Taxation on fossil fuels in Europe



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Transcription:

Taxation on fossil fuels in Europe A French case study Nicolas Lecaussin D I S C U S S I O N P A P E R M A Y 2 0 1 4

Taxation on fossil fuels in Europe: a French case study New Direction discussion papers are designed to encourage debate on public policy in a European context. They do not reflect the views of New Direction or its members. New Direction receives funding from the European Parliament and is also required to raise a proportion of its funds from additional sources. The views expressed in this publication do not necessarily reflect those of the European Parliament. May 2014 Printed in Belgium ISBN: 978-2-87555-079-8 Publisher and copyright holder: New Direction Foundation Rue d'arlon 40, 1000 Brussels, Belgium Phone: +32 2 808 7847 Email: contact@newdirectionfoundation.org www.newdirectionfoundation.org 1

Les énergies fossiles sont bien plus taxées et bien moins subventionnées que les énergies renouvelables 1 Contrairement aux mythes relayés par de nombreux responsables politiques et par une partie des médias, les énergies fossiles ne bénéficient pas de plus d avantages que les énergies renouvelables. Bien au contraire. Il n y a pas de subvention directe à l industrie des énergies fossiles mais des déductions fiscales qui s élèvent à (environ) 2.6 Mds d euros (2011). En même temps, la fiscalité sur les énergies fossiles rapporte, en net, près de 34 Mds d euros, 13 fois plus que les déductions d impôts dont bénéficie l industrie des énergies fossiles. Le prix de vente de l énergie renouvelable est largement inférieur à son coût de production. Le coût de production de l électricité photovoltaïque par exemple est au moins 5 fois plus élevé que celui de l électricité nucléaire. Il s agit d une subvention déguisée. La dépense totale (subventions directes et allègements fiscaux) en faveur des énergies renouvelables s élève à plus de 5 milliards par an. 1 Etude réalisée en collaboration avec P&J Conseil, cabinet d analyse économique appliquée. 2

Au cours des deux dernières années, plusieurs rapports publiés par des organisations internationales 2 ont pointé du doigt les subventions accordées par l ensemble des Etats du monde aux industries exploitant des énergies fossiles et plus particulièrement du pétrole. Rapidement, on a pu lire dans la presse de gros titres tels que «Ces milliards de subventions aux énergies fossiles» 3, «409 milliards de subventions annuelles pour les énergies fossiles» 4 et des dossiers complets sur le sujet 5 ont dressé un état des lieux de la situation mondiale plus que sévère. Ainsi, en 2013, près de 500 milliards de dollars de subventions auraient été accordés aux producteurs d énergies fossiles, soit 5 fois plus qu aux énergies renouvelables. Présentés de la sorte, les chiffres semblent indiquer que la fiscalité dans son ensemble va, toujours et partout dans le monde, dans le sens de l industrie fossile et de son avatar, l industrie pétrolière. Pourtant, en relisant les rapports publiés par l OCDE et l IEA, on découvre une situation bien plus nuancée. Certes, les énergies fossiles sont «aidées», mais pas subventionnées comme on peut le lire. Peut-être s agit-il d une simple erreur de formulation mais celle-ci a un impact très important lorsque l objectif est de faire apparaître aux yeux des contribuables les coûts relatifs des énergies fossiles et renouvelables. D où vient l ambiguïté? Dès les premières pages des rapports, il est précisé que la méthodologie utilisée considère les exonérations d impôts comme une subvention directe. Aussi, à moins de considérer que ce qu une baisse des recettes fiscales est immédiatement une dépense publique, les résultats annoncés doivent être nuancés, car comme nous allons le voir, la majorité des 500 milliards de dollars de «subventions» sont en réalité des réductions d impôts. Plus important encore ; ces 500 milliards de dollars représentent un chiffre mondial, et le rapport de l OCDE précise clairement que la quasi-totalité de cette somme est le fruit des pays émergents, principalement l Inde, la Chine, le Brésil et la Russie. Ainsi, une première conclusion doit-elle être tirée : les énergies fossiles n entraînent sûrement pas de telles dépenses publiques, et sûrement pas en France. Cela dit, pour s en assurer, il est nécessaire d entrer dans le détail de ces taxes et subventions 1. Les subventions aux énergies fossiles en France Les subventions aux industries fossiles ont été fortement modifiées au cours des années 2000. Jusqu en 2004, la production de charbon a été directement subventionnée, par l intermédiaire 2 OECD (2013), Inventory of Estimated Budgetary Support and Tax Expenditures for Fossil Fuels 2013, OECD Publishing. Et, IEA (2013), World Energy Outlook, IEA Publishing. 3 Article du Monde, du 20/01/2012. http://ecologie.blog.lemonde.fr/2012/01/20/ces-milliards-de-subventions-auxenergies-fossiles/ 4 Goodplanet magazine, du 4/10/2013. http://www.goodplanet.info/photo/2013/10/04/409-milliards-subventionsannuelles-les-energies-fossiles/ 5 Alternatives économiques, Hors-série n 094, octobre 2012. «Subventions annuelles accordées aux énergies fossiles dans le monde, en 2009, 2010 et 2012, en milliards de dollars». 3

