Structures non-axisymétriques grandes échelles en cavité rotor/stator à grands nombres de Reynolds



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Structures non-axisymétriques grandes échelles en cavité rotor/stator à grands nombres de Reynolds C. Lachize a, G. Verhille b, P. Le Gal c Institut de Recherche sur les Phénomènes Hors Équilibre - UMR 7342 a. lachize@irphe.univ-mrs.fr, b. verhille@irphe.univ-mrs.fr, c. legal@irphe.univ-mrs.fr Résumé : Nous décrivons ici l étude expérimentale d un écoulement confiné au sein d une cavité rotor/stator de rapport d aspect voisin de l unité et pour laquelle on peut faire varier à la fois le taux de rotation et la densité du fluide utilisé, dans le cas présent l hexafluorure de soufre (SF 6 ). Ses propriétés thermodynamiques (c, ρ, etc) sont déterminées à partir de la pression absolue dans l enceinte, la température de travail ainsi que la masse totale de SF 6. La configuration expérimentale contraste avec les nombreuses études dans la mesure où elle tend à caractériser un écoulement turbulent à grand nombre de Reynolds (10 6 10 7 ) avec d éventuels effets compressibles. Ces derniers peuvent être induits en modifiant la température et la pression intérieure au voisinage du point critique du SF 6 (P c = 37.55 bar, T c = 45.57 C). Pour des nombres de Reynolds plus grands qu un Reynolds critique Re c 10 5, on observe l émergence d une dynamique grandes échelles mettant en jeu des modes azimutaux m = 1, 2, 3 dont les fréquences de rotation correspondent à un sous-multiple de la fréquence de rotation. Abstract : We describe here the experimental study of a flow confined within a rotor/stator cavity of aspect ratio close to unity where we can change both the rotation rate and the density of the working fluid, here the sulfur hexafluoride (SF 6 ). Its thermodynamical properties (c, ρ, etc) are determined by the absolute pressure in the vessel, the working temperature and the total mass of SF 6. The experimental configuration contrasts with the existent literature as it aims to characterize a high Reynolds turbulent flow (10 6 10 7 ) with possible compressible effects. This can be done by changing the temperature and the inner pressure in the vicinity of the critical point of SF 6 (P c = 37.55 bar, T c = 45.57 C). For Reynolds numbers greater than a critical number Re c 10 5, we observe the emergence of a large scale dynamics involving azimuthal modes m = 1, 2, 3 which rotate at a submultiple of the rotation rate. Mots clefs : cavité rotor-stator, structures tridimensionnelles, écoulement turbulent 1 Introduction D un point de vue industriel, la présence de structures grandes échelles au sein de cavités rotorstator, rencontrées par exemple dans les turbomachines, peut modifier les transferts thermiques ou de

moments ainsi que la cartographie du champ de pression. Plus fondamentalement, ces structures mettent en péril numériquement le traitement statistique de la turbulence basé sur l hypothèse de fluctuations à petites échelles statistiquement stationnaires mais également en postulant la turbulence bidimensionnelle dans le cas de ces écoulements tournants particuliers. Par conséquent, un éclairage plus focalisé sur ces structures est nécessaire pour la compréhension des mécanismes subtils au cœur de la dynamique de ces écoulements. Les écoulements tournants sont connus pour être sujets aux instabilités de type centrifuge. Eckhoff et Storesletten [4] ont fourni dans ce domaine une étude fondatrice : ils ont dérivé analytiquement une condition suffisante de déstabilisation tridimensionnelle dans le cadre d un développement en ondes courtes, en tenant compte des effets de compressibilité et de variations de masse volumique. Assez récemment, Billant et Gallaire [1] ont montré l existence de modes instables non axisymétriques dans un cadre incompressible, en introduisant un discriminant de Rayleigh généralisé. Ils en déduisent que cette instabilité est fortement dépendante de la variation radiale de la vitesse azimutale qui doit décroître très rapidement. A ce cas général, s ajoute une littérature fertile sur la stabilité des écoulements tournants confinés au sein de cavités rotor/stator à rapports d aspect modérés. On sait, par exemple, que sous certaines conditions les écoulements subissent une série de bifurcations (Schouveiler et al. [10]) résultant de mécanismes d instabilités de couches limites et plus particulièrement de la couche limite liée au stator en fonction du nombre de Reynolds. Ces instabilités se manifestent spatialement soit sous forme de modes axisymétriques soit de modes spiralés qui peuvent dans certains cas coexister. Récemment, Gelfgat [5] s est intéressé numériquement à la transition d un écoulement axisymétrique stationnaire à un écoulement 3D oscillant pour une gamme étendue de rapports d aspect H/R (entre 0.1 et 1). De son étude de stabilité marginale découle une nouvelle instabilité qui ne peut être assimilée comme précédemment à une simple déstabilisation de l écoulement par les couches limites. D autres facteurs significatifs rentrent en jeu pour expliquer l instationnarité de l écoulement et l apparition d ondes azimutales. Il suggère notamment un rôle élémentaire de la paroi latérale sur l instabilité observée et conclue que les modes les plus instables sont localisés soit entre le stator et le cœur en rotation solide soit entre le stator et l enveloppe périphérique. D autre part, dans sa démarche il ne parvient pas à restabiliser l écoulement par simple annulation des termes de Coriolis ou centrifuge dévoilant alors le caractère non ordinaire de cette instabilité. Il observe également que le nombre d onde azimutal augmente en diminuant le rapport d aspect. Ces modes présentent aussi la caractéristique d avoir une pulsation marginale le plus souvent négative ce qui indique que les ondes tournent dans le sens opposé à celui du rotor. Pour les rapports d aspect qui nous intéressent, son analyse montre que les premiers modes instables sont les modes m = 1, 2, 3. Parallèlement à ces efforts visant à établir des diagrammes de stabilité complets, des études expérimentales basées sur des visualisations témoignent de l existence de structures instationnaires tridimensionnelles grandes échelles en configuration rotor-stator. Parmis ces études, les résultats de Czarny et al. [2] confirmés, plus tard, par les expériences de Poncet et al. [9] sont à mettre en relief. Ils notent en particulier que dans le cas d une cavité annulaire, aucune structure grande échelle n est visible ; la paroi interne bloquant la propagation de l information par le champ de pression, responsable de l éruption de ces structures. Par contre, en se plaçant en configuration rotor-stator sans moyeu central, l apparition de ces structures est soumise à un seuil en taux de rotation qui est fonction du rapport d aspect. Au-delà de ce seuil, les modes à grand nombre d onde azimutal (m = 7 8) sont dominants et évoluent vers de plus basses valeurs de m en augmentant le nombre de Reynolds. Par ailleurs, les visualisations montrent que ces structures sont localisées dans le cœur géostrophique non visqueux. Jacques et al. [7] ont, quant à

