teneur en benzo(a)pyrène soit inférieure à 0,005% en poids et que celle en phénols extractible par l eau soit inférieure à 3% en poids. Le remplacement du bois par du béton (poteaux, traverses de rail du réseau T.G.V.) limite désormais son utilisation. 7. Les produits noirs 7.1. Le goudron Il est obtenu par distillation de matières volatiles recueillies au cours de la pyrolyse de la houille. Il est classé, par l Union Européenne, comme cancérogène de catégorie 1. Ce matériau est très riche en H.A.P. ; la teneur en benzo(a)pyrène (cancérogène, mutagène et toxique pour la reproduction de catégorie 2) peut atteindre notamment jusqu à 5g / kg. Des concentrations atmosphériques en benzo(a)pyrène de l ordre de 1 à 5 µg / m3 ont été retrouvées lors de la mise en œuvre à chaud d enrobés à base de goudron (valeur limite recommandée par la C.N.A.M. : 0,15 µg / m3). Le goudron a cependant été abandonné, depuis le début des années 50, comme liant de revêtement routier. Des produits composés (bitume : 60% + goudron : 40%) ont été utilisés, jusque dans les années 80, pour réaliser des revêtements anti-kérosène pour les pistes d aéroport, les stations services et les dépôts d hydrocarbures. Ils ont été remplacés par des structures béton puis par des bitumes anti-kérosène sans goudron. 7.2. Le bitume Obtenu par distillation fractionnée du pétrole, il a remplacé le goudron comme liant de revêtement routier (3,3 millions de tonnes par an en France). Il n est pas classé par l Union Européenne et inscrit dans le groupe 3 par le C.I.R.C. (inclassable quant à leur cancérogénicité pour l homme). La teneur en benzo(a)pyrène est faible (< 2 mg / kg) et plusieurs études récentes ont montré de faibles teneurs atmosphériques lors de l application manuelle ou mécanisée d enrobés (< 0,010 µg / m3). Actuellement des essais sont effectués avec des enrobés verts sur des chantiers de voirie. Ils sont fabriqués avec des liants utilisant uniquement des matières premières renouvelables d origine agricole. Ces enrobés, mis en œuvre avec des moyens traditionnels (finisseur et compacteur) sont appliqués à plus basse température (entre 110 et 130 ). Ils auraient, par ailleurs, des propriétés mécaniques améliorées par rapport à celles des enrobés à base de bitume : plus grande résistance à l orniérage et à l action des hydrocarbures. Le bitume fluxé est un bitume amolli par l ajout d huile de fluxage de faible volatilité pour la réalisation d enduits superficiels ou d enrobés à froid. Autrefois, ces bitumes fluxés étaient obtenus avec des huiles de houille (11 à 12%) riches en H.A.P. (teneur en benzo(a)pyrène > 100 mg / kg). Actuellement, les huiles de fluxage sont d origine pétrolière et on assiste aussi au développement des huiles végétales (colza). Par ailleurs, les bitumes fluxés sont le plus souvent remplacés par des émulsions de bitume appliquées à des températures plus basses. 8. Les huiles de décoffrage du béton Elle étaient, autrefois, fabriquées à partir d huiles industrielles peu coûteuses, avec des concentrations très importantes en H.A.P., notamment lors d utilisation d huiles usagées ou recyclées. Actuellement, les fabricants proposent des huiles minérales de synthèse avec ou sans solvant hydrocarboné (très faible teneur en H.A.P.), des cires liquides de démoulage et des huiles végétales sans solvant.

9. Les sables abrasifs Un décret du 6 Juin 1969 a interdit l utilisation de sable contenant plus de 5% en poids de silice libre cristalline pour les travaux de décapage à sec en cabine ou à l air libre. De ce fait, des abrasifs de remplacement du sable siliceux ont fait leur apparition : - des laitiers de haut fourneau (fonte), de la métallurgie du zinc et du plomb ou du cuivre. - des résidus de la fabrication du phosphore. - des produits minéraux. 10. Le ciment Le chrome VI (hexavalent), classé comme cancérogène de catégorie 2 est présent dans le ciment sous forme d impuretés (quelques p.p.m. à quelques dizaines de p.p.m.) ; il n existe cependant aucun lien documenté entre exposition au ciment et excès de cancer cutané. La directive européenne 2003 / 53 / CE du 18 Juin 2003 interdit la mise sur le marché et l utilisation de ciment dont la teneur en chrome VI est supérieure à 0,0002% du poids sec depuis le 17 Juin 2005. Dans certains pays ( Allemagne, Danemark, Finlande, Suède) la diminution du chrome VI est déjà obtenue par adjonction de sulfate ferreux lors du broyage entre le clinker et le gypse permettant ainsi de réduire le chrome VI soluble en chrome III insoluble. IV. Conclusion Le remplacement des agents C.M.R. doit constituer un axe prioritaire en matière de prévention des risques professionnels. Grâce aux progrès industriels, des produits C.M.R. avérés ont pu être avantageusement remplacés, sur le plan technique, par des procédés, des substances ou des préparations moins dangereux pour la santé et la sécurité des travailleurs. Malgré tout, il importe de rester vigilant car ces nouveaux matériaux de substitution ne sont pas toujours dénués de toxicité et certaines études épidémiologiques en cours ne disposent pas encore de recul suffisant pour affirmer leur innocuité.