notamment des Charbonnages de France. Néanmoins, la dernière mine de charbon a fermé en 2006, et les Charbonnages de France ont été liquidés la même année. 6 D autre part, les exonérations fiscales ont été réduites au cours de la même période. Les «provisions pour reconstitution des gisements» qui autorisaient les compagnies pétrolières et gazières à déduire un pourcentage fixe de leurs revenus et de leur base imposable à condition de réinvestir ce montant en exploration ont cessé en 2010. Aujourd hui, deux mesures principales demeurent en vigueur : l exemption d impôts indirects pour les producteurs de gaz naturel et l exemption d impôts indirects pour les raffineries. Ces deux mesures exonèrent d impôts sur les énergies fossiles utilisées dans le processus de production. Néanmoins, comme le précise le rapport de l OCDE, ces deux mesures sont si faibles qu elles peuvent être considérées comme non significatives dans le calcul des dépenses publiques de soutien à l industrie des énergies fossiles. Côté consommation, l OCDE identifie 7 mesures principales de soutien à l industrie «fossile» : i) la prime à la cuve, stoppée en 2009, ii) l aide aux stations essences en zones rurales, iii) l exonération de TVA sur les produits pétroliers offshore (DOM-TOM), iv) la réduction de TVA sur les produits pétroliers en Corse, v) la réduction de taxe sur le fuel utilisé comme fuel diesel dans les secteurs de la construction et de l agriculture, vi) la réduction de taxe sur le gaz naturel utilisé comme fuel dans le transport, vii) la réduction d impôts indirects sur les carburants de type GPL. Ce premier aperçu met en évidence l absence totale de subvention directe à l industrie des énergies fossiles. Certes, des mesures de soutien existent, mais elles prennent toutes la forme de réduction d impôts, ce qui signifie qu il n y a pas de dépenses publiques à proprement parler. Au total, le soutien sous forme d exonération ou de réduction d impôt s élève à 2,632 milliards d euros en 2011. La somme peut paraître élevée, mais elle est bien loin des 500 milliards de dollars annoncés par les médias. De plus, ces exonérations sont à mettre en perspective avec les recettes publiques issues des taxes sur ces mêmes produits. En effet, en 2011, les recettes fiscales sur les produits pétroliers se sont élevées à 19,938 milliards d euros. 7 En conséquences, les déductions fiscales ne peuvent être considérées comme de réelles dépenses publiques puisque leur montant s avère très faible comparativement aux recettes fiscales sur ces mêmes secteurs. Loin d être des subventions directes, ces exemptions doivent donc être comprises, tout au plus, comme un manque à gagner fiscal. Tableau 1. Soutien au Charbon (millions euros) Soutien à la production 2007 2011 6 OECD (2013). 7 UNEP (2013), Energy Subsidies : Lessons Learned in Assessing their Impact and Designing Policy Reports, UNEP Publishing. 4