eux, analysé numériquement le cas d une cavité rotor-stator, en géométrie cylindrique 2D-axisymétrique en régime turbulent et ont souligné la présence de modes d inertie dans la zone en rotation solide pour des nombres de Reynolds > 10 5. Ils avancent que des structures grandes échelles (20% de l espace interdisque) issues de la couche limite du stator jouent le rôle d excitateur permanent au développement de modes d inerties se propageant suivant la direction stator-rotor au sein de la région en rotation solide avec une longueur d onde bien déterminée. Avec des mesures de fluctuations de pression sur le stator, on souhaite caractériser l existence ainsi que les propriétés de structures tournantes grandes échelles au sein d une cavité rotor-stator de grand rapport d aspect (O(1)) pour une grande gamme de nombres de Reynolds rotationnels, ainsi qu une possible interaction entre les différents modes azimutaux susceptibles d être observés. 2 Dispositif expérimental, instrumentation et régimes d écoulements Figure 1 Autoclave pressurisée et thermalisée (à gauche) et cavité rotor/stator lisses avec son moteur (à droite) insérée dans l enceinte haute pression L écoulement turbulent est généré dans une enceinte cylindrique (d = 70 mm) entre un rotor lisse de diamètre D r = 68 mm et un stator lisse de diamètre D s = d, comme illustré sur la figure de droite de la figure 1. Le rotor est entraîné par un moteur brushless pouvant atteindre en régime nominal 10 500 tr/min soit 175 Hz. L espace interdisque est égal à 40 mm ce qui correspond, si on définit le rapport d aspect comme le rapport H/R r, à G = 1.18. Contrairement aux autres études qui sont menées pour des rapports d aspect beaucoup plus faibles comme attestent les expériences de Czarny et al. [2] et Poncet et al. [9] où G = [0.126 ; 0.195] ou encore la classification des régimes d écoulements possibles en cavité rotor/stator isolée de Daily & Nece [3] et pour laquelle G max = 0.1. De plus, les fréquences de rotation du rotor f 0 mises en jeu se situent entre 17 Hz et 167 Hz ce qui amène à considérer des nombres de Reynolds rotationnels Re θ = (ρ(2πf 0 R 2 r))/µ (µ déterminée avec le polynôme d ordre 7 de Hoogland et al. [6]) entre 5 10 4 et 2 10 7. Dans ces régimes, l écoulement moyen possède une structuration de type Batchelor constituée de deux couches limites liées à chacun des disques séparées par un écoulement azimutal et auquel se superpose une recirculation poloïdale de pompage d Ekman. L objectif de l étude est de déterminer l existence ou non de modes azimutaux dans cette configuration. Pour cette raison, l ensemble cavité rotor/stator et moteur est intégré dans un autoclave cylindrique