Contribution aux CdF 2880 - Soutien à l investissement 32 - Soutien à la consommation Exemption d impôts indirects (biomasse) - 3 Total 2912 3 Source : OECD (2013) Tableau 2. Soutien au pétrole (fuel fossile) 2007 2011 Soutien à la production Déduction pour exploration 11 - Exemption d impôts indirects (raffineries) 95 100 Soutien à la consommation Réductions TVA, réductions fiscales 2108 2256 sectorielles Total 2214 2356 Source : OECD (2013) Tableau 3. Soutien au gaz naturel 2007 2011 Soutien à la production Déduction partielle pour exploration 9 - Exemption d impôts indirects 0 2 (producteurs) Exemption d impôts indirects (raffineries) 6 5 Soutien à la consommation Exemption d impôts indirects 7 266 Total 22 273 Source : OECD (2013) 2. Fiscalité environnementale et subventions aux énergies renouvelables L étude des chiffres du Commissariat Général au Développement Durable démontre que les ressources fossiles sont largement plus taxées et largement moins subventionnées que les ressources renouvelables/environnementales. 5

Dans la section précédente, on a pu observer que les déductions fiscales, prises au sens large, s élèvent à 2,632 milliards d euros pour un montant total de recettes fiscales de près de 20 milliards d euros. Globalement, et même si la détermination d un montant exact nécessiterait davantage de détails, il apparaît clairement que les énergies fossiles sont bien plus taxées qu elles ne sont subventionnées. D ailleurs, loin de diminuer, ces recettes fiscales rapportent de plus en plus à l Etat, comme le montre le Commissariat Général qui les évalue à plus de 25,5 milliards en 2012, soit 5 milliards de plus que l année précédente. 8 Toujours selon le Commissariat Général, la fiscalité sur la consommation des ressources fossiles (notamment TICPE ancienne TIPP, taxe intérieure sur la consommation et les produits énergétiques) pèse principalement sur les produits pétroliers puis les ressources gazières. D autre part, il rappelle que ce montant de 25,5 milliards est sousévalué si l on prend en considération l ensemble des instruments fiscaux, et particulièrement les redevances sur l extraction d hydrocarbures : «Au sens de la définition européenne, les taxes environnementales ont rapporté de l ordre de 40 milliards d euros en 2011 en France et restent pour les trois quarts une fiscalité assise sur les consommations énergétiques, principalement fossiles.» En reprenant la nomenclature Eurostat, le Commissariat Général classe les dépenses et les subventions environnementales selon 4 catégories : les taxes environnementales, les dépenses fiscales favorables à l environnement, les dépenses fiscales relatives à la consommation des énergies fossiles et les subventions directes aux producteurs. Comme le montrent les résultats de ces 4 catégories, présentées en annexes, les énergies fossiles ne bénéficient d aucune subvention directe en France et supportent la majorité des taxes. A contrario, les ressources vertes/renouvelables sont très peu fiscalisées et très fortement subventionnées. Ainsi, même en considérant que les déductions fiscales sont des «subventions», il apparaît clairement que les énergies renouvelables sont largement plus subventionnées que les ressources fossiles. En effet, l étude des chiffres fournis par le Commissariat Général sont éloquents : les taxes environnementales pèsent principalement sur les combustibles (gazole et essence), sur la production d électricité et sur les véhicules polluants. La TICPE rapporte à elle seule 24,778 milliards d euros par an ; la contribution au service public d électricité et la taxe locale sur l électricité rapportent ensemble 5 milliards d euros et la somme des 14 taxes les plus élevées sur les transports s élève à plus de 5,7 milliards d euros par an. Certes, les transports polluants demeurent subventionnées (taux réduit de TIC carburant pour les taxis, exonération de TIC carburant pour les bateaux de pêches, exonération de TIC pour les transports aériens commerciaux), mais au total, la somme de ces allègements s élèvent à 6,5 milliards d euros. Ainsi, le Commissariat conclue-t-il logiquement que la somme des taxes et des soutiens fiscaux 8 Commissariat Général au Développement Durable (2013), Références Avril 2013 : la fiscalité environnementale en France : un Etat des lieux, Paris. 6

aux énergies fossiles représente en réalité une fiscalité nette de 33,898 milliards d euros pour l année 2011. En ce qui concerne les énergies renouvelables et/ou non polluantes, elles bénéficient tout d abord d exonérations et d allègements fiscaux (crédits d impôts CIDD, exonération plafonnée de TIC biocarburants, crédits d impôts en faveur des entreprises agricoles utilisant la production biologiques, taux réduit de 5,5% pour la fourniture d énergie par des réseaux d énergie renouvelable) pour un montant total de 2,214 milliards d euros. Certes, ces allègements sont inférieurs à ceux dont bénéficie le secteur des énergies fossiles (6,5 milliards d euros), mais en conclure que les énergies fossiles sont trois fois plus subventionnées que les énergies renouvelables, en suivant la logique des articles de presse cités plus haut, revient à commettre une erreur de logique économique : là où les allègements sont trois plus élevés, le niveau global et le nombre total de taxes sont infiniment plus grands! En effet, comme nous l avons montré, la fiscalité sur les énergies fossiles rapporte, en net, près de 34 milliards d euros. Que rapporte la fiscalité sur les énergies vertes? S il est difficile d obtenir une valeur détaillée, en raison de la complexité des taxes et des allègements fiscaux sur les énergies renouvelables, l on peut tout de même aisément montrer que la fiscalité verte s apparente à une subvention et non à une taxe comme c est le cas pour les énergies fossiles. Aux 2,2 milliards d allègements et d exonérations, il faut ajouter le soutien direct à la production d énergie renouvelable lorsque le prix de vente de celle-ci est inférieur à son coût de production. En effet, mise à part la géothermie, la production d énergie renouvelable en France est plus coûteuse que son prix de vente dont le montant est déterminé par le marché et ne peut donc être immédiatement modifié ce qui signifie tout simplement que cette production n est pas économiquement rentable. En conséquence, l existence même de ces énergies et leur mise en vente sur le marché implique que leur production a été subventionnée. Ces subventions interviennent notamment sous la forme d achat par les institutions publiques à un prix égal au coût de production et non au prix du marché. L exemple de l électricité photovoltaïque est éloquent : son prix d achat (coût de production) varie entre 27 et 54 centimes d euros alors que l électricité nucléaire coûte 6 centimes d euros. Aussi, le rachat par EDF de l électricité photovoltaïque à son prix d achat représente une subvention directe, c est-à-dire une dépense directe, sous la contrainte publique et in fine financée par le contribuable. Le tableau suivant résume le montant des subventions directes aux énergies renouvelables découlant des tarifs d achat en France en 2011 : Tableau 4. Subventions directes (tarifs d'achat) par secteur, en millions d'euros Solaire Eolien Biogaz Biomasse Géothermie Hydraulique Marémotrice 44-55 302-674 1-31 120-193 0 1397-3652 53 7

Source : OCDE (2012), Etudes économiques OCDE : France 2011, Paris Au total, les subventions directes sous la forme de rachat de l énergie à des prix supérieurs au prix de marché ont donc atteint un montant compris entre 2,916 et 4,658 milliards d euros en 2011. Enfin, il faut ajouter à cela les dépenses en Recherche & Développement des énergies vertes qui s élèvent à près de 500 millions d euros en 2011 ainsi que les fonds publics alloués directement à la production d énergies renouvelables tels que le «fonds chaleur» et le «FEDER» (Fonds Européen de Développement Régional). Selon la Cour des Comptes 9, le coût total du financement public de ces énergies crédits d impôts, R&D et fonds publics s est élevé à environ 2,5 milliards d euros par an depuis 2005 pour un total de 14 milliards entre 2005 et 2011. En d autres termes, et pour la seule année 2011, il apparaît que les dépenses nette de l Etat ont été supérieures à 3,4 milliards d euros pour un soutien total subventions plus exonérations compris entre 5,6 et 7,3 milliards d euros. En conclusion, trois faits méritent d être rappelés : tout d abord, il apparaît qu une fois précisée la différence entre subventions et allègements fiscaux, les énergies fossiles ne bénéficient d aucune dépense publique. Les montants considérés, a priori, comme subventions ne sont en réalité que des déductions fiscales et ne doivent donc pas être considérés comme des dépenses publiques en faveur des énergies fossiles. Ensuite, bien que le total des allègements fiscaux soit trois fois plus élevé pour les énergies fossiles, le soutien relatif à ces énergies demeure très faible puisqu elles représentent plus de 90% de l énergie utilisée en France. Enfin, la dépense totale (subventions directes et allègements fiscaux) en faveur des énergies renouvelables s est élevée à plus de 5 milliards par an au cours des dernières années là où les recettes fiscales nettes sur les énergies fossiles ont représenté 33,8 milliards d euros. Ces montants, confirmés par le Commissariat Général au Développement Durable, l OCDE et la Cour des Comptes mettent en évidence le fait que les énergies fossiles sont bien plus taxées et bien moins subventionnées que les énergies renouvelables. 9 Cour des Comptes (2013), La politique publique de développement des énergies renouvelables, Cours des Comptes Paris. 8