pressurisé et thermalisé par une circulation d eau assurée par un bain thermostatique. La pression maximale certifiée est de 120 bar. Le remplissage en SF 6 de la cavité rotor/stator est réalisé en condensant le SF 6 gazeux dans l enceinte haute pression thermalisée autour de 5 C ; on augmente ensuite la pression en augmentant la température de son enveloppe. Le réacteur est visible au centre de la photo de gauche de la figure 1. Les essais se sont ainsi déroulés pour 6.17 kg/m 3 < ρ < 830 kg/m 3, avec des mesures majoritairement dans le domaine vapeur du SF 6. Les mesures sur différentes isochores ont permis de modifier la vitesse du son c entre 80 m/s et 135 m/s 1 et donc le nombre de Mach périphérique Ma = 2πR r f 0 /c qui a pu varier entre 0.03 et 0.5. Sur le plan instrumental, deux capteurs de pression dynamique sont montés à R = 15 mm et séparés de π/2 dans la direction azimutale. Enfin, une sonde de température sur la paroi de l enveloppe en plexiglas a été placée pour mesurer la température du SF 6 et donc déduire la pression absolue dans l enceinte pour une isochore fixée. En ce qui concerne le principe de mesures : on réalise des rampes moteur sur une isochore fixée sans attendre l équilibre thermodynamique du fluide entre deux fréquences de rotation. 3 Résultats DSP normalisées par S(f 0 ) 10 4 10 2 10 0 10 2 10 4 10 2 10 1 f/f 10 0 10 1 0 Re x 10 7 1.8 1.6 1.4 1.2 1 0.8 0.6 0.4 0.2 10 5 2 1 10 10 Phase/π 0 0.1 0.25 0.5 0.75 1 Cross PSD 0.1 0.25 f / f 0.5 0.75 1 0 Re x 10 6 14 12 10 8 6 4 2 Figure 2 A gauche : spectres temporels classiques de turbulence pour ρ = 830 kg/m 3 (phase supercritique) et une rampe en fréquence de rotation du rotor. A droite : exemple de densités spectrales de puissance croisées pour ρ = 250 kg/m 3 (phase vapeur) et une rampe en fréquence de rotation du rotor ; Le niveau de bruit expérimental se situe à 10 12. L examen des spectres temporels des fluctuations de pression sur le stator liés à chaque capteur révèle un enrichissement de la dynamique aux basses fréquences, impliquant qu une partie de l énergie est contenue dans des modes grandes échelles. Cette observation nous a conduit à considérer les densités spectrales de puissance croisées sur la figure 2 qui montre à la fois l amplitude et le déphasage entre les capteurs de pression dynamique pour une isochore particulière de ρ = 250 kg/m 3 avec un balayage en Reynolds sur un ordre de grandeur (2*10 6 < Re < 1.4*10 7 ). Le zoom des interspectres pour des fréquences inférieures à la fréquence de rotation du disque tournant met en évidence trois modes significatifs ; chacun existant à une fréquence caractéristique, sous-multiple de la fréquence de rotation f i /f 0 0.25, 0.5, 0.75 avec f 0 la fréquence de rotation du rotor. Ces fréquences sont déterminées en 1. Données disponibles sur http ://webbook.nist.gov/chemistry/fluid

calculant le moment d ordre 1 sur une fenêtre centrée autour des maxima locaux : f i = f + f f fe(f)df f + f f E(f)df de manière à ce que f et f + f encadrent toute la largeur du pic considéré. On note par ailleurs que ces modes ont une amplitude supérieure à l amplitude d injection, en particulier ceux à f i /f 0 0.25 et 0.5. On a vérifié que si l on trace le rapport des fréquences pour chacun des modes, non plus en fonction de f 0 mais Re, on parvient à rassembler tous les points de mesures effectués sur une même courbe. Ces interspectres permettent de remonter au déphasage des signaux (que l on renormalise par π, cf figure 2) entre les deux capteurs et montrent des plateaux de phase francs localisés en fréquence autour des modes précédemment décrits. On obtient pour f i /f 0 = 0.24 un déphasage φ i =π/2, pour f i /f 0 = 0.5 φ i = π et pour finir un déphasage de φ i = 3π/2 pour f i /f 0 = 0.75. A l inverse de l analyse des rapports de fréquence en fonction de ρ et f 0, ces phases ne dépendent pas du point de fonctionnement et conservent leur valeur même à faible densité ce qui indique que l on suit, d un point de vue hydrodynamique, les mêmes structures tournantes mais avec une fréquence normalisée évolutive avec Re. On sait par ailleurs que ces structures sont co-rotatives. Une décomposition en modes de Fourier exp(imθ) (géométrie cylindrique) permet d identifier ces structures nouvelles en termes de modes azimutaux. Un bilan de la caractérisation de ces derniers est donné dans le tableau ci-dessous : <f i /f 0 > φ i m Structure tournante 0.25 π/2 1 Dipôle 0.5 π 2 Quadrupôle 0.75 3π/2 3 Sextupôle Un calcul de la vitesse de phase V φ,m = Rω/m nous indique que ces structures possèdent la même vitesse quel que soit m et tournent à une vitesse de V φ = 2πRf 0, soit donc la moitié de la vitesse du 4 cœur en rotation. On s intéresse à présent à l évolution de l amplitude de chacun des modes en fonction de nos deux paramètres expérimentaux et à la corrélation entre ces modes. 10 7 10 8 A 2 10 9 10 10 10 6 10 7 10 8 A 2 10 9 10 10 A 1 2 A 1 3/4 ρ 830 215 139 97 65 37 21 16 10 11 10 6 10 7 Re 10 11 10 11 10 10 10 9 10 8 10 7 A 1 Figure 3 A gauche : amplitude du mode prédominant m = 2 en fonction du Reynolds pour tous les points de fonctionnement thermodynamiques considérés. A droite : amplitude du mode m = 2 en fonction de l amplitude du mode m = 1 toute densité confondue