Annexe 1. Taxes Environnementales A. Energie (en millions d euros) TICPE (super et gazole) 24778 TICGN 274 Taxe carburant (DOM) 460 Taxe locale sur l électricité 1924 Contribution au service d électricité 3080 Redevance due par les exploitants de mines d hydrocarbures 2 liquides Taxes sur les installations nucléaires 985 Impositions forfaitaires sur les pylônes 212 Total 32205 B. Transport (en millions d euros) Taxes véhicules société 927 Taxes certification immatriculation 2080 Taxes achats véhicules neufs polluants 198 Taxes achat véhicules occasion polluants na Taxes sur détention véhicules particuliers polluants na Taxes destinée à financer le développement des actions de 66 formation professionnelles dans le transport routier Taxes à l essieu 170 Taxes aviation civile 385 Taxes due par les concessionnaires d autoroute 542 Contribution solidarité sur billets d avion 175 Taxes due par les entreprises de transport public aérien et 44 maritime Taxes sur les bateaux de plaisance 42 Taxes additionnelle sur les assurances auto 1018 Taxe transport maritime à destination d espaces protégés 2 Total 5725 C. Pollution (en millions d euros) TGAP 520 Taxes nuisances sonores et aériennes 56 Redevances pollution des eaux 1580 9

Redevances prélèvements en eau 345 Redevances sur les autres usages en eau 10 Redevances communales et départementales des mines 19 Total 2530 Annexe 2. Principales allègements fiscaux favorables à l environnement (en millions d euros Crédit d impôt pour dépenses d équipements en faveur des 1950 économies d énergie et du développement durable (CIDD) Exonération plafonnée de taxe intérieure de consommation (TIC) 196 pour les biocarburants Crédit d impôt en faveur des entreprises agricoles utilisant la 33 production biologique Taux réduit de 5,5% pour fourniture par réseaux d énergie d origine 25 renouvelable Amortissement des véhicules fonctionnant au moyen d électricité, 10 de gaz et de superéthanol Total (incluant l ensemble des dépenses non citées ci-dessus) 2478 Annexe 3. Allègements favorables à la consommation d énergie fossile (en millions d euros) Transport Taux réduit de TIC sur les carburants pour taxis 22 Remboursement d une fraction de TIC sur gazole utilisé dans les 40 transports publics Remboursement d une fraction de TIC sur gazole utilisé dans les 320 transports de marchandises Exonération TIC sur les produits pétroliers pour les bateaux de 278 pêche Exonération TIC sur les carburants et combustibles pour le 3 transport fluvial Exonération TIC sur le transport aérien commercial 2448 Exonération TIC sur le transport aérien international 552 Exonération TIC sur le transport aérien national 270 Taux réduit d impôt pour le GPL 50 Usages sectoriels 2219 Ménages et Territoires 259 Consommations intermédiaires des producteurs d énergies 93 Total 6562 Sources : Cour des comptes, OCDE, Commissariat général au développement durable 10