L analyse des amplitudes relatives à chacun des modes nous dit que le nombre de Reynolds pilote la dynamique observée puisque ces amplitudes s alignent en abscisse avec celui-ci (graphe de gauche de la figure 3). Avec ce tracé, on sait qu un maximum local pour le premier régime est atteint pour R e 10 6. Par ailleurs, nos études semblent indiquer que le nombre de Mach périphérique (= 2πR r f 0 /c) n influe pas sur les variations de l amplitude. Par conséquent, l hydrodynamique incompressible semble suffire pour analyser ces modes. Pour rendre compte d une éventuelle interaction entre les modes, on s oriente vers l étude de la corrélation de leurs amplitudes. Ainsi, si l on trace l amplitude du mode m = 2 en fonction du mode m = 1 (figure 3 à droite) pour tous les points de fonctionnement, on assiste de nouveau à un changement brutal de régimes. Lorsque les amplitudes sont suffisamment faibles, on retrouve les exposants classiques connus d un développement faiblement non-linéaire que l on rappelle : A 2 A 2 1, A 3 A 3 1, A 3 A 3/2 2. Puis, au-delà de R e 10 6 apparaît un second régime cette fois-ci fortement non-linéaire : A 2 A 3/4 1, A 3 A 3/4 1, A 3 A 2. La valeurs de ces nouveaux exposants plus faibles ne trouve, à ce stade, aucune explication quant à leur origine. 4 Conclusion et discussion La combinaison d un banc d essai utilisant le SF 6 et une cavité rotor-stator lisse a permis une étude paramétrique complète en ρ et Ω rot mettant en exergue trois modes azimutaux avec une prédominance des modes m = 1 et 2. L analyse des interspectres (amplitude et phase) associe à chacun de ces modes une fréquence caractéristique f m mf 0 /4 et ces trois structures grandes échelles possèdent la même vitesse de phase V φ = 2πRf 0 /4. L expérience montre que leur dynamique est pilotée par le nombre de Reynolds et ces modes ne sont plus observables en-dessous d un nombre de Reynolds critique Re c = 10 5. En fin de compte, une autre propriété remarquable a été mise en avant et apporte une nouvelle voie de réflexion : la corrélation de l amplitude de ces modes se décompose en deux régimes distincts passant d un comportement faiblement non-linéaire classique à une corrélation fortement non-linéaire totalement nouvelle à notre connaissance. Ces résultats nous poussent à écarter un mécanisme de type instabilité de couche limite au profit d une instabilité de cisaillement de type Kelvin-Helmholtz ce qui rejoint les conclusions avancées par Gelfgat [5] en regard de la complexité à déterminer la source de déstabilisation de l écoulement en cavité rotor/stator. En faveur de ce mécanisme pour l instant : le sens de rotation des structures (sens de rotation), la vitesse de phase constante pour tout m (onde non dispersive) mais également sa valeur qui laisse supposer que ces structures azimutales peuplent la région entre le stator et le c½ur en rotation solide sans oublier l effet supplémentaire de la paroi externe fixe, source de cisaillement. Une instabilité de cisaillement de type Kelvin-Helmholtz a déjà été rencontrée pour un écoulement en contra-rotation par Moisy et al. [8] pour lequel un réseau polygonal de tourbillons a été observé dans des conditions géométriques précises (0.2 < G < 0.5). Dans leur cas, ces motifs sont expliqués par la déstabilisation de la couche de cisaillement annulaire intense présente dans la cavité. Références [1] P. Billant and F. Gallaire. Generalized rayleigh criterion for non-axisymetric centrifugal instabilities. J. Fluid Mech., 542 :365 379, 2005.